La conversion d'un étranger
A - Les chemins de Dieu
Lecture préalable: 2 Rois 5.1-14
1. Un enfant de Dieu dans l'adversité
Les batailles étaient fréquentes entre Israël et la Syrie, et nombreux les incidents de frontière. C'est ainsi qu'une fillette israélite fut enlevée, déportée, et attribuée comme servante à Madame Naaman, dont le maréchal de mari commandait les troupes de Ben Hadad, roi de Damas. Régulièrement vainqueur sur les champs de bataille, Naaman jouissait d'une grande popularité ainsi que de la faveur de Ben Hadad, qui ne lui ménageait ni honneurs ni richesses.
Mais acclamations du peuple et félicitations du roi ne le déridaient pas, condamné qu'il était à une longue maladie, dégradante et douloureuse. Il était lépreux et aurait volontiers troqué sa glorieuse place contre celle d'un humble soldat, pourvu qu'il fût en bonne santé.
Il n'y avait ni radio ni télé chez les Naaman: alors le soir, à la veillée, on parle, totalement libre des contraintes et prétendues obligations de notre siècle. On ne parle même plus des victoires du maréchal mais de sa maladie incurable, et chacun s'en désole.
Cependant un détail va tout changer et introduire une histoire étonnante: la petite servante hébraïque faisait partie du cercle de famille et partageait ses soucis. C'était une prisonnière bien traitée qui dialoguait avec sa patronne. Or, un jour la fillette lui dit: Oh! si mon Seigneur était auprès du prophète qui est à Samarie, celui-ci le débarrasserait de sa lèpre! (v. 3)
Considérons l'exemple de cette enfant, sa sérénité dans un exil où elle nous paraît plus heureuse que ses maîtres libres. Jugez un peu: elle compatit au malheur des autres et plaide, non pour sa liberté, mais pour la guérison de son maître et... ravisseur. Pour elle, elle a l'Eternel, son prophète et son peuple. Dans les jours mauvais, ce sont des réalités qui subsistent malgré les circonstances, et elles seront à l'origine de la guérison de Naaman et de la paix de toute sa famille. C'est un grand témoignage d'un jeune enfant de Dieu: il y avait encore du bon en Israël.
Le chrétien possède une sérénité semblable, indépendante des circonstances de la vie, parce que sa vraie patrie est céleste et son Dieu fidèle. Aussi passe-t-il ici-bas comme étranger et voyageur, nanti de certains privilèges célestes qui lui permettent de compatir au malheur des incrédules.
2. Bien contre mal
Si puissant fût-il, Naaman n'était pas à l'abri de la lèpre: ses victoires n'amélioraient pas son état; il n'y avait pas de compensation. Sa mort inéluctable ne perdrait rien de sa laideur, la victoire dût-elle lui sourire encore. Il était à la fois le général en chef glorieux et le lépreux condamné, les deux extrémités de l'échelle sociale.
Devant Dieu, nos qualités possibles ne compensent pas nos défauts certains et une bonne action ne rachète aucun péché. Une seule transgression rend l'homme coupable devant la loi entière. Il est donc vain de se prévaloir d'une oeuvre, d'un don ou d'un talent qui, à notre avis, pourrait manquer à notre frère (Rom 3.21-24; Phil 2.3).
3. Le chemin du salut
Naaman a décidé de suivre le conseil de la fillette, mais il fera des erreurs de parcours, car il juge selon les valeurs païennes. Aussi l'Eternel corrigera-t-il sa route, et malgré quelques réticences, Naaman modifiera son appréciation des valeurs d'en haut.
C'est ainsi qu'il faut agir pour être sauvé: se convertir au Seigneur Jésus, ce qui conduira toujours à modifier notre échelle de valeurs et à suivre le Seigneur dans un chemin nouveau (Jean 14.6; Act 3.19; Mat 21.29).
Curieusement, pour rencontrer le prophète d'Israël, Naaman consulte... le roi de Syrie, qui lui donne une lettre de recommandation pour... le roi d'Israël. C'est tellement insolite que le roi d'Israël s'imaginera qu'on attend de lui-même la guérison du général. En réalité Naaman était plus près du prophète qu'il ne le croyait: il aurait pu se rendre chez lui directement, sans lettre de recommandation ni détours.
