Frères séparés !
S'il est agréable et doux pour des frères de demeurer ensemble, il n'est pas toujours possible de réaliser cet état dans tous les cas. L'histoire de Caïn et d'Abel, celle de Jacob et d'Esaü, celle de Joseph et d'autres encore, montrent que les frères n'ont pas forcément le même coeur et les mêmes vues, et que parfois des séparations s'imposent. Abraham et Lot nous en fournissent un autre exemple.
Frères unis
Des frères ils l'étaient par leur consanguinité, car Lot fut le neveu d'Abram.
Quand Térach quitta Ur en Chaldée, il prit son fils Abram, sa belle-fille Saraï et Lot le fils de son fils Haran. Ce fut un exode familial. Ces liens de parenté ne pouvaient que renforcer leur position en inspirant un plus grand respect aux populations cananéennes au milieu desquelles ils allaient s'établir.
Des frères ils l'étaient aussi parce qu'ils avaient la même occupation. Abram était riche en troupeaux et Lot en possédait également. Comme les membres d'une même corporation, Abram et Lot étaient des confrères.
Des frères ils l'étaient encore dans l'adoration et le service d'un Dieu commun. Ainsi, quand l'Eternel ordonna à Abram de quitter son pays, sa patrie et la maison de son père, Lot partit avec lui, liant, par la foi, son destin à celui de son oncle.
Frères sont tous ceux pour lesquels Jésus-Christ est mort et qui par la repentance et la foi en Lui sont devenus des enfants de Dieu. Frères, parce que fils de Dieu. Fils de Dieu avant tout.
Frères séparés
Mais le jour où Lot eut ses propres troupeaux et ses propres bergers la séparation avait tacitement commencé. Lot n'aurait-il pas dû rester sous l'autorité paternelle d'Abram pour avoir pleinement part aux bénédictions promises à ce dernier? Mais il saisit l'occasion qui lui est offerte pour s'émanciper.
Des querelles éclatèrent entre les bergers de l'un et ceux de l'autre parce qu'ils n'avaient pas de commun maître, ni de bornes de démarcation. Rivalités, jalousies et vexations ont dû envenimer les rapports entre les deux parties et risquaient de provoquer des disputes entre Abram et Lot. La séparation et la délimitation des territoires étaient donc préférables à la guerre fratricide.
Et il faut croire que Celui qui sonde les pensées les plus profondes du coeur avait tout prévu et que~ce départ entrait dans le plan de Dieu. A peine Lot eut-il quitté la contrée que l'Eternel s'adressa à Abram en ces mots : «Tout le pays que tu vois, je te le donnerai à toi et à ta postérité pour toujours». Et Abram vint habiter parmi les chênes de Mamré, qui sont près d'Hébron, et y bâtit un autel à l'Éternel.
Ainsi, quand une seule et même autorité n'est plus reconnue par tous, quand des partis se forment et que la paix intérieure est menacée, il vaut mieux se dissocier que de se déchirer entre frères.
Encore de nos jours, par amour de la Vérité et de la paix, certaines séparations paraissent inévitables.
Frères quand même
Mais Abram demeura malgré tout un frère pour Lot. Il le prouva de plusieurs manières. D'abord il renonça à ses droits légitimes en laissant Lot choisir la région qui lui convenait: « Si tu vas à gauche, j'irai à droite, si tu vas à droite, j'irai à gauche. » Quelle leçon d'amour fraternel et d'humilité! Ce n'est pas dans l'exercice de sa force et de son autorité que réside la vraie grandeur d'un homme.
Lot prit apparemment la plus belle part: la plaine fertile du Jourdain, entièrement
arrosée, qui était comme un jardin de l'Éternel. Abram la lui accorda fraternellement.
Abram fut aussi un frère quand un jour Lot fut enlevé avec les siens par plusieurs
rois venus combattre ceux de Sodome, de Gomorrhe et des environs. Dès qu'Abram apprit le sort de son frère, il arma 318 de ses plus braves serviteurs, poursuivit les assaillants, les battit et ramena Lot et tout ce qui lui appartenait.
Abraham fut encore un frère lorsque Dieu résolut de détruire Sodome à cause de la perversité qui y régnait. Abraham pensa à son neveu, et souhaitant sa délivrance, il intercéda avec ferveur en faveur de la cité maudite. Et l'Eternel fut attentif à sa prière et envoya deux anges pour en sortir Lot et ceux des siens qui voulaient le suivre. Ainsi toutes les fois que cela fut possible, Abraham manifesta des sentiments fraternels à l'égard de celui dont il avait dû se séparer.
Nous voulons aussi aimer nos frères séparés et les aider quand nous en avons l'occasion, et dans la mesure où nos convictions nous le permettent.
Souvenez-vous
Ces choses sont arrivées pour nous servir d'exemple. Lot incarne le type du croyant-mondain. Aux montagnes aérées de Juda il préféra les bas-lieux de la Mer Morte aux villes luxurieuses. Cette mer se trouve dans la dépression la plus profonde de notre terre et la moralité des cités côtières était au même niveau !
Aucun poisson ne peut vivre dans ses eaux saturées de sel et elle est devenue un symbole de la mort. Lot dressa ses tentes jusqu'à la proximité de Sodome et bientôt il eut sa maison dans cette ville dont les habitants étaient méchants et de grands pécheurs devant l'Eternel.
Tout en souffrant de la dépravation des Sodomites, Lot ne put entièrement échapper à leur funeste influence. Son sens moral s'émoussa à tel point qu'il fut disposé à laisser déshonorer ses filles, et enivré, il se laissa lui-même séduire par elles et devint ainsi le père des Moabites et des Ammonites, ennemis jurés du peuple de Dieu. Dans sa grande largeur d'esprit, il appela même ces Sodomites ses frères, quoiqu'eux le considéraient comme un étranger. Avait-il oublié son origine et le caractère sacré de son appartenance à la famille élue de Dieu ? Cette expérience néfaste lui fit perdre son honneur, sa femme et ses biens. Et si lui-même échappa au terrible cataclysme ce ne fut que comme à travers le feu.
Abraham fut le type du fidèle de tous les temps. Père des croyants, serviteur éprouvé de l'Eternel, ami de Dieu, il tint ferme dans sa vocation et fut en bénédiction à toutes les nations de la terre.
Séparé de Lot il ne lui demeura pas moins attaché et se montra toujours disposé à le secourir dans ses détresses, sans jamais le suivre dans ses faiblesses.
Or, ce qui arriva du temps de Lot se reproduira aux jours du fils de l'homme, c'est-à-dire à la fin des temps. (Luc 17: 28). Serons-nous alors des enfants de Lot ou des enfants d'Abraham? Nous trouverons-nous alors mélangés aux enfants de ce siècle dans la confusion d'une fraternité mondiale ou serons-nous un peuple élu, acquis, séparé, une nation sainte annonçant les vertus de celui qui nous a appelés des ténèbres à son admirable lumière? Cela dépendra de notre attitude présente. Que le Seigneur nous préserve de la séduction du grand nombre et des alliances coupables avec le monde et la mondanité. Aussi douloureux que cela puisse nous être, restons plutôt séparés de certains frères et de certains milieux chrétiens que de partager leur communion avec les infidèles.
Mais gardons un grand amour pour tous ceux dont nous sommes séparés en nous inspirant toujours de l'exemple d'Abraham qui, dans la séparation inévitable, demeura un frère charitable.
Jean Hoffmann
Bonne Nouvelle 4 / 91
La Bonne Nouvelle - Droit de reproduction: prière de s'adresser au journal