AUX ETATS-UNIS, 4 000 PASTEURS D'ENTREPRISES ONT EN CHARGE LA SANTE SPIRITUELLE DES EMPLOYES
De plus en plus d'entreprises américaines ont recours à des pasteurs ou des prêtres pour prendre en charge leurs employés au niveau spirituel. En 1996, ces nouveaux pasteurs d'entreprises sont déjà au nombre de 4000. C'est ce que déclare Diana Dale, présidente de l'Institut National du ministère pastoral dans les entreprises et les industries. Diana Dale, elle-même pasteur, assiste à un développement rapide des pasteurs d'entreprises. «Ce boom a démarré il y a trois ans», renchérit l'ex-pasteur militaire Gil A. Stricklin, qui a fondé en 1984 déjà, à Dallas (Texas), un service pastoral dans les usines. Ce service, qui porte le nom de Marketplace Ministries, a pu proposer des pasteurs auprès d'environ deux cents patrons d'entreprises. Stricklin et ses collaborateurs sont de tendance évangélique, ce qui ne les empêche pas de chercher à élargir ce service aux prêtres catholiques et aux rabbins. La demande est si importante que la Haute Ecole de Théologie de Dallas a pu mettre sur pied un nouveau séminaire de «ministère pastoral d'entreprise», avec diplôme à la clé.
Le consortium alimentaire Hudson Industries Incorporation fait figure de pionnier dans cette démarche. Son directeur, James Hudson, se déclare chrétien de confession baptiste, même s'il ne fréquente pas assidûment une communauté. En 1975, il engageait un pasteur du nom de Dean Newberry pour veiller sur la santé spirituelle de ses employés. Cette chaîne de distribution alimentaire compte aujourd'hui treize usines et emploie 11000 personnes aux Etats-Unis. Son chiffre d'affaires annuel s'élève à plus de 1.7 milliard de francs suisses (FF 6.8 mias). Alan Tyson, le successeur de Dean Newberry, est désormais assisté par treize pasteurs.
Cette vague ne se limite pas à une entreprise isolée dont le directeur se dit chrétien, puisque même le puissant syndicat ouvrier du secteur automobile emploie des ecclésiastiques. Cinq pasteurs consacrés et trois cents collaborateurs laïques, commissionnés par le syndicat, sont employés dans les entreprises des groupes General Motors, Ford et Chrysler.
Ce mouvement constitue en fait un spectaculaire retour en arrière, puisqu'au XVIle siècle déjà, des ecclésiastiques se préoccupaient du sort des ouvriers dans l'ancienne colonie britannique du Massachussetts. Ils avaient disparu au XVIIIe siècle, que l'on a appelé le «Siècle des Lumières», étrange paradoxe. Il est vrai qu'en France, juste après la Seconde Guerre mondiale, de nombreux prêtres-ouvriers sont apparus, et ont été très populaires. Mais ils se sont montrés surtout préoccupés par la défense des idéaux du parti communiste; de Dieu, il n'était que fort peu question.
Le mouvement qui s'amorce aux Etats-Unis est quant à lui bien plus proche de ce que l'on peut attendre d'un ministère pastoral. Le New York Times rapporte notamment que les pasteurs d'entreprise se préoccupent naturellement des questions relatives à la vie sociale des ouvriers (drogue, alcool, ou dissensions conjugales par exemple), «mais aussi, cela va de soi, de la réalité du péché, de Dieu, de la grâce et du pardon», ajoute le pasteur Tyson. «Nous prions ensemble, peu importe que nous nous trouvions sur le lieu de travail, dans mon bureau, ou au domicile des personnes que je visite».
Le développement rapide du pastorat d'entreprise s'explique-t-il par le fait que les entreprises qui emploient ces pasteurs assurent des revenus plus que confortables? Toujours est-il que le pasteur Tyson, lui, reçoit un salaire annuel d'environ FS 75000. Par contre ses collaborateurs ont un contrat de durée limitée. Ils ne s'occupent généralement ni d'une communauté, ni d'autres services ecclésiastiques.
Uwe Siemon - Netto / Idea
AVENEMENT Janvier 1997 No 103