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Travaille en chantant.

 

Vous avez, sans doute, entendu chanter ou chanté vous-même le joli chant de J. Dalcroze ; j'y ai pensé en lisant le petit récit que je vous raconte ici.

Travaillons, ma mie, en chantant. Travailler, youp, c'est la vie, Travaillons, ma mie, en chantant.

Ceci s'est passé une de ces dernières années sur notre beau lac. C'était sur le bateau qui fait le tour du Haut-Lac, par un merveilleux après-midi où le bleu du ciel et celui de l'eau rivalisaient d'éclat. Un parfait bien-être envahissait les nombreux voyageurs qui venaient de goûter à St-Gingolph ou sur le bateau, quand un petit bonhomme de dix à douze ans, qui circulait entre les bancs, s'arrêta près de moi. Il avait au bras un panier brun, dans lequel une couche de petits bouquets de cyclamens des bois entourés de mousse, exhalaient un Parfum exquis.

- Des cyclamens, madame ?

- Volontiers, mon petit. As-tu peut-être de la monnaie ? Moi, je n'en ai plus.

- Oh ! oui.

Et le gamin de plonger la main dans la poche, puis, de l'en retirer pleine de pièces de vingt centimes.

- Oh ! oh ! tu as donc beaucoup vendu de bouquets. Tu as de la chance.

- C'est parce que je les ai faits en chantant !

Brave petit homme, on lui avait appris qu'il faut remplir sa lâche en chantant pour qu'elle soit bénie.

Je n'oublierai pas la leçon que tu m'as donné ce jour-là sur le bleu Léman, petit garçon mal lavé, et ton minuscule bouquet, je le garderai, même flétri, pour qu'il me rappelle que, moi aussi, je dois remplir ma tâche en chantant, tant lourde soit-elle.

Chers enfants de l'Ecole du dimanche, apprenez à travailler en chantant, et le coeur joyeux et vous verrez comme toute besogne devient facile et même attrayante.

Mme B.-C.


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Jérémie jeté dans une citerne.

(Jérémie 38 : 1-13).

Vous aurez des afflictions dans le monde, mais prenez courage, j'ai vaincu le monde. (Jean 16: 33).

Souvenez-vous de vos conducteurs qui vous ont prêché la parole de Dieu ; considérez la fin de leur vie et leur foi. (Hébr. 13 : 7).

Avant de quitter Jérémie, il nous reste à parler d'un des derniers événements douloureux de sa vie. Son emprisonnement et la tentative d'assassinat dont il est l'objet.

Le pauvre roi Sédécias, à la volonté chancelante, est constamment ballotté entre ses faux conseillers et faux prophètes d'une part, et Jérémie d'autre part, qui continue à faire entendre la voix de Dieu, au milieu de cette agitation, et de ce brouhaha humains. On accuse faussement Jérémie de passer aux Caldéens. Jérémie proteste, mais en vain. On se jette sur lui, on le frappe, et on le jette dans les caves d'une maison, et «il y passe bien des jours ». Le «courageux» Sédécias fait appeler secrètement Jérémie. Il ne peut se défaire du sentiment qu'après tout l'homme de Dieu pourrait bien avoir raison. contre les méchants qui l'ont enfermé sous prétexte de patriotisme. Il adoucit légèrement le sort de Jérémie, qui continue de prophétiser. Et que prophétise-t-il ? Que Jérusalem sera livrée au roi de Babylone, que «celui qui restera dans la ville, périra par l'épée, par la lamine ou par la peste ». Et, audace qui surpasse toutes les autres, Jérémie déclare que c'est là, « parole de Jéhova ».

Les chefs du peuple, exaspérés, ordonnent que « l'on fasse périr le misérable. Qu'on fasse mourir cet homme, car il fait perdre courage aux gens de guerre qui restent dans cette ville, et à tout le peuple, en leur tenant de tels discours. Cet homme ne recherche pas le salut de ce peuple, mais sa ruine, » (Jér. 38 : 4). Sédécias, le roi, le chef suprême, illustre parfaitement par son attitude, le mot historique: « il faut bien que je les suive, puisque je suis leur chef ». Il répond aux chefs : « le voici, il est en votre pouvoir, car le roi ne peut rien contré vous >. Vraiment, il ne vaut pas la peine d'être roi, si l'on n'a aucun pouvoir contre l'injustice. Jérémie est de nouveau malmené, et précipité dans une citerne. Cette fois, le gêneur ne reparaîtra plus, on en est bien débarrassé ! Non point ! Dieu est là, qui veille, plus fort que les hommes. Dans cette citerne, il n'y avait pas d'eau, mais seulement de la boue. « Jérémie enfonça dans cette boue ». A ce moment, Dieu se sert d'un eunuque éthiopien Ebed-Melek (serviteur du roi), pour sauver Jérémie. Cet homme proteste auprès du roi contre la mauvaise action des chefs d'armée. Le roi qui respectait tout de même Jérémie, ordonne qu'il soit retiré de la citerne. Jérémie a la vie sauve. Dieu a encore besoin de lui. « Considérons la fin de sa vie et sa foi ». Comme Dieu est puissant pour protéger celui qui s'abandonne entre ses mains.


