Quelle lecture tonique que le récit de ces pionniers dont Dieu avait réveillé l'esprit, dont la vie a été transformée par une autre destinée que celle à laquelle ils semblaient être voués. Le poids de l'exil et de la honte allait bientôt être enlevé! Ces hommes de foi et de vision ont bouleversé la réalité politique et spirituelle dans laquelle ils vivaient. Forts de la Parole que Dieu leur avait adressée, ils ne se sont accordés aucun répit, ils ne se sont cachés derrière aucune des circonstances; ils ont relevé le défi et ont abouti!
Cet enthousiasme aurait-il déserté l'Eglise aujourd'hui? Où trouver ce même dynamisme, cette foi qui transporte les montagnes, qui soulève nos pesanteurs et fait jaillir de nos coeurs ce cri: «nous nous lèverons!». D'abord, pour eux comme pour nous, par une communication de la Parole de Dieu à nos coeurs par le Saint-Esprit, qui désembrume notre horizon et l'éclaire de la révélation du plan souverain de Dieu. N'est-ce pas la marche par la foi? L'histoire biblique et l'histoire de l'Eglise nous en donnent les héros qui nous inspirent et nous ouvrent la route pour que nous y courrions. Certains d'entre eux ont changé la destinée de leur nation. Ce sont eux qui ont marqué l'atmosphère de leur époque. Ils ont donné le ton au prix du renoncement à l'incrédulité et à l'immobilisme, du refus de la médiocrité. C'est pour tous, eux et nous, le même scénario: la promesse de Dieu nous libère de la désespérance, nous fait quitter tous nos conforts, y compris celui de la critique, et nous met en mouvement. Rien ne peut justifier la tentation du repli sur soi. Même au plus profond de la repentance, fruit premier de la Parole de Dieu, préalable à toute vraie foi, la promesse de la restauration resplendit (2 Chron. 7, 14). Le pessimisme n'est pas de mise. Il n'est pas le signe distinctif d'une grande spiritualité. Le cynisme n'est pas la marque d'une sagesse supérieure mais bien terre-à-terre, c'est-à-dire chamelle. Dieu se tient toujours à nos côtés pour nous insuffler son espérance (Jér. 29, 4). Il ne baisse jamais les bras, ne désespère pas. Il ne connaît pas l'échec. Il renouvelle la force de ceux qui ont besoin d'«un second souffle» (Es. 40, 29). Ses plans réussissent toujours. S'il ne partage pas sa gloire, il donne le succès à ceux qui se confient en Lui.
Nous sommes donc appelés à bâtir. Nous sommes appelés à:
- bâtir nos vies sur le roc (Matth. 7, 24), par l'écoute, la méditation et la mise pratique fidèle, c'est le passage obligé pour le résultat (Jos. 1, 8 et Ps. 1,3).
- bâtir/«construire les autres» par des relations vraies, marquées par la justice, autrement dit: par l'amour en action et en vérité. Rendre à chacun le respect et la dignité qui lui reviennent de droit, en tant que créature en image de Dieu. Détruire les murs de l'indifférence et de l'exclusion pour une communication de l'amour et de la vie qui découlent de l'Evangile de Jésus-Christ.
- Jésus ne bâtit pas son église sans nous. Nous sommes ouvriers avec lui par la mise en action et en commun des talents reçus. Ils doivent servir à l'édification (1 Cor. 14, 26). Ainsi, que ce soit par les paroles (Eph. 4, 29) ou par les charismes (1 Pi. 4, 10) et l'engagement mutuel qu'ils supposent, l'état d'esprit constructif doit régner.
- Bâtir rime avec désir. Si les paroles à elles seules ne suffisent pas, il vaut la peine de souligner leur effet positif quand elles véhiculent la bénédiction (Pr. 18, 21). C'est vrai dans toutes les sphères de relations, jusqu'à celles marquées par le conflit (Matth. 5, 43-48 - 1 Pi. 3, 9). C'est vrai aussi pour la nation (Prov. 11, 11 - Jér. 29, 7).
Même en annonçant les jours les plus sombres qui devaient venir, Jésus n'a jamais dit: «Baissez la tête» mais «Levez les yeux» (Luc 21, 28). Faisons front contre la sinistrose ambiante. "Levons-nous et bâtissons!» C'est notre vocation (Es. 58, 12).
Jean-Marc, Potenti
AVENEMENT Mai 1992 No 44 / P 29