Cela existe malheureusement, et au sein même des églises locales de professants où tous les membres souscrivent en principe à une même confession de foi biblique. C'est là un sujet de souffrance pour les croyants et un contre-témoignage face au monde.
Les causes
Elles sont multiples. Cela peut aller de la tolérance de fausses doctrines à l'acceptation de conduites immorales en passant par les effets de la jalousie, de l'orgueil, de l'autoritarisme de responsables d'églises, ou du refus de membres à se soumettre aux exigences bibliques. Camouflages, mensonges, calomnies, rivalités, commérages et rumeurs peuvent envenimer l'atmosphère portant à la fois atteinte a l'amour fraternel et à l'impact des églises en laissant à Satan l'avantage sur les chrétiens (II Cor. 2 : 11).
Les faux remèdes
La plus grave erreur serait de chercher à étouffer tout conflit en s'imaginant qu'avec le temps tout se réglera tout seul. Mais que dit l'Ecriture? «Veillez... à ce qu'aucune racine d'amertume, poussant des rejetons, ne produise du trouble, et que plusieurs n'en soient infectés » Héb. 12 : 15). Ne pansons pas à la légère la plaie du peuple de Dieu (Jér. 6 : 14). Quiconque dissimule le mal ressemble aux pharisiens et aux hypocrites que Jésus comparait aux sépulcres blanchis qui paraissaient beaux au-dehors, et qui, au-dedans, étaient pleins d'ossements. Jésus disait : «Au-dehors vous paraissez justes aux hommes, mais au-dedans, vous êtes pleins d'hypocrisie et d'iniquité » (Mat. 23 : 27-28).
Une autre grave erreur serait de vouloir rester neutre devant l'évidence des faits en ne donnant tort ou raison à personne. Ce ne fut pas l'attitude de Paul qui reprochait aux Corinthiens de n'avoir pas un seul homme sage parmi eux qui puisse prononcer un jugement entre ses frères (I Cor. 6 : 5), et de supporter fort bien qu'on leur prêche un,autre Jésus, un autre esprit et un autre Evangile que ceux qu'il leur avait annoncés (II Cor. l 1 :4). Il disait :
« L'homme spirituel, au contraire, juge de tout » (1 Cor. 2 : 15). N'y aurait-il plus guère d'hommes spirituels de nos jours qui sachent discerner le bien du mal, le vrai du faux et qui aient le courage de prendre position pour ce qui est juste et bon devant le Seigneur?
Conséquences
Si le mal n'est pas ôté et que le coupable conserve sa position et ses responsabilités sans s'être repenti, des relations fraternelles normales ne sauraient être rétablies. (l Cor. 5 : 13). Il y a des injustices qui n'ont jamais été reconnues et confessées, des torts qui n'ont jamais été réparés, des calomnies qui n'ont jamais été retirées, des erreurs qui n'ont jamais été abandonnées.
Ce sont là des causes de troubles persistant dans les églises, de divisions et de l'absence de réelles bénédictions divines. Bien des stagnations et des régressions dans la vie des chrétiens, des églises et des oeuvres proviennent de situations qui n'ont pas été réglées selon les Ecritures. comment pourrait-on espérer rétablir l'harmonie de relations fraternelles normales et un témoignage efficace, si ceux qui ont causé du trouble n'ont pas pu être amenés à la repentance, ou n'ont pas été retranchés selon les instructions de la Parole de Dieu ? (Cal. 5 : 12). On cherche alors souvent à compenser 1 'absence d ' une véritable vie spirituelle par des performances d'une autre nature: de l'activisme religieux, social, sinon politique, des réalisations matérielles, artistiques, théâtrales, musicales, destinées a donner le change en masquant le déplorable état réel des choses.
Le vrai remède
C'est de reconnaître le mal et de le confesser, non seulement devant Dieu, mais aussi devant ceux envers lesquels on a péché. Le fils prodigue disait à son père :
« J'ai péché contre le ciel et contre toi » (Luc 15:21). Il est vrai qu'il lui a fallu passer par toutes sortes de privations et d'humiliations pour en arriver là. Il en est toujours ainsi quand la Parole de Dieu seule ne suffit plus pour amener le pécheur à la repentance. Les chrétiens doivent veiller les uns sur les autres (Héb. 10:24), prendre garde que quelqu'un d'entre eux n'ait un coeur mauvais et incrédule, et s'exhorter les uns les autres, (Héb. 3 : 12-13).