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Aider un peu vaut mieux que plaindre beaucoup.

 

Sous l'auvent de notre chalet de montagne, à la croisée de deux poutres, des hirondelles avaient construit leur nid. Les oeufs étaient éclos et, de la galerie, nous pouvions voir quatre petits becs jaunes s'ouvrir démesurément lorsque apparaissait la mère avec une chenille ou 'une mouche dans son bec. Nous aimions à entendre, à l'aube, le gazouillis des charmants oiseaux et ce vers me revenait à la mémoire : « Heureuse la maison où niche l'hirondelle... »

Trois des gracieuses petites créatures avaient, des bords du nid, fait leur plongeon dans le vide, ouvert leurs ailes, appris à voler. Il ne restait que la plus petite, moins forte, moins résolue que ses soeurs. Or, par une brûlante après-midi d'été le ciel s'assombrit et, le soir, une violente bourrasque fondit sur la vallée. Quand la trombe eut passé, que vit-on, hélas 1 Les débris du nid jonchaient la galerie; de la petite hirondelle plus de trace. Elle était tombée dans le foin déjà haut que fouettaient encore des torrents de pluie. Les ténèbres se faisaient plus épaisses. Comment porter secours à la petite victime ? Comment la retrouver ? Ma voisine, Mme B. et moi, après un moment d'entretien, nous en arrivâmes à cette désolante conclusion : Il n'y a rien à fa ire! Et je me retirai dans ma chambre, toute triste, songeant à la pauvre bestiole qui, brutalement chassée de son nid douillet, agonisait toute seule, mouillée, transie, dans l'orage de la nuit.

Le lendemain, en entrant chez mon amie, qu'aperçois-je soudain ?... Sous le poêle, une corbeille ouatée et dedans, toute éveillée et sémillante, la mignonne hirondelle qui ouvrait le bec attendant son déjeuner ! Mime B. me raconta que vers dix heures du soir, son mari était rentré. Elle lui avait raconté le désastre et, d'un commun accord, ils avaient décidé de tenter le sauvetage. Munis d'une lanterne, de grands manteaux de pluie et de parapluies, ils avaient, sous l'averse, exploré et fouillé l'herbe devant la galerie. Enfin, après une demi-heure de patientes recherches, Mme B. avait fini par mettre la main sur la fugitive. En me racontant tout cela, la joie rayonnait sur son visage: joie de l'action bonne, de l'effort généreux, Pleinement récompensé. A cette joie (quoique n'ayant rien fait !) je m'associai cordialement.

Un léger vent du sud avait dissipé les nuages, le ciel retrouvait son azur et les mille gouttelettes qui tremblaient au bord des feuilles scintillaient au soleil de juin. Le berceau de la petite hirondelle fut placé sur la poutre et bientôt nous vîmes en dessus, voltiger en rasant l'air de leurs grandes ailes, le père et la mère qui cherchaient leur enfant. Quelle allégresse que de se revoir ! Car les oiseaux, comme les humains, aiment leur progéniture. La petite rescapée fut fêtée, caressée, nourrie avec sollicitude. Et le lendemain déjà, son aile ayant grandi, elle tournoyait autour du chalet. Plus tard, nous saluant d'un aimable « cui, cui », elle nous fit ses adieux et s'envola pour ne plus revenir.

Sois bon ! Cher enfant qui lis ces lignes, ta grand'maman t'a-t-elle peut-être raconté une vieille, très vieille histoire, celle du petit Dick ? Je l'ai lue dans mon enfance et n'ai jamais pu l'oublier. La voici en peu de mots :

Dick était le plus gentil, le plus joyeux petit compagnon que l'on peut imaginer. Il aimait ses parents et ne leur causait aucun chagrin, il chantait et sifflait toute la journée. Un soir qu'il se baissait pour boire au ruisseau, il se sent tout à coup saisi par une main de fer... Il se retourne effaré. Un géant qui riait de son épouvante le retenait captif. On l'emmène dans une grande et sombre maison de pierre. on l'enferme dans une étroite prison. Dick s'y consume d'ennui, plus de chants, plus de gaîté. Il refuse la nourriture grossière que lui présente son geôlier. Il pleure sa chère famille, sa liberté, la forêt verte où il prenait ses ébats. Un matin, on trouve le pauvre petit mort au fond de sa prison. - Tu l'as deviné sans doute: Dick était un oiselet et le géant un méchant petit garçon.

