L'implantation d'églises nouvelles
Sans expérience particulière en ce domaine, j'ai pour seule compétence celle que j'ai acquise depuis une quinzaine d'années dans le cadre d'Opération Mobilisation, où j'ai poursuivi activement l'objectif de voir de nombreuses nouvelles Eglises implantées en France.
Ce sujet est trop vaste pour qu'il soit possible d'être exhaustif. Un choix s'impose, qui n'est pas aisé à faire. Je vous proposerai seulement trois thèmes de réflexion.
l. FONDEMENT BIBLIQUE
1 Corinthiens 3 : 6-9 « J'ai planté, Apollos a arrosé, mais Dieu a fait croître. Ainsi, ce n'est pas celui qui plante qui est quelque chose, ni celui qui arrose, mais Dieu qui fait croître. Celui qui plante et celui qui arrose ne font qu'un, et chacun recevra sa propre récompense selon son propre labeur. Car nous sommes ouvriers avec Dieu. Vous êtes le champ de Dieu, l'édifice de Dieu ». Matthieu 16 :18 b « . . . je bâtirai mon Eglise et les portes du séjour des morts ne prévaudront pas contre elle ». Matthieu 28 : 18-20 « ... Tout pouvoir m'a été donné dans le ciel et sur la terre. Allez, faites de toutes les nations des disciples, baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez-leur à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde ».
Ces textes connus, voire trop connus, appellent quelques remarques : .
l . L'évangélisation ne doit jamais être une fin en elle-même, mais toujours un moyen pour atteindre un but : l'édification ou l'implantation d'Eglises nouvelles. Quelles que soient les dispositions dans lesquelles nous « faisons de l'évangélisation » (évangélisation-fétiche), évangélisation-dada, évangélisation pour avoir bonne conscience), elle est un moyen pour atteindre l'objectif suprême : l'implantation d'Eglises nouvelles.
2. « Je bâtirai mon Eglise » dit Jésus. Tel est le but de sa venue sur terre. Christ est, certes, venu pour racheter l'homme en mourant sur la croix, pour le sauver de son péché et le délivrer de son ancienne nature ; mais il est venu, aussi, pour nous incorporer, nous inclure dans une communauté : l'Eglise au sens universel, mais aussi l'Eglise locale. Ce qui est remarquable au verset 18 de Matthieu 16, c'est l'assurance dont Jésus fait preuve lorsqu'il parle. Il n'évoque pas un projet qu'il réalisera peut-être, si ]`occasion se présente, ou si les disciples sont obéissants. Non. l'affirmation est inconditionnelle : « Je bâtirai mon Eglise ».
Ce verset nous informe aussi de l'identité du constructeur de l'Eglise : Christ, et de son propriétaire : Christ. Il y a là toute une richesse d'enseignements. Il est si facile de s'approprier l'oeuvre de Dieu, d'imprimer sa personnalité, ses idées, ses conceptions sur l'Eglise, et de faire de celle-ci une réalité qui nous agrée et qui nous est fidèle plutôt que de dresser une Eglise qui appartienne à Christ, parce que lui-même en est le constructeur.
Enfin, il y a dans ce verset, un sujet de joie : l'assurance que Jésus prend soin et protège son Eglise, même petite et faible.
Le livre des Actes raconte comment la promesse de Jésus s'est réalisée, malgré bien des combats et des découragements. Je suis toujours un peu surpris et peiné de voir combien on érige facilement l'Eglise primitive en modèle, et comment on a placé le livre des Actes sur un piédestal, alors que ce livre propose un long catalogue d'échecs, de découragements et de difficultés de tous ordres à surmonter...
3. La portée géographique du commandement de Jésus est immense ; il faut aller dans chaque nation ou chaque ethnie pour y faire des disciples, les baptisant et leur enseignant à observer tout ce que le Christ a prescrit.
Quand je suis venu en France, en 1963, j'étais idéaliste : rien ne serait plus facile, croyais-je, avec tous les moyens modernes disponibles, d'annoncer l'Evangile : il suffirait de mobiliser le plus de jeunes possible, d'éditer des ouvrages, de distribuer largement des tracts, de faire des émissions à la radio, d'apporter des témoignages personnels, etc. Cette conception de l'évangélisation était superficielle. Vingt ans après, la preuve est faite que ce beau programme n'est pas aussi facile que cela à réaliser, puisque 47 % des Français n'ont pas encore entendu parler de l'Evangile !
