Chrétiens tous les deux, ma femme et moi avons expérimenté la puissance de la prière. Mais je préfère prier seul plutôt qu'avec mon épouse, peut-être parce que je me sens plus «libre» dans ce que je demande au Seigneur, bien que je n'aie rien à cacher à ma femme. Quelle doit être mon attitude?
Votre préférence à prier seul ne signifie pas que vous ayez quelque chose à cacher à votre femme. Vous êtes plutôt comme un petit garçon qui vient demander une faveur à son papa ou sa maman, en cachette de ses frères et soeurs, pour se démarquer d'eux et obtenir un privilège personnel. Votre attitude vient sans doute d'une réserve personnelle qui fait partie de votre caractère et révèle peut-être un manque de confiance en vous au niveau spirituel, un peu comme si vous craigniez que Dieu agrée davantage la prière de votre femme que la vôtre parce qu'elle serait mieux formulée ou plus spirituelle... Peut-être que votre épouse est plus dynamique ou plus entreprenante dans sa vie avec Dieu et que par rapport à cela vous ne vous sentiez pas à la «hauteur». Vous avez certainement peur de son jugement à elle, alors qu'en réalité, c'est vous-même qui vous jugez sévèrement, vous estimant insuffisant ou maladroit.
Dès que nous nous mesurons à quelqu'un, nous avons tendance soit à ne voir que ses défauts, pour se placer au-dessus et se croire meilleur ou supérieur, soit à ne voir que ses qualités et à se sentir inférieur, incompétent ou inutile. Mais un couple se situe non à un niveau de «compétition» mais de complémentarité. Et un couple chrétien utilise comme référence la stature parfaite de Christ selon Eph. 4, 13, ils sont «semblables à l'image du Fils de Dieu», (Rom 8, 29); la référence n'est pas celle d'un homme quelle que soit sa valeur. Un couple de chrétiens a en outre le privilège d'être assuré de la présence de Christ au milieu d'eux lorsqu'ils prient ensemble (Mat. 18, 20).
Il serait d'ailleurs souhaitable qu'avant ce moment de prière commune, vous ayez un temps de partage et de mise en commun des besoins, désirs, attentes et espoirs de chacun, et que vous évoquiez ensemble tout ce qui constitue un sujet de préoccupation du moment.
En ayant un véritable dialogue fait d'écoute mutuelle, de compréhension et d'acceptation de l'autre tel qu'il est, vous pourrez expérimenter le soulagement que produit l'expression verbale des soucis, parce que c'est une mise en lumière. Et, bien qu'il ne s'agisse pas de péchés, c'est aussi cela la confession: reconnaître un fardeau et l'exprimer. il pourra ainsi être porté à deux et présenté à Dieu d'un commun accord, sans honte ni fausse modestie, mais dans la simplicité et la lumière, «car, si deux s'accordent sur la terre pour demander quoi que ce soit, cela leur sera donné par mon Père qui est dans les Cieux» (Mat. 18, 19).
Peut-être avez-vous peur de partager vos soucis: ce n'est pourtant pas un péché que d'avoir des difficultés. L'erreur c'est de les garder pour soi, de ne pas en parler: notre esprit finit par en être envahi et nous ne progressons plus. C'est une forme d'orgueil que de ne pas reconnaître que nous sommes des hommes limités qui avons besoin de la grâce divine, chaque jour; en tant que chrétiens, nous avons l'incompréhensible privilège et l'immense responsabilité d'incarner l'Evangile et d'être le temple du Saint-Esprit.
Des promesses extraordinaires se réalisent lorsque deux personnes sont unies dans l'Esprit; combien plus se réalisent-elles au sein d'un couple chrétien qui vit une réelle communion au niveau de l'Esprit, de l'âme et du corps: «car ce n'est pas un esprit de timidité que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d'amour et de sagesse» 2 Tim. 1, 7.
Dominique Dirrenberger
AVENEMENT Novembre 1993 No 65