Sois bon !... Souviens-toi que les petites créatures qui gazouillent, bourdonnent et remplissent de leur joie de vivre la nature printanière, peuvent souffrir aussi bien que toi. Tourmenter un insecte, arracher lies pattes d'une mouche ou d'un scarabée est un jeu cruel. Le tortureur de bêtes est un être indigne, lâche autant que vil et qui mérite la réprobation. Un grand écrivain français, Victor Hugo, raconte que, tout enfant, il s'amusait avec d'autres gamins à houspiller un malheureux crapaud, l'empêchant de gagner le bord de la route. Survient un âne traînant sa charrette. Les polissons poussent le crapaud dans l'ornière. Soudain l'âne s'arrête, penche la tête, de son gros oeil considère la bestiole que les roues vont écraser... Alors, d'une brusque secousse, il sort la charrette de l'ornière et passe près du crapaud sans 'lui faire du mal. Un âne, plus humain que nous !... quelle pensée humiliante pour des enfants et propre à leur faire monter au front la rougeur de la honte 1 L'incident s'achève ainsi :

Sous la voûte infinie, à la fois bleue et noire,

L'un des enfants, - celui qui conte cette histoire,

Entendit une voix qui lui disait : Sois bon !

Mlle M. M.


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Pentecôte.

(Actes 2 : 1-17, 22-24, 36-47).

 

Je mettrai mon esprit en vous et je ferai en sorte que vous suivrez mes ordonnances et pratiquiez mes lois. (Ez. 36 : 27).

La « Pentecôte »! Quelle grande fête dans l'histoire de la chrétienté! La fondation de l'Eglise chrétienne ! Le Christ a été crucifié; à vues humaines son autorité est ruinée. La preuve a été faite qu'il n'est Qu'un imposteur. Un fils de Dieu, ne meurt pas sur une croix ! Tout est donc bien fini ! Les chefs de la synagogue peuvent dormir tranquilles ! Non ! Tout ne fait que commencer. Le grain de sénevé a été enfoui en terre... Tandis que les hommes s'agitent à la surface de la terre, quand le soleil illumine ciel et terre, quand la nuit chasse le jour, il germe, silencieusement, dans le secret, mais sûrement, irrésistiblement semblable à ces racines qui, serrées entre deux pierres, font éclater un mur. Dieu ne meurt pas !

C'était la Pentecôte. A Jérusalem, se groupent des hommes venus, de toutes les nations, alors connues. Juifs pieux, adorateurs du Dieu vivant, Ils parlent des langues différentes. Ils vivent sous des autres cieux. Soudain le « Saint Esprit » descend sur eux. Ils célèbrent tous ensemble les « choses magnifiques de Dieu »

Ils parlent en langues. « Ils sont ivres » ? Mais non ! Dieu réalise sa promesse ! « Viendra un jour, - c'est Dieu lui-même qui parle, - où je répandrai mon esprit sur toute chair ; vos fils et vos filles prophétiseront, vos jeunes gens auront des visions, et vos vieillards auront des songes. Oui, en ces jours-là, je répandrai mon Esprit sur mes serviteurs et sur mes servantes, et ils prophétiseront. » (Actes 2 : 17-18).

Et c'est Pierre, qui, parlant au nom de la foule, affirme que ce Christ, envoyé de Dieu, que les hommes ont voulu faire périr, Dieu l'a ressuscité d'entre les morts. Il vit et par lui son Eglise vivra. Jusqu'à la fin des temps un peuple de témoins proclamera sa gloire et sa puissance, chantera sa louange. Ce Jésus que vous avez crucifié, « Dieu l'a fait Seigneur et Christ ». Et ces paroles sont entendues de la foule. L'Esprit de Dieu fait sauter les vieux cadres, les vieilles barrières. Quoique parlant en langues différentes tous comprennent le langage nouveau. Celui que Jésus-Christ inaugura. Tous entendent et comprennent le message de l'Evangile nouveau. Trois mille se convertissent, c'est-à-dire, s'humilient, reconnaissent leurs péchés, acceptent le pardon et le don du Saint Esprit de Dieu. Et ces trois mille forment la première Eglise, la première milice du Christ, prête à mourir pour son nom, prête à rendre témoignage. « Et, conclut le récit de la Pentecôte, le Seigneur ajoutait tous les jours à, l'Eglise ceux qui étaient sauvés ».


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John Williams, l'apôtre des mers du Sud. 1796-1839.

