des hommes jusqu'à l'exil du dernier roi de Juda LES CHRONIQUES elles aussi, sont plus proches de la théologie que de l'histoire
Les deux livres des Chroniques n'en formaient qu'un à l'origine. Ils ont été rédigés vers 300 av. J.-C., donc bien après le retour de l'exil, par un auteur anonyme, Invite appartenant à la classe des chantres. et que, faute de mieux, on appelle « le Chroniste ». Très brièvement pour la période dont Dieu seul connaît la durée et qui va d'Adam chasse du Paradis terrestre au sacre de Saül, plus complaisamment pour celle des rois, qui se termine par la déportation en Babylonie, l'oeuvre traite de l'histoire entière de l'humanité, du moins dans les rapports qu'elle eut avec Dieu «
Chroniques » est un titre curieux dont l'origine remonte à l'hébreu (littéralement : « les événements des jours »). Délibérément les traducteurs grecs des Septante ont utilisé un autre mot : « les Paralipomènes », c'est-à-dire « les choses laissées de côté », comme si l'ouvrage rapportait des faits complémentaires de ceux qui sont déjà connus par les autres livres historiques; ce qui est inexacte C'est cependant sous ce titre injustifié que durant longtemps les bibles éditées par les catholiques ont présenté l'oeuvre du Chroniste. Saint Jérôme, lui, avait saisi la nuance du grec, car s'il maintenait le nom de « Paralipomena », et l'interprétait en parlant de faits omis par les livres des Rois, il voyait dans l'ensemble la « Chronique de toute l'histoire divine ».
De fait, parmi les sources utilisées par l'auteur, il en est que nous connaissons fort bien par ailleurs : Samuel et les Rois,le Deutéronome, Osée et Jérémie. Certes il en est d'autres, extra-bibliques. Mais, dans l'ensemble, les Chroniques n'apportent pas une histoire tout à fait nouvelle; c'est plutôt une optique différente qui permet, ici encore, de donner un enseignement religieux bien précis.
Un des procédés d'exposition dominants sera celui des généalogies. Système schématisé d'ailleurs, car aussitôt après avoir donné l'origine des trois groupes descendant de Noé, le Chroniste passe à Abraham. On notera aussi des divergences, soit avec le texte de la Genèse, soit même d'un passage à l'autre des livres des Chroniques. Ainsi la descendance de tel clan peut être donnée de manière différente en deux endroits, selon l'époque et selon les relations avec des groupes voisins.
Les clans du sud, mal sédentarisés en Juda, sont mentionnés selon des traditions que l'auteur ne cherche pas à harmoniser, mais qui renseignent sur une situation fort ancienne, très mal connue.
Au centre de l'ouvrage David
Quel est l'enseignement de ces livres? Le plus important est clair : Israël constitue une communauté religieuse où Dieu veut réaliser son royaume. Le modèle peut en être trouvé dans le passé : lorsque le roi David jetait les bases d'une théocratie. Ce monarque est en effet la grande figure de l'ouvrage. Dans l'énumération des tribus et de leurs clans, c'est la sienne qui vient la première; tandis que Moïse est à l'origine des institutions antérieures à la royauté, David a la responsabilité de l'organisation religieuse qui suit : la liturgie, le chant, les classes sacerdotales.
Mais, depuis le retour de l'exil, toute ambition politique est vouée à l'échec; désormais l'État est remplacé par une communauté religieuse où les prêtres dirigent l'ensemble du peuple choisi pour le faire parvenir à une véritable sainteté qui fasse de lui en toute vérité « un royaume de prêtres et une nation sainte ». Nous retrouvons, sous une forme plus nette encore que dans les livres des Rois, cette « théologie de l'histoire », où les faits ne sont apportés qu'à titre de confirmation. Dans cet esprit, pour ne pas choquer son lecteur, le Chroniste, parlant du saint roi David, ne mentionnera pas l'adultère avec Bethsabée; et le schisme s'avérant, dans la perspective envisagée, comme une atteinte fondamentale à l'idéal d'Israël, il ne sera fait que de brèves allusions au royaume du nord.
D'autres détails concernant le sacerdoce, prêtres et lévites seront étudiés ailleurs. Il suffit, pour aborder ces livres, de retenir que le genre littéraire utilisé par l'auteur des Chroniques est plus proche de la théologie que de l'histoire.
J. DHEILL
Professeur à l'Institut catholique de Paris
En ce temps-là, la BibleNo 29 page IV.