Changements révolutionnaires dans les écoles talmudiques

 

Le ministre des Finances d'Israël, Jaakov Neeman, a étonné tant les non-religieux que les ultraorthodoxes, quand, dans une interview à un journal, il qualifia les élèves des écoles du Talmud de parasites qui vivent aux frais de la société israélienne. Neeman aurait l'intention d'intégrer les orthodoxes dans le secteur public et de les faire servir sous les drapeaux, même si ce ne doit être que symboliquement.

Les non-religieux furent fort surpris d'entendre ces déclarations de la bouche précisément d'un homme très religieux. Neeman est de ceux qui se mettent sur la tête une imposante kippa pour affirmer leur judaïsme et leur religiosité. Ses propos clouèrent aussi le bec aux ultraorthodoxes. Ils ne pouvaient croire qu'un juif religieux comme lui, qui a ses entrées dans les cours des rabbinats, veuille porter préjudice au monde des écoles talmudiques.

On comprend dès lors que le jour même de la publication de l'interview, le ministre Neeman ait été insulté et agressé par quelques ultrareligieux. Il reçut à la tête des mots comme «créature du méchant» «ennemi d'Israël» et «méchant Haman», la plus grave injure de la tradition judaïque écrite.

Mais Neeman ne se laissa pas désarçonner et détourner de ses projets. Il croit fermement que ceux-ci seront utiles aux écoles talmudiques et à leurs élèves. Ils ne devraient ainsi plus avoir faim. Et cela permettrait à plusieurs d'entre eux de se former professionnellement; ils auraient alors la possibilité de s'intégrer au marché du travail, de gagner de l'argent et de ne plus vivre dans la misère.

Le ministre des Finances et la population israélienne non-religieuse étaient fort préoccupés par la forte augmentation, ces derniers temps, du nombre d'élèves ultraorthodoxes dans les écoles talmudiques. Les étudiants de la Thora ne travaillent pas, et ils reçoivent des subsides de l'Etat. Le nombre des élèves du Talmud a connu une croissance de l'ordre de 32% au cours de ces 11 dernières années, ce qui a naturellement entraîné un recul de la main-d'oeuvre et du nombre de ceux qui subviennent eux-mêmes à leurs besoins. Le total des étudiants du Talmud qui ne travaillent pas est passé de 1,2% de la population active en Israël en 1980 à 2,3% en 1993 - donc presque le double.

Selon les données fournies par le ministère des Finances, les enfants de ces étudiants& Talmud, qui ne travaillent pas non plus, représentaient en 1993 5,7% de tous les enfants israéliens. D'après des estimations statistiques, leur nombre sera, dans les neuf prochaines années, de l'ordre de 10% de l'ensemble des jeunes Israéliens. Un enfant sur dix jeunes Israéliens appartiendra à une famille dont le chef n'exercera pas d'activité professionnelle.

Ces chiffres constituent une matière explosive aux points de vue social et économique