C'est un beau voyage que nous faisons aujourd'hui par la pensée ! Le navire qui nous emporte file, emporté par le vent, toutes voiles dehors, entre des îles merveilleuses. Nous distinguons sur le rivage les troncs flexibles des cocotiers: leurs branches se reflètent dans l'eau d'une limpidité étonnante.

Bientôt le capitaine ordonne d'amener les voiles. Le navire ralentit sa course. Nous entrons dans un canal bordé de gros blocs, de corail : au fond de l'eau, nous distinguons des fleurs splendides, des anémones de mer, animaux-plantes d'un coloris que ne saurait rendre le plus habile des peintres.

N'aimerait-on pas vivre dans de telles contrées, heureux comme Crusoë avec son fidèle Vendredi, heureux comme les enfants du cher vieux Robinson Suisse ? Et pourtant, de même que souvent la plus belle pomme, rouge et brillante, renferme un ver rongeur, de même la cruauté règne en maîtresse souveraine sur les îles d'or du Pacifique.

Entre les peuplades qui les habitent, ce sont des guerres perpétuelles. Le cannibalisme y sévit. Des parents tuent eux-mêmes leurs enfants pour peu qu'ils paraissent chétifs et délicats ! Non, ne les appelons pas les îles d'or, mais bien les îles de la souffrance et du péché, les îles de la Mort...

Cependant, le Seigneur n'abandonne aucun de ses enfants, qu'ils habitent la chère Europe ou les pays noirs d'Afrique ou les. îles des mers du Sud. C'est pour eux qu'Il est venu, pour eux tous, sans exception : « Dieu, dit l'Evangile, a tant aimé le monde... ». Et voici qu'Il prépare, en Angleterre, au commencement du siècle dernier, celui qui allait être son « instrument », son «ambassadeur», son envoyé auprès des pauvres Polynésiens. Son nom, ? John Williams, apprenti forgeron-taillandier, tout près de Londres.

Vous le voyez, il était modeste d'origine, comme William Carey, comme François Coillard. comme tant d'autres missionnaires, comme les disciples de Jésus eux-mêmes. Et ce jeune apprenti n'était, tout d'abord, pas très ami du Seigneur, mais voici que Notre Sauveur le prit par la main pour le ramener dans la bonne voie. C'était le 30 janvier 1814 (il avait alors dix-huit ans). John attendait dans la rue des amis, de tristes amis, avec lesquels il devait se rendre dans une méchante auberge d'un faubourg de Londres. Ceux-ci étaient en retard. John était rouge de colère ! La femme de son maître vint à passer, se rendant à une réunion religieuse, et elle l'invita à l'accompagner. Pour se venger de ses amis, pour qu'ils ne le trouvent plus à leur arrivée tardive, John accepta de suivre Mrs Tonkin (c'était le nom qu'elle portait) ...

Le pasteur, ce soir-là, parla de l'âme, trésor plus précieux que tous les biens de la terre. Il parla de l'homme riche et insouciant, dont l'âme fut reprise « dans la nuit » par le Seigneur. Cet entretien fit une impression profonde sur John qui, dès lors, changea de vie, devint un fidèle chrétien, s'intéressa joyeusement aux oeuvres religieuses, aux malades, aux pauvres, aux orphelins et aussi aux oeuvres missionnaires.

Aussi ne serons-nous pas étonnés si, en 1816, nous voyons le brave John Williams offrir ses services à la Société de Missions, de Londres. désireuse d'envoyer des ouvriers en Polynésie. Sa demande fut agréée et, le 16 novembre 1817, le navire qui le portait jetait l'ancre devant Tahiti, la plus importante des îles de la Société.

Pendant des années, voici John Williams à l'oeuvre à Tahiti. aux. Iles-sous-le-Vent, à Raîatéa, dans l'archipel de Cook, aux îles. Tonga, aux Samoa. Tel le semeur qui répand partout le bon grain du commencement à 'la fin de soi) champ, tel John Williams jetait le blé de l'Evangile: partout où il pouvait aller et aborder avec son bateau de quatre-vingt tonnes, le « Messager de Paix » qu'il avait construit lui-même.

Et, à côté de la prédication de l'Evangile, quel labeur que le sien! Dans une lettre qu'il écrit à un pasteur de Londres, en 1825, John, Williams dit : « un indigène vient de me dire : « montre-moi où je dois bâtir ma maison ! » et un autre : où dois-je mettre cette fenêtre ? » et un autre encore : «viens aiguiser ma scie » ou « viens faire une saignée à mon frère malade ! ». Ainsi, aux yeux d'un vrai disciple de Jésus, le maître doux et humble de coeur, aucun travail n'est petit, vulgaire ou inutile.

