Les réflexions qui paraissent et paraîtront sous ce titre s'inspirent du magistral ouvrage de Frederick Dale Bruner: «A Theology of the Holy Spirit - The Pentecostal Experience and the New Testament Witness» (Une théologie du Saint-Esprit - L'expérience pentecôtiste et le témoignage du NT), Hodder & Stoughton, London 1970, 390 p. A ceux qui savent l'anglais, nous ne pouvons que chaleureusement en recommander la lecture. Ce livre est aussi actuel aujourd'hui qu'au jour de sa publication.
La réception du Saint-Esprit est devenue sujet à controverse depuis l'apparition du pentecôtisme avec son prolongement charismatique. Il est impératif que l'Eglise soit édifiée, aussi en ce qui concerne ce point primordial, uniquement sur la base de l'Ecriture sainte, l'expérience ne pouvant être un fondement valable, pour deux raisons: elle n'est jamais normative; étant subjective, elle n'est pas nécessairement authentique quant à son origine et ses manifestations.
1. Recevoir l'Esprit: la condition
A. L'enseignement du NT
La condition principale pour recevoir le Saint-Esprit est énoncée ainsi par Jésus: Celui qui croit en moi, des fleuves d'eau vive couleront de son sein, comme dit l'Ecriture. Il dit cela de l'Esprit qu'allaient recevoir ceux qui croiraient en lui (Jean 738-39).
Ces paroles sont simples et claires: l'Esprit de Dieu est donné en réponse à la foi, sans aucune adjonction. Pourtant, même avant cette réception par la foi, il fallait qu'une condition fondamentale soit remplie: la glorification de Jésus, à savoir sa mort, sa résurrection et son ascension (Jean 12.16,23-24; 16.17). La condition préalable est donc l'oeuvre de Christ.
Il fut donné à l'apôtre Paul de développer les raisons théologiques pour lesquelles l'oeuvre de Christ devait précéder le don de l'Esprit. Comment l'incompatibilité entre la condition de l'homme (pécheur) et la justice de Dieu (saint) pouvait-elle être surmontée? Tout le message chrétien dépend de la réponse à cette question.
Gal 3.10-14 joue ici un rôle de première importance: Tous ceux qui dépendent des oeuvres de la loi sont sous la malédiction, car il est écrit. «Maudit soit quiconque n'observe pas tout ce qui est écrit dans le livre de la loi, pour le mettre en pratique.» Et que nul ne soit justifié devant Dieu par la loi, cela est évident puisque: «Celui qui mettra ces choses en pratique vivra par elles.» Christ nous a racheté de la malédiction de la loi, étant devenue malédiction pour nous - car il est écrit: «Maudit soit quiconque est pendu au bois» - afin que, pour les païens, la bénédiction d'Abraham se trouve en Jésus-Christ et que, par la foi, nous recevions la promesse de l'Esprit.
Paul examine la possibilité d'obtenir la vie et les dons de Dieu par l'obéissance à la loi. Il constate que comme personne n'est capable d'observer toute la loi sans faille, il se trouve condamné par elle. Car les exigences de la loi sont absolues; la loi doit être mise en pratique dans sa totalité par l'homme qui veut vivre par elle, sinon aucune justification n'est possible. Il en découle que croire qu'on a Dieu parce qu'on a à son actif des actes d'obéissance à la loi constitue une malédiction.
Au lieu de pousser à une plus grande obéissance à la loi, comme le faisaient les frères judaïsants en Galatie, Paul démontre que par la loi personne ne peut être justifié et recevoir les dons de Dieu, dont le Saint-Esprit. La justification est obtenue par la foi en l'oeuvre accomplie par Jésus-Christ. C'est pourquoi Paul pouvait écrire aux Romains: Christ est la fin de la loi, en vue de la justice pour tout croyant (10.4).
En recevant Jésus-Christ par la foi, il vient à nous avec le don gratuit de la plénitude de l'Esprit. En d'autres termes: ce n'est pas l'homme qui par son obéissance à la loi atteint à l'Esprit, mais c'est l'Esprit qui vient à l'homme à cause de l'oeuvre de Christ accomplie dans l'obéissance parfaite. La bénédiction d'Abraham se trouve en Jésus-Christ. C'est lui qui a racheté l'homme de la malédiction de la loi. Ainsi la condition de base a été remplie pour que l'homme puisse recevoir le Saint-Esprit par la foi seulement.
Il y a donc deux chemins différents: l'un est le chemin de l'homme vers l'Esprit, où il s'agit d'accomplir des oeuvres pieuses et bibliquement fondées; l'autre est le chemin de l'Esprit vers l'homme, sur la base de l'oeuvre parfaite accomplie par Christ. Le premier chemin monte de l'homme à Dieu; le deuxième descend de Dieu à l'homme. Le premier consiste en actes faits par l'homme; le deuxième est sur la base de l'oeuvre faite par Christ selon le témoignage de l'Ecriture. Le premier chemin est impraticable; seul le deuxième correspond à la réalité spirituelle. Car l'homme ne peut aller à l'Esprit; c'est l'Esprit qui vient à l'homme.
La vie dans l'Esprit vécue par la foi accomplit doublement la loi: La foi attribue à Dieu l'honneur pour toute l'oeuvre du salut; la foi en la pleine suffisance du salut en Christ dirige le regard loin de soi-même vers les autres pour les aimer comme on est aimé par Dieu.
En résumé: Le don de Dieu par l'obéissance parfaite de Christ est la condition déjà accomplie pour la réception du Saint-Esprit. En et avec Christ, le croyant reçoit le don parfait du Saint-Esprit, qui le rend capable de vivre la justice dans l'obéissance.
Le Saint-Esprit est la source et non le but de la vie du croyant. C'est la rédemption de la loi opérée par Christ, et non l'effort de l'homme pour l'accomplir, qui est la condition pour la réception du Saint-Esprit, don gratuit de Dieu aux hommes qui croient en Jésus-Christ.
B. Enseignement erroné
L'Esprit étant donné sur la base de la foi comme don gratuit de Dieu, la réception de l'Esprit ne peut être envisagée comme étant conditionnée par quelque mérite que ce soit de la part du récepteur.
Il apparaît que le pentecôtisme prône un enseignement selon lequel il faut d'abord passer par une purification de tout «péché connu» avant de pouvoir recevoir l'Esprit. Cela équivaut à un renversement de la séquence biblique: la grâce est suivie et non précédée de l'obéissance.
Cette erreur a sa racine en une compréhension défectueuse du pardon de tous les péchés accordé par la grâce seule. L'erreur consiste à penser que le pardon des péchés ne joue un rôle déterminant qu'à la conversion et cesse ensuite d'être efficace. Or la réception de l'Esprit ne dépend aucunement de la dignité du croyant (qui aurait réussi à bannir tout péché), mais uniquement de la foi en la justice totale d'un autre, le Christ.
La thèse pentecôtiste est que le péché et le Saint-Esprit ne peuvent cohabiter dans un même coeur. Pourtant, l'Esprit et le péché habitent bel et bien dans le coeur du croyant, sinon il serait sans péché affirmer cela ferait de lui un menteur (1 Jean 1.8).
D'ailleurs, comment quelque croyant que ce soit saurait-il bannir le péché de son coeur sans le Saint-Esprit? Et qu'en est-il des péchés inconnus? Un péché est-il moins péché pour n'être pas connu? Le pardon reçu par grâce est complet: nous sommes délivrés des péchés (connus et inconnus) par son sang (Apoc 1.5).
Il n'y a aucune distinction à faire entre les expressions Christ pour nous et Christ en nous, car si Christ est pour nous, il est aussi en nous, sans quoi il ne serait pas vraiment pour nous. Pas besoin «d'abandon» spécial ou «d'appropriation» particulière; l'Evangile ne connaît que la réception du Christ tout entier par le simple moyen de la foi.
La passion pentecôtiste et charismatique pour avoir «plus» (surtout plus d'expériences spirituelles) est la conséquence d'une sous-estimation du pardon de tous les péchés accordé dès la conversion par la grâce de Dieu, pardon qui entraîne l'adoption comme fils de Dieu. Le croyant est adopté par Jésus-Christ (Eph 1.5); il a reçu un Esprit d'adoption par lequel il crie: Abba! Père! (Rom 8.15) La puissance du Saint-Esprit consiste en rien de moins ni rien de plus que la mise en oeuvre du miracle de l'adoption.
«La justification du pécheur par Dieu est le message central du NT. Et la sanctification du pécheur justifié montre qu'il prend la justification au sérieux. La compréhension profonde du sens du pardon des péchés est la signification essentielle du don Saint-Esprit» (Bruner p. 234).
Prétendre que «en tant que pécheurs nous acceptons Christ, et en tant que saints nous acceptons le Saint-Esprit» revient à séparer l'Esprit du Christ. Or recevoir Christ, c'est recevoir l'Esprit de Christ, qui est identique avec le Saint-Esprit de Dieu, comme cela ressort clairement de Rom 8.9-10: ... vous êtes sous l'emprise de l'Esprit, si du moins l'Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, il ne lui appartient pas. Et si Christ est en vous, ... l'esprit est vie à cause de la justice.
Recevoir Jésus-Christ, c'est recevoir le Saint-Esprit et devenir enfant de Dieu, ce dont l'Esprit témoigne dès la conversion (Jean 1.12; Rom 8.16).
Vouloir séparer la réception de Jésus-Christ de la réception de l'Esprit est totalement étranger à l'enseignement du NT
II. Les moyens de l'Esprit
A. Le message de la foi
1. L'enseignement du NT
Comment Dieu communique-t-il le Saint-Esprit aux hommes? Par une question, Paul rappelle aux Galates comment ils ont reçu l'Esprit: Est-ce en pratiquant la loi que vous avez reçu l'Esprit, ou en écoutant avec foi? (3.2)
Le moyen utilisé par l'Esprit n'est rien d'autre que le message de la foi, à savoir le message de Jésus-Christ mort à la croix pour nous.
Le danger que couraient les Galates était de vouloir mettre en oeuvre des moyens plus «élevés» que la simple foi en Christ par laquelle ils avaient reçu ]'Esprit initialement. Paul insiste: la pratique de la loi et le message de la foi s'excluent mutuellement. Il n'y a pas d'autre évangile soi-disant «plus plein» par lequel le chrétien recevrait une plus grande plénitude de l'Esprit, par exemple en remplissant les conditions d'une plus parfaite obéissance.
Le message de la foi, qui est à la fois la condition et le moyen pour recevoir l'Esprit, n'est pas seulement le point de départ de la vie chrétienne, mais il est aussi le moyen continuel qui permet de vivre la vie chrétienne dans l'Esprit.
Le message de la foi hier, aujourd'hui et demain est le moyen choisi par Dieu pour communiquer le Saint-Esprit aux hommes. C'est là le sens du passage de Gal 3.1-5, que je cite ici dans la transcription moderne faite par Alfred Kuen.
1 Ah! mes pauvres amis galates! Que vous êtes donc insensés! Qui vous a fascinés ainsi? On dirait que vous avez été ensorcelés! Ne vous ai-je pas dépeint Jésus-Christ, le crucifié, comme s'il avait été cloué à la croix sous vos yeux? Où est restée votre compréhension de sa mort?
2 Je ne vous poserai qu'une seule question: comment avez-vous reçu le Saint-Esprit? Etait-ce parce que vous aviez accompli strictement les oeuvres exigées par la loi, parce que vous aviez observé toutes les ordonnances rituelles, ou bien plutôt parce que vous avez accueilli avec foi le message de la Bonne Nouvelle?
3 Manquez-vous à ce point d'intelligence? Vous avez commencé votre vie chrétienne avec l'Esprit de Dieu, et vous voulez la parachever par vos propres efforts? Croyez-vous que vous atteindrez la perfection par des pratiques toutes matérielles?
