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Le pardon des offenses.

 

Un bon quaker voyait chaque jour le blé de son grenier diminuer. Il pensa que, pour le prendre, le voleur passait le bras par la lucarne. Son premier mouvement fut d'agir avec rigueur. Puis il réfléchit et se dit à lui-même :

Si je le dénonce, qu'apprendra-t-il en compagnie des autres voleurs ? Certainement, elle ne lui fera que du mal. Si je prends mon fusil et que je le tue, je suis un criminel ; que puis-je faire pour l'aider à se repentir ?

Après mûres méditations, il prit une corde et forma un noeud coulant à la lucarne, puis alla se coucher paisiblement.

Dès l'aube du jour, il se leva et se dirigea vers le grenier. Son voleur était pris par le noeud coulant et ne pouvait plus retirer sa main

- Ah ! ah ! dit le bon homme, si tu n'avais pas pensé à mal faire, tu ne serais pas en cette fâcheuse position ! Voyons, que je te délivre. Pourquoi donc es-tu venu voler mon blé ?

- Monsieur, dit le malheureux tout confus, je suis un pauvre, père, de famille du village et je n'avais pas de pain pour mes enfants...

- Bien, bien, et tu as songé à me voler ? Si tu étais venu de jour me raconter ta misère, je ne l'aurais pas refusé du blé. - Et en disant cela, il dénouait la corde lentement. Quand il eut fini, le voleur se disposait à s'enfuir.

- Arrête, tu dis que tu n'as pas de pain pour tes enfants ? Viens et ouvre ton sac pour que je le remplisse.

Quand le sac fut plein, le coupable, mis a la torture par tant de bonté, remerciait et voulait se retirer :

- Oh ! mon ami ! ce n'est pas tout ! dit le quaker ; tu vas venir déjeuner avec moi...

Il parla avec et pauvre homme durant tout le repas, ce qui le mettait au désespoir beaucoup plus que des reproches. Ce fut ainsi qu'il accomplit cette parole de l'Ecriture :

« En faisant cela, tu lui amasseras des charbons de feu sur la tête. » (Rom. XII : 20).


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Un réveil en Israël.

(I Samuel 7 : 1-17.)

 

Il y avait déjà vingt ans que Samuel était juge en Israël. Bien des événements s'étaient passés depuis la mort d'Héli. L'arche qui avait été emmenée en exil avait été rendue par les Philistins. Ceux-ci continuaient d'être les maîtres de la situation et semaient la terreur parmi les Israélites. Le moral du peuple était très bas ! Or, Samuel ne désespérait point. Il avait la certitude que le mal n'était pas sans remède ; il savait qu'un ennemi Plus redoutable que les Philistins faisait le malheur de son peuple : l'immoralité et l'impiété. Samuel se donna pour tâche de supprimer les idoles cananéennes qui n'avaient que trop d'adorateurs en Israël. Otez, ne se lassait pas de dire le vaillant prophète, ôtez du milieu de vous les dieux étrangers. Il disait aussi : Dirigez vos coeurs vers l'Eternel, et servez-le lui seul. (I Sam. 7 : 5.) Puis, quand Samuel estima ses conseils suffisamment entendus, il prit l'initiative de réunir une imposante assemblée qu'il convoqua dans une petite cité de la tribu de Benjamin : Mitspa. Ce lut une émouvante solennité. Tandis que Samuel, en une fervente prière, invoquait le Tout Puissant et le suppliait d'avoir pitié de son peuple et de lui donner la délivrance, les assistants, sans doute pour manifester leur repentir, puisaient de l'eau et la répandaient en répétant tous ensemble : « Nous avons péché contre

Comme Mitspa ne se trouvait pas très loin de la frontière des Philistins, ceux-ci ne tardèrent pas à apprendre qu'une grande foule d'Israélites étaient rassemblés dans leurs parages. Ils s'imaginèrent qu'il s'agissait de la préparation d'une expédition militaire et se préparèrent à l'attaque. Si l'attitude des Hébreux devant la menace philistine révèle une inquiétude. bien légitime, elle en dit long aussi sur les sentiments de piété du peuple qui demanda à son prophète d'invoquer le secours divin. Un sacrifice fut offert à l'Eternel et la réponse d'En-Haut ne se fit pas attendre. Un violent orage éclata, qui sema la panique chez les adversaires philistins. Lee Israélites n'eurent qu'à poursuivre les fuyards et remportèrent une belle victoire.

