LA COMMUNICATION ET SES FONDEMENTS
« Livre de Communication par excellence, la Bible constitue dans ce domaine la référence absolue. En effet, le Créateur, parfait et omniscient, a décidé d'en faire son principal outil de communication avec l'homme. .. »
Allons donc à sa rencontre, et découvrons ensemble quelques-uns des grands principes de cette communication divine.
LA COMMUNICATION EST UN PROCESSUS MULTIMEDIATIQUE
La communication divine consiste en une succession de communications étalées dans le temps et véhiculées par divers vecteurs et canaux. La Bible n'a pas été écrite suite à une unique révélation, mais s'est constituée sur une période de plusieurs millénaires.
Et dans sa communication, Dieu s'est adressé à L'homme par une multitude de canaux, de « médias » : une voix, une nuée, des songes, des visions, des prophètes... etc. C'est ce qu'atteste le livre des Hébreux quand il dit:
« Après avoir autrefois à plusieurs reprises et de plusieurs manières parlé à nos pères par les prophètes, Dieu, dans ces derniers temps nous a parlé par le Fils... ». Et ce processus se prolonge aujourd'hui avec d'autres médias : la Parole écrite, la Bible, ou encore le Saint-Esprit, voire notre conscience...1*
Cette même notion de communication multimédiatique se retrouve également dans L'épître de Jacques au chapitre 2 verset 17, quand l'apôtre parle de la foi qui, si elle n'a pas les oeuvres, est « morte en elle-même ».
La communication orale seule est incomplète ! Il ne suffit pas de chercher à communiquer sa foi par les paroles seulement (témoignage personnel, discussion persuasive, prédication, ou chant...), il faut encore la communiquer au travers de toute une vie d'action et d'engagement. Car les actes, les attitudes, les comportements, les initiatives, les décisions... communiquent également.
Jésus lui-même applique ce même principe dans sa communication avec ses contemporains. A une même foule qui le suit, il annonce son message au moyen de paraboles, de prédications, de miracles, comme au travers de sa propre vie et de son témoignage vécu.
PECHE D'ORGUEIL ET HYPOCRISIE2*
Selon le premier verset de l'épître aux Hébreux. communiquer ne se fait donc ni en une seule foi, ni d`une seule manière ou au moyen d'un seul canal.
C'est un principe fondamental de toute véritable communication. Il est malheureusement trop souvent négligé, notamment dans notre manière d`évangéliser. Ainsi, la notion de « C'est peut-être la seule et unique occasion pour cette personne d'entendre le message » constitue en fait un péché d'orgueil. Car en effet, de quel droit nous mettons-nous à la place du Grand Communicateur et pouvons-nous supposer qu'il n'a pas établi de stratégie de communication multimédiatique et soigneusement étudiée pour cette personne qui est autant que moi l'objet de Son amour ! De quel droit pouvons-nous un instant penser que nous sommes l'unique vecteur de cet amour, et oublier que même si nous ne le percevons pas, le Seigneur a peut-être déjà commencé une oeuvre dans son coeur (ou a prévu de le faire) mais par un autre moyen ! Il ne s'agit pas de nous dérober à notre responsabilité, mais de rester dépendants du plan de communication parfait de Dieu. Le maillon d'une chaîne est en effet indispensable, car sans lui, celle-ci ne peut exister. Mais il n'est qu'un maillon parmi beaucoup d'autres, et n'a d'utilité qu'à la place où le forgeron l'a placé.
Le moteur de notre communication est également facilement vicié : nous cherchons trop souvent à évangéliser, c'est-à-dire à transmettre la (bonne) nouvelle, l'information réjouissante du salut en Jésus-Christ, pour nous décharger d'une lourde responsabilité mais non par amour réel pour les âmes qui se perdent. Si notre motivation était véritablement et uniquement cet amour divin, nous ne pourrions adhérer à cette théologie de la « dernière chance » et nous nous appliquerions à découvrir des plans de communication, des stratégies bien plus ambitieuses et plus complexes, en conformité avec les plans du Maître... malheureusement quelquefois mieux imité par les publicitaires et autres professionnels de la communication que par Ses propres enfants. . .
TENIR COMPTE DES SPÉCIFICITÉS
Ces professionnels de la communication combinent en effet souvent très astucieusement différents types de communication (publicité, promotion, sponsorisme, relations publiques ou marketing direct... etc) en jouant de tous les médias ou supports existants (TV, cinéma, presse, affichage, sport...) et en tenant compte des
spécificités de chacun d'eux de manière à ce qu'ils se complètent les uns les autres, ce qui améliore leur efficacité. Nous sommes tous différents, et quand le Seigneur nous utilise, Il tient compte de nos spécificités et combine nos interventions qui se complètent.
De même, quand nous utilisons les outils et les techniques qu'il met à notre disposition, nous nous devons de les bien connaître tous et de les utiliser en synergie, chacun en fonction de ses adéquations propres, dans le cadre d'une stratégie globale.