Or Christ ne nous a pas ordonné de nous contenter de cette évangélisation superficielle. Il nous a commandé plutôt un travail de pénétration, une action en profondeur. Nous sommes exhortés à faire des disciples, les baptisant et leur enseignant à observer ... c'est-à-dire les conduisant à obéir à Christ. Et cela dans le monde entier !
Est-ce toujours faire preuve d'idéalisme que d'être convaincu que Christ veut voir son Eglise bâtie dans chaque ethnie, et en ce qui nous concerne, ici, en France ? Je ne le crois pas. Il y a même urgence à y travailler.
4. Ne nous arrive-t-il pas de nous engager dans une action d'évangélisation avec pour souci principal : les conversions, les décisions ou même les nouvelles naissances, mais en négligeant l'intégration de ces nouveaux convertis dans une famille spirituelle où ils pourraient croître, se développer et parvenir à la maturité en Christ ? N'avons-nous pas trop souvent enfanté des orphelins ou des enfants uniques en traitant avec légèreté la question de « la suite »... de ces bébés en Christ, en leur laissant parfois même le soin de choisir eux-mêmes leur famille spirituelle ?
II. MÉTHODES,OUI OU NON?
Cette question est, pour moi, source de gêne ou de réserve. Y a-t-il des méthodes à utiliser ? Sans aucun doute. J'ai, dans ma bibliothèque, cinquante livres sur ce thème. C'est un sujet à la mode ; aussi n'est-il pas étonnant qu'un nombre croissant d'ouvrages lui soit consacré.
Je voudrais parler, moins de technique que d'une pratique à la portée de tous. Le point de départ de notre action est le commandement du Christ. L'objectif à atteindre est clair. Christ nous a indiqué de quelles ressources nous pourrions disposer et il nous a promis sa présence. Nous avons à réfléchir constamment à la part que nous devons prendre à l'action d'évangélisation. Nous ne sommes pas tous appelés à être des fondateurs d'Eglises.
Certains d'entre nous ont vocation pour exercer un ministère spécialisé : littérature, radio, film, etc. Il est sûr que les Eglises qui existent déjà et celles qui verront le jour ont besoin de pasteurs. Mais un accent trop faible est mis sur le besoin d'hommes capables d'implanter de nouvelles Eglises. L'Eglise n'est pas un accident de parcours, un simple rassemblement circonstanciel de chrétiens : c'est un objectif spécifique et concret.
Une étude récente montre qu'actuellement pour établir une Eglise, en France, il faut en moyenne 17 ans. Est-ce normal ? peut-on espérer réduire ce temps ? Faut-il envisager des méthodes, des stratégies particulières ? Est-ce qu'il existe des actions nouvelles à entreprendre ou bien doit-on continuer à oeuvrer comme maintenant, c'est-à-dire chacun dans son coin, dans son organisation propre ? J'aimerais évoquer trois sujets très liés entre eux afin de répondre un peu à ces diverses interrogations :
*la nécessité d'une croissance « intérieure » des Eglises actuellement existantes ;
* la nécessité d'un développement numérique de ces Eglises ;
* la nécessité d'une croissance par extension.
Il faut commencer avec les Eglises qui existent déjà. Depuis 20 ans, je vois sans cesse se créer de nouveaux mouvements, de nouvelles dénominations. La population missionnaire anglo-saxonne, en France, a doublé au cours des douze dernières années ; il y a actuellement plus de 600 ouvriers de ce type et une quarantaine de nouvelles sociétés missionnaires, sans parler de ce qui se fait à l'intérieur des mouvements historiques.
Examinons, pour commencer, comment les choses se passent dans les Eglises du Tiers-Monde. En 17 80, 0,5 % des chrétiens étaient dans le Tiers-Monde et 99,5 % en Occident.
Ces pourcentages sont devenus, respectivement, 6 % et 94 % en i 9 10, et 54 % et 46 % en 1980. Il s'est donc produit une croissance très forte dans le Tiers-Monde où de nombreuses Eglises se sont implantées. Aujourd'hui, dans le monde, travaillent environ 45 000 missionnaires, dont 15 000 sont issus des pays du Tiers-Monde. Et ce dernier chiffre s'accroît cinq fois plus vite que le nombre des missionnaires venus du monde occidental.
