Fêtes juives et chrétiennes
Dans le rituel juif, tel que le présente le Pentateuque, trois grandes fêtes très anciennes apparaissent : la Pâque, la Pentecôte, les Tentes. Elles ont évolué au cours des siècles avant d'être reprises, pour deux d'entre elles du moins, par la liturgie chrétienne.
LA PAQUE
A l'époque de Moïse, c'était une fête de bergers nomades. Chaque année, à la pleine lune du mois de nisan (mars-avril) on immolait un agneau ou un chevreau comme prémices du troupeau. Avec le sang de la victime on oignait le piquet central des tentes afin d'en écarter les mauvais génies.
Cette fête fut adoptée par les Israélites, mais Moïse la transforma en y attachant le souvenir de la sortie d'Egypte : le sang de l'agneau pascal sur le linteau de la porte veut écarter l'« Exterminateur » qui frappe les premiers-nés des Egyptiens, et Dieu passe au milieu de son peuple pour le sauver. Désormais la Pâque sera le mémorial du salut d'Israël.
Mais, parvenus en Canaan, les Israélites deviennent sédentaires; la vie pastorale est, sinon remplacée, du moins largement complétée par la vie agricole. Ils adoptent alors une fête cananéenne, celle des Azymes. Quand on a moissonné l'orge, on mange, durant sept jours, du pain fait avec la farine nouvelle, mais sans levain. Vers la fin de la monarchie (env. 600 av. J.-C.), les deux fêtes devaient être réunies en une seule.
C'est à l'occasion de la célébration de la Pâque juive que Jésus institua l'Eucharistie au soir du Jeudi-Saint, donnant à ces vieux rites le caractère d'un repas d'alliance et voulant que dans l'avenir ils soient le mémorial de son sacrifice. Mais la foi en sa résurrection allait donner un nouveau sens à la Pâque chrétienne : Jésus étant ressuscité le dimanche, Pâques sera la fête de la résurrection, tandis que le jeudi précédent commémorera l'Eucharistie. De la Pâque ancienne dérive la date de la fête chrétienne : depuis 325, celle-ci est fixée au dimanche qui suit la pleine lune après l'équinoxe de printemps.
LA PENTECOTE
Les Juifs l'appelaient « la fête des Semaines », car elle avait lieu sept semaines après celle des Azymes ; plus tard, les traducteurs grecs de la Bible lui donnèrent le nom de Pentecôte (cinquantième) parce qu'on la célébrait le 50. jour après l'offrande de la première gerbe d'orge. C'était donc une fête agraire, où l'on offrait les prémices de la moisson de froment, en mai.
Mais par la suite, comme pour la Pâque, on y ajouta un souvenir historique : celui de la conclusion de "alliance au Sinaï.
Or c'est au matin de la fête juive de la Pentecôte, vers 9 h., que se réalisa, nous disent les Actes des apôtres, la promesse que Jésus leur avait faite : ils reçoivent l'effusion de l'Esprit-Saint, et désormais l'Eglise chrétienne est fondée. Le souvenir de ce grand événement transformera le sens traditionnel de la Pentecôte : dans la liturgie chrétienne, ce sera la fête de l'Esprit-Saint et la fin du temps de Pâques.
LA FETE DES TABERNACLES
Le mot « tabernacles » est le décalque français du mot latin qui signifie « tentes » d'où la double appellation : fête des Tentes ou des Tabernacles. Les juifs disaient parfois : « la fête de la récolte » ou même « la fête ».
Comme des deux autres, il s'agit à "origine d'une fête agraire, sans doute cananéenne : elle se célèbre en septembre, quand les fruits sont cueillis. Pourquoi ce nom de« fête des Tentes » alors que la construction de huttes en était le trait caractéristique ? Il s'agissait sans doute primitivement de huttes de feuillage dans lesquelles on campait pour surveiller la maturation finale du raisin. Mais le mot faisait aussi penser au séjour sous la tente dans le désert. C'est pourquoi on en vint à rattacher à cette fête agricole le souvenir historique de l'exode : les tentes étaient celles où, durant 40 ans, Israël avait vécu au cours de ses pérégrinations dans la péninsule du Sinaï. De cette fête, la liturgie chrétienne n'a rien retenu.
Ainsi aperçoit-on l'évolution de ces grandes solennités. Fêtes agraires à l'origine, pastorales ou agricoles, elles sont devenues fêtes du souvenir : les juifs y ont rattaché les événements marquants de leur histoire, et les chrétiens ont fait de même.
J. DHEILLY
En ce temps-là, la Bible No 6 page IV.