Il est donc important de bien connaître son « métier ». Chaque média a ses spécificités, ses points forts et ses points faibles. Et il serait illusoire et fou de s'entêter à l'utiliser seul. Il n'y a pas « que » la radio, ou l'imprimé, la TV, ou la « bonne » campagne d'évangélisation. Ne soyons pas des insensés aux yeux de Dieu, mais sachons en permanence nous rassembler pour utiliser nos différentes « spécialités » en synergie, en les combinant dans le cadre d'une stratégie de communication plus ambitieuse. En jargon professionnel, cela s'appelle le « média-planning ». Soyons donc des « médias-planners » astucieux pour Dieu !
Et si c'est une erreur grave que de vouloir agir isolément (« évangéliser » en une seule fois et en cherchant à y inclure tout le conseil de Dieu ; évangéliser, enseigner et édifier à la fois ; etc.), de vouloir tout faire soi-même par un seul média..., c'est également une erreur, et pour les mêmes raisons, de vouloir récolter soi-même tous les fruits de notre action commune. D'autres « médias » ont peut être encore un relais à prendre... Et surtout, c'est le rôle du Saint-Esprit de souverainement sanctifier notre travail pour le transformer en fruit éternel. « J'ai planté, Apollos a arrosé, mais Dieu a fait croître » (1 Cor. 3 :6).
LA COMMUNICATION EST UN PHENOMENE INDIVIDUALISE
Presse écrite, télévision, radio, sont souvent qualifiées de mass-médias, parce que ces moyens de communication, de par leur capacité technique à se dédoubler presque à l'infini, permettent de toucher une multitude de personnes en même temps. Cependant, le terme est trompeur, et il ne faudrait surtout pas l'assimiler à « communication de masse ». En effet, cette dernière n'existe pas. Communiquer signifie établir une relation ou être en relation. Et qui dit relation, dit réciprocité. Émetteur et récepteur sont tous les deux impliqués, et s'il y a message, il y a également réponse. Ce n'est qu'à cette condition qu'il y a véritablement communication, et cela exige un lien d'individu à individu exclusivement.
N'importe quel présentateur de télévision ou animateur de radio, s'il est un véritable professionnel, vous confirmera que chaque fois qu'il prend la parole, quoique s'adressant à des milliers voire des millions de personnes à la fois, s'imagine dans le salon d'un interlocuteur imaginaire mais précis, sorte de « représentant des auditeurs », chez qui il est convié. C'est justement cela, la personnalisation de la communication.
PAS D'UNICITE NI D'UNIVERSALITE DE LA FORME DU MESSAGE
Jésus, durant tout son ministère, n'a jamais cessé d'annoncer un même message, celui du pardon des péchés et de la vie éternelle, le message du salut ; mais il l'a à chaque fois adapté à son interlocuteur.
Au jeune homme riche qui était venu le voir, Jésus prêche le renoncement à soi-même. A la femme adultère, où des tiers sont à l'initiative de la confrontation, Jésus propose le pardon au travers d'une réponse aussi douce qu'indirecte : le silence. Avec la femme samaritaine, c'est Jésus qui prend l'initiative d'un dialogue lui faisant découvrir de manière indirecte les secrets de la satisfaction permanente (cf. Luc 18 : 18-23, Jean 8 : 1- 11, Jean 4 : 1-26). Essayer d'interchanger ces exemples de communication parfaite, outre un manque total d'impact, conduirait directement au désastre !
Ces personnes avaient toutes trois le même besoin fondamental: celui d'être libérées de leurs péchés et de connaître le pardon divin. Et Jésus répond à ce besoin pour chacun.
Seulement, en fonction du contexte et de leurs expériences respectives, le message du salut prend chaque fois une forme différente. Pour le jeune homme, qui n'était pas seulement riche mais également très pieux, droit et intègre, expérimenter par la foi le pardon de Dieu, c'était accepter par la foi de renoncer à tout ce qu'il était et tout ce qu'il possédait pour faire confiance à Jésus à 100 %. Pour la femme samaritaine, le salut, c'était accepter de reconnaître que sa vie désordonnée la laissait vide et insatisfaite au bout du compte, et qu'elle avait besoin de la satisfaction permanente que lui offrait Jésus. Et l'on pourrait ainsi multiplier les exemples à volonté.
Quoiqu'il n'y ait qu'un seul et unique but dans la communication de l'Evangile, il n'existe donc pas de message unique et universel, valable pour tous sans distinction. Le message doit être adapté en fonction de tout ce que nous pouvons connaître de notre interlocuteur : sa culture, son vécu, ses sentiments, ses idéaux, sa formation, son environnement, ses problèmes spécifiques, etc... Le besoin fondamental reste le même, mais l'expression de ce besoin, et donc sa réponse, varient. Et pour les besoins de la cause, il ne faut pas hésiter à passer beaucoup de temps dans l'approfondissement de notre connaissance de l'autre.