Comment cela s'explique-t-il ? Y a-t-il seulement action souveraine de Dieu, ou bien existe-t-il aussi d'autres raisons ?
J'en proposerai seulement une : en 1980, dans les pays du Tiers-Monde, 42 % des chrétiens étaient engagés activement dans leur Eglise locale, alors que dans les pays d'Occident, ce pourcentage tombait à 14 % ! Et il faut, sans aucun doute, lier le nombre des vocations à l'engagement des chrétiens dans leur Eglise locale.
1 La croissance intérieure des Eglises locales existantes
L'objectif prioritaire est assurément là. Comment l'atteindre ?
a) Par l'approfondissement de la vie spirituelle de chacun des membres.
C'est là assurément une préoccupation permanente ; mais les résultats obtenus sont en général bien faibles. C'est toujours le même petit groupe de personnes qui est prêt à agir. Le dimanche matin, tous les membres sont là ; ils s'engagent de tout leur coeur à servir le Seigneur, à se consacrer à lui. Et puis, pour les activités de l'après-midi ou pour telle ou telle autre action, il n'y a plus que le petit groupe des fidèles habituels !
Il y a là un indice de la faible vitalité spirituelle de biens des membres de l'Eglise. Aussi est-il urgent et prioritaire de travailler à l'approfondissement spirituel de chacun. Cela représente un investissement en temps considérable et, pour certains pasteurs. une tâche ingrate. Il est tellement plus gratifiant de mettre en oeuvre de vastes projets plutôt que d'accomplir, jour après jour, une action persévérante et sans panache.
Quelle est la santé spirituelle des membres de votre Eglise ? Où en sont-ils dans la lecture et la compréhension de la Parole de Dieu ? Sont-ils engagés quotidiennement, avec soif, avec élan et zèle, dans la lecture de la Bible ? Les pasteurs le sont-ils ? Tout cela est élémentaire, sans doute, mais essentiel.
Quelle expérience de la purification et de la délivrance du péché, les membres de votre Eglise ont-ils faite ? Une grande partie du travail pastoral consiste à amener à cette expérience joyeuse de la purification et de la délivrance du péché. Impossible d'espérer annoncer l'Evangile avec des chrétiens boiteux ! Il est indispensable que ceux-ci aient éprouvé la joie de leur salut, qu'ils connaissent la plénitude du Saint-Esprit et tout ce que cela implique.
Si l'on se préoccupe de cela, on accomplit une part importante du travail à effectuer en vue de l'implantation de nouvelles Eglises.
b) Par le développement de la formation des membres des Eglises afin qu'ils soient de plus en plus capables de transmettre leurs convictions. Il ne s'agit pas tant d'enseigner des méthodes « agressives » (porte à porte, etc.) que d'apprendre à témoigner, naturellement, dans le milieu familial, dans son voisinage et dans son lieu de travail. Or, il est clair que bien des chrétiens ont du mal à témoigner de leur foi dans ces milieux familiers. Ils préfèrent souvent s'engager avec Opération Mobilisation, par exemple, qui leur apparaît comme un substitut plus agréable, une sorte d'échappatoire.
c) Par le développement des dons spirituels des membres des Eglises. cela implique, d'abord. que ces dons soient reconnus et, ensuite. que des responsabilités soient confiées. Très souvent, les responsables d'Eglises freinent le développement des dons spirituels, ou le contrarient, parce qu'ils se croient eux-mêmes plus capables que tel ou tel. Et c'est ainsi que bien des personnes restent inactives ! Il faut non pas se contenter de prothèse, ou n'agir qu'avec ceux qui « chauffent les bancs » dimanche après dimanche, mais encourager ]`exercice des dons de beaucoup d'autres. Cela suppose de l'imagination, de l'innovation dans bien des domaines, pour un grand nombre d'activités diverses qui correspondent à ces dons. s'occuper du reste avant d'avoir veillé à ]`approfondissement de la foi et à la formation des membres de l'Eglise, c'est négliger l'essentiel, c'est vouloir courir avant de savoir marcher_ Bien des responsables aiment mieux organiser des choses nouvelles, alors que Dieu leur demande de s'investir dans une action auprès de quelques-uns seulement.
2 La croissance par conversion
L'Eglise doit grandir, c'est dans sa nature. Cotte croissance peut intervenir de plusieurs manières :
* de façon biologique, par l'augmentation du nombre des enfants de ses membres ;
* par le moyen des conversions, signe éclatant de la santé de l'Eglise, manifestation de la capacité de ses membres à être vraiment présents et actifs dans la communauté humaine dont ils font partie. Cela suppose un engagement permanent et régulier dans le quartier où l'Eglise se rassemble.
