L'Ancien Testament, manuel d'écologie

 

La Bible comme une source de conseils spécialisés dans les questions d'environnement

Aloys Hüttermann (55 ans) est professeur de botanique à l'Université de Göttingen et catholique pratiquant. Pendant ses loisirs, il se penche sur le judaïsme et étudie intensivement la Bible. Il a fait une découverte étonnante: il a découvert dans l'Ancien Testament des connaissances écologiques parfaitement fondées. Après avoir quitté l'Egypte, les Juifs se rendirent en Palestine. Ils durent séjourner dans des contrées inhospitalières. Les terres fertiles étaient occupées par les Philistins.

La plupart des lieux mentionnés dans l'Ancien Testament se trouvent dans des massifs montagneux pauvres où seul un type d'épineux, la macchia, croissait à l'origine. «Les hommes qui y vivaient étaient en permanence au bord de la catastrophe écologique», explique Hüttermann. «Pour survivre, ils étaient contraints d'observer minutieusement la nature.» En conséquence, des règles écologiques strictes virent le jour. La consommation de viande de porc est strictement interdite aux Juifs. «L'élevage des porcins est un pur luxe», explique Hüttermann. «Pour obtenir un kilo de viande de porc, il faut trois fois plus de nourriture que pour le boeuf.» Par contre, les boeufs étaient les animaux les mieux à même d'exploiter les ressources disponibles, et étaient connus comme gros producteurs de protéines.

La liste des animaux interdits jouait pour ainsi dire un rôle de «liste rouge» motivée par l'écologie. Tritons, crapauds et grenouilles étaient considérés comme impurs. Ces mesures ont permis de lutter contre la malaria dans l'Israël antique. Les grenouilles sont les principaux prédateurs de l'anophèle, moustique agent de transmission du paludisme. Les vautours, corbeaux et corneilles étaient sous protection: c'était la police sanitaire. L'ensemble des oiseaux de proie ne pouvaient être chassés, car ils limitaient le nombre de souris. Les hérons et les ibis étaient les prédateurs privilégiés des sauterelles, forme antique de lutte biologique contre les nuisibles. «Non seulement les Juifs de l'Antiquité connaissaient le concept de la conservation des espèces, mais en outre, ils préservaient déjà le biotope», constate Hüttermann.

Dans le livre d'Esaïe, chapitre 5,8-10, il est écrit: «Malheur à ceux qui ajoutent maison à maison, et qui joignent champ à champ, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'espace, et qu'ils habitent seuls au milieu du pays! Voici ce que m'a révélé l'Eternel des armées Certainement, ces maisons nombreuses seront dévastées, ces grandes et belles maisons n'auront plus d'habitants. Même dix arpents de vigne ne produiront qu'un bath, et un homer de semence ne produira qu'un épha» «C'est un avertissement», prévient Hüttermann: «Une exploitation intensive des surfaces arables prive d'espace vital les prédateurs naturels des nuisibles.» La succession des plaies d'Egypte traduit également, selon Hüttermann, une connaissance approfondie de l'écologie: le Nil commence par se transformer en sang (1ère plaie) ... du sang qui, en réalité, est une invasion d'algues. Le manque d'oxygène qui en résulte fait sortir les grenouilles de l'eau (2ème plaie).

En l'absence de leurs ennemis naturels, les moustiques et taons (3ème et 4ème plaie) peuvent proliférer et transmettre les épidémies aux humains et aux animaux (5ème et 6ème plaie); enfin, les sauterelles s'abattent sur le pays (8ème plaie). Selon Hüttermann «les auteurs de la Bible avaient certainement connaissance des rapports de cause à effet». Les lois écologiques étaient strictement respectées, même si cela présupposait de nombreux inconvénients économiques. Ainsi, après la fin de la Révolte contre Rome (70 après J.C.), il fut interdit aux Juifs de posséder des moutons et des chèvres afin de ne pas dévaster davantage encore le pays détruit. Dans le Nouveau Testament, l'écologie ne joue plus aucun rôle. «Le judaïsme ainsi que le christianisme étaient des religions purement urbaines». Ce n'est qu'aux Xllème et XIIIème siècles que les théologiens chrétiens redécouvriront la nature. «Mais ils y ont eu accès par le philosophe grec Aristote», commente Hüttermann, «et non par la Bible». Hüttermann est le seul citoyen allemand à avoir été cité à l'International Council for Thora and Science pour ses recherches sur la Bible. (DW)

Nouvelles d'Israël 02 / 1994

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