C'est à cet effet que le Seigneur a dit : « Si ton frère a péché («contre toi » selon certains manuscrits), va et reprends-le entre toi et lui seul. S'il t'écoute tu as gagné ton frère. S'il ne t'écoute pas, prends avec toi une ou deux personnes, afin que toute l'affaire se règle sur la déclaration de deux ou trois témoins. S'il refuse de les écouter dis-le à l'église ; et s'il refuse aussi d'écouter l'Eglise, qu'il soit pour toi comme un païen et un publicain » (Mat. 1 8 : 1 5). Il faut évidemment être sûr que le frère - ou la soeur - a péché, pour que ne soient pas portées de fausses accusations contre lui - ou elle -, autrement la démarche pourrait être inversé et l'accusé devenir accusateur faisant lui-même intervenir des témoins. Car il serait inadmissible que l'on commette l'injustice de s'acharner contre un membre devenu gênant, parce qu'il a osé, par exemple, dénoncer des abus ou des erreurs, et qu'on le chasse de l'église sans lui avoir accordé le droit de s'expliquer en présence de témoins. Les frères et soeurs, témoins
- ou mis au courant - d'injustices commises à l'égard de l'un - ou de l'une - des leurs, ont l'obligation morale de soutenir et de défendre la victime de l'arbitraire, faussement accusée ou calomniée.
En manquant à ce devoir, ils se rendent complices du mal commis. Pour éviter les vaines répétitions, les malentendus, les déformations et les contestations des propos tenus, il pourrait être indiqué de demander aux personnes impliquées - et à l'église - de mettre par écrit leurs doléances, leurs accusations et leur défense, afin que tout puisse se passer aussi honnêtement et objectivement que possible dans le respect réciproque et l'amour indispensable, aussi l'amour de la vérité.
Pardon et réconciliation
Jésus a dit: «Si tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi... va d'abord te réconcilier avec lui » (Mat. 5 : 23). Le Seigneur ordonne la réconciliation, mais la reconnaissance du péché précède le pardon et la réconciliation. Nous devons sans doute aussi pardonner à celui qui nous a offensé et qui ne s'en repent pas (Mat. 6 : 12). Jésus a bien prié pour ses bourreaux en ces termes:
« Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font» (Luc 23 : 34). A Pierre qui lui demanda un jour s'il fallait pardonner jusqu'à sept fois à son frère, Jésus répondit: «... non pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à soixante-dix fois sept fois» (Mat. 1 8 : 22), en d'autres termes : sans te fixer de limite. Un chrétien qui ne reconnaît pas son péché demeure toutefois dans une mauvaise disposition d'esprit devant Dieu et ses frères, c'est-à-dire dans un état de péché par lequel il empêchera la réconciliation de se réaliser tant qu'il n'aura pas confessé et - si possible - réparé le mal qu'il a commis.
Aussi sa conscience ne lui laissera-t-elle point de repos, à moins qu'il ne la fasse taire en l'endurcissant. Mais l'offensé qui pourra néanmoins pardonner agira selon le Seigneur et jouira de la paix du coeur, même si la réconciliation n'a pas pu avoir lieu.
Il y a donc nécessité d'une double réconciliation :
1) Avec Dieu par la reconnaissance du péché, la repentance, la confession et la foi en la mort expiatoire de son Fils (Col. 1 : 22 ; 1 Jean 1 : 9).
2) Avec le frère qui a péché contre nous et d'autres, ou envers lequel nous avons péché. La aussi il faut qu'il y ait reconnaissance du péché, repentance, confession et pardon (Jacq. 5 : 16 ; Eph. 4 : 32). « Pardonnez-vous réciproquement » (Col. 3 : 13). Jésus disait à ce propos : «Si ton frère a péché, reprends-le; et, s'il se repent, pardonne-lui » (Luc 1 7 : 3). La sincérité de la repentance apparaît là où le coupable pardonné manifeste la volonté de réparer autant que possible le mal qu'il a commis, comme ce fut le cas chez Zachée qui disait : « Si j'ai fait du tort de quelque chose à quelqu'un, je lui rends le quadruple » (Luc 19 : 8).
Et quand le remède n'a pas d'effet ?