Les chrétiens savent qu'ils ont libre accès auprès du Seigneur. Pourtant ils peuvent commettre cette erreur qui consiste à chercher, jusque dans les affaires de Dieu, l'appui du monde et de ses puissants. Or, dans le domaine spirituel, seuls les moyens spirituels sont normaux, les autres sont une offense à la gloire de Dieu (Jér 17.5). En Israël, les prophètes oignaient les rois et leurs donnaient des instructions, et non l'inverse (1 Sam 16.13).
Mais dans les affaires du monde elles-mêmes, est-il souhaitable de rechercher l'appui de ses puissants, alors que le Seigneur est capable d'ouvrir ou de fermer n'importe quelle porte (Néh 1.11; 2.2; Apoc 3.8)? A l'inverse, solliciter l'aide du Seigneur «sous réserve de sa volonté» est un excellent moyen de connaître cette dernière pour notre projet (Apoc 3.8; 1 Jean 5.14).
Du reste, comment pourrions-nous la connaître, sa volonté, si au lieu de consulter le Seigneur nous nous adressons aux hommes qui ont le bras long? Quand le chemin convoité n'est pas celui de Dieu, admettons que la tentation existe d'insister et de passer outre (Nom 22.9-12, 18 s.).
Naaman part donc avec sa suite, sa recommandation royale et beaucoup d'or et d'argent. Un vent de corruption serait-il dans l'air? C'est vrai que les gens s'achètent: les indulgences, les situations, les services. Mais dans le domaine de Dieu, rien ne s'achète avec de l'argent ou des influences (Rom 3.24); le général est remis dans le bon chemin par l'émoi du roi d'Israël (Joram), et Elisée est informé de tout (on ne saurait se cacher de Dieu). Naaman commence à mesurer la sagesse de sa servante et la folie de ses propres combinaisons, mais son apprentissage avec le Seigneur n'est pas terminé. Le nôtre non plus d'ailleurs (Deut 17.18s.).
Il arrive enfin devant la porte du prophète et il attend (v. 9). Il attend peut-être que le prophète l'accueille en ouvrant la porte du carrosse (?); le protocole sans doute. Mais pensez donc, c'est le domestique qui sort, lui lance un laconique message (7 plongeons dans le Jourdain et tu seras guéri) et rentre à la maison sans autres politesses.
Fureur de Naaman: même dans son état désespéré, il n'oublie pas qu'il est un grand personnage. Et puis, cette médecine simpliste est méprisante pour son pays et ses richesses... Comme les puissants et les religieux, il aurait aimé faire quelque chose de difficile pour sa guérison et se parer d'un certain mérite. Mais là n'est pas le chemin de Dieu, et il devra encore apprendre. On ne peut venir à Dieu en conquérant, et le chemin de Naaman serait sans issue si ses serviteurs ne se montraient plus avisés. Ce sont eux qui le reprennent maintenant, et c'est une bénédiction pour Naaman de leur avoir concédé cette liberté de parole. Il les écoutera et sera guéri, totalement.
Le chrétien aussi est tenté de faire quelque chose pour sa propre gloire, pour montrer sa valeur et s'en prévaloir, ne serait-ce que dans son coeur. Se réserverait-il de pouvoir dire un jour: Seigneur! n'est-ce pas en ton nom que j'ai prophétisé, que j'ai chassé des démons, que j'ai fait des miracles? (Mat 7.22).
Remarquons que la foi de Naaman avait ses limites. Certes, il s'attendait à guérir (v. 11), mais il croyait que le prophète comptait sur la valeur de l'eau, et il n'avait pas plus confiance dans le Jourdain que dans le Parpar. Son opinion devait changer.
Ne faut-il pas modifier son opinion de temps à autre et abandonner ses idées anciennes, quitte à s'humilier un peu? (2 Ch 7.14).
Enfin, puisque c'est le Jourdain ou rien, Naaman s'y plonge comme prescrit. Sa foi hésitante le lui permet et le pousse ensuite à regarder sa peau malade pour voir si elle est guérie. «Oui, elle est guérie!» Mais s'il n'avait pas eu ce regard sur sa peau après le septième plongeon, tout aurait pu être différent. C'était le regard timide, interrogatif et nécessaire de celui qui ne peut plus compter que sur l'Eternel.
Il suffit que la foi ait Dieu seul pour objet, qu'elle permette de lui obéir, même en hésitant, de regarder ensuite le résultat dans sa vie et de reconnaître alors que Dieu est vrai et grand. On vient (ou on revient) au Seigneur: on sait bien quand c'est lui qui à tout dirigé, et personne ne peut le contester (Job 19.25 ss.; Jean 13.17).
