Le nom « Deutéronome » donné au dernier livre du Pentateuque par les traducteurs grecs des Septante, vient du grec et signifie « seconde loi ». Non pas qu'il s'agisse d'une seconde législation, mais d'une répétition de la Loi unique.
C'est un ouvrage où dominent les prescriptions législatives. A l'inverse du livre des Nombres, ces lois ne sont pas ici enchâssées dans des récits se rapportant au séjour au désert. Il y a seulement quelques narrations concernant l'activité d'Israël dans les plaines de Moab et aboutissant à la mort de Moïse. Ce sont des discours qui encadrent les codes et qui précisément donnent ce qu'on pourrait appeler la spiritualité des événements vécus par Israël. Placés sur les lèvres du grand législateur, ils entendent bien donner sa pensée profonde. Littérairement on distingue le code deutéronomique proprement dit, qui couvre les chapitres de 12 à 26, des discours d'introduction qui comprennent les onze premiers chapitres, et des discours de conclusion qui se terminent avec le chapitre 30. Dans une seconde partie, très brève (chapitres 31 à 34), sont rapportés un certain nombre d'événements qui concernent la fin de la vie de Moïse.
Devant cette abondance de textes législatifs portant sur des sujets déjà évoqués, on pourrait craindre que la lecture de ce livre soit bien austère et de peu de profit. Bien au contraire, c'est un des plus passionnants de l'Ancien Testament.
La « crainte de Dieu » se confond avec« l'amour de Dieu » Elle permettra peut-être de faire notamment justice du slogan : « Ancien Testament = loi de crainte », quand on rencontrera par exemple le passage magnifique du chapitre 6 : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur. » On y découvrira aussi la nature des relations que Dieu a nouées avec les siens : l'élection d'Israël pour être le peuple de Dieu; mais élection gratuite où l'amour divin est seul en cause; mais élection exigeante car elle implique que les conditions de l'Alliance soient fidèlement remplies. Dans l'ensemble de ces lois la Parole de Dieu s'adresse au plus intime de l'homme et se rappelle constamment à lui : « Garde-toi d'oublier le Seigneur ton Dieu. » Le Deutéronome livre encore le sens des événements du désert.
L'auteur y parle d'une double épreuve. Les Israélites ont mis Dieu à l'épreuve par leurs murmures. Mais Dieu a voulu aussi éprouver son peuple : les quarante années de vie difficile dans la « terre de sécheresse et de ténèbres » étaient destinées à révéler le coeur d'Israël : « Allais-tu ou non garder les commandements (de Dieu) ? » Le don de la manne enfin voulait faire comprendre que « l'homme ne vit pas seulement de pain, mais... de tout Reste une dernière question : que penser de tous ces discours attribués à Moïse lui-même? Celui-ci n'en est certainement pas l'auteur au sens le plus serré du terme, d'autant que styles et mentalités sont divers, que l'ouvrage n'a pas été écrit d'un seul jet, et que bien des décisions juridiques s'appliquent à un état économico-social différent de celui du désert. Et cependant on sent partout le désir de sauvegarder la pureté de la religion telle que l'avait voulue le fondateur : c'est dans cette ligne qu'il faut envisager par exemple la loi de l'unité de sanctuaire qui sera réalisée avec l'érection du temple de Jérusalem, et l'attitude ce qui sort de la bouche de Dieu ».
... On pourrait donc se représenter ainsi les différents moments de la composition : A la base, des collections de solutions juridiques données par les Lévites dans l'esprit de Moïse, et conservées, après le schisme, dans le royaume du nord. Ces collections, apportées à Jérusalem après la destruction de Samarie (721), auraient été encadrées par les discours attribués à Moïse. L'ensemble (du chapitre 5 au chapitre 29) aurait été retrouvé en 621 dans le temple de Jérusalem. Enfin, durant l'exil, on aurait ajouté les chapitres de 1 à 4 et de 29 à 33. C'est ainsi qu'aurait été obtenu le Deutéronome dans sa teneur actuelle.
J. DHEILLY Professeur à l'institut catholique de Paris.
En ce temps-là, la BibleNo 14 page IV.