Le messianisme d'Isaïe

 

L'apparition de l'Emmanuel, « Dieu avec nous » (Isaïe, chap. 7, vers. 14), né d'une jeune mère spécialement choisie, signifie l'ouverture d'une ère de félicité. On sait que la tradition chrétienne, à la suite de saint Matthieu (chap. 1, vers. 23), a vu dans ce passage l'annonce explicite de la naissance virginale de Jésus (voir No 56, page 1333)

Le poème qui, au chapitre 9, chante l'avènement de l'enfant messianique, insiste surtout sur la paix que celui-ci apporte au monde. Comme au premier chapitre de la Genèse la lumière fait soudain place aux ténèbres. Certains pensent que la mention des habitants du pays« des ombres de la mort »(vers. 2) pourrait signifier que la joie résultant de cette naissance s'étend jusqu'au séjour souterrain des défunts. Le prophète accumule les images pour donner une idée de cette allégresse sans précédent qui a pour raison d'être le passage de la servitude à la liberté et de la guerre à la paix parfaite : on brûle même les « vêtements maculés de sang » des soldats, parce que c'en est fait désormais de toute guerre. Nulle part l'accent n'est mis sur la toute-puissance politique du Messie. Toute idée de vengeance est exclue, puisqu'il n'y a plus ni tyrans ni violences.

Au chapitre 11, le royaume annoncé n'est déjà plus guère « de ce monde » jugeons plutôt : son roi est doué d'une force d'En-Haut. Il n'aura pas à combattre les méchants, il lui suffira d 'un souffle de sa bouche pour les faire disparaître (vers. 4). Ce n'est pas une épée, comme chez les princes de la terre, qui ceint ses reins, mais la justice et la fidélité (vers. 5). Il jouit d'une intuition qui l'affranchit des écueils de l'apparence et rend ses sentences tout à la fois infaillibles et impartiales (vers. 3). Son règne amènera la conversion morale de l'humanité qui ne fera plus le mal et ne détruira plus (vers. 9). Cette transformation atteindra même les animaux qui se réconcilieront entre eux et avec l'homme (vers. 6-8).

Tout cela sera accompli sous l'action de l'esprit de Dieu qui repose sur Lui (vers. 1 ). Ce dernier verset revêt u@e double importance pour la tradition chrétienne.

D'une part le fait que l'Esprit de Dieu « repose sur lui » est le grand signe grâce auquel Jean le précurseur a identifié Jésus de Nazareth avec le Messie d'Isaïe (JEAN, chap. 1, 33-34) ; d'autre part l'énumération des différentes qualités de l'esprit divin telle qu'elle figure en Isaïe est à l'origine de la doctrine chrétienne sur les sept dons du Saint-Esprit.

En réunissant ces passages messianiques aux « chants du serviteur » nous nous trouvons certainement devant l'évocation la plus riche et la plus compacte de la personne, de l'action et du mystère du Messie attendu.

P. CRISOLIT

En ce temps-là, la BibleNo 58 page IV.

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