Pendant cette croissance, il existe naturellement des seuils à respecter. Il y a des transferts géographiques de membres d'Eglises à opérer, sans qu'il soit question d'appauvrissement réel. selon un sondage fait en France, il y a quelques années, sur la manière dont s'est opérée l'intégration dans 1`Eglise de nouveaux membres venus à la foi chrétienne, il ressort que : 4 à 6 % des membres nouveaux ont été admis à la suite d'action de colportage, de distribution de tracts,... dans un quartier
6 à 8 %... à cause du travail pastoral
2 à 4 %... à cause du programme d'activités de l'Eglise : parmi les enfants, la jeunesse, etc.
Moins de 1%... par les campagnes d'évangélisation
70 à 90 %... par l'influence des membres de l'Eglise dans leur cercle de famille ,d'amis, de travail...
Ces résultats sont pratiquement les mêmes dans tous les pays. Ils sont instructifs et ne peuvent qu'inciter à mettre un accent tout particulier sur la formation des membres de l'Eglise afin qu'ils soient de meilleurs témoins dans leur environnement de tous les jours.
3 La croissance par extension, par essaimage
Nous avons la responsabilité d'atteindre, non seulement le quartier où nous sommes, mais aussi les autres ; non seulement la ville où nous habitons, mais aussi les villes environnantes. Il nous faut donc avoir le souci de créer de nouvelles Eglises à partir de celles qui existent déjà, en créant des annexes, des postes d'évangélisation, des études bibliques, etc. La méthode normale est l'essaimage, et non la pratique qui consiste à placer un homme seul, avec sa femme, dans une ville, pour qu'il tente de travailler à partir de rien : quel isolement, quel découragement, ont éprouvé tant d'ouvriers du Seigneur, qui ont été ainsi « catapultés » dans des villes et qui ont « labouré » longtemps avec peu de fruits !
Le principe de l'essaimage mérite de retenir l'attention. Son application exige d'avoir à la fois une vision et beaucoup de volonté, car elle est coûteuse. Elle implique toutes sortes de sacrifices ; par exemple, la rupture de liens sentimentaux... il suffit de penser à ce qui se passe dans une famille et combien il est difficile pour des parents de laisser grandir et partir un enfant ! L'esprit de famille, si beau à tant d"égards, peut devenir un esprit de ghetto... Il n'est pas aisé de se séparer de ceux qui ont de la vie, des dons, de l'énergie, des talents. La rupture des liens sentimentaux constitue probablement l'obstacle le plus grand à l'essaimage. Comment se couper d'une famille spirituelle avec laquelle on a été très uni et avec laquelle on a vécu quantité d'expériences, avec laquelle on a « labouré », pleuré, prié... pour tout recommencer. Il le faut pourtant. Et les pasteurs sont, parfois, les premiers à ne pas y consentir.
L'essaimage est un commandement biblique ; et cependant, on craint d'être appauvri non seulement numériquement, mais financièrement. Cependant, si la vision de l'objectif est précise et la volonté d'obéissance forte, ces craintes devront être traitées avec sensibilité et justice, mais aussi avec fermeté. L'essaimage suppose, en général, le départ des « meilleurs » membres et ne doit pas être l'occasion de résoudre des problèmes délicats de personnes. Il faut renoncer, en effet, à avoir vis-à-vis de l'oeuvre de Dieu une attitude comparable à celle que nous avons trop souvent vis-à-vis du Tiers-Monde (vêtements, argent,...). Pensons aux sentiments des membres de l'Eglise d'Antioche en voyant partir Barnabas et Paul, les deux « meilleurs » ? Or, combien d'Eglises sont réellement prêtes à accepter de se séparer des « meilleurs » de leurs membres, pour ne pas dire des plus doués de leurs anciens et de leurs responsables ?