C'est à la suite de ces événements que Samuel dressa, non loin de, Mitspa, une modeste stèle commémorative à laquelle fut donné le nom d'Eben-Ezer, c'est à dire « pierre du secours »...

Et nous, amis lecteurs, n'avons-nous donc jamais bénéficié de la divine protection ? N'avons-nous pas quelques bonnes raisons de dire avec Samuel au lendemain de Mitspa :

Jusqu'ici l'Eternel nous a secourus. (I Sam. 12 : 20.)


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Abdication de Samuel.

(I Sam. 8 : 1-9 ; 10 : 17-27 ; 12 : 1-5.)

 

Après avoir vu Samuel enfant, Puis dans la force de l'âge, nous le retrouvons vieillard. Il y a bien longtemps que, de la part de 'l'Eternel, il préside aux destinées du peuple. Il n'a plus la vigueur d'autrefois, le vénérable prophète : et puis, triste rapprochement, ses deux fils sont, comme le furent ceux d'Héli son prédécesseur de mauvais fils, qui sont loin de marcher sur les traces de leur père. Le peuple trouve sans doute le vieillard bien austère et vieux jeu : pourquoi ne ferait-on pas comme les autres, pourquoi n'aurait-on pu un souverain ? Une délégation est envoyée à Samuel : il est âgé, qui désignera donc un roi !

Si Samuel finit par céder à la pression populaire, ce n'est certes pas facilement. On aurait tort de penser que c'est là l'opposition du chef mis de côté ; les prophètes israélites n'ont jamais eu grande ,sympathie pour la royauté, pour eux, un seul est roi d'Israël, c'est le Dieu Tout Puissant. En outre, Samuel n'est pas sans prévoir d'autres inconvénients. L'organisation royale coûtera cher au pays, les Israélites perdront quelque chose de leur liberté personnelle, mais Samuel a l'intelligence assez ouverte aussi pour ne pas se rendre ,compte, qu'avec la monarchie, le pays sera plus uni, plus fort pour résister aux attaques des adversaires du dehors. L'établissement de la royauté a ceci de commun avec toutes les institutions humaines, il y a le pour et le contre...

Que fera Samuel ? Son attitude est admirable. C'est à Dieu qu'il demande des directions avant de s'effacer devant le souverain. Il convoque les tribus d'Israël à Mitspa, la localité où avait eu lieu précédemment une grande réunion du peuple humilié. Et là, on procéda à une sorte de tirage au sort. La tribu de Benjamin lut d'abord désignée pour donner un roi au peuple, et, parmi les Benjamites, Saül, fils de Kis, lut élu. La beauté et la haute taille du premier roi d'Israël le rendirent tout de suite populaire. Samuel dit au peuple : « Voyez-vous celui que l'Eternel s'est choisi ? Il n'a pas son pareil dans le peuple entier. » Tous l'acclamèrent en criant : « Vive le roi ! » Et Saül montre son bon naturel en faisant semblant de ne pas entendre les propos de quelques mécontents, des jaloux sans doute, qui se moquaient de lui.

L'heure de la retraite a maintenant sonné pour le vieux lutteur. Il se fait rendre par le peuple le témoignage qu'il a toujours agi avec honnêteté. Désormais, Samuel servira ses compatriotes en, invoquant pour eux le Dieu qui pardonne ! Voici un conseil du noble vieillard :

N'ayez point de crainte : vous avez fait tout ce mal, mais ne vous, détournez pas de l'Eternel. (I Sam. 12 : 20.)


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Pour une miche de pain.