Ne croyons pas cependant que le jeune missionnaire ne rencontre aucune difficulté sur sa route. Souvent sa vie fut en danger,. mais il fut miraculeusement protégé par Celui « qui garde ses. bien-aimés et les tient cachés dans sa tente au mauvais jour. »

(Ps 27 : 5). « le devais, raconte, par exemple Williams, partir un, samedi pour l'île de Tahara. Quatre indigènes (je le sus plus tard) devaient, pendant le voyage, me tuer et me jeter à la mer ! Or, un détail, bien insignifiant en apparence, m'empêcha de m'embarquer. J'avais repeint et réparé mon bateau le mercredi: Manquant de peinture, j'avais ajouté à ce qui me restait de couleur une trop forte quantité d'huile de coco. Ceci empêcha la peinture de sécher. Les indigènes, et pour cause, me pressaient de partir, mais c'était impossible. Je ne soupçonnais pas alors que la Providence m'avait ainsi gardé de la mort ! »

C'est le sentiment de cet amour fidèle de Dieu qui le soutint dans ses innombrables courses de marin-missionnaire, qui lui permit d'étendre sans cesse son champ d'activité, si bien qu'il songea à évangéliser aussi les Marquises, les Nouvelles-Hébrides, la Nouvelle-Guinée.

Pour solliciter l'appui du Comité des Missions de Londres, sentant aussi le besoin de se reposer quelque peu, avant d'embrasser de nouvelles tâches, John William rentra en Angleterre en juin 1834.

Il y passa quatre ans, prêchant, prononçant des conférences, fondant la Mission de l'Eglise Presbytérienne d'Ecosse aux Nouvelles-Hébrides. A son départ, un voilier, le « Campden » lui fut donné par souscription pour faciliter ses voyages d'exploration et d'évangélisation.

Mais les « voies de Dieu ne sont pas nos voies » : dans la pensée du Seigneur, l'oeuvre de son serviteur était terminée et l'heure était venue où il allait recevoir la couronne de vie et la récompense de. ses travaux...

Le 20 novembre 1839, le « Campden » abordait à l'île d'Erromanga. John Williams descendit à terre avec un autre missionnaire, Harris. Les indigènes n'avaient pas l'air rassurant. Cependant, John et son compagnon allèrent plus avant. Des buissons les dérobèrent à la vue de leurs compagnons restés sur le navire. « Puis tout à coup, raconte le capitaine Morgan, j'aperçus Williams qui courait, poursuivi par un natif ! Sur le rivage rocailleux, il tomba, frappé d'une massue à coups redoublés... Les sauvages l'emportèrent à l'intérieur de l'île et le dévorèrent. M. Harris eut le même sort ».

Williams n'avait que quarante-quatre ans : il était demeuré fidèle jusqu'à la mort. Que cette fin prématurée (comme celle d'Etienne et de Jésus lui-même) nous rappelle, chers enfants, que la longueur d'une vie n'est rien aux yeux du Seigneur: la seule chose qui compte pour lui c'est notre fidélité, notre dévouement, notre esprit de sacrifice


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Les économies des petits Loude.

 

- Bonjour, Madame Louise, vous avez apporté du linge ?

- Oui, Madame, je l'ai donné à la cuisinière. J'espère que Madame sera satisfaite ; j'ai mis tous mes soins à le raccommoder.

- Je le crois, Madame Louise. Je suis toujours très contente de vous. Comment vous portez-vous? Et, à propos, qu'a dit le docteur au sujet de votre fillette ?

- Il paraît qu'elle est encore bien délicate. Ces pneumonies, c'est si grave, et si difficile de s'en remettre complètement. M. le docteur déclare que pour qu'elle guérisse tout à fait, il lui faudrait un bon séjour à la montagne. Mais, ce n'est pas possible ! Comment pourrais-je lui payer une chose aussi coûteuse, alors que je n'arrive pas à faire pour le docteur et les remèdes.

Madame Loude essaye de réconforter la pauvre veuve qui s'en va rapidement, afin de ne pas laisser voir son chagrin.

- C'est très triste, mère, pour elle, et pour sa fille.

- Oui, mon chéri, d'autant plus qu'elles sont seules, n'ont, ni parents, ni amis , qui puissent les secourir.

Pierre hoche la tête, puis suit ses deux soeurs dans leur chambre de jeux. Mais ils ne s'amusent pas, pensent à la petite fille qui ne guérira point, si elle ne peut aller à la montagne.

- Micheline, quand part-on en vacances ?

- Dans cinq jours.

Le silence retombe dans la claire salle de jeux.

- Marie-Claire, combien avons-nous d'économies ?

- Je ne sais pas exactement.

- Nous sommes très riches, assure Micheline. J'ai compté hier.

Les enfants se regardent, puis se mettent à parler à voix basse. Ils se sont compris. Un moment plus tard, trois obus font irruption dans le bureau de monsieur Loude. Heureusement, papa et maman y sont tous les deux.