Ces trois étapes - approfondissement spirituel, croissance par conversion et essaimage - sont liées entre elles. Elles constituent ensemble comme un processus normal à suivre. Le problème est de discerner comment et quand il convient de passer d'une étape à l'autre ou de les combiner. Si une Eglise ne retient qu'un des aspects et néglige totalement les autres, se consacre, par exemple, à l'approfondissement spirituel des membres sans penser à l'évangélisation de la commune, un déséquilibre fâcheux s'ensuivra et, pour l'exemple choisi, elle ressemblera vite à une espèce de ghetto. Ses membres perdront le contact avec les autres et ils seront de plus en plus déphasés par rapport à ceux qui les entourent. Onassis, l'armateur grec qui a construit un empire sur les mers, a écrit : « le pionnier doit avoir des idées plus grandes que celles des personnes qui l'entourent ; il doit savoir calculer le prix et prendre le risque ; il doit être prêt à tout engager, y compris sa propre réputation ». Voilà, je crois, une bonne définition du type de pionnier dont nous avons besoin dans l'Eglise : un homme qui voit « plus grand » que l'histoire, que les circonstances et qui réfléchit bibliquement. Ce n'est pas une tête brûlée, car il sait calculer le prix et prendre des risques.
Où en est notre Eglise ? Quand a-t-elle créé un nouveau poste d'évangélisation, une nouvelle étude biblique en vue de fonder une nouvelle Eglise ?
III. LES PROBLEMES A RÉSOUDRE
1. La conception de l'Eglise
« L'Eglise est trop souvent comparée à un hôpital, alors qu'elle est une caserne », a-t-il été dit. Et il est vrai que bien des Eglises n'existent que pour les « malades » et que leur pasteur passe tout son temps à s'occuper « des cas », courant de l'un à l'autre. L'Eglise devrait être plutôt un lieu où l'on
forme des soldats et des officiers pour le service du Christ, où l'on se préoccupe d'envoyer le maximum de gens sur le front, afin de mettre en oeuvre une stratégie de base tout en disposant d'une importante arrière-garde. Cela ne veut pas dire qu`il n'y ait pas de pavillon-hôpital, mais celui-ci n'est qu'un élément, nécessaire mais accessoire. Dans cette caserne, on se préoccupe également de la relève afin de ne pas risquer d'interrompre l'action.
2. L'idée d'Eglise indigène
On veut créer des Eglises indigènes ; c'est devenu une idée fixe. Ces Eglises indigènes se définissent, à la manière chinoise, par trois autonomies : administrative, financière et de reproduction.
Cette triple autonomie assure-t-elle vraiment le caractère indigène d'une Eglise ? Il n'y avait pas d'Eglise plus indigène que celle de Jérusalem. et pourtant elle avait besoin d'une aide financière. En fait, la caractéristique d'une Eglise indigène, c'est son enracinement dans le pays ou la région où elle se trouve, et sa capacité, grâce aux convertis présents en son sein, de marquer la vie du pays, de la région ou de la localité. C'est une Eglise qui a su faire le pont entre ce qui est profondément biblique et ce qui est bon et juste dans la culture locale.
La prédication, en France, n"est-elle pas trop imprégnée d'un anglo-saxonisme excessif: le vocabulaire, non pas les méthodes car celles-ci sont universelles, est marqué d'une pensée et d'une culture étrangères à bien des français. Il en est ainsi, en particulier, pour la musique (cantiques, choeurs...), la littérature, etc.
3. L'image de marque
Quelle image offrons-nous à nos contemporains ? La diversité « évangélique » est souvent incompréhensible pour ceux qui nous entourent et qui voient, dans nos diverses communautés, autant de sectes. La diversité est bonne si elle exprime une complémentarité et non une concurrence. Or, les personnes qui nous observent remarquent notre manque de coordination, d'harmonisation ; elles voient surtout nos divisions. Créer des fédérations, des alliances ne serait pas une solution, car le problème à résoudre est moins un problème d'organisation que de coeur. Nous avons besoin de reconnaître nos différences. La diversité est acceptable si elle s'accompagne d'un véritable respect mutuel, d'un amour profond les uns pour les autres.
Notre image de marque reflète également ce que l'on pourrait appeler notre polarisation : nous apparaissons davantage préoccupés par tel ou tel point particulier de la Foi, par tel ou tel cheval de bataille actuel, que par la nécessité d'implanter de nouvelles Eglises, en obéissance au commandement du christ. Or il faudrait que nous soyons prêts à mettre au second plan les sujets importants mais non premiers que sont le charismatisme, l'eschatologie, le créationnisme,...
Michel EVAN
Ichthus 1986-3 (No 124)
Eglise, membres, Christ,évangélisation, nouvelles croissance