4 Avoir fait tant d'expériences exaltantes pour rien! Auriez-vous vraiment reçu de si grandes bénédictions inutilement! Valait-il la peine de tant souffrir pour tout oublier? J'ai peine à le croire. Et encore, si c'était pour rien!
5 Lorsque le Seigneur vous a donné son Esprit, lorsqu'il agit puissamment parmi vous, opérant des prodiges étonnants, pourquoi le fait-il? Parce que vous avez observé la loi juive? N'est-ce pas plutôt parce qu'après avoir entendu prêcher l'Evangile, vous l'avez accepté avec foi?
Dans la première question au verset 2, Paul utilise l'aoriste, temps de la conjugaison grecque qui correspond au passé simple (ou défini) français et indique donc un fait passé considéré comme achevé. Dans sa deuxième question au verset 5, Paul utilise le participe présent pour indiquer que le Saint-Esprit continue à être donné pleinement par le moyen de la foi et sans le moyen d'oeuvres quelconques. Il combat ainsi l'enseignement des faux docteurs selon lequel il faut, en plus de la foi, l'obéissance à des exigences légales ou autres pour recevoir le Saint-Esprit pleinement.
Non pas que Paul aurait jamais contesté la nécessité de se soumettre aux commandements de Dieu, tout au contraire! Mais ce n'est pas le moyen par lequel l'Esprit est donné et oeuvre en le croyant.
En résumé: L'obéissance au message de la foi est diamétralement opposée a l'obéissance à des conditions quelles qu'elles soient. Cette dernière obéissance implique une constante concentration sur soi-même, alors que l'obéissance au message de la foi est portée sur les intérêts des autres. La présence continuelle de l'Esprit est un don que Dieu accorde en réponse à la foi en Christ et à rien d'autre.
Pour votre recherche personnelle, voici quelques textes qui éclairent la doctrine du NT: Rom 10.16-17; 1 Thes 1.4-5; 2.13; 2 Thes 2.13-14; 1 Cor 2.4-5; 2 Cor 3.3,6; Eph 6.17; 1 Pi 1.12; Jean 6.63; 16.8; 20.22.
.2. Conséquences d'une doctrine erronée
a) Comment atteindre à la plénitude? Comme c'était le cas pour les chrétiens de Galatie, le danger pentecôtiste consiste à chercher la plénitude de l'Esprit en remplissant certaines conditions.
S'il est vrai, dit-on, que la vie chrétienne commence par l'acceptation du message du salut par la foi seule, l'Esprit n'est pourtant pleinement donné que suite à une séparation totale de tout péché connu (comme si le péché inconnu était négligeable), à un abandon absolu et une soumission complète au Seigneur. Cela crée les deux niveaux de chrétiens - les chrétiens tout court et les chrétiens remplis de l'Esprit - qui caractérisent le pentecôtisme.
L'erreur a été résumée ainsi: «En tant que pécheurs, nous acceptons le Christ; en tant que saints, nous acceptons le Saint-Esprit.» Cependant le trait distinctif du message apostolique consiste en la toute-suffisance de l'Evangile du salut par la foi pour le début, la continuation et l'accomplissement de la vie du chrétien. Non seulement le chrétien reçoit le Saint-Esprit une fois pour toutes par le message de la foi, et cela sans conditions spéciales à remplir, mais il continue à être équipé pleinement par l'Esprit par ce même message, et ce sans le moyen de, techniques particulières, y compris un baptême du Saint-Esprit qui serait à rechercher après la conversion.
La prédication fidèle de la grâce en Jésus-Christ est le moyen constant pour avoir la plénitude de l'Esprit.
b) Où est la plénitude?
Le pentecôtisme préconise une recherche de la plénitude du Saint-Esprit en recherchant l'Esprit lui-même. L'épître aux Colossiens enseigne clairement que la plénitude se trouve uniquement en Christ et nulle part ailleurs. En fait, le sujet de cette lettre est le thème principal de la doctrine pentecôtiste: la plénitude.
La description sublime du Christ dans Col 1 se termine par cette déclaration pertinente: Car il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute plénitude (v. 19) - donc aussi celle du Saint-Esprit. Au deuxième chapitre, Paul renchérit: En lui (Christ) habite corporellement toute la plénitude de la divinité. Et vous avez tout pleinement en lui (v. 9-10). Toute la divinité, y compris le Père et le Saint-Esprit, se trouve pleinement réunie en Jésus-Christ, de sorte que quiconque croit en Christ a reçu, en lui et par lui, toutes les bénédictions imaginables et ne doit pas rechercher d'autres moyens que la foi en Christ pour «obtenir» plus de plénitude ou de bénédiction. Le croyant peut jubiler avec Paul écrivant aux Ephésiens: Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ (1.3).
La plénitude que les chrétiens ont en Christ est vraiment pleine, non pas parce qu'ils seraient capables de se l'approprier, mais parce que Christ est capable de s'approprier les chrétiens.
L'épître aux Colossiens ne contient aucune condition préalable demandant de faire le vide pour recevoir la plénitude. Au contraire, Paul y combat rigoureusement toute condition de ce genre, car les faux docteurs invitaient les Colossiens à la mortification, à l'abandon à des visions, à l'application de règlements diététiques, dont Paul dit qu'ils ne sont que préceptes et enseignements humains... qui ne méritent pas d'honneur et contribuent à la satisfaction de la chair (Col 2.16-23).
Non, dit Paul, ne concentrez-vous pas sur vos obligations subjectives sans valeur, mais sur votre condition objective: vous êtes en Christ, donc vous avez la plénitude, car être en Christ signifie être en celui en qui habite toute la plénitude divine. La plénitude appartient à Christ; le croyant est en Christ; donc le croyant a la plénitude. Insinuer que le croyant, tout en étant en Christ, aurait besoin d'une plénitude spirituelle additionnelle ou d'une quelconque appropriation: voilà l'hérésie colossienne.
L'argumentation de Paul dans les épîtres aux Galates et aux Colossiens a de graves conséquences pour la doctrine pentecôtiste. Selon Galates, il n'y a qu'un moyen pour recevoir le Saint-Esprit, à savoir le message de la foi en Christ, à l'exclusion de toute autre condition. Selon Colossiens, les croyants ont à rechercher la plénitude de l'Esprit au seul endroit où ils l'ont reçue initialement, à savoir en Christ.
Question
Y a-t-il une distinction à faire entre le Christ habite en vous et l'Esprit de Dieu habite en vous? L'Esprit, troisième personne de la Trinité, vient-il habiter le croyant après coup, indépendamment de Christ, deuxième personne de la Trinité, ou vient-il en Christ Jésus? Est-ce que être en Christ ne signifie qu'une plénitude partielle?
Réponse
La réplique de Paul est claire: En Christ, le croyant a tout, et cela parfaitement; le chrétien qui est en Christ n'a pas reçu qu'une mesure de la puissance. Il n'a pas à rechercher ce qu'il a déjà pleinement en Christ. Par la foi, il a reçu tout ce que Dieu veut lui donner, à lui personnellement et pleinement, et en permanence, puisque par la foi il reçoit le Christ. Le chrétien qui a reçu Jésus-Christ, non seulement a reçu tout ce dont il a besoin, mais il a reçu tout ce qu'il peut jamais avoir.
Preuves scripturales
Rom 8.9-11: Pour vous, vous n'êtes plus sous l'emprise de la chair, mais sous celle de l'Esprit, si du moins l'Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, il ne lui appartient pas. Et si Christ est en vous, le corps, il est vrai, est mort à cause du péché, mais l'esprit est vie à cause de la justice. Et si l'Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité le Christ Jésus d'entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous.
1 Cor 6.17: Celui qui s'attache au Seigneur est avec lui un seul esprit.
1 Cor 15.45: Le premier homme, Adam, devint en être vivant. Le dernier Adam (= Christ) est devenu un esprit vivifiant.
Col 2. 10: Vous avez tout pleinement en lui (ou: vous êtes remplis en lui), qui est le chef de toute principauté et de tout pouvoir.
Jean 3.34-35: Celui que Dieu a envoyé (= Christ) dit les paroles de Dieu, parce que Dieu donne l'Esprit sans mesure. Le Père aime le Fils et a tout remis dans sa main. Cette affirmation de Jean-Baptiste résume la pensée de Paul, pensée qui est, ne l'oublions pas, celle du Saint-Esprit qui inspire Paul. A savoir: La divinité tout entière habite corporellement (=personnellement) en Jésus-Christ. C'est pourquoi celui qui n'a ou ne trouve pas Dieu en Christ ne l'aura ou ne le trouvera nulle part ailleurs en dehors de Christ, où qu'il aille (selon Luther).
B. L'écoute de la foi
1. L'enseignement du NT
a) L'apôtre Paul posait cette question aux chrétiens de la Galatie (3.2): Est-ce en pratiquant la loi que vous avez reçu l'Esprit, ou en écoutant avec foi?
Le terme «écouter» a en grec la connotation de «rapport message». Or le message est objectif, alors que l'écoute est subjective. Ainsi donc, le message de l'évangile exige la foi, mais comme il est plus que la loi, il donne aussi la foi exigée. C'est un message-écoute de foi: la foi vient avec le message.
Dans l'introduction de sa lettre aux Romains, Paul nomme l'Evangile un message où Dieu s'y révèle par la foi et pour la foi (1.17). Cela revient à dire que, non seulement le don de Dieu est reçu par la foi initialement, mais qu'il est toujours reçu «pour» la foi (afin de susciter la foi).
Autrement dit: Dieu nous donne sa justice et son acceptation, son Esprit et sa présence - et ceci continuellement -, non pas en réponse à un quelconque effort de notre part, aussi louable qu'il soit, mais en réponse à notre foi.
b) Pour nous faire comprendre ce qu'est la foi, Paul la met constamment en contraste avec les oeuvres de la loi. La foi est présentée comme le contraire de l'oeuvre. La foi est quelque chose que
Dieu fait, que Dieu nous met à même de faire, quelque chose qui est reçu sans qu'il n'y ait ni mérite ni «faire» de notre part. Voilà pourquoi Paul parle de la foi de Jésus-Christ (selon le texte grec; c'est une foi qui vient donc de Jésus).
La déduction est contraignante: si la foi émane de Dieu par l'écoute de l'Evangile, elle est l'oeuvre et le don de Dieu. Aux Galates, qui voyaient en la foi un acte humain, Paul décrit la foi comme étant venue à eux (3.25). Paul combattait ainsi l'idée que pour avoir la plénitude, il fallait la foi et l'obéissance, ce qui mettait en cause la toute-suffisance de la foi comme unique base pour la justification (Rom 5.1) et comme source effective des oeuvres bonnes.
Il fallait ensuite que l'apôtre Paul se défende contre l'accusation que, par sa doctrine de la foi seule, il préconisait en fait l'immoralité. Non! dit Paul; car si la foi est suffisante, c'est justement parce qu'elle identifie le croyant avec Christ, qui est pleinement suffisant pour garder le croyant de toute immoralité. Voici comment Paul explique cela aux Galates (2.20; 3.11-14):
Je suis crucifié avec Christ (le vieil homme pécheur est mort), et ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ qui vit en moi (identification: réception de la vie de Christ, qui est éternelle); ma vie présente dans la chair, je la vis dans la foi au Fils de Dieu (pas question de s'abandonner au dérèglement moral)... Le juste vivra par la foi (sa vie correspond à la vie de Christ, qui nous a rachetés de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction pour nous... afin que... par la foi, nous recevions la promesse de l'Esprit).
c) Significatif aussi est le fait que dans l'écoute de la foi, le Saint-Esprit entre par le plus passif des organes majeurs de la personne: l'oreille, qui ne crée ni n'émet rien, qui ne fait que recevoir ce qui lui est donné. Du côté humain, l'écoute de la foi est la seule et unique condition pour recevoir le don de Dieu; ce n'est pas quelque chose qu'on fait. L'écoute de la foi est rendue possible par la présence du message de la foi.