4. Le conseil des humbles
Les non puissants, jeunes, étrangers et serviteurs, ont joué un rôle indispensable dans la guérison du général. Les conseils valables sont souvent venus de là. Naaman a pu être sauvé parce qu'il a écouté les humbles et suivi leurs conseils:
La fillette hébraïque, qui a annoncé la bonne nouvelle d'une guérison possible: si, traitée en otage, sans partage quotidien de la vie de famille, elle n'avait rien dit, Naaman aurait été perdu. Le domestique du prophète, qui a ordonnancé le remède: le prophète ne s'est même pas montré.
Les serviteurs du général, qui l'ont raisonné, calmé et encouragé: sans eux, Naaman aurait abandonné.
C'est toujours un grand risque que d'écarter la personne que nous estimons d'un moindre rang, d'un autre milieu que le nôtre, l'étranger, le pauvre, le chômeur, le marginal. A nos yeux myopes, ils sont les faibles du monde; or les conseils touchant à la vie spirituelle ne viennent pas que des savants. Pour nous aider, le Seigneur nous dépêche l'homme de son choix, sans favoritisme. C'est pourquoi les chrétiens ne peuvent mépriser qui que ce soit sans préjudice certain (Ecc 9.14-18).
5. La nouvelle naissance
La guérison physique de Naaman est un exemple imagé de la nouvelle naissance survenant dans l'âme qui se convertit au Seigneur Jésus.
Elisée joue le rôle de l'envoyé de Dieu (Jésus-Christ lui-même), et son domestique celui d'un chrétien qui donne l'indication nécessaire à qui est convaincu d'être perdu, Naaman.
Le Jourdain est un symbole de la mort, mais s'y plonger 7 fois ne parle pas de la mort physique du plongeur. Selon le langage de la Bible, il s'agit de cette autre mort (appelée seconde mort) qui est l'exclusion définitive du royaume de Dieu.
Ressortir vivant du Jourdain parle alors de la résurrection spirituelle immédiate dans une vie nouvelle, et de l'attente d'un corps parfait lors de la résurrection des croyants. Ce n'est pas le cas de la résurrection de Lazare, qui est retourné à son ancienne vie avec le même corps usé mais c'est le cas de la résurrection du Seigneur Jésus, le premier à revêtir le corps éternel des enfants de Dieu. Par son expérience, Naaman est entré juridiquement dans le peuple de Dieu, et c'est aussi juridiquement qu'est sauvé, corps et âme, quiconque accepte que Jésus soit son Sauveur et son Maître (Jean 3.16).
B - Un homme nouveau
Lecture préalable: 2 Rois 5.1-19
- Le chemin parcouru par Naaman jusqu'à sa guérison est comparable à celui d'un homme qui, aujourd'hui se convertit au Seigneur Jésus.
- Le chemin parcouru après sa guérison est celui du nouveau chrétien qui débute dans la vie nouvelle.
La médecine du prophète s'est révélée une médecine d'humilité et d'humiliation:
- Naaman a appris l'inutilité de la fortune et des puissants dans le domaine de Dieu;
- il a été traité comme le moindre de ses soldats;
- il a renoncé à son nationalisme pour chercher la guérison chez l'ennemi, en Israël, auprès du prophète de Yahvé - les conseils nécessaires lui ont été dispensés par des domestiques;
- et il a plongé 7 fois dans le Jourdain, remède incompréhensible et peu glorieux.
1. Une guérison parfaite
Curieusement, Naaman guéri sera en meilleure santé que s'il n'avait jamais été malade! En effet, sa peau est devenue comme celle d'un enfant, sans ride ni bouton.
C'est ainsi que Dieu guérit nos péchés et leurs séquelles. Il ne voit pas ses enfants dans leur condition présente, avec leurs faiblesses et leurs échecs: grâce à la croix, il les voit parfaits, comme ils seront demain au ciel. Car si Dieu déteste le péché, il aime l'homme (1 Jean 4.10; Eph 5.27). Et il ne s'agit pas seulement de l'âme, mais aussi de notre corps, que le Seigneur transformera en le rendant semblable à son corps glorieux, par le pouvoir efficace qu'il a de s'assujettir toutes choses (Phil 3.21).