Les enfants parlent tous à la fois, bruyamment, avec animation.

- Impossible de vous comprendre. Qu'un seul de vous parle, déclare papa.

C'est Micheline, l'aînée qui, sur un signe de son frère, prend la parole.

- Nous avons de gros sous dans nos tirelires. Alors, comme nous allons partir pour la montagne, cela nous ferait tellement plaisir de vous les donner, afin qu'on emmène la petite fille de Madame Louise. Elle est malade, et c'est si triste, à son âge. Si vous le voulez, nous la prendrons avec nous dans notre chalet, nous nous en occuperons, Marie-Claire, Pierre et moi. Et, dans deux mois, quand nous rentrerons, elle sera sauvée, complètement guérie. Dites-le voulez-vous ?

Papa et maman ne répondent pas tout de suite. Ils échangent un regard attendri, puis contemplent les jolis visages francs des trois enfants.

L'approbation a été donnée. Maintenant, papa et maman embrassent leurs enfants. Le jour même, madame Louise a été avertie que sa fille partirait avec la famille Loude. Elle-même devra venir voir sa fille, et on exige qu'elle passe au moins trois semaines près d'eux, à la montagne. Madame Louise pleure de joie, ne sait comment remercier.

Les Loude sont partis à la montagne, emmenant la veuve et sa fille.

S. C.


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Le sourd.

 

Un coup timide est frappé à la porte de l'école ; quand Roger a ouvert, une femme entre, tenant par la main un garçon d'une dizaine d'années. C'est une maman qui amène son fils dans la « classe spéciale ». Elle est grande, robuste; l'expression de son visage énergique est adoucie par le sourire d'une bouche qui révèle de la bonté. Le petit, lui, est un joli garçon aux yeux noirs vifs et malicieux qui éclairent son visage pâle. Dès l'abord, on voit que ce sont de pauvres gens.

Comment t'appelles-tu ?

La maman intervient :

- Il n'entend pas ; il est sourd depuis l'âge de cinq ans ; ça lui est venu après une maladie ; il faut crier quand on lui parle.

« Il n'entend pas... » Cette phrase a jeté le trouble dans les cerveaux des enfants qui sont assis dans la classe. A voir les fronts plissés, l'expression tendue de tous ces petits visages, on peut suivre le travail ardu de leurs intelligences faibles qui font effort pour comprendre. Dans les yeux tout grands ouverts, sur les lèvres entr'ouvertes, on lit la pitié pour le « nouveau ». Il n'entend pas ce qu'on lui dit !... Charlot, un enfant choyé par sa maman, est visiblement le plus affecté. Comme dans un livre ouvert, on peut lire ses pensées : « il n'entend pas, il ne peut pas entendre si sa maman lui parle!... Il faut crier!... Mais, peut-on crier des mots qui sont si doux quand on les entend murmurer tout doucement entre deux baisers ?... Et s'il est tombé et qu'il se soit fait mal, il n'entend pas les mots que les mamans savent trouver pour consoler leurs petits enfants... oh ! ... » Le coeur de Charlot est gonflé de sympathie, on dirait qu'il va pleurer.

Cependant, le petit nouveau n'a pas l'air malheureux. Maintenant que sa maman est partie, il regarde la classe si jolie, si gaie, les enfants qui le mangent des yeux, la maîtresse qui lui sourit et il éclate de rire ; puis, d'une voix aigüe:

- C'est chic ici !

La maîtresse parle fort, tout près de son oreille:

- Tu es content de venir à l'école ? - Oui !

Des deux mains, il se frappe joyeusement la poitrine pour manifester son plaisir.

- Comment t'appelles-tu ?

- François.

- Tu n'entends rien ?

- Oui, quand le train passe près de chez nous ; je l'entends dans mes jambes...

- Eh ! bien, François, je t'apprendrai à entendre avec tes yeux.

Pour le coup, c'en est trop ; Alfred, un bon gros garçon, dévisage la maîtresse d'un air sceptique :

- On ne peut pas entendre avec les yeux ! Comment qu'vous voulez faire ?

- Tu verras, j'apprendrai à François à regarder mes lèvres quand je parle et à comprendre ce que je dis.

Alfred n'est pas convaincu, mais, comme il a confiance, il croit ce que dit sa maîtresse. François, lui, se demande comment le miracle pourra se faire; mais, s'il ne s'agit que d'ouvrir les yeux et de s'en servir, il les ouvrira, oui, et il s'en servira! Pour le moment, ils ont l'air de deux points d'interrogation incandescents.