Comme toutes les conditions pour la réception de l'Esprit furent remplies par l'oeuvre de Christ en dehors de nous-mêmes, et comme le moyen utilisé par l'Esprit est le message de l'oeuvre de Christ qui nous atteint par la parole d'autrui, de même l'écoute qui reçoit le don rendu possible par l'oeuvre de Christ n'a pas besoin de faire appel à une puissance engendrant la foi, autre que la puissance inhérente en le message de la foi. C'est là toute la gloire de l'Evangile: il n'est pas seulement une parole concernant le salut; il est une puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit (Rom 1.16).
Dieu dispense son Evangile non en vue d'une action, mais en vue de l'écoute de la foi - de la «foi-écoute» et même cette écoute, il la donne.
2. Conséquences d'une doctrine erronée
a) La foi vue comme une oeuvre
L'erreur cruciale de la doctrine pentecôtiste aussi bien que charismatique consiste à faire de la foi un accomplissement nécessaire pour recevoir l'Esprit en récompense. Ralph M. Riggs écrit dans «L'Esprit lui-même» (1949), après avoir précisé que le Saint-Esprit est reçu comme un don absolument gratuit: «Nous n'avons qu'à étendre notre main dans la foi, nous saisir de lui, nous l'approprier et le recevoir comme nous appartenant.»
Les trois expressions soulignées annulent l'affirmation du don gratuit, puisque la foi elle-même est le prix par lequel il est obtenu. On trouve toujours à nouveau l'idée erronée que «plus nous convoitons le don de Dieu, plus nous sacrifions pour l'obtenir, plus nous l'apprécierons une fois que nous l'avons obtenu».
Selon cet enseignement, ce n'est pas la foi hormis les oeuvres, mais la foi après les oeuvres: «D'abord il faut être en ordre avec Dieu. Ensuite (!) nous cessons de faire des efforts et nous lui demandons le don que nous recherchons. Il attend que nous en arrivions là.» Encore une fois, c'est l'idée que Dieu attend et que l'homme agit.
Selon le NT, Dieu lui-même établit une relation «en ordre» avec lui par Christ, et ceci à l'exclusion de nos efforts et non en conséquence de ceux-ci. C'est Dieu qui vient à l'homme avec son don par l'Evangile, et non les hommes qui viennent quémander auprès de Dieu. Qui a donné le premier, pour qu'il ait à recevoir en retour? Tout est de lui, par lui et pour lui! (Rom 11.35-36).
S'il faut d'abord faire quoi que ce soit avant de pouvoir recevoir le don de Dieu, il cesse d'être un don, il devient un dû. La foi authentique produit les oeuvres bonnes, comme le disent Paul, Jacques, les autres apôtres et les réformateurs avec eux.
Luther écrivait ces paroles bien connues dans sa préface à l'épître aux Romains: «0! la foi est une chose vivante, active, puissante, de sorte qu'il est impossible qu'elle ne produise pas continuellement ce qui est bien. La foi ne demande pas s'il y a des bonnes oeuvres à faire, mais avant qu'on puisse demander, la foi les a déjà faites.»
b) La foi vue comme une appropriation
Voici l'argument dont se sert le raisonnement fallacieux: Il est vrai que le don de Dieu n'est reçu que par la foi, tout comme, dans un certain sens (?), l'Esprit. Il est pourtant aussi nécessaire de faire un second acte de foi pour s'approprier entièrement (?) le Saint-Esprit, afin d'obtenir puissance, sanctification, victoire et la plénitude de l'Esprit. Car par la première foi n'ont été obtenus que grâce, justification et pardon des péchés.
Il y aurait donc une foi ayant pour objet Jésus-Christ en vue du salut, et une foi ayant pour objet le Saint-Esprit en vue de la puissance et de la consécration; cette seconde foi serait nécessaire parce que le don de Dieu exigerait une «appropriation». Il faut en déduire qu'il y aurait une foi (la première) procurant la grâce sans puissance.
La raison principale qui est avancée pour expliquer que le don reçu par la foi primaire serait insuffisant n'est pas l'insuffisance de Christ (qu'on ne veut pas dénigrer), mais l'insuffisance d'appropriation du croyant. «Appropriation» a le sens de «faire d'une chose sa propriété, acquérir une chose». C'est justement ce que la foi en Dieu n'est pas: «faire» plutôt que recevoir. Un don qu'on doit acquérir, qu'on doit «faire sien», n'est plus simplement reçu comme une grâce; il devient le résultat d'un effort. Ainsi l'oeuvre du salut est en fin de compte transférée de Dieu à l'homme, quelle que puisse être l'orthodoxie de ce qui précède l'acte d'appropriation.
Quand l'appropriation prend la place de la réception, il s'agit peut-être bien d'une oeuvre intentionnellement pieuse, mais ce n'est plus ce que le NT entend par la foi.
c) La foi vue comme un absolu
Finalement, la foi est souvent synonyme d'un abandon total. L'argument est le suivant: De même que l'on est justifié, régénéré et sanctifié par la foi, de même on doit recevoir le baptême du Saint-Esprit par la foi, pour autant qu'on se soit abandonné à Dieu en tous points.
En fait, on sépare la justification et la sanctification puisque, avant qu'on puisse vraiment recevoir le Saint-Esprit, il faudrait obéir totalement à l'exigence de l'abandon «en tous points».
Cela est exprimé clairement par Wade Horton: «Personne ne peut recevoir ou maintenir l'expérience pentecôtiste s'il n'obéit pas à toute la volonté de Dieu... Seulement une fois que le croyant s'est entièrement consacré et a obéi pleinement, l'Esprit entrera; une fois donc que toutes les conditions auront été remplies» («Pentecost Yesterday and Today», 1964). Dans ces conditions, l'Esprit n'entrera jamais, puisque le croyant est laissé à lui-même pour opérer une consécration totale sans l'Esprit, ce qui lui est évidemment impossible.
Même si le langage utilisé par le pentecôtisme relève de la pure piété quand il parle de l'abandon à Dieu et de la consécration chrétienne, il ne s'agit plus de la foi néo-testamentaire dans sa simplicité. Car les absolus d'abandon et de consécration exigés par la doctrine pentecôtiste appellent les chrétiens, non à la grâce en Christ, mais à une recherche acharnée et futile de trouver dans leur coeur des absolus qui n'y sont pas.
La foi telle qu'elle est définie par le NT est souveraine et suffisante. Elle est évoquée avec concision par Luther: «Crois et tu l'as reçu» («Glaubst du, so hast du»). C'est la doctrine du NT dans sa pureté. Aussitôt qu'on y ajoute: «Crois absolument (abandonne-toi, livre-toi, vide-toi) et tu l'auras» (langage d'apparence ultra-pieuse), on replace le croyant sous le poids de la loi et de l'impossible. Ce n'est certes pas par hasard que l'apôtre Paul ne lie jamais la foi à un adjectif ou un absolu.
3. Observations supplémentaires: «La foi seule» dans l'Evangile de Jean
Nous terminons nos réflexions sur la parfaite suffisance de la foi en Christ que le NT connaît par un texte de l'Evangile de Jean.
Voici l'annonce programmatique dans Jean 7.37-39:
Le dernier jour, le grand jour de la fête, Jésus debout s'écria: Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive. Celui qui croit en moi, des fleuves d'eau vive couleront de son sein, comme dit l'Ecriture. Il dit cela de l'Esprit qu'allaient recevoir ceux qui croiraient en lui; car l'Esprit n'était pas encore donné, parce que Jésus n'avait pas encore été glorifié.
La foi en Jésus a pour résultat le don du Saint-Esprit. C'est l'enseignement unanime, clair et simple du NT. La foi en Christ et la réception de l'Esprit sont corrélatives. La foi n'est jamais «en l'Esprit» ici elle est deux fois en Jésus. Pour recevoir le Saint-Esprit, Jésus-Christ est le seul objet de la foi; c'est toujours par la foi que Christ est reçu.
Le texte cité enseigne aussi que l'Esprit donné en réponse à la foi n'est nullement anémique; au contraire, il coule du croyant comme des fleuves d'eau vive.
N'y voir qu'un filet d'eau sans puissance fait bien peu de cas de la foi en Christ. Car la formulation pentecôtiste dit: la foi en Christ mène à la vie, alors que la foi ultérieure en l'Esprit résulte en puissance spirituelle, attestée par «le parler en langues». Mais selon Jean 7, la foi en Jésus ne produit pas seulement un filet d'eau propre à humecter la langue du croyant; au contraire, celui-ci reçoit du Christ aussi bien l'existence et la vivification spirituelle que la puissance spirituelle, donc aussi la puissance nécessaire au service.
Si la foi en Jésus ne confère pas la pleine réception de l'Esprit, comment le croyant saurait-il s'abandonner, se consacrer, faire toutes sortes de sacrifices, puis avoir une foi suffisante pour recevoir la «plénitude de l'Esprit» (le «baptême du Saint-Esprit»)? Ce n'est que parce que l'Esprit a été pleinement reçu qu'abandon, consécration et sacrifices sont possibles. Sinon, il s'agit d'une parodie de l'Evangile de la grâce.
La foi toute simple en Christ reçoit de Dieu tout ce qu'il a à donner. La foi qui ne repose pas sur ce principe rend l'Evangile inopérant.
En conclusion, voici encore une affirmation de Luther, citée par Karl Barth dans «Der Heilige Geist und das christliche Leben» (Le Saint-Esprit et la vie chrétienne):
«Dieu ne veut pas nous voir donner notre confiance ou vouer notre coeur à quoi que ce soit d'autre, quelque saint ou rempli d'Esprit que ce soit, qu'à Christ seul dans sa parole.»
III. Un seul baptême
Il y a un seul corps et un seul Esprit, comme aussi vous avez été appelés à une seule espérance, celle de votre vocation; il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême. Eph 4.4-5
1. L'enseignement du NT
Nous avons tous été baptisés dans un seul Esprit, pour être un seul corps, soit Juifs, soit Grecs, soit esclaves, soit libres, et nous avons tous été abreuvés d'un seul Esprit. 1 Cor 12.13 Autres textes à consulter: 1 Cor 6.11; Jean 3.5-8; Tite 3.4-8; Rom 6.1-11; Col 2.8-19.
a) Il ressort de la lecture des Actes que la foi n'est jamais désincarnée; elle devient un fait historique par l'action du baptême d'eau, qui est non seulement le sceau de la foi du nouveau converti, mais aussi le sceau de la venue de l'Esprit en lui.
Le NT atteste clairement la relation entre l'eau et le Saint-Esprit, à commencer par le baptême de Jésus (Marc 1.10). A la fin de la première prédication donnée par Pierre à la Pentecôte, le Saint-Esprit est offert ensemble avec le baptême d'eau: Pierre leur dit: Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, pour le pardon de vos péchés; et vous recevrez le don du Saint-Esprit (Act 2.38).
Cette relation entre baptême d'eau et réception de l'Esprit est enseignée avec la plus grande évidence dans les passages des Actes où il se produisit un intervalle de temps passager entre baptême d'eau et réception de l'Esprit; chaque fois, cet intervalle fut rapidement interrompu et l'Esprit reçu. Les événements décrits dans Actes 8.5-17, 10.43-48 et 19.1-7 enseignent d'une manière frappante que le don du Saint-Esprit et l'eau du baptême chrétien sont liés entre eux.
b) Mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus-Christ et par l'Esprit de notre Dieu (1 Cor 6.11).
Il ne s'agit pas là d'une succession imparfaite ou douteuse; l'emploi de l'aoriste pour les trois verbes (temps qui indique une action accomplie) montre que le baptême signifie que le croyant est purifié, sanctifié et justifié par le fait qu'il est devenu un membre du Corps de Christ en qui l'Esprit habite. 1 Cor 3.16: Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous?