 

Une après-midi de congé tombant en pleine saison d'école, quelle aubaine ! Le maître était malade. Hélas ! je me souviens avec confusion que nous ne songeâmes guère à le plaindre, trop heureux que nous étions de cette liberté inattendue coïncidant avec une merveilleuse journée de printemps. Vous savez, une de ces journées où l'on De tient pas en place, parce que toute la nature en fête vous invite à la vie, au mouvement, à la joie.

Nous voilà, un ami et moi, par monts et par vaux. Le but de la course est un village distant d'une quinzaine de kilomètres où mon camarade veut aller rendre visite à une parente âgée. Quinze kilomètres ! pensions-nous au départ, ce m'est rien pour nos jambes et nous allons les avaler de la belle façon. Mais voilà... ce coquin de soleil printanier vous a des ardeurs vraiment accablantes ; le doux zéphyr emplit les poumons, oui, mais aussi creuse l'estomac, et d'accord avec le soleil, donne là soif et casse les jambes. Bref, ce fut, traînant la patte et tirant la langue, que nous arrivâmes à destination.

La parente en question se trouva être une brave et digne femme que l'âge et les privations avaient déjà bien usée. Nous la trouvâmes à la fabrique où, malgré ses cheveux gris qui auraient dû lui donner droit au repos, elle allait travailler chaque jour pour gagner quelques sous. Oh ! bien peu, car, à cet âge, que peut-on faire ? Les doigts sont roides, la vue baisse, le corps se courbe alors que, pour suivre la navette qui court sur le métier, tissant les jolis rubans de soie et pour mettre en mouvement toute la machine, il faut de la force, de l'agilité et de l'oeil. Pauvre vieille ! on l'employait par pitié, et, par pitié aussi, on lui remettait un tout petit salaire.

Elle nous accueillit à bras ouverts et se fit un devoir de nous dévoiler, selon sa sagesse, les mystères de la fabrication des rubans. Nous n'y comprîmes pas grand'chose :et nous n'y vîmes rien d'intéressant pour la bonne ou la mauvaise raison que la faim nous ouvrait la bouche, mais nous fermait les yeux et les oreilles

Enfin, après qu'elle eût demandé congé à son directeur, la bonne vieille nous invita à aller manger quelque chose chez elle. Ah ! voilà qui était clair et qui trouva un écho dans... nos coeurs ! Nous, nous rendîmes à son logis. Il était petit comme elle et pauvre comme elle: une mansarde basse, mal éclairée, chétivement meublée, servant de cuisine et de chambre à coucher. Pour tout régal à ses jeunes invités, la grand'mère sortit de son armoire une miche de

pain non entamée. Lisant peut-être dans nos yeux d'enfants quelque désappointement à la perspective de ce frugal repas, elle se mit à s'excuser timidement de sa pauvreté puis, saisissant la miche, elle resta un moment les mains posées dessus et adressa à Dieu une prière pour le bénir de cette nourriture qu'Il lui accordait dam son amour.

Avec quelle émotion j'entendis ces paroles ! Gomment ? voilà une femme qui n'avait qu'un pain et pas d'argent pour acheter autre chose ; qui était sans ressources assurées pour le lendemain ; usée par le travail sans être malade à pouvoir penser que bientôt la mort la mettrait à J'abri de toute inquiétude ; plus que pauvre puisqu'elle était dans la misère et elle bénissait Dieu de ce peu avec la même ferveur que si c'eût été l'abondance et la richesse ! Quelle foi et quel amour, chers enfants ! Quel exemple pour ceux qui mangent, boivent, grandissent joyeusement sous la protection de leurs parents, pouvant tout espérer d'un avenir pour lequel on les arme chaque jouir et qui ne sont muets que devant Dieu, pour remercier. et pour louer !