Dès le lendemain, le travail commence. Bien en face d'elle, la maîtresse tient un petit miroir ; elle articule lentement ides syllabes. François voit dans le miroir la position de la langue et tâche de faire de même. De lettre en lettre, de syllabe en syllabe, le petit sourd arrive à prononcer des mots ,difficiles sans les entendre, mais seulement en les lisant sur les lèvres de la maîtresse. En même temps, il s'exerce à reconnaître les lettres écrites. Il dispose de tout un carton de lettres mobiles et, sur les indications de la maîtresse, il les trie, les assemble, en fait des mots, plus tard des phrases. Tout seul à sa table, il travaille avec acharnement. Tout un monde va s'ouvrir devant lui quand il saura lire ! C'est si merveilleux ces petits caractères noirs qui parlent, racontent de belles histoires dont on peut jouir sans avoir besoin de ses oreilles !...

De jour en jour, le visage de François s'éclaire, s'épanouit; c'est que l'enfant va de découverte en découverte. Il met un tel zèle à prendre part à la vie normale qu'il saisit toutes les occasions d'apprendre quelque chose. Un matin de mai, Juliette a apporté un bouquet de lilas à l'école. François a demandé le nom de ces belles fleurs ; devant le petit miroir, la maîtresse a prononcé lentement : Pendant un long moment, François, tout joyeux, répète : lilas, lilas. A la promenade, retentit tout à coup la voix aigüe du petit sourd : « Mademoiselle, dans ce jardin, il y a des lilas ! » Ou bien, il prononce à haute voix les numéros de toutes les "sens, lit les -,noms de toutes les rues. Au bout d'un an, François sait lire couramment ; il est si heureux qu'il lit tout ce qu'il trouve: un vieux journal, les affiches, les réclames sur les trains, tout. Il n'est plus enfermé dans un monde borné où ne lui arrivaient jadis que de faibles échos de ce qui l'entourait. Il partage les jeux de ses camarades dont il ne tarde pas à devenir le chef. C'est le grand frère de la classe. Un jour, à la promenade, il a pris sur son dos pour le retour, le petit Charlot qui était fatigué. François est heureux ; il rayonne de joie et pourtant, ce n'est pas un enfant gâté... Sa mère fait des lessives ; son père est chiffonnier, tailleur à ses heures ; seulement, comme il ne réussit pas très bien les habits, on ne lui donne pas beaucoup à coudre. Dans le pauvre ménage, on est quelquefois très « serré ». Cependant François sait prendre les choses du bon côté ; il sait bien que la vie n'est pas toujours rose.

Un jour, à l'école, il doit résoudre un problème ; il s'agit de calculer combien il reste à un ouvrier qui gagne tant, dépense tant pour sa nourriture, tant pour ses vêtements, etc. Les calculs terminés, il vient montrer son travail. Stupéfaite, la maîtresse lit au bas de la solution du problème : « Réponse : ceinture ».

- Mais François, qu'est-ce que cela veut dire ?

- Il ne lui reste rien à cet ouvrier, alors quoi, il faut qu'il mette une ceinture!...

C'était plutôt inattendu.... mais c'était dit avec un tel naturel qu'on sentait que souvent, chez François, il fallait « mettre une ceinture »... Cela ne l'empêchait pourtant pas d'être gai comme un pinson !

Je pense à certains enfants de nos groupes d'école du dimanche qui ont !de bons yeux, de bonnes oreilles, une bonne intelligence, des parents aisés ; des enfants dont la ceinture na jamais à comprimer un estomac vide, et qui sont maussades, grognons parce qu'ils doivent aller à l'école quand il fait beau temps et étudier des leçons quand ils voudraient jouer... Qu'ils apprennent de François à mettre en valeur tout ce qu'ils ont reçu. Ils auront ainsi appris à lire quelques pages dans le grand livre du bonheur !

M. J.


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Les Récabites.

(Jérémie 35 : 1-19).

 

Les fils de Récab ont obéi à la volonté de leur père, mais quand Moi, l'Eternel, je vous ai parlé, vous ne m'avez pas écouté. (Jér. 35 : 14).

C'est encore dans une période troublée de l'histoire d'Israël que se passe l'histoire des fils de Récab. Sous la menace d'invasion de Nébucadnetsar, roi de Babylone, les Récabites, qui étaient une tribu de nomades, étaient venus se réfugier à Jérusalem, à l'abri de ses puissantes murailles. Ils vont, par leur fidélité à l'ordre de leur père, être un exemple de fermeté aux Jérusalémites, voici comment:

Jérémie, le prophète, reçoit l'ordre de l'Eternel d'amener dans le Temple, les Récabites, et de leur offrir du vin. Il réunit donc dans une chambre du Temple les descendants de Récab et leur présente du vin. Tous le refusent, alléguant l'ordre sévère qu'ils ont reçu de Jonadab, leur père, fils de Récab. Nous avons reçu cet ordre: « Vous ne boirez jamais du vin, ni vous, ni vos enfants ».