Purification, justification, sanctification et l'Esprit sont donnés en Jésus-Christ à la fois et non par bribes. Le tout est scellé et solennellement signifié par le baptême.
c) L'Evangile de Jean présente l'enseignement du NT sur le baptême avec toute la clarté désirable. Voici ce que dit Jésus à Nicodème: En vérité, je te le dis: si un homme ne naît d'eau et d'Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu (Jean 3.5). On peut considérer ce texte comme la description classique du NT sur le rite d'initiation qu'est le baptême. Les termes d'eau et d'Esprit pourraient difficilement être plus intimement liés, ce qui est encore plus évident en grec, où la traduction littérale donne: d'eau et Esprit, la préposition «ex» (= de) servant pour les deux termes, qui ne sont donc pas séparables. En plus de cela, le verbe étant à la forme de l'aoriste passif subjonctif, le sens littéral est: «naît une fois d'eau et Esprit».
Le croyant naît donc une seule fois d'eau et d'Esprit. Il n'y a qu'un seul baptême chrétien, qui est en même temps d'eau et d'Esprit, en même temps matériel et spirituel. L'accent dans l'Evangile de Jean est nettement sur l'Esprit. La nouvelle naissance est une naissance par l'Esprit, même si la venue de l'Esprit dans le croyant reste un mystère et un miracle de la grâce de Dieu, comme l'indique bien Jean 3.8. Cela exclut l'exigence de conditions ou d'évidences en rapport avec la venue de l'Esprit sur le baptisé. Sont à écarter: l'idée d'une quelconque vertu sacramentale de l'eau baptismale (Tertullien); la prétention d'une église de détenir le privilège d'administrer le seul baptême valable (catholicisme romain); la notion d'une preuve qu'apporterait l'expérience individuelle (pentecôtisme).
Il suffit de savoir que l'Esprit vient d'en haut et qu'il est étroitement lié à l'eau du baptême, mais comment, où et pourquoi, cela nous échappe. Jean 3.9-21 interprète Jean 3.3-8 et montre que l'Esprit est reçu en conséquence de notre foi.
d) Le passage de Tite 3.4-8 peut être considéré comme un résumé de la doctrine du NT sur «le baptême dans le Saint-Esprit»: Lorsque la bonté de Dieu notre Sauveur, et son amour pour les hommes, ont été manifestés, il nous a sauves - non parce que nous aurions fait des oeuvres de justice, mais en vertu de sa propre miséricorde - par le bain de la régénération et le renouveau du Saint-Esprit; il l'a répandu sur nous avec abondance par Jésus-Christ notre Sauveur, afin que, justifiés par sa grâce, nous devenions héritiers dans l'espérance de la vie éternelle.
La clarté de ce texte, en conjonction avec les autres déjà cités, permet de tirer quelques
e) Conclusions finales.
1. Le Saint-Esprit en tant qu'agent du salut n'attend pas que le croyant devienne plus digne ou plus pur - comme s'il pouvait devenir plus digne ou plus pur que lorsqu'il a été «lavé» par Dieu mais l'Esprit est donné avec le salut.
2. L'Esprit n'est pas donné partiellement, comme si Dieu était réticent, mais répandu sur nous avec abondance.
3. Etant aussi bien (a) l'agent du salut que (b) le don de Dieu, le Saint-Esprit n'est pourtant ni un agent indépendant, ni un don à part, ni (c) une source de richesses par lui-même.
Plutôt:
(a) en tant qu'agent, l'Esprit baptise en Christ, et par conséquent aussi en l'Esprit, car Christ et l'Esprit sont inséparables;
(b) en tant que don, l'Esprit est donné en et par Christ, et jamais par une expérience comme don séparé, comme si Christ, quand il est reçu, était incapable de communiquer l'Esprit;
(c) en tant que don du salut en Christ, l'Esprit ne nous amène pas à faire des expériences meilleures ou plus riches en lui-même, mais à nous communiquer la richesse insondable du Christ.
Nous pouvons donc affirmer que l'oeuvre du salut accomplie par Christ à la croix et par sa résurrection a eu un triple effet: le message de l'Evangile est reçu par l'écoute dans la foi, le Saint-Esprit est reçu et le croyant est scellé dans le baptême; il devient ainsi une même plante avec Christ (Rom 6.5). C'est une des grâces de Dieu que le don de l'Esprit soit rattaché à un acte aussi terre à terre que le baptême d'eau, signe visible s'il en est, et non à un événement extatique ou ésotérique réservé à une élite sensible aux états émotionnels, ni à un acte demandant un effort acharné comme l'exige la doctrine du «parler en langues» du pentecôtisme.
2. La doctrine des deux baptêmes est insoutenable
a) Un baptême d'eau sans le Saint-Esprit ou un «baptême dans le Saint-Esprit» sans eau sont des impossibilités, comme les passages dans Actes 8.15-16 et 19.1-7 le démontrent.
Du Plessis ne semble pas comprendre qu'un nouveau converti est, par définition, quelqu'un qui a reçu le Saint-Esprit, quand il écrit: «Chaque converti est encouragé à recevoir le Saint-Esprit afin de devenir un témoin de Jésus-Christ» (dans «Religion in Geschichte und Gegenwart»). Quand les Assemblées de Dieu soutiennent que «cette merveilleuse expérience (de la réception de l'Esprit) est distincte de l'expérience de la nouvelle naissance et lui est postérieure», nous ne pouvons que conclure qu'ils connaissent mal ce que le NT dit du baptême.
Le pentecôtisme morcelle ce qui, dans le NT, est signifié par le seul acte du baptême: d'abord l'identification avec Christ (conversion), puis le baptême d'eau, ensuite l'accomplissement des conditions rendant le «baptême dans le Saint-Esprit» possible, et finalement la pleine identification avec l'Esprit par le «baptême dans l'Esprit» accompagné des langues. Tout au long, l'accomplissement dépend du croyant.
Il est à remarquer ici que l'expression «baptême dans le Saint-Esprit» ne se trouve nulle part dans le NT!
b) Selon Romain 6, la vie chrétienne est fondée sur le seul baptême en la mort, la mise en tombe et la résurrection de Christ. Au v. 10, le terme grec «une fois pour toutes» indique que ce baptême ne peut être répété, de sorte que le chrétien n'a pas besoin de deux morts par deux baptêmes avant d'avoir reçu la vie spirituelle. Son baptême d'eau signifie qu'il est baptisé du Saint-Esprit et qu'il est aussi spirituel que le Christ avec lequel il a été baptisé.
Le baptême spirituel enseigné par le NT est la base et non pas le but de toute activité chrétienne.
c) L'épître aux Colossiens enseigne que le résultat de l'identification du croyant avec Christ dans le baptême le délivre non seulement du péché et de la loi, mais aussi de son piètre effort de se débarrasser lui-même de certains péchés.
1. Col 2.12-13 dit que, ensevelis avec Christ par le baptême, le croyant est rendu à la vie par lui. Point n'est besoin d'un «baptême» supplémentaire pour cela. Le baptême en Christ n'est pas un symbole préliminaire, mais signifie la réception de la plénitude qui est en Christ: vous avez tout pleinement en lui (2.10).
Le baptême selon le NT n'offre pas seulement, mais donne tout ce que Dieu a accompli pour l'homme en Christ; l'accent est sur le mot «tout».
2. Col 2.16-23 avertit contre la pratique de la mortification de la chair comme moyen d'atteindre un niveau spirituel plus élevé. Non! dit Paul; la croissance spirituelle est une croissance qui vient de Dieu (v. 19). Bien entendu, la discipline et l'humilité ont leur place (3.1-12), mais non pas avant et en vue du baptême, mais après et à cause de la plénitude reçue en Christ.
d) La redécouverte du sens du baptême selon le NT est de la plus haute importance, car du moment où il est vidé de son véritable contenu, on doit avoir recours à des substituts. Or ces substituts ont forcément toujours pour effet de mettre en question la toute suffisance aussi bien de la foi concrétisée par le baptême que du Christ avec lequel le croyant est identifié dans le baptême.
Quand le seul baptême ne donne plus une certitude suffisante, il faut trouver d'autres certitudes, d'autres évidences, car la certitude du salut est un des soucis majeurs de l'homme. Nous avons vu à quels expédients les Colossiens avaient recours pour pallier à la carence créée par l'introduction de règles basées sur la philosophie et la tradition: observation de sabbats, cultes des anges, visions, divers préceptes humains (ne prends pas! ne goûte pas! ne touche pas!).
Certaines des conditions pentecôtistes ne sont pas répréhensibles en elles-mêmes; elles ont même une apparence de grande spiritualité. Cependant l'introduction de conditions dans le but d'obtenir les grâces de Dieu transforme la vertu en loi. «Faire le vide» est une condition pentecôtiste afin d'être rempli de l'Esprit, alors que cet état est la conséquence de l'habitation de l'Esprit en le croyant dès sa conversion. Il faut se rappeler que l'Esprit n'est pas un fluide, mais une personne, la troisième Personne de la divinité, qui exerce son influence sur le croyant. En être rempli veut tout simplement dire: s'y soumettre volontairement pour que l'Esprit puisse diriger la pensée, le coeur et la volonté du croyant. Aussi Paul peut-il enjoindre aux Ephésiens: Soyez remplis de l'Esprit (litt.: Soyez toujours en train d'être remplis de l'Esprit; autrement dit: ayez la volonté de vous laisser guider par lui).
Alors même que les règles de discipline et de dévotion religieuse des Colossiens leur paraissaient si admirables, Paul dut les reprendre durement: enflé d'un vain orgueil, contribuant à la satisfaction de la chair (2.18,23). Par leurs abnégations, ils ne plaisaient pas à Dieu, mais à eux-mêmes.
La discipline et la dévotion chrétiennes caractérisent bel et bien le chrétien né d'en haut, mais non en vue d'obtenir quelque chose de plus; c'est le résultat de la nature nouvelle (3.10) dont il a été revêtu à la conversion, nature qui se manifeste par l'amour et la compassion que le Saint-Esprit lui communique par le Christ en lui (3.12-17). Tout ce qui est bon en lui découle de la grâce, de la puissance et de la plénitude qu'il a reçues lors du baptême d'eau et d'Esprit.
IV. La manifestation de l'Esprit: la foi chrétienne
Préambule: foi, espérance, amour
Pour traiter le sujet de la manifestation de l'Esprit selon le NT, il est nécessaire d'esquisser toute la doctrine du NT concernant le Saint-Esprit. Tout le poids de l'oeuvre de l'Esprit porte sur la foi, ce qui signifie: sur Jésus-Christ. L'espérance et l'amour ne sont pas des alternatives, ni des suppléments, ni encore des perfectionnements de la foi, mais le fruit spirituel de la foi même. Ce fait nous est indiqué par l'apôtre Paul dans Gal 5.5-6: Pour nous, c'est de la foi que nous attendons, par l'Esprit, l'espérance de la justice. Car, en Christ-Jésus, ce qui a de la valeur, ce n'est ni la circoncision ni l'incirconcision, mais la foi qui est agissante par l'amour.
L'Esprit se manifeste par la foi dans la vie du chrétien, qui est faite d'espérance et d'amour. Le premier fruit que produit l'Esprit, c'est l'assurance de la foi, suivi par l'objectif de l'espérance et la patience de l'amour. Ce sont là les manifestations les plus évidentes de la présence de l'Esprit dans la vie des croyants. Nous allons donc examiner chacune de ces manifestations: foi, espérance et amour. Nous verrons que l'action du Saint-Esprit est parfaitement christocentrique.
A. L'assurance de la foi
1. Après avoir jeté les fondements théologiques de l'oeuvre rédemptrice de Christ dans les épîtres aux Galates et aux Romains, Paul arrive chaque fois à la conclusion suivante: le rôle essentiel, sinon primaire, de l'Esprit est de donner aux hommes la foi en Dieu le Père:
Parce que vous êtes des fils, Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son Fils, qui crie: Abba! Père! Ainsi tu n'es plus esclave, mais fils, si tu es fils, tu es aussi héritier, grâce à Dieu (Gal 4.6).