Quinze ans se sont écoulés depuis le jour où cette scène s'est passée. Jamais, où que j'aie été et même dans les milieux les plus luxueux, je n'ai fait d'aussi bon repas que celui que je fis avec le pain de la veuve chrétienne. Souvent encore, je songe à elle avec reconnaissance pour la leçon quelle m'a donnée et je la revois quand je veux devant moi, courbée, ridée, mais rayonnante de foi ! Il m'est doux alors de me dire : Elle n'a jamais manqué de Tien, puisqu'elle avait trouvé la seule chose nécessaire.

J. V.


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En face de la mort.

 

Prisonnier du roi Jean d'Abyssinie et appelé à comparaître devant lui, Gordon prit la chaise qu'on lui avait préparée et vint la placer à côté du fauteuil royal.

- Savez-vous que je pourrais vous tuer sur le champ, si je le voulais, lui dit le monarque.

Je le sais parfaitement, sire. Je suis prêt.

Quoi, reprit le roi, prêt à recevoir la mort !

Certainement ! Je suis toujours prêt et j'estime que vous m'accorderiez une faveur, car vous me délivreriez de toutes les épreuves que l'avenir me réserve.

Le monarque était confondu - - Ainsi, ma puissance ne vous effraie pas ?

- En aucune manière, répondit laconiquement Gordon.

 


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Le roi Saül.

(I Samuel 16 et 17).

Samuel présente Saül au peuple

 

L'homme regarde ce qui frappe les yeux, mais l'Eternel regarde au coeur. (I Sam. 16 : 7).

Saül était grand et beau. En le proclamant roi, Samuel était plein d'espoir. Ses illusions devaient, hélas, tomber l'une après l'autre. Le, vieux prophète allait se rendre compte que le grand homme n'était qu'un homme grand, ce qui est tout autre chose ; quant à la beauté du roi, elle n'était que corporelle...

Saül avait reçu l'ordre - la cruelle mesure guerrière de « l'interdit » était parfois prise à l'époque où nous sommes - d'anéantir, corps et biens, la tribu pillarde des Amalécites. Une éclatante victoire ayant été remportée par ses troupes, Saül donna l'ordre d'épargner le roi amalécite et les meilleures pièces de ses troupeaux. Il va sans dire qu'aucun sentiment de pitié n'entra dans la décision de Saül, qui fut poussé au contraire par le désir de paraître et de s'enrichir. Tenir entre ses mains son puissant ennemi vaincu, quelle gloire... et, quelle bonne affaire que celle de mettre de côté une belle partie du butin !

Prévenu, Samuel ne tarda pas à intervenir énergiquement auprès du roi pour lui faire comprendre la gravité de sa faute. En présence du prophète, Saül eut une attitude assez pitoyable : il chercha des excuses en essayant de rendre le peuple responsable de la faute commise ; d'ailleurs, ajouta-t-il, le bétail que nous avons mis de côté sera offert en sacrifice à l'Eternel... La fière réplique de Samuel est digne d'être rappelée : L'obéissance, dit le prophète, vaut mieux que le sacrifice, la soumission vaut mieux que la graisse des béliers. Puisque tu as rejeté la parole de l'Eternel, conclut le vieillard, il te rejette aussi et te dépouille de la royauté.

La terrible menace ne se réalisa pas immédiatement. Pendant un certain temps encore, Saül régna, mais il était triste et inquiet. Il savait bien que Samuel ne radotait pas, que, tôt ou tard, le malheur fondrait sur lui et qu'un autre prendrait sa place. Saül ignorait naturellement la démarche que Samuel fit dans la suite auprès d'un homme de Bethléhem, nommé Isaï, démarche qui n'avait pas d'autre but que la désignation du successeur du souverain israélite. Isaï avait huit fils qui, les uns après les autres, défilèrent. Les aînés étaient de fort beaux hommes ; pourtant, aucun ne fut choisi. « Ce qui se voit ne compte pas pour l'Eternel » , le cadet, le Petit berger David, fut désigné. On peut supposer que, pas plus que les membres de sa famille, il ne se rendait compte du destin qui l'attendait, tandis que le prophète implorait sur lui la bénédiction du Tout Puissant. La suite du récit biblique nous montre en effet le jeune David jouant de la harpe aux pieds de son roi...