C'est qu'il a été mal appliqué, ou que les démarches ordonnées par le Seigneur n'ont pas pu avoir lieu, parce que l'une ou l'autre des parties, sinon les deux, n'ont pas voulu s'y prêter (Mat. 18 : 15-17). Celui qui refuse d'écouter son frère, même en présence de témoins et devant l'église, se met dans son tort. Il bloque la situation en rejetant consciemment les interventions ordonnées par le Seigneur et il doit dès lors être considéré comme un païen et un publicain (Mat. 18:17) qui s'est lui-même exclu de la communion fraternelle.
Selon le cas, toute relation avec lui doit être suspendue (I Cor. 5 : 11), afin qu'il éprouve de la honte (II Thess. 3 : 14-15). Mais il doit néanmoins rester l'objet de notre compassion, tel un païen ou un publicain à gagner. Jésus lui-même a été appelé l'«ami des publicains» (Mat. l 1 19) et il a déclaré justifié le publicain qui
s'était frappé la poitrine en disant: «à Dieu sois apaisé envers moi qui suis unpécheur » (Luc 1 8 : 1 3). Il peut évidemment arriver que l'une ou l'autre des parties en cause, voire même les deux, manquent de sincérité et ne soient nullement disposées à reconnaître leurs torts. Lorsque les faits établis sont niés, les responsabilités esquivées et la vérité contournée, l'entrevue risque de dégénérer en disputes de mots ou en vains discours (II Tim. 2: 14, 16, 23), rendant momentanément toute poursuite du dialogue inutile.
Et quand il y a division au sein d'une église?
Les églises primitives ont déjà connu cela. La jalousie, les rivalités, l'attachement aux hommes plutôt qu'à Christ ont provoqué des scissions (I Cor. l : 1 -1 0 ; 3 : 1-8). L'apôtre Paul en a blâmé les Corinthiens en relevant leur manque de maturité spirituelle, tout en se prononçant en faveur du maintien de l'unité (I Cor. 1 :13 ; 12 : 12-13). Mais lorsqu'il s'agissait de combattre de faux enseignements ou des hérésies, les apôtres n'ont pas hésité à ordonner la séparation (Rom. 1 6 : 1 7 ; II Jean 10-11). Ils n'ont certes pas envisagé tous les cas auxquels nous pourrions être confrontés aujourd'hui. Mais les principes bibliques généraux et le bon sens chrétien, fruit de l'action du Saint-Esprit en nous, devraient nous permettre de procéder selon la pensée de Christ. Si donc une église est troublée par un conflit interne opposant deux partis et que les responsables de l'église, eux-mêmes partagés, ne sont plus en mesure de gérer la situation, il peut s'avérer nécessaire de faire intervenir des médiateurs extérieurs choisis d'un commun accord. Il faut surtout éviter de faire unilatéralement appel à des personnes favorables à l'une des factions, autrement la démarche serait d'avance vouée à l'échec, car on ne peut pas être à la fois juge et partie.
Et si toute une église devenait apostate ?
Il peut malheureusement aussi arriver que toute une église s'engage dans une voie d'abandon de la saine doctrine et de l'éthique biblique en se mondanisant, en s'associant avec de faux croyants, voire des incroyants, et en commettant ou en tolérant de flagrantes injustices. Des avertissements très sérieux furent adressés à la plupart des sept églises d'Asie Mineure.
A l'église d'Ephèse, par exemple, le Seigneur fit écrire: «Souviens-toi donc d'où tu es tombée, repens-toi, et pratique tes premières oeuvres ; sinon, je viendrai à toi, et j'ôterai ton chandelier de sa place, à moins que tu ne te repentes » (Apoc. 2 : 5). Il est vrai que l'apôtre Paul n'a pas conseillé aux Corinthiens fidèles (1 Cor. l 1 : 2) de quitter l'église à cause des chrétiens charnels qui s'y trouvaient. Mais si les avertissements répétés devaient demeurer sans effet, il ne resterait peut-être aux chrétiens spirituels d'une église pas d'autre choix que de sortir de la confusion religieuse selon l'ordre du Seigneur « Sortez du milieu d'eux et séparez-vous » (II Cor. 6 : 14-1 8). L'apôtre Jean aussi entendit du ciel une voix qui disait: «Sortez du milieu d'elle (de Babylone), mon peuple, afin que vous ne participiez point à ses péchés, et que vous n'ayez point part à ses fléaux». (Apoc. 18 :4). Ici il ne s'agit plus d'excommunier un pécheur impénitent, mais de sortir d'une assemblée engagée dans une voie d'apostasie. Il vaut mieux en sortir que d'assister, impuissant, à sa dégradation. «Jésus aussi, afin de sanctifier le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte. Sortons donc pour aller à lui, hors du camp, en portant son opprobre » « Héb. 1 3 : 1 2-1 3). Il y a là matière à réflexion. N'agissons pas à la légère, ne devançons pas l'heure, mais ne la manquons pas non plus!