Vous n'avez pas reçu un esprit de servitude, pour être encore dans la crainte, mais vous avez reçu un Esprit d'adoption, par lequel nous crions: Abba! père! L'Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Or, si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers: héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ... (Rom 8.15-17a).
La capacité de crier «Père!» est l'oeuvre et donc la manifestation de l'Esprit du Fils. La première preuve que l'Esprit est à l'oeuvre est la foi chrétienne en Dieu le Père, et en même temps la prière adressée au Père.
Dans ces textes parallèles, l'Esprit est intentionnellement nommé l'Esprit du Fils, non seulement parce que l'Esprit appartient au fils et est donné en lui, mais parce que l'oeuvre de l'Esprit est d'assurer les croyants que, par le Fils, ils sont véritablement fils de Dieu.
La plénitude de la grâce et la perfection de l'Evangile, c'est que non seulement le Père a envoyé le Fils pour le salut des hommes, mais il envoie aussi l'Esprit de son Fils «en bas» avec l'Evangile chrétien, et puis «en haut» dans la prière chrétienne, afin que les hommes puissent avoir le salut et savoir qu'ils l'ont. Descendu du ciel à travers l'Histoire pour entrer dans le coeur et retournant au ciel par la prière, voilà un circuit qui est dû à Dieu seul: Tout est de lui, par lui et pour lui (Rom 11.36).
2. La signification de ce circuit trouve un commentaire dans Rom 5.5: L'amour de Dieu est répandu dans nos coeurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné.
Cette dernière proposition relative fait ressortir le fait que l'Esprit est un don divin et ne peut être obtenu par l'homme de quelque manière que ce soit. La forme grammaticale du verbe «donner» est au temps aoriste en grec et signifie «donné une fois pour toutes», au moment de la conversion.
Par contre, le verbe «répandre» est au parfait, ce qui indique que l'amour une fois versé dans les coeurs avec l'Esprit donné y continue constamment son oeuvre.
Tout enseignement qui laisse entendre que l'Esprit ne fait qu'introduire l'amour dans le coeur et ensuite le quitte jusqu'à ce que le croyant soit devenu assez obéissant ou se soit suffisamment vidé pour mériter que l'Esprit vienne habiter en lui, coupe le croyant du fondement à partir duquel il se sait aimé de Dieu en tant que son enfant.
3. Dans les trois textes cités plus haut, le ministère de l'Esprit a pour effet d'ouvrir le coeur du croyant à la connaissance de l'amour de Dieu. C'est aussi cette vérité qui apparaît dans 1 Cor 2.12:
Or nous, nous n'avons pas reçu l'esprit du monde, mais l'Esprit qui vient de Dieu, afin de savoir ce que Dieu nous a donné par grâce.
Paul s'adresse à tout chrétien de l'église de Corinthe (et au-delà) comme ayant reçu l'Esprit de Dieu (il dit: nous), dont le but est de faire comprendre la grâce. Ce que Dieu donne est gratuit. Le plus important de ses dons gratuits est le Saint-Esprit, qui permet à l'enfant de Dieu de comprendre ce qui lui est donné et d'en être assuré.
Il est intéressant de constater que le ministère de l'Esprit ne consiste pas ici à révéler des choses futures, cachées, mystérieuses, mais des choses déjà reçues. L'Esprit n'attire pas l'attention sur lui-même, mais sur la grâce. C'est la grâce, et non l'Esprit lui-même, qui est au centre de la manifestation de l'Esprit.
Par la réception de l'Esprit, le chrétien non seulement a obtenu les dons de grâce, mais il sait aussi discerner ce que sont ces dons et ce qu'ils signifient. Pour résumer: le Saint-Esprit rend le chrétien apte à comprendre l'oeuvre de Dieu.
4. Le Saint-Esprit est aussi décrit comme un acompte (les arrhes), donc une garantie pour la réception du tout. Or la partie reçue en acompte est du même genre que le tout. Celui qui nous affermit avec vous en Christ et qui nous a donné l'onction, c'est Dieu. Il nous a aussi marqués de son sceau et a mis dans nos coeurs les arrhes de l'Esprit (2 Cor 1.22; cf aussi 2 Cor 5.5).
Quand Dieu donne son grand salut, il le donne avec la garantie qu'il l'a donné, et cette garantie est le Saint-Esprit. L'apôtre Jean a compris cela de la même manière: A ceci nous reconnaissons que nous demeurons en lui, et lui en nous, c'est qu'il nous a donné de son Esprit (1 Jean 4.13; 3.24: ... par l'Esprit qu'il nous a donné). La connaissance ou assurance que Dieu est en nous est indissolublement liée au don de l'Esprit.
Enfin, l'Eglise a le moyen de vérifier (contrôler, tester) que le témoignage de l'Esprit qu'elle perçoit est bien celui de l'Esprit de Dieu: Bien-aimés, ne vous fiez pas à tout esprit; mais éprouvez les esprits pour savoir s'ils sont de Dieu, car plusieurs faux prophètes sont venus dans le monde. Reconnaissez à ceci l'esprit de Dieu: tout esprit qui confesse Jésus-Christ venu en chair est de Dieu, et tout esprit qui ne confesse pas Jésus n'est pas de Dieu, c'est celui de l'antichrist (1 Jean 4.1-3).
Dans sa première lettre, Jean combat les gnostiques, pour lesquels Jésus n'était pas vraiment humain, ni le Fils de Dieu qui souffrit à la croix en tant que Dieu devenu chair. Les gnostiques pensaient que la présence de l'Esprit devait forcément s'attester par des manifestations extérieures, extraordinaires ou surhumaines. Mais l'évidence que l'Esprit est à l'oeuvre se trouve dans la confession du Seigneur Jésus-Christ devenu homme dans la chair ou, pour parler avec Paul, dans une chair semblable à celle du péché (Rom 8.3).
La démonstration que l'Esprit a été reçu n'est pas d'ordre mystique ou extatique, mais consiste en un clair témoignage que l'homme Jésus, Jésus dans sa chair, est le Christ incarné. Ce témoignage, cette confession, est la première évidence sans équivoque de la divinité et de la présence de l'Esprit (cf. aussi 1 Cor 12.1-3).
Soit dit en passant, l'extase était, au premier siècle, un phénomène courant dans les religions à mystères, voire le point culminant de l'expérience spirituelle; elle ne pouvait donc pas être considérée comme une preuve de l'action du Saint-Esprit. Il est intéressant de constater la similarité du déroulement des phénomènes entre le pentecôtisme et les religions à mystères: 1. obéissance active (préparation); 2. obéissance passive (se vider, s'abandonner); 3. manifestation audiovisuelle (glossolalie extatique).
A notre connaissance, il n'est nulle part dit que Dieu rende le récepteur conscient d'avoir reçu le Saint-Esprit (même pas dans Gal 4.6). Par contre, l'Esprit le rend conscient d'être fils de Dieu, signe infaillible qu'il a reçu l'Esprit.
Il est aussi à noter que, dans tous les textes de Paul et de Jean examinés jusqu'ici, l'Esprit ne rend jamais témoignage à lui-même, ni à une quelconque oeuvre qu'il accomplit, pour attirer l'attention sur lui-même. Plutôt, l'Esprit se manifeste indirectement en rendant capable de prier Abba! Père! et de confesser que Jésus est aussi bien humain (1 Jean 4.3) que divin (1 cor 12.3).
5. Résumons. Le don du Saint-Esprit rend les croyants aptes, non seulement à connaître, à comprendre, à discerner, à confesser l'amour de Dieu le Père par la grâce dont ils sont l'objet en Jésus-Christ son Fils, mais aussi à lui adresser leurs prières en tant que ses enfants. Là où la grâce du Seigneur Jésus-Christ et l'amour de Dieu sont au centre de nos préoccupations, il y a la communion du Saint-Esprit (2 Cor 13.13).
Question:
Qu'est-ce qui est au centre de ma vie? de la vie de mon église, de mon assemblée, de ma communauté?
B. L'espérance de la foi
Le ministère de l'Esprit n'agit pas que dans le présent; il s'étend aussi à l'avenir: Pour nous, c'est dans la foi que nous attendons, par l'Esprit, l'espérance de la justice (Gal 5.5).
Lorsqu'on se préoccupe trop intensément de la plénitude spirituelle, comme ce fut le cas dans le contexte colossien par exemple, on risque de perdre de vue le «pas encore» de l'espérance chrétienne. Car ceux qui sont en Christ, non seulement ont reçu la justification, la plénitude, la vie et la rédemption, mais nous qui avons les prémices (l'acompte) de l'Esprit, nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l'adoption, la rédemption de notre corps. Car c'est en espérance que nous avons été sauvés. Or, l'espérance qu'on voit n'est plus espérance... Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l'attendons avec persévérance (Rom 8.23-25). Aux Ephésiens, Paul écrit: N'attristez pas le Saint-Esprit de Dieu, par lequel vous avez été scellés pour le jour de la rédemption (4.30).
Si toute la plénitude spirituelle nous avait déjà été donnée pleinement, on pourrait se passer de l'espérance, et la foi ne serait plus foi. Mais par l'Esprit, le chrétien non seulement croit, il espère aussi.
Et pourtant, l'espérance chrétienne n'est pas la même chose que prendre ses désirs pour la réalité c'est une attente ferme et sûre produite en nous par l'Esprit. Comme nous l'avons vu, l'Esprit de Dieu est la garantie de notre adoption, à savoir la rédemption de notre corps (Rom 8.23), qui sera revêtu d'incorruptibilité pour devenir ce corps spirituel dont Paul parle dans 1 Corinthiens 15. La raison pour laquelle l'espérance ne trompe pas est d'ailleurs assez inattendue: parce que l'amour de Dieu est répandu dans nos coeurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné (Rom 5.5). Notre espérance n'est pas de l'optimisme, elle se fonde sur l'amour de Dieu qui nous est révélé par l'Esprit et dont la démonstration objective est la mort de Jésus-Christ à la croix.
L'attente pleine d'espérance n'est pas, dans le NT, une attente de la plénitude du Saint-Esprit. L'objectif de l'espérance et de l'attente dans le NT n'est pas l'Esprit; il est le moyen, la garantie, mais non le but de l'attente et de l'aspiration chrétienne. Selon le NT, le chrétien n'attend pas, au-delà de Christ, une seconde expérience, comme s'il avait reçu l'Esprit imparfaitement à la conversion. Après la Pentecôte, le verbe «attendre» n'est jamais employé en vue de la réception du Saint-Esprit. Plutôt, le chrétien attend par ou dans l'Esprit, par la foi, l'accomplissement de l'espérance de l'Eglise, c'est-à-dire l'héritage de Christ. Ce n'est que parce que Dieu a déjà donné son Esprit que l'espérance chrétienne a de la substance.
Finalement, si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, il ne lui appartient pas (Rom 8.9). Un chrétien sans l'Esprit, ou un chrétien où l'Esprit ne serait qu'en dehors de lui («sur lui») sans habiter en lui, cela n'existe pas. La marque par laquelle tout chrétien né de Dieu se distingue de l'incrédule est précisément le fait que l'Esprit de Dieu habite en lui.
Le passage d'Eph 1.13-14 cité ci-après fournit une conclusion appropriée aux considérations sur le ministère d'espérance du Saint-Esprit; en même temps, il résume son action à travers l'annonce de l'Evangile centrée en Christ et énonce le but eschatologique. La traduction qui suit tient compte de la forme exacte du texte grec:
En lui (condition), vous aussi, ayant entendu la parole de la vérité, l'Evangile de votre salut (le message), en lui ayant cru (la foi), vous avez été scellés du Saint-Esprit de la promesse (le baptême), qui constitue l'acompte (la garantie) de notre héritage, en vue de la rédemption (l'adoption) de ceux que Dieu s'est acquis pour célébrer sa gloire (but final).