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L'enfance et la jeunesse de Luther.

 

A la fin de sa vie, lie grand Réformateur Luther eut chez lui, à Wittemberg, des étudiants pensionnaires. Ils l'admiraient tant, qu'ils écrivaient sur des cahiers tout ce qu'ils lui avaient entendu dire dans la conversation. Dans un de ses « Propos de table », Luther, un jour, s'étonna de sa destinée :

« Je suis fils d'un paysan ; mon père, mon grand-père, mon aïeul étaient de vrais paysans... Que je dusse être ensuite bachelier, docteur, etc., cela n'était point dans les étoiles. N'ai-je pas étonné les gens en me faisant moine ? Cela vraiment a bien affligé mon père et lui la fait mal. Ensuite, je me suis pris aux cheveux avec le pape. Qui a vu cela dam les étoiles ? Qui m'aurait annoncé d'avance qu'il en dut arriver ainsi ? »

Nous aussi, nous nous étonnons, quand nous pensons à la vie de Luther. On ne peut pas 'la raconter toute entière à des enfants. Ils n'en comprendraient pas certaines parties, mais d'autres les intéresseront, à commencer par son enfance et sa jeunesse.

Martin Luther naquit en 1483, le premier ou le second d'une famille de sept enfants. Ses ancêtres étaient, comme il le dit, des paysans, originaires de Eisenach (cherchez sur une carte) en Thuringe, au centre même de l'Allemagne. -Le père était mineur, travaillant dans ides' carrières de minerai de cuivre et ce fut pour exercer son métier qu'il allia s'établir (plus à l'Est, à Eisleben, sur les terres du comte de Mansfeld. Luther vînt donc au monde à Eisleben, mais ses parents se transportèrent presque aussitôt à Mansfeld. Assez pauvres d'abord, !lis parvinrent ensuite à une bonne aisance. Ils élevèrent leurs enfants avec une grande sévérité et Luther se rappelait avoir été fouetté jusqu'au sang pour une noix.

A l'école de Mansfeld, Luther apprit' à lire, à écrire ; un peu de latin s'ajouta à cela. Comme instruction religieuse : le "Notre Père", le "Je crois en Dieu...", les dix commandements, mais sans explication, et naturellement le culte catholique. Comme piété : la peur de Jésus-Christ, juge terrible, qui pouvait être cependant apaisé par la Vierge ou par les Saints, et (aussi des histoires du diable et des « kobolds » embusqués dans les mines sombres.

A 14 ans, l'enfant partit pour Magdebourg. Il y avait là une école dirigée par des moines pieux « les frères de la vie commune ». Chez eux les élèves trouvaient un toit et un lit, mais ils devaient se procurer leur nourriture en la demandant à la charité.

Un an plus tard, Luther était à Eisenach, dans une autre école, où les enfants vivaient de même. Par petites bandes, ils chantaient

dans les rues, riches ou pauvres, pour avoir leur pain. La femme d'un riche marchand, Ursule Cotta, se prit d'amitié pour le jeune Martin et le logea dans sa maison. Il eut de la sorte une vie plus tranquille et une éducation un peu plus soignée que ses camarades. Mais (différent en ceci de Calvin), il n'eut jamais, comme on dit, les « usages du monde ».

Il conserva toujours d'Eisenach un souvenir attendri. Il racontait que l'un de ses maîtres n'entrait jamais dans la classe sans quitter son bonnet devant ses élèves, dans la pensée que parmi eux quelques-uns deviendraient peut-être de grands personnages.