Conclusion
Plusieurs cas peuvent donc se présenter:
1) Un pécheur manifeste, ayant mal agi ou professant de fausses doctrines, refuse de reconnaître ses torts, de se repentir, de demander pardon a Dieu et à ses frères et d'essayer de réparer le mal qu'il a commis. S'il persiste dans cette attitude il n'est plus en communion avec ses frères et soeurs et doit se retirer, ou être exclu (1 Cor. 5 : 13). Quelqu'un nous disait un jour qu'il y avait des choses qui ne se régleront qu'au ciel ! C'est sans doute vrai pour certains problèmes, mais ce serait une piètre échappatoire, si elle devait servir d'alibi pour nous soustraire à nos obligations morales et spirituelles d'ici-bas. N'attendons donc pas l'Eternité pour mettre nos vies en règle avec Dieu et notre prochain.
2) Il peut aussi arriver qu'un membre - ou plusieurs - soient faussement accusés, jugés de façon inéquitable et chassés de l'église par un - ou des - « Diotrèphe» (III Jean 9-10), dominateurs et manipulateurs, outrepassant leurs droits et ceux d'une église qui, par faiblesse, ignorance, immaturité ou lâcheté, s'est faite complice d'injustices en ne réagissant pas sainement. Une telle église doit se repentir, reprendre les responsables de telles actions, voire même les suspendre de leurs fonctions, et réparer le mal commis en réhabilitant celui, celle ou ceux qu'on a traités si arbitrairement. A défaut, tous les membres ayant pris conscience de la gravité de la situation pourraient être amenés à quitter une église qui refuse de se conformer aux principes et aux procédés bibliques de justice, de vérité et d'amour fraternel.
3) Lorsqu'une église ou un groupement d'églises se laisse pénétrer et emporter par une quelconque hérésie mettant en doute ce que dit l'Ecriture ou se prête aux collaborations oecuméniques avec des mouvements religieux apostats ou même étrangers à la foi chrétienne, les croyants attachés aux Ecritures devraient en sortir, s'ils constatent que la dégradation se poursuit et qu'il n'est pas tenu compte des mises en garde des Ecritures qui disent : « Ne prenez point part aux oeuvres infructueuses des ténèbres, mais dénoncez-les » (Eph. 5 : 1 1). C'est ainsi que sont nés les mouvements de réforme et de réveil, que des hommes de Dieu ont dû quitter leurs églises et que des églises sont sorties de leurs unions ou associations pour ne pas se rendre complices des hérésies qu'ils y ont vainement combattues.
Dernière recommandation
Il convient toutefois d'être prudent, patient et d'agir toujours avec amour et fermeté, selon sa conscience éclairée par la Parole de Dieu. Il ne faudrait pas quitter une église pour rejoindre une autre également compromise, ni chercher une église parfaite inexistante ! La volonté du Seigneur étant toutefois que les rachetés se regroupent en assemblées locales, ceux qui se trouvent ainsi placés « hors du camp » devraient autant que possible se rechercher et se rassembler pour réaliser la communion fraternelle en tant que membres du Corps de Christ, afin d'éviter de vivre dispersés dans l'isolement. A la limite, et dans l'impossibilité de se retrouver plus nombreux, deux ou trois assemblées au nom du Seigneur, peuvent, aussi compter sur sa divine présence. (Mat. 18 : 20). Il y va du développement spirituel du chrétien et du témoignage commun à rendre au monde. Car il ne s'agit pas de se replier sur soi-même pour s'enfermer dans un ghetto, mais de sortir de la confusion religieuse pour être en mesure d'agir de façon plus cohérente et plus efficace, en plus grande conformité avec la Parole de Dieu et en communion avec ceux qui partagent la même vision et qui ont adopté la même position. Ce n'est qu'ainsi que l'on pourra compter sur la bénédiction du Seigneur.
Jean Hoffmann
La Bonne Nouvelle 4/94
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