Dieu efface nos transgressions comme un nuage et ne s'en souvient plus. Qui aime la nature a remarqué qu'après la pluie, le ciel est plus pur et l'air plus limpide qu'avant l'arrivée des nuages. Ainsi le ciel, comme la peau de Naaman, est une image de la perfection du salut (Es 44.22).
2. Le premier fruit de la vie nouvelle
Après sa guérison, Naaman ne se hâte pas de rentrer chez lui; il retourne chez l'homme de Dieu. Ce n'est pas une simple visite de politesse; il a envie de revoir le prophète pour quelque chose d'important: lui dire que sa guérison va plus loin que la peau. Non seulement cette dernière est nouvelle, mais son être entier est nouveau.
Il est normal d'avoir quelque chose à dire au Seigneur, car la guérison de l'âme se répercutera dans nos actes et nos paroles. La vie étant nouvelle, les goûts seront nouveaux, l'importance relative des choses se modifiera, et ces changements engendreront un nouveau comportement perceptible aux autres (Mat 7.16). Alors, si le Seigneur a effacé nos péchés, ne nous éloignons pas de lui. Il trouverait anormal de ne plus nous voir, de ne plus nous entendre.
3. Un témoignage
Arrivé devant le prophète, Naaman déclare: Voici, je reconnais qu'il n'y a point de Dieu sur toute la terre si ce n'est en Israël (v. 15). Voilà une belle déclaration de foi qui glorifie Dieu seul et balaye les idoles. Elle est étonnante de la part du général syrien qui fait la guerre au peuple de Dieu, mais l'Eternel peut transformer n'importe quelle âme de bonne volonté.
Remarquons aussi que Naaman ne confesse pas timidement le Dieu d'Israël, il prend position devant toute sa suite pour déclarer qu'il a trouvé le vrai Dieu: Maintenant je sais, dit-il (TOB).
Nous retrouvons ces deux attitudes dans le témoignage du chrétien:
- quoique que l'on fasse, faire tout pour la gloire de Dieu (1 Cor 10.31),
- être toujours prêt à justifier notre espérance, avec douceur et respect, devant ceux qui nous en demandent compte (1 Pi 3.15s TOB).
4. Le départ dans la vie nouvelle
Après ces premiers pas qui démontrent la transformation de son coeur, Naaman se prend en charge et jette les bases du départ dans sa nouvelle vie. Elles seront définies par trois petites scènes caractéristiques et probantes.
1. Naaman veut faire au prophète un cadeau qui est catégoriquement refusé. C'est la douche froide. Que se passe-t-il chez le prophète?
Peut-être pense-t-il à cette parole: Tu ne recevras pas de présent; car les présents aveuglent. les clairvoyants et pervertissent les paroles des justes (Ex 23.8). Mais il y a très probablement plus: Elisée reste sur le terrain de la grâce et refuse le cadeau parce que Naaman risquerait de croire que sa guérison peut se monnayer.
L'oubli que le salut de Dieu est un don gratuit serait une grave amputation à sa gloire éternelle (Apoc 5.6,9). Celui qui a été racheté par le Seigneur lui est redevable éternellement, et de plus on ne rembourse pas une dette céleste avec des biens terrestres. D'autant plus que .c'est Dieu qui nous a prêté ce que nous pourrions donner (Eph 2.8ss). Que penserions-nous d'une personne qui nous donnerait en cadeau un objet que nous lui avions prêté?
Ensuite une telle optique pourrait conduire à la pensée que l'on doit conserver le salut par les oeuvres, alors que celles-ci n'en sont que le fruit normal.
Enfin le don souhaité en reconnaissance, c'est notre coeur et notre être entier, bien que de droit ils appartiennent aussi à Dieu (Mat 22.37).
2. Remarquons la réponse de Naaman, car elle prouve qu'il a compris la démarche du prophète: Puisque tu refuses tout cadeau..., dit-il (F. C.). Il va faire une meilleure proposition. Vu que l'Eternel ne veut pas de ce cadeau de riche, il demande de la terre du pays, un morceau d'Israël en quelque sorte, pour l'emporter en Syrie afin d'y construire un autel, car il ne veut sacrifier qu'au seul Dieu d'Israël. Symboliquement il place son autel sur la terre d'Israël, au pays de Yahvé, ce qui nous parle du sanctuaire céleste où nous pénétrons déjà par la foi, bien que nos pieds soient encore en terre étrangère (Héb 10.19).
Naaman nous étonne, mais l'Eternel regarde au coeur sans tenir compte des temps d'ignorance, et Elisée ne fait là aucune objection (Act 17.30).