En 1501, ayant dix-huit ans, et une bonne tête, il partit cette fois pour une ville véritable, Erfurt, qui était très fière de :son université. Il était maintenant entretenu par son père, devenu fermier de deux fours à minerai, qui voyait déjà son fils savant dans la science du droit, et pourvu d'une bonne charge auprès du Comte de Mansfeld. Luther, sans doute, étudiait le droit, mais il suivait à l'Université, comme tous les étudiants, des cours de théologie. Il s'enfonçait dans les livres des docteurs « scolastiques » glu moyen-âge, pleins de discussions sans fin. Mais déjà on voyait apparaître des hommes qui à côté de cette étude en recommandaient une autre : celle des auteurs latins et grecs. Ceux-là, hommes de la « Renaissance » étaient des «humanistes », ils s'appelaient eux-mêmes les « poètes ». Ils faisaient des vers latins, et Luthier prit goût aussi à leur savoir.

En 1505, il avait obtenu, avec honneur, ses grades. Il semblait devoir marcher sur un chemin tout uni, ayant parmi (ses amis une bonne réputation de, « philosophe et de musicien ». Brusquement, à 22 ans. il entra comme moine au Couvent des Augustins d'Erfurt.

Pourquoi Luther s'est-il fait moine ? On ne sait pas grand'chose des sentiments pieux qu'il eut dans son adolescence. Ayant une voix exercée, il a chanté souvent dans les églises. Il a rencontré des prêtres sérieux et des moines épuisés par les souffrances qu'ils imposaient à ,leur corps. Il a entendu parler d'un moine emprisonné dans un couvent pour avoir eu le courage de blâmer les évêques impies. Pendant ses études, il a eu le bonheur de découvrir dans une bibliothèque une Bible en latin et il a été bien surpris d'y trouver beaucoup de récits dont on ne parlait jamais dans les églises et qui l'ont ravi. Mais il faut se !représenter qu'à côté de tout cela grandissait dans son coeur, peut-être sans qu'il s'en doutât, une piété profonde, sérieuse, qui ne lui permettait pas de plaisanter avec Dieu.

Il se blessa une fois avec son épée d'étudiant et manqua de mourir d'une hémorragie. Un de ses amis fut tué. Un jour enfin, près d'Erfurt, surpris par un violent orage, un coup de tonnerre faillit le foudroyer. Ce fut alors que sortit de ses lèvres un cri qui l'engageait pour toujours : « Sainte-Anne (c'était la sainte « patronne » des mineurs) secours-moi, et je me fais moine ! »

Comme tous les hommes pieux de son temps, il a été effrayé à la pensée qu'il pouvait mourir « sans préparation suffisante », et il a fait son voeu, poussé par une force « irrésistible ». Il aurait pu se faire « relever » de ce voeu par les autorités de l'Eglise. Son père l'aurait souhaité bien fort, car il n'aimait ni les prêtres ni les moines. Mais Luther avait promis. Il tint. La vie pieuse du moine était alors considérée comme celle qui menait le plus sûrement au ciel ; il ne l'aurait pas acceptée s'il n'avait eu le coeur rempli du désir de vivre saintement.

C'était au couvent qu'il allait découvrir qu'il y a une vie chrétienne plus profonde et plus vraie que celle du couvent. Sérieux, décidé, ardemment pieux, il suivit la voix de Dieu à mesure que Dieu lui montrait le chemin.

Ch. Bost.

Le château de la Wartburg, prison de Luther


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Luther et le paysan.

 

Un pauvre paysan saxon avait dû réciter devant Luther le symbole des apôtres en se servant du patois de son village

- Je crois en Dieu le Tout Puissant.

- Le Tout Puissant, reprit Luther, sais-tu ce que ce mot signifie ?

- Non, répond le paysan.

- Hélas ! mon brave homme, ni le docteur Jonas, ni moi, ni tous les savants du monde ne peuvent comprendre la puissance de Dieu. C'est pourquoi qu'il te suffise de croire, en toute simplicité, que Dieu est ton Père, bon et fidèle, le seul sage, le seul Seigneur qui peut et veut te garder en toutes choses, toi, ta femme et tes enfants.

 

Versets à apprendre :

Vous êtes sauvés par grâce, par la foi... c'est un don de Dieu. (Eph. 2 : 8).

Le juste vivra par la foi. (Rom. 1 : 17)