LES TROIS SOURCES

 

Le verset 15 du chapitre XIV du livre de Josué présente une difficulté qui mérite un temps d'arrêt. Le texte hébreu actuel porte mot à mot: « Hébron, auparavant Qyriath-Arba, l'homme (en hébreu : adam) le plus grand parmi les Anaqim ». Comment traduire en clair? Qyriath-Arba peut signifier « Ville Quatre » (cf. 21 Samuel, c. 2. v. 3) ; Arba peut également être un nom propre. Les Anaqim sont, rappelons-le, une race de géants d'avant l'arrivée d'Israël.

 

Traduction grecque des Septante « La nom d'Hébron était auparavant Ville Arba. C'était la capitale des Anaqim ». Cette version témoigne probablement d'un texte hébreu diffèrent du nôtre.

 

Traductions françaises modernes, d'après l'hébreu actuel : « Hébron s'appelait auparavant Qyriath-Arba; (cet Arba était) l'homme le plus grand parmi les Anaqim. »

 

Or la Vulgate (saint Jérôme, entouré de rabbins palestiniens) interprète tout autrement : « Hébron s'appelait auparavant Qyriath-Arba. Le (ou Un) très grand Adam repose là parmi les Anaqim. » Allons jusqu'au bout. « Un » très grand Adam serait-il le souvenir d'une race géante primitive, adamique? « La » très grand Adam s'accorde étrangement avec ce qu'on chuchote à Hébron, à la caverne de Makpéla : Adam y serait venu prier...

 

Nous avons là un bon exemple de la complémentarité des trois sources que nous possédons : le texte hébreu, source principale (mais vocalisée, fixée au X éme siècle ap. J.-C. seulement), qui permet souvent plusieurs interprétations; la source grecque, d'après de vieux textes hébreux, mais parfois hellénisée (Alexandrie, III éme siècle av. J.-C.) ; la source latine, la Vulgate du IV, siècle ap. J.-C., retour à une source hébraïque antérieure qui a subi des influences palestiniennes, parfois chrétiennes.

 

Il importe avant tout de reconnaître à chaque source sa valeur et de ne mêler qu'avec précaution leurs eaux.

 

Noël BOMPOIS

(Source: En ce temps-là, la Bible No 18)

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