Les quatre livres prophétiques appelés en dernier dans l'ordre traditionnel ne sont Pas eux non plus classés selon la chronologie; et c'est sans doute cinq auteurs inspirés qu'il faudrait présenter ici, car le plus long de ces ouvrages a pour lui seul deux auteurs au moins, et de deux époques. Mais le temps et les noms des messagers ont bien pou d'importance en regard des « paroles d'éternité» du message.
La prédication de SOPHONIE se situe au Vlle siècle avant notre ère, sous Josias : quelques années avant la réforme religieuse du pieux roi, donc entre 640 et 625. A Isaïe, ce prophète a emprunté l'idée de l'abaissement de l'orgueil humain, qu'il combine avec le thème du « Reste », déjà proposé par Amos. Il aboutit ainsi à la perspective que « le royaume » comprendra seulement les « pauvres de Yahvé » (en hébreu : anawim). Mais. pour en arriver là, il fait passer l'idée de pauvreté du plan sociologique (absence de biens) au plan spirituel : le pauvre est celui qui reconnaît sa misère intérieure devant la richesse de Dieu; celui qui, dans l'épreuve, accepte la volonté divine sur lui. tout en demandant au Seigneur son salut.
AGGÉE, ZACHARIE et MALACHIE sont d'un autre âge : tous trois ont exercé leur mandat au retour de l'Exil; les deux premiers vers 520 av. J.-C., le troisième vers 450. Aggée et Zacharie sont orientés vers la reconstruction du Temple; ils chargent leur message d'espérance messianique et voient la réalisation de celle-ci à travers Zorobabel, prince descendant de David et chef civil de la communauté juive renaissante en Judée
LE LIVRE DE ZACHARIE est un cas particulier, pas plus compliqué à vrai dire, et probablement moins, que le livre d'Isaïe par exemple avec ses deux, et même trois auteurs principaux : il comprend deux parties très distinctes. Seuls les huit premiers chapitres sont l'oeuvre du prophète de la fin du Vle siècle.
Dans un avenir indéterminé y est envisagée la conversion des païens et la venue de Dieu dans son Temple de Jérusalem qui va être reconstruit; désormais la Palestine sera bien la « Terre sainte » parce qu'elle sera purifiée de tout péché.
Quant aux chapitres 9 à 14, ils sont d'un anonyme, qu'il faut dater au plus tôt de la fin du IVe siècle et peut-être même d'une époque beaucoup plus tardive. Leur auteur est en tout cas antérieur à l'Ecclésiastique (vers. 200) qui mentionne les douze petits prophètes (chap 49, vers. 10) après Jérémie et Ézéchiel, mais postérieur à Joël (vers. 400). C'est dire qu'il est le dernier des prophètes de l'Ancien Testament. Après lui, aucune voix prophétique ne retentira plus jusqu'à Jean Baptiste.
L'ouvrage lui-même est une compilation où l'on discerne facilement l'influence des autres inspirés : Osée, Jérémie, Ézéchiel, le Livre de la Consolation (du deuxième Isaïe), Joël. Le genre apocalyptique, qui s'affirmait déjà dans la première partie, s'épanouit ici, spécialement dans l'annonce du combat de la fin des temps, et le messianisme apparaît dans la personne d'un Messie humble et doux. Peut-être faudrait-il rattacher également le « transpercé » du second Zacharie (chap. 12, vers. 10) au thème du Serviteur souffrant (Isaïe, chap. 53). Le Temple enfin est dans ces oracles appelé à devenir le centre spirituel de l'humanité, désormais convertie au vrai Dieu ; ainsi s'imposera une sacralisation complète des hommes et des choses en Israël.
MALACHIE ramène un siècle et demi au moins en arrière (vers 450). L'auteur de cet ultime recueil du livre commun aux juifs et aux chrétiens est très marqué par le Deutéronome et met l'accent sur le culte. Mais il centre son message sur l'avènement du Messie : ce sont les infidélités des prêtres qui l'empêchent jusqu'ici. Le « jour du Seigneur » sera préparé par un messager; alors le culte sera transformé spirituellement : c'est déjà le culte universel (chap. 1 vers. 11 ) en esprit, et en vérité, dont parlera le quatrième évangile Jean, chap. 4, vers. 23). L'attitude morale du juste doit être une préparation à ce « jour » : d'où la condamnation des divorces et le rejet des mariages mixtes (croyants et païens). Une finale ajoutée tardivement compare enfin à Élie le messager des derniers temps.
J. DHEILLY
En ce temps-là, la Bible No 72