Nous suivons la pensée du Syrien: «Ce n'est pas un présent matériel qui plaît à Dieu? ce qu'il veut c'est moi-même? Eh bien qu'il en soit ainsi, je vais l'adorer lui seul!» Sa proposition révèle le changement de son coeur. Désormais il y aura dans sa vie un «autrefois» et un «maintenant». Autrefois, il était ennemi d'Israël, tout y était inférieur à son pays: l'Eternel, son prophète, ses habitants, même le Jourdain. Maintenant, il réalise qu'il était étranger à Israël où tout est meilleur: Dieu, le peuple, le pays. Aussi Elisée lui donne-t-il de bon coeur la terre demandée (Eph 5.8).
3. Enfin une ultime pensée traverse l'esprit de Naaman: Rimmon, l'idole! Certes Naaman ne lui offrira pas de sacrifice, ce ne sera plus que le dieu de son roi (v. 18, F C.), mais Naaman est lié à un service protocolaire, inclus dans sa fonction de général des armées. Le roi s'appuie sur lui pour manifester qu'il s'appuie sur son armée. C'est la première ombre qui ternira son culte à l'Eternel et le fera soupirer après la perfection. Cependant il ne déclare pas rejeter ce protocole qu'il déplore, il n'en voit pas encore le moyen et il sollicite le pardon de Dieu pour cette obligation qui maintenant lui déplaît: Que l'Eternel pardonne à ton serviteur, dit-il. Il est conscient de n'être pas digne de s'appeler le serviteur de l'Eternel, alors il se nomme le serviteur du serviteur. Et puis il souligne son changement de camp: d'ennemi il est devenu serviteur.
Elisée observe la transformation qui s'opère dans l'esprit de Naaman, sans l'ordonner ni la préconiser, et il répond simplement: Va en paix. A chaque jour suffit sa peine pense-t-il certainement (Mat 6.34): en temps voulu l'Eternel donnera à Naaman de nouvelles instructions; pour le moment il l'a guéri et l'a accepté tel qu'il est. C'était déjà la grâce offerte aux nations, et il fallait un prophète pour faire cette réponse: Va en paix (Act 10.35).
Naaman vient de commencer une nouvelle vie, différente et certainement mouvementée. Va-t-il un jour cesser d'entrer chez Rimmon? renoncer à sa situation? refuser de faire la guerre à Israël? s'exiler? Il ignore où Dieu le mènera; nous le saurons plus tard.
5. Un enseignement actuel
La condition nouvelle de Naaman, encore ambiguë, nous instruit.
1. Elle nous rappelle que nous sommes venus au Seigneur tels que nous étions, si ternes fussions-nous spirituellement. Le Seigneur nous a sauvés et nous a chargés d'un fardeau léger, à notre mesure. Ce fardeau évoluera ensuite, mais nous n'aurons jamais été seuls à le porter (Mat 11.30).
2. De même qu'Elisée n'avait pas le droit d'augmenter lui-même le fardeau de Naaman, nous n'avons pas le droit d'ajouter au fardeau d'autrui (Mat 23.4). D'aucuns exigeraient presque que, même avant de se convertir, l'homme se réforme et devienne quelqu'un de parfait, alors que Paul écrit: Faites bon accueil à celui qui est faible dans la foi (Rom 14.1).
Le Seigneur conduit chacun de nous dans le chemin qui monte en partant de la croix. S'il l'a fait jusqu'à ce jour, il continuera à le faire. «Allons en paix», comme Naaman qui avait devant lui de grands problèmes. «Allons en paix avec le Seigneur.»
Ensuite n'oublions pas que le Seigneur continuera aussi à conduire chacun de nos frères. Alors faisons confiance à notre frère pour ce qui le concerne, comme Elisée a fait confiance à Naaman; car le Seigneur s'occupe de lui (Rom 8.14).
En ce qui concerne Elisée, on pouvait supposer que son comportement bourru était motivé par la présence du général ennemi. Mais non; conduit par son Dieu, il agissait pour apporter au Syrien une guérison plus importante que celle qu'il était venu chercher.
Enfin l'homme ne peut pas se tourner vers le Seigneur pour être sauvé sans envisager un changement d'optique, une nouvelle échelle de valeurs engendrée par la connaissance personnelle du Tout-Puissant (2 Cor 5.17).
Henri Larçon
Promesses 1991 - 1 / No 95 - 96