CIBLER
Bien connaître est facile quand il n'y a qu'un interlocuteur. Mais quand ils sont nombreux, et plus ils le sont plus cela se complique, l'on est forcé d'agir autrement. On peut à l'instar des animateurs radio, se fixer sur un auditeur imaginaire type qui soit la synthèse de tous les caractères communs à l'ensemble de son public, et s'adresser à lui comme à un « représentant des auditeurs ». Mais, si les circonstances le permettent, on peut également segmenter son public en « familles » rassemblées en fonction de caractéristiques communes, et s'adresser individuellement à chacune d'entre elles, ce qui permet une communication ciblée, précise et donc plus performante. C'est ce que pratiquent notamment certaines radios qui, selon les horaires et le public disponible, adaptent la forme et le contenu de leurs programmes.
De même que nous éduquons nos propres enfants différemment selon leur caractère et leur tempérament, et que nous les abordons de manière très personnalisée. on ne s'adresse pas (en paroles mais aussi en actes et en attitudes) de la même manière à des jeunes qu'à des personnes âgées. à un homme qu`à une femme, à des intellectuels qu`à des ouvriers, à des riches qu`à des démunis. à un directeur de société qu`à un chômeur... Chaque individu est unique et représente un profil physique, mental, spirituel, culturel, social, familial, économique, politique, religieux, géographique, etc, tout à fait particulier dont il est indispensable de tenir compte.
TRADUIRE
Les frontières linguistiques nous poussent naturellement à traduire notre propos. Mais il est d'autres frontières qui le mériteraient également et qui sont trop souvent négligées car moins flagrantes : la culture, le niveau intellectuel, L'âge. ou le stade spirituel, etc... (cf & précèdent). Ainsi, la reproduction telle quelle (orale ou imprimée) des textes bibliques actuels (qui ne sont eux-mêmes que la traduction par un homme - et donc une interprétation - de textes millénaires inspirés) saurait difficilement constituer un message universel pour communiquer le salut en Jésus-Christ. Les termes utilisés dans nos Bibles sont impropres à la communication avec la majorité de nos contemporains, et ont besoin d`être traduits, explicités, paraphrasés, adaptés ! Trop d'à-prioris, de déviations et d'influences en ont falsifié le sens original. Ces mots véhiculent ainsi des concepts ne correspondant plus à la pensée biblique, et leur emploi fausse donc la communication la plupart du temps. Seules les personnes « initiées » sont capables de les bien comprendre et de les assimiler.
Les autres, soit resteront indifférentes à des propos qui ne les concerneront pas, soit réagiront négativement à un message qu'elles auront mal compris.
Traduire des réalités imperceptibles à l'homme en un langage et des concepts qui lui soient familiers et donc parfaitement compréhensibles, voilà le pari de toute communication chrétienne. C`est le défi auquel nous sommes tous confrontés : nous « faire tout à tous », nous imprégner de la réalité de l'autre, pour lui traduire le plus efficacement possible une autre réalité...
CONCLUSION
Paradoxalement, le monde a des choses à nous apprendre en matière de communication. En effet, sans le savoir, il applique des principes fondamentaux que la Parole de Dieu développe depuis des siècles, et que malheureusement bon nombre d'enfants de Dieu continuent à négliger.
Alors que partout autour de nous il n'est question que de communication, et que l'on assiste à une véritable explosion des techniques nouvelles en la matière, il devient urgent pour le peuple de Dieu de se replonger dans le Livre de communication par excellence et d'y découvrir tous les secrets de la communication divine. Et si un tel retour aux sources est essentiel, il nécessite toutefois d"être complété par une connaissance approfondie des techniques et des médias de notre temps. afin de les utiliser à bon escient et d'agir en professionnels complets. avisés et performants.
Sachons donc pratiquer une communication individualisée quoique « multimédiatisée »...
Jean ROHNER
Ichthus 1986-3 (No 124)
1* - Le contexte n'est pas celui du message. mais celui des moyens mis en oeuvre. Le paragraphe veut insister sur la nécessité absolue de penser «multimédia» chaque fois qu'il s'agit de communiquer la bonne nouvelle: dans les techniques de communication, mais aussi dans la « chaire » du témoignage ou encore dans une approche complémentaire des moyens d'évangélisation mis en oeuvre. Les outils ont des spécificités et des destinations prioritaires qu'il convient d'identifier et d'exploiter.
2* - Ce qui importe dune. dans l'évangélisation, c'est de rester humblement à l'écoute des directives du Grand Communicateur et de chercher à en comprendre la stratégie; l'orgueil et la prétention en la matière. consistent à tenir davantage compte de ses propres critères plutôt que de ceux de Dieu.