Voilà une attitude courageuse, loyale et bien propre à imiter. Des hommes qui n'ont pas peur de ne pas faire comme tout le monde; qui acceptent de se singulariser, d'être remarqués, parce qu'il s'agit ,d'une question de fidélité et de parole donnée.

Mais, ce n'est pas pour rien que l'Eternel met à l'épreuve ces Récabites, il donne à Jérémie ce second ordre : « Ne vous laisserez-vous pas instruire, n'obéirez-vous pas à mes paroles » « On a Observé les ordres de Jonadab, fils de Récab, qui a prescrit à ses fils de ne point boire de vin, et ils n'en ont point bu jusqu'à ce jour, ,parce qu'ils ont obéi à l'ordre de leur père ». Qu'en est-il du peuple de Juda, du peuple élu ? Dieu n'a cessé de leur envoyer ses serviteurs et ses prophètes, pour leur dire « repentez-vous, réformez votre conduite, fuyez les baals et les astartés ». Mais en vain ; autant en emporte le vent. Les Récabites ont écouté la voix d'un homme ; vous, vous fermez vos oreilles à celle de Dieu. Quelle responsabilité! *Mais ce n'est pas en vain, d'autre part, que l'on écoute les appels de Dieu. En réponse à leur fidélité, les Récabites seront bénis de 'l'Eternel.

Quant aux Juifs, parce qu'ils ne veulent point se repentir, parce qu'ils ne veulent point passer par la voie d'humiliation ; parce qu'ils ne veulent pas faire le pas décisif en renonçant aux idoles, Jérusalem sera détruite, le peuple connaîtra les horreurs de la déportation et de l'exil, alors que Récab verra sa postérité assurée ce qui pour u Juif n'était pas une petite bénédiction.


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Destruction de Jérusalem et exil.

(Il Rois 25 : 1-21. Ps. 137 : 1-6).

La ruine du Temple

Fut-il jamais un peuple qui entendit la voix de Dieu comme tu l'as entendue ? (Deut. 4 : .83).

Nous avons à parler de la terrible catastrophe qui atteignit Jérusalem en 586.

Sédécias dont il a été souvent question à propos de Jérémie, est sur le trône. Pour son malheur, et celui de la ville, il n'écoute pas le prophète, mais ses compagnons ambitieux et animés d'un faux patriotisme. Ses amis font miroiter à ses yeux l'indépendance, la liberté, la souveraineté. Sédécias se révolte contre le roi de Babylone Nebucadnetsar.

Le roi de Babylone, dont la puissance était aussi grande que la cruauté, se met en marche contre Jérusalem avec une armée formidable. Il campe devant les murs de la cité réputée imprenable. Le siège dure environ deux ans. Ce qui décida de la victoire des envahisseurs, ce fut la famine qui sévissait dans le camp des Jérusalémites. Les précautions n'avaient pas été prises.

Les Caldéens font une brèche à la muraille, par laquelle ils pénètrent dans la ville. Jérusalem était située sur des rochers ; le Temple et la citadelle étaient presqu'inaccessibles. Les Caldéens eurent cependant raison de ces protections naturelles.

Le peuple et les guerriers s'enfuient de nuit par une porte près du jardin du roi. Ils sont poursuivis et rejoints par les sauvages guerriers de Nébucadnetsar.

Le roi Sédécias est saisi, on égorge ses fils en sa présence, puis on lui crève les yeux. Le capitaine des gardes du roi de Babylone fait emporter les objets précieux du Temple, qui est ensuite brûlé. Il fait également brûler les maisons des notables ; il détruit les murailles. Il emmena en captivité femmes et enfants. Jérémie estime à quatre mille six cents, le nombre des déportés. Mais Israël ne faisait que commencer de souffrir. Le vainqueur n'était pas clément pour les vaincus. A l'esclavage ignominieux s'ajoutaient mille vexations, mille humiliations. Et les séparations douloureuses du mari et de la femme, de la mère et de ses enfants. Tout cela, parce que Dieu a parlé, et l'on n'a pas écouté.

Oh ! les conséquences de la révolte ! Ce n'est pas seulement la génération infidèle qui en portera les conséquences, mais les enfants, les petits-enfants et plus loin encore.

Toute joie a disparu, Toute espérance semble morte : « Comment chanterions-nous les cantiques de l'Eternel, sur la terre étrangère ? » L'Eternel, cependant, n'abandonnera pas son peuple, et le chemin de la souffrance sera aussi le chemin de retour au Dieu qui n'humilie pas à plaisir ses enfants.