C. Le dynamisme de la foi
Selon l'expression inoubliable de l'apôtre Paul, la foi, qui est l'oeuvre de l'Esprit, s'énergise en amour (Gal 5.6). L'exercice de l'amour chrétien a besoin de l'énergie de l'Esprit, qui est reçue par la foi (Gal 3.5).
Dans le NT, l'action d'amour exercée par le Saint-Esprit est considérée sous deux aspects: négativement en ce qui concerne la chair et positivement quand il s'agit du prochain.
1. La chair
L'énergie qui produit l'amour par la foi est en tension constante avec la chair La vie en Esprit est une vie en guerre contre la chair. Cette guerre ne cesse pas une fois que l'Esprit a été reçu (Rom 8.13). Mais c'est justement parce que l'Esprit a été reçu que le chrétien mène un combat continuel pour «mettre à mort» ses mauvais penchants. Ce combat constitue d'ailleurs pour le chrétien l'assurance qu'il est conduit par l'Esprit, qu'il est donc enfant de Dieu. C'est la raison pour laquelle Paul juxtapose ces deux choses: Si par l'Esprit vous faites mourir les (mauvaises) actions du corps, vous vivrez, car tous ceux qui sont conduits par l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu (Rom 8.13-14).
On peut donc conclure que marcher selon l'Esprit et contre la chair signifie «marcher dans l'amour». Cette marche est la manifestation, la démonstration et l'attestation que l'Esprit est à l'oeuvre, qu'il habite le croyant. L'Esprit ne se manifeste donc pas nécessairement par une extase quelconque, mais bien par un comportement éthique. Ce n'est pas le chrétien qui fait preuve d'expériences spirituelles ostensibles ou qui parle d'une manière inintelligible qui manifeste la vie dans l'Esprit. Car l'amour ne supprime pas la conscience du Moi dans l'extase; il exerce une contrainte sur le Moi, qui peut alors se donner à l'autre. L'amour n'est pas tellement l'explosion d'une grande émotion, mais consiste plutôt à maîtriser ses émotions. L'amour est d'abord caractérisé par la patience; dans les moments décisifs, ce n'est pas tellement la langue qui agit, mais les mains (cf. 1 Jean 3.18, où aimer en parole et avec la langue est mis en contraste avec aimer en action et en vérité).
2. Le prochain
La foi chrétienne se distingue de toutes les religions illuministes par le souci du don au prochain. Le gnosticisme, qui prétend au «savoir par excellence» (généralement par initiation), a pour but l'accumulation de «spiritualité» pour soi-même; pour y parvenir, il faut «faire le vide» en soi afin d'être rempli de substance divine (mouvement vertical). Le but de la foi chrétienne, au contraire, est de se vider de soi-même en vue de se donner au prochain - c'est un mouvement horizontal. C'est à cette différence de direction que prend l'énergie que Paul fait allusion quand il écrit: La connaissance (gnostique, voire charismatique) enorgueillit, mais l'amour édifie (1 Cor 8.1).
Le prochain (que l'on voit) est l'objet de l'authentique spiritualité chrétienne; le spirituel (que l'on ne voit pas) est le centre de toutes les variétés de gnose (connaissance) mystique. Cependant, le gnostique (l'illuminé) est séparé de son prochain aussi par ses expériences spirituelles elles-mêmes. Car chacune de ces expériences le fait accéder à un niveau spirituel supérieur, de sorte qu'il considère en état d'infériorité le frère chrétien (et toute autre personne) qui n'a pas fait ces expériences. C'est ainsi que se créent inévitablement des schismes.
3. Pertinence particulière de la première épître de Jean
Cette lettre de Jean doit se comprendre dans le contexte du gnosticisme très répandu de son temps. Jean met en contraste la soi-disant «piété supérieure» des gnostiques avec le seul critère légitime de la foi chrétienne - l'obéissance au commandement de l'amour.
Jean détecte chez les gnostiques une incapacité de fonder leur version de la foi en Jésus en tant qu'homme, parce qu'ils opposent ce qui est humain et naturel à ce qui est spirituel et surnaturel (1 Jean 4.2-3). Par ce fait, ils comprennent mal le côté éthique de la vie chrétienne et donnent la priorité aux «choses spirituelles» (aux expériences supérieures) plutôt qu'aux «choses historiques» telles que le frère et le prochain; la perfection est dans l'amour, et non dans l'exaltation «spirituelle» (1 Jean 4.12). Pour l'apôtre Jean, c'est le manque d'amour et non le manque d'expériences spirituelles qui indique qu'un chrétien n'est pas dans le vrai. Le test de l'authentique spiritualité est donc l'amour et non l'expérience spéciale.
C'est la raison pour laquelle Jean refuse aux gnostiques le droit d'être appelés chrétiens (1 Jean 2.4-6). En fait, centrer sa vie dans le spirituel (donc finalement en soi-même) plutôt que dans le Christ incarné correspond à l'esprit de l'antichrist (1 Jean 4.3).
Par conséquent, la forme de piété gnostique n'est plus, pour Jean aussi bien que pour Paul, une forme valable de la foi chrétienne, malgré sa prétention de l'être à un degré supérieur. La manifestation de la vie chrétienne dans la foi, l'espérance et l'amour, se réalise concrètement à l'égard du frère plutôt qu'en démonstration de dons (charismes) de l'Esprit.
D. Le centre de la foi
Les déclarations concernant le Paraclet dans l'évangile de Jean constituent le témoignage le plus concentré sur la doctrine de la manifestation du Saint-Esprit et nous serviront de résumé. Ces affirmations sont toutes centrées sur le Christ auquel l'Esprit rend constamment témoignage.
Nous vous proposons de cataloguer la doctrine du Saint-Esprit et son pendant pentecôtiste de la manière suivante:
1. Jean 14.15-17
(a) Si vous m'aimez, vous garderez mes commandements, et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Consolateur (Paraclet) qui soit éternellement avec VOUS.
Ce texte indique ce qui s'approche le plus d'une condition humaine en vue de recevoir l'Esprit. Ce passage porte-t-il préjudice au principe de «par la foi seule» qu'on trouve partout, et notamment dans l'évangile de Jean (7.37-39), en relation avec le Saint-Esprit? En fait, cette obéissance n'est pas une «oeuvre» en plus de la foi mais, selon l'usage de Jean lui-même, un appel à la foi: Ce qui est l'oeuvre de Dieu, c'est que vous croyiez en celui qui l'a envoyé (6.29). Si Jean 14.15 est un appel à l'amour, ce que le contexte suggère (cf. 13.34; 15.12, 17), la doctrine du NT est confirmée.
Par contre, il est intéressant de constater que, jusqu'à ce jour, nous n'avons pas découvert le commandement de l'amour dans les listes pentecôtistes énumérant les conditions pour recevoir l'Esprit. Celles-ci tournent toutes autour de l'abandon absolu à Dieu, de «faire le vide», de l'attente dans la prière; tout cela peut se faire en isolation chez soi, d'une manière égocentrique.
(b) L'Esprit n'est pas donné imparfaitement ou d'une manière incomplète, mais de sorte qu'il soit éternellement avec VOUS.
Le pentecôtisme nie en général que quand l'Esprit est donné «d'abord», il demeure toujours dans le croyant; pour que cela arrive, il faut, dit-il, une obéissance plus parfaite du croyant, sans quoi l'Esprit ne fait que communiquer le salut. Pourtant, Jésus dit en clair que quand l'Esprit est donné, c'est pour toujours.
(c) L'Esprit de vérité ne peut pas être reçu par le monde parce qu'il ne le voit 4. Jean 16.13-14
(a) L'Esprit ne fait pas que rappeler et convaincre; Jésus dit aux disciples: il vous annoncera aussi les choses à venir. L'Eglise ne doit pas oublier cette dimension future de l'activité de l'Esprit. Encore faut-il relever que cette activité n'est pas une mission indépendante de l'Esprit, car ses paroles ne viendront pas de lui-même (de sa propre autorité), mais de ce qu'il aura entendu du Christ. Par les apôtres, l'Esprit a annoncé fidèlement les paroles de Christ aussi en ce qui concerne l'avenir.
(b) Jésus dit du Saint-Esprit: Lui me glorifiera, parce qu'il prendra de ce qui est à moi et vous l'annoncera. C'est là le résumé de toute la mission du Paraclet. La manifestation par excellence du Saint-Esprit est la glorification de Jésus-Christ.
Conclusion
Puisque tout a été donné à Jésus-Christ, tout est donné à ceux à qui Christ se donne: Vous avez tout pleinement en lui (Col 2.10). C'est le témoignage unanime du NT par rapport à la manifestation du Saint-Esprit en Jésus-Christ.
E. Les conséquences pour la doctrine pentecôtiste concernant «la manifestation initiale de l'Esprit»
Le pentecôtisme donne une importance de premier ordre à la doctrine, considérée comme reposant sur des bases bibliques, selon laquelle le parler en «langues» signifierait d'une manière audible et visible indiquant que le baptême du Saint-Esprit aurait effectivement eu lieu. Ainsi, toute «foi vague» serait éliminée. Cette doctrine est l'expression d'une véritable passion d'acquérir la certitude de la présence du Saint-Esprit par une manifestation qui en serait l'évidence.
Pourtant, le Nouveau Testament donne comme évidences:
1. la prière adressée au «Père»: Parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son Fils, qui crie: Abba! Père! (Gal 4.6);
2. la confession que Jésus est le Seigneur: ... nul ne peut dire: Jésus est le Seigneur! si ce n'est par le Saint-Esprit (1 Cor 12.3);
3. le fait que tous ceux qui sont conduits par l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu (Rom 8.14), ce qui indique sans contredit que l'Esprit habite en eux;
4. le témoignage de l'Esprit à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu (Rom 8.16).
Ces témoignages de la présence de l'Esprit peuvent être entendus, perçus et toucher le coeur comme aucune langue inintelligible ne le peut.
En d'autres termes, ce sont la prière et la confession de foi chrétiennes qui sont la démonstration que le baptême du Saint-Esprit a effectivement eu lieu, et non la manifestation du parler en «langues» que le pentecôtisme demande comme «preuve».
Le terme que le Nouveau Testament emploie pour attester que l'Esprit est présent est le mot foi. La foi n'est pas seulement le moyen, elle est aussi l'attestation que l'Esprit est actif dans la vie du chrétien. C'est dans ce sens-là que la justice de Dieu se révèle dans l'Evangile par la foi et pour la foi (Rom 1.17).
La réalité de cette foi se manifeste donc premièrement par la confession de la seigneurie de Jésus, autrement dit: de la divinité du Jésus terrestre, sans que pour autant son humanité soit diminuée. A la confession de Thomas: Mon Seigneur et mon Dieu! Jésus attache une béatitude: Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru! (Jean 20.28-29). Toujours et encore la foi!
Autre conséquence d'une foi authentique: elle n'entraîne pas dans l'euphorie, mais elle entraîne vers le prochain. Le Nouveau Testament nomme cet «entraînement» amour.
Ces simples manifestations de la foi - le baptême, la prière adressée au «Père», la confession de Jésus comme «Seigneur», l'amour chrétien plein d'égards - ne sont pas, il est vrai, d'ordre spectaculaire, mais ils sont d'ordre spirituel. Il y a, dans les manifestations selon le Nouveau Testament, une normalité et une simplicité qui font défaut au pentecôtisme.
Il faut cependant mentionner quelque chose de plus grave. Les manifestations prônées par le pentecôtisme ne sont pas de simples particularités anodines dont la naïveté pourrait nous faire sourire. Car du moment où l'on exige des chrétiens, en plus de la foi, de parler en «langues» avant de pouvoir recevoir Dieu dans sa plénitude, le pentecôtisme risque de se placer en dehors de la sphère de la foi chrétienne. La démonstration extérieure exigée par le pentecôtisme ressemble à la circoncision exigée par les judaïsants de l'Eglise primitive.
L'apôtre Paul ne considérait pas cette addition à la foi comme inoffensive, ni comme une variation oecuménique innocente qui ne mettrait pas l'Evangile en danger (relisez Actes 15). Quand des «super-apôtres» vinrent apporter aux Corinthiens un Jésus, un Esprit et un Evangile différents, meilleurs et plus complets, Paul ne trouva pas cela simplement intéressant. Il compare ce nouvel apport à la séduction d'Eve par le serpent qui corrompit ses pensées (2 Cor 11.3-4). Les avertissements les plus intransigeants du Nouveau Testament sont dirigés précisément contre tout supplément que certains essayaient d'ajouter à la simplicité de l'Evangile du salut par la seule foi.
Nous n'honorons pas l'Evangile si nous ne précisons pas ce qu'implique la doctrine particulière du pentecôtisme. Il se peut que le parler en «langues» soit parfois parfaitement anodin, tout comme Paul, par exemple, en certaines circonstances, était prêt à taxer la circoncision de rite inoffensif: En Jésus-Christ, ce qui a de la valeur, ce n'est ni la circoncision ni l'incirconcision, mais la foi qui est agissante par l'amour (Gal 5.6). Il arriva même à Paul d'administrer la circoncision dans le cas précis de Timothée, à cause des Juifs qui étaient dans ces lieux-là, afin que son témoignage parmi les Juifs soit bien reçu (Act 16.1-3). Mais dès qu'un rite, l'observation d'une règle religieuse ou une expérience devient une adjonction à la foi ou une condition nécessaire pour atteindre plus de plénitude en Dieu, alors l'anathème doit être prononcé afin d'éviter un faux enseignement à tout prix.
Dans sa forme classique, cet avertissement solennel se trouve dans l'épître aux Galates (1.6-9; 5.2-12). Afin d'indiquer le degré de gravité concernant les adjonctions à la foi, nous terminerons notre tour d'horizon systématique par une simple comparaison de la manifestation des langues à la Pentecôte avec le rite judaïque de la circoncision.
Cela se justifie par la remarquable similitude des deux rites. Les deux se basent sur l'Ecriture en tant qu'extensions ou de conséquences de la foi, et les deux veulent être compris comme nécessaires pour obtenir la faveur de Dieu et de la puissance. En plus, les deux sont des phénomènes physiques momentanés concernant spécifiquement des organes du corps, et les deux semblent garantir la réalité de ce que chaque rite veut attester. Dans les deux cas, l'événement physique est investi de signification spirituelle.
Finalement, l'histoire montre que le fait d'ajouter à la foi est destiné à devenir le centre d'une nouvelle foi. Il n'est donc pas surprenant que le premier «mouvement supplétif» formât un groupe à part; c'est le cas aussi pour le mouvement supplétif le plus récent, celui «des langues».
Historiquement parlant, il apparaît que toute adjonction à la foi comporte la tendance presque irrésistible de prétendre à un avancement spécifique qui dépasse la foi et devient ainsi le but d'une nouvelle spiritualité d'un type chrétien soi-disant «supérieur». La foi ne devient alors qu'un pas dans la bonne direction. En un mot, ce qu'on y ajoute à la tendance inéluctable de devenir le centre.
Conclusion au chapitre IV
Tant que le parler en «langues» sera considéré comme l'attestation initiale et du même coup l'ultime condition exigée pour prouver la réception du Saint-Esprit, tous les avertissements sévères de l'apôtre Paul, particulièrement ceux adressés aux Galates (5.2-12), doivent être appliqués au pentecôtisme: être séparé de Christ, déchu de la grâce et obligé d'observer toute la loi. Ce jugement est le seul à faire justice à l'Evangile du Nouveau Testament, bien qu'il puisse paraître injuste à ceux qui en sont frappés.
Ceux qui vous troublent et veulent pervertir l'Evangile du Christ (Gal 1.7) en y ajoutant le «plus» que le Nouveau Testament ne connaît pas, supporteront la condamnation (5.10). Et ceux qui se laissent fasciner, que Paul nomme insensés (3.1) parce qu'ils désobéissent à la vérité (5.7), supporteront la leur. Car la prétention qu'il faille ajouter à la suffisance de la foi un «plus» pour obtenir le plein don de Dieu est une subversion de la vérité. Un peu de levain fait lever toute la pâte (5.9), et un peu de «plus» anéantit tout l'Evangile.
Le fond de la question est d'une clarté toute simple: ou bien le croyant reçoit tout ce que Dieu veut lui donner en Christ par la foi, ou il le reçoit par quelque chose de plus (même par «plus de foi»). Le Nouveau Testament désavoue sans ambages la deuxième éventualité (cf. Jean 10.1). Au pentecôtisme d'en tirer les conséquences.
V. Les problèmes spirituels probants de l'église de Corinthe
Introduction
Une étude sérieuse de la doctrine du Saint-Esprit dans le Nouveau Testament, en relation avec le pentecôtisme, ne serait pas complète sans la considération des lettres corinthiennes. Les problèmes qui y sont traités sont d'ordre intérieur, ce qui apparaît bien quand Paul parle des dons spirituels (1 Cor 12-14), mais encore mieux dans 2 Cor 10-13. Pour quiconque connaît quelque peu la doctrine pentecôtiste, les développements de l'apôtre Paul sont une véritable révélation.
Dans 1 Cor 1, Paul met en lumière ce que les Corinthiens ont déjà en Christ-Jésus: la sanctification (v. 2), la grâce (4), richesse en parole et connaissance (5), tous les dons spirituels (7). Ce qu'ils ont sera complété par ce qu'on peut nommer «une deuxième expérience»: le jour de notre Seigneur Jésus-Christ, à savoir son retour (8). L'appel primordial est celui à la communion de son Fils, Jésus-Christ notre Seigneur (9). En un mot: tout ce que les Corinthiens ont et auront encore, ils l'ont en Christ. Paul insiste parce qu'un certain zèle mal placé semble avoir égaré les Corinthiens au-delà de Christ.
1 Cor 12-14
Dans ces trois chapitres, Paul fait face au problème par excellence de l'église de Corinthe. Il est recommandé de lire au fur et à mesure les chapitres et versets indiqués.
1 Cor 12: L'oeuvre de l'Esprit
(charismes: dons de grâce)
V. 1:
Paul répond à la question: Qui ou qu'est-ce qui est vraiment spirituel? Comment évaluer qui ou ce qui est spirituel? En particulier: Comment la spiritualité doit-elle s'exprimer dans une assemblée?
v. 2:
D'une manière thématique, Paul commence par rappeler aux Corinthiens ce que les «choses spirituelles» (pneumatika) ne sont pas. Evoquant leur passé païen, Paul dit en substance: «La marque de ce qui est authentiquement spirituel n'est pas l'exaltation qui caractérisait jadis votre religion.» Il est significatif que Paul place cette observation au début de son traitement des «choses spirituelles».
v. 3:
Nul, s'il parle par l'Esprit de Dieu, ne dit: Jésus est anathème! et nul ne peut dire: Jésus est le Seigneur! si ce n'est par le Saint-Esprit.
L'oeuvre pour ainsi dire classique de l'Esprit est la confession simple et intelligible que Jésus est Seigneur. L'Esprit ne s'exhibe pas dans le Moi en transposant ses pulsions sur un plan supérieur, en subjuguant le Moi, en le noyant dans l'extase; c'est ce qui était arrivé à Corinthe. Paul cherche à rétablir l'utilisation intelligente, intelligible et christocentrique du Moi par l'Esprit.
L'Esprit Saint attribue la divinité au Jésus humain et terrestre, en contraste avec d'autres esprits qui minimisent son humanité. L'Esprit témoigne de l'humanité de Jésus, Fils de Dieu devenu chair, alors que les faux esprits ne témoignent que de ses qualités spirituelles (1 Jean 4.1-3).
En résumé, Paul met en contraste l'expérience religieuse extatique des Corinthiens avant leur conversion et l'expérience produite ensuite par l'Esprit, qui consiste à honorer Jésus en lui attribuant la divinité de manière simple et intelligible. Le fondement est ainsi posé pour ce qui va suivre.
(Remarque: Quiconque me dit: Seigneur, Seigneur! n'entrera pas forcément dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père (Mat 7.21). Jésus avertit contre un usage quasi magique de la formule «Jésus est Seigneur».)
v. 4-7:
A ce point, Paul change stratégiquement de vocabulaire. Il remplace le mot «pneumatika» (choses spirituelles) par le mot «charismata» (grâces, choses de grâce). Le ministère de l'Esprit n'est pas la glorification de l'insolite, de l'étrange, du «spirituel», de l'inutile, mais la mise en lumière du Seigneur historique, concret, crucifié et ressuscité, et à présent la distribution continuelle et variée des dons de grâce assurant le service efficace dans l'Eglise. Un charisme, un don de grâce, est d'abord défini comme un service (diakonia, v. 5), non pour l'édification, la jouissance ou la mise en valeur individuelle, mais pour l'ensemble de l'Eglise.
Dans les v. 4-5, la progression passe de l'Esprit au Seigneur (progression évangélique), et non du Seigneur aux dons de l'Esprit, comme pour passer à un plan supérieur. Paul utilise tous les moyens possibles pour préserver la relation intérieure de l'Esprit en fonction de Christ, du spirituel en fonction de la grâce, et des dons individuels en fonction de l'Eglise. Lapidairement exprimé: les différents dons de grâce servent tous au bien commun.
v. 8-11:
Paul énumère à présent une liste de dons. On remarque qu'il commence par les dons qui, touchant au domaine de l'intelligence, s'expriment en paroles parfaitement compréhensibles, et qu'il termine par des dons en langage inconnu qui doit être interprété pour avoir de la valeur.
Ayant en vue l'assemblée entière, il n'attribue de la valeur aux dons que pour autant qu'ils soient compréhensibles et édifiants. Paul semble vouloir indiquer qu'on ne peut pas, pour ainsi dire, prendre un don de grâce chez soi.
Autre aspect: ces dons ne sont pas réservés à quelques-uns seulement. Il sont distribués à chacun en particulier comme l'Esprit veut.
v. 1-11: sommaire
Dans cette première partie, Paul met en évidence:
1. Ce n'est pas le plus spectaculaire qui est le plus spirituel.
2. Les dons ne sont pas la récompense d'un quelconque effort, mais des grâces accordées par Dieu comme il veut, sans aucun mérite du récepteur.
3. Les charismes sont donnés primairement pour le bien de l'église et très secondairement pour celui du récepteur.
4. Jésus ne peut être séparé de l'Esprit, soit en rabaissant la simple confession que «Jésus est Seigneur» au niveau d'un «christianisme de nom» (sous-entendu: sans vie), soit en jugeant le simple témoignage chrétien comme inférieur à certaines «démonstrations» de l'Esprit et d'enthousiasme exaltant, comprises comme une «spiritualité plus profonde». L'Esprit ne mène pas au-delà de Jésus mais à Jésus même, qui équipe le chrétien pour le service par son Esprit.
En un mot: L'Esprit exalte Jésus-Christ; ceux qui sont spirituellement doués le sont pour servir le Corps de Christ.
v. 12-13:
Au v. 12, le corps humain sert d'exemple pour la diversité dans l'unité qui caractérise le Christ. La phrase nous avons tous été baptisés dans un seul Esprit est l'approximation la plus proche de l'expression «baptême du (ou dans le) Saint-Esprit», d'ailleurs nulle part trouvée dans tout le Nouveau Testament.
Le Saint-Esprit ne pourrait pas avoir inspiré à Paul un texte plus clair pour faire comprendre aux Corinthiens que tous, c'est-à-dire l'église tout entière, et incidemment chaque église aujourd'hui, est une unité où chaque membre né de l'Esprit a été baptisé dans un seul Esprit et abreuvé d'un seul Esprit. C'est ce qui fait de l'ensemble des membres un seul corps. Jamais Paul ni aucun autre auteur du Nouveau Testament n'enseigne un baptême spirituel réservé à une élite (à ceux qui sont portés à l'exaltation psychique), mais le baptême chrétien donné à tous.
Paul insiste que ce baptême que chaque converti reçoit fait de lui un membre, tous les membres formant un seul corps. Il n'y a pas deux «corps» chrétiens, l'un composé de chrétiens baptisés d'eau d'une manière partiellement spirituelle, l'autre constitué seulement de chrétiens consacrés baptisés ultérieurement et pleinement dans le Saint-Esprit, comme s'il y avait deux baptêmes et deux corps de Christ.
Tenant compte du caractère et de la mission christologique du Saint-Esprit, le baptême du Saint-Esprit est identique avec le baptême en Christ. La distinction faite par le pentecôtisme sur ce point n'a aucun fondement biblique. Le baptême en Christ ne peut pas plus être séparé du baptême dans le Saint-Esprit que Christ du Saint-Esprit lui-même. 2 Cor 3.17-18 dit carrément: le Seigneur, c'est l'Esprit. Le baptême dans le Corps de Christ n'est pas une affaire où l'Esprit serait quasi absent, de sorte qu'il faudrait une revalorisation par un baptême ultérieur, plus «spirituel», dans le Saint-Esprit.
Car selon le texte (v. 13a), c'est un seul Esprit qui baptise le croyant dans le Corps de Christ.
La parole de Jésus: Si un homme ne naît d'eau et d'Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu (Jean 3.5), confirme, en résumé, non seulement l'enseignement donné aux Corinthiens (1 Cor 6.11), mais aussi celui donné par Pierre le jour de la Pentecôte: Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, pour le pardon de vos péchés, et vous recevrez le don du Saint-Esprit (Act 2.38-39).
Le v. 13 se termine ainsi: ... et nous avons tous été abreuvés d'un seul Esprit. Le temps grec utilisé (aoriste) indique que c'est chose faite. Par l'image parlante du verbe abreuver, Paul veut faire comprendre que le chrétien n'est pas seulement baptisé de l'Esprit, mais en même temps rempli de l'Esprit.
L'accumulation des mots «tous» et «un» devait convaincre même le plus obstiné des Corinthiens que par un seul et même baptême ils sont tous devenus un seul et même Corps.
v. 14-31:
Maintenant Paul peut considérer l'autre aspect de la vérité de l'unité organique du corps: sa diversité. S'il est vrai que le corps est formé de membres plus ou moins «honorables» ou «décents», il est aussi vrai que ce ne sont que des distinctions fonctionnelles et non qualitatives ou «spirituelles». Aucune des parties du corps ne doit s'estimer inférieure ou supérieure, car Dieu a placé chacun des membres dans le corps comme il a voulu (v. 18). Chaque part a besoin de chaque autre part. Loin de rivaliser, les parts se complètent, en vue du bon fonctionnement du tout.
Paul termine son argumentation par une liste, mais cette fois non de dons, mais de personnes, comme pour indiquer que la liste de neuf dons invoqués aux v. 8-10 n'était pas un inventaire rigide ou invariable. De plus, les ministères établis par Dieu dans l'Eglise ne se recouvrent pas forcément avec les dons énumérés.
Cette liste se distingue des autres par la numérotation des ministères: premièrement des apôtres, deuxièmement des prophètes, troisièmement des docteurs (enseignants), ensuite il y a... et tout à la fin: diverses sortes de langues. Ce don est aussi nommé en fin de liste au v. 10.
On pourrait considérer les v. 29-30 comme une troisième liste sous forme interrogative, se terminant par l'évocation du don des langues et de leur interprétation; la raison pour avoir toujours nommé ce don en dernier est évidente.
A cet endroit, l'apôtre Paul met un terme à la discussion de ce problème particulier en suggérant aux Corinthiens d'aspirer aux dons les meilleurs.
Si au 12e chapitre Paul reliait ce qui est spirituel à la grâce, au 13e il les relie à l'amour. Il indique comment les dons de grâce doivent être exprimés sur le plan humain,. Ni le langage exalté (v. 1), ni la pénétration de «mystères» (v. 2), ni le sacrifice le plus sublime (v. 3) ne peuvent se substituer à l'expression de l'amour chrétien. L'amour est une grâce moins spectaculaire mais combien plus fondamentale que tous les dons. Sans l'amour, les dons de grâce sont disgraciés.
Pour bien comprendre et interpréter 1 Cor 13, nous devons tenir compte du contexte: les problèmes d'ordre spirituel dans l'église de Corinthe. Ce regard permet de mieux déchiffrer ce «poème» sur l'amour.
Ainsi, la première définition positive de l'amour au v. 4 est un verbe grec qui a été traduit par «patient» (litt. l'amour longanimise, ne perd pas facilement patience); il se manifeste par une action qui va à la rencontre de l'autre. Paul dit aux Corinthiens enclins à l'émotivité que ce n'est pas tellement l'expression ardente qui caractérise l'amour authentique. Tout comme il avait donné la priorité aux dons s'exprimant en paroles pondérées (12.8), Paul décrit l'amour chrétien comme une attitude de joie, de pardon, de confiance, d'espérance et de tolérance.
Il est évident que la description de l'amour n'est pas ici de la poésie, mais une application concrète de la vérité à l'adresse de ceux qui devaient apprendre ce que signifie vraiment la vie chrétienne, en faisant abstraction du penchant pour le spectaculaire.
Considérons l'injonction du v. 5: L'amour ne cherche pas son intérêt (litt. ... le sien, ce qui est à lui). Cette définition nous permettra de mieux comprendre le chapitre suivant. L'amour ne cherche pas le sien, tout comme les dons, qui n'existent que pour bénéficier au Corps.
Sommaire
Les expériences «supérieures» individuelles prônées par les Corinthiens doivent faire place à la manière «inférieure» de l'amour patient pour l'église et son ministère dans le monde, tel que l'apôtre Paul l'enseigne.
1 Cor 14: Le but de l'Esprit (oikodomé: édification)
v. 1-3:
Paul désire que les Corinthiens recherchent spécialement le genre de vie qu'il vient de décrire. Il nous semble que le mot «prophétie», quelque peu vétuste, serait mieux rendu par des mots tels que «discours réfléchi», «témoignage» ou «conseil», car celui qui prophétise parle aux hommes, les édifie, les exhorte, les console (v. 3). C'est là une importante définition de la prophétie dans le sens du NT. Il semble bien que le don de prophétie soit le don de comprendre et exprimer la volonté de Dieu dans une situation donnée.
Ainsi, tout comme la Trinité est la source de toutes les grâces (chap. 12), et comme l'amour en est la manière (chap. 13), l'édification en est le but (chap. 14). Le critère ultime dans l'évaluation d'un don, dans la pensée de Paul, est celui-ci: édifie-t-il l'église?
v. 4 et 12:
Celui qui parle en langue s'édifie lui-même; celui qui prophétise édifie l'église. Paul ne nie pas que le don de parler d'autres langues existe; par contre, il n'encourage dans aucune de ses lettres la recherche de ce don. La raison serait-elle dans le fait que ce don «édifie» le parleur lui-même, alors que celui dit de «prophétie» édifie l'église?
v. 5-20:
Seul quand le parler en une autre langue est traduit, il peut être utile. La comparaison du v. 19 devrait ouvrir les yeux à ceux qui attribuent de l'importance au don de parler en d'autres langues: plutôt 5 paroles en une langue connue de l'auditoire que 10 000 en une langue inconnue (rapport: une minute plutôt que 33 heures). Peut-on s'exprimer plus clairement? De là l'insistance de Paul de rechercher plutôt le don de prophétie (tel que défini plus haut), comme le demande la règle de l'édification du plus grand nombre. Ne soyez pas des enfants au point de vue du jugement... soyez des hommes faits (v. 20); autrement dit; ayez du bon sens.
v. 21-25:
Dans ce passage se trouve l'argument le plus fort: celui de l'évangélisation. Un incroyant qui entend parler en une langue inintelligible pensera que les chrétiens sont détraqués (v. 23). La citation de l'AT au v. 21 est un avertissement dont la portée n'est pas immédiatement apparente: les langues étrangères provoquent un endurcissement et non une humiliation du coeur.
L'auteur relate un incident typique qui se produisit lors d'un «petit déjeuner» organisé par un groupe pentecôtiste dans une université. Après quelques chants exécutés par leur choeur, plusieurs pentecôtistes s'adonnèrent au «parler en langues», ce qui eut pour résultat que pratiquement tous les étudiants quittèrent la salle un à un. Même si ce geste pouvait être qualifié de peu courtois, il était pourtant symptomatique. J'affirme que beaucoup de personnes sont détournées de la foi par ce genre de manifestations, quoi qu'en disent les pentecôtistes. Ceux qui sont ainsi chassés peuvent évidemment moins aisément être comptés que ceux qui entrent...
Par contre, le témoignage missionnaire authentique est d'une grande portée et mène souvent à la conversion (v. 24-25). Toute église devrait considérer ce fait lorsque la question de l'usage public du «parler en langues» se pose.
v. 26-33 a:
Paul résume ses considérations en examinant la manière de se rassembler. Notez l'emploi du mot «chacun» au v. 26, qui indique que chaque croyant devait être conscient de sa responsabilité dans la vie de la communauté. Paul ne méprise pas les langues, pourvu que trois conditions soient remplies: pas plus de trois, chacun à son tour, traduction obligatoire. Une quatrième condition sera ajoutée plus loin.
Les prophètes aussi devaient parler à tour de rôle (pas plus de deux ou trois), alors que les autres devaient exercer leur jugement. Il est évident que chaque présentation pouvait être suivie d'une discussion critique.
Le but de la participation totale de l'église: afin que tous soient instruits et que tous soient exhortés (v. 31).
v. 33b-38:
Paul interdit ensuite à la femme de prendre la parole dans l'assemblée. Vu que, dans 1 Cor 11.5, Paul envisage que la femme puisse prier ou prophétiser pourvu qu'elle ait la tête voilée (couverte), il doit s'agir ici du «parler en langues». On peut se demander si les difficultés provenant de l'usage abusif des langues n'étaient pas dues à la participation des femmes.
v. 39-40:
Paul termine ce chapitre par l'exhortation d'aspirer à la prophétie, à savoir: édifier, exhorter, consoler (selon la définition du v. 3), suivie de la concession pleine de tact de ne pas empêcher les langues.
Le mot final mérite toute l'attention de toute église qui n'est pas liée par un ordre liturgique rigide:
Mais que tout se fasse avec bienséance et avec ordre.
Résumé
Dans ces trois chapitres de sa première lettre aux Corinthiens, l'apôtre Paul cherche à inculquer à l'église de Corinthe un principe resté actuel pour nous aujourd'hui: de même que l'Esprit est un avec Christ, de même les dons de l'Esprit servent à édifier le Corps de Christ.
Le Dieu trinitaire est la source, l'amour est le moteur, et l'édification de l'église est le but des dons de grâce.
L'impact des instructions de ces trois chapitres doit être tel qu'aucune église ne puisse trouver l'essence de sa vie spirituelle en ce qui provient simplement de l'enthousiasme et du miraculeux visible. Les réflexions de l'apôtre font bien comprendre que la spiritualité chrétienne consiste à confesser la divinité de Jésus par la foi et à oeuvrer à l'édification du Corps de Christ par l'exercice de l'amour lucide.
Responsable de la traduction-adaptation du texte de Bruner: J.-P. Schneider
Jean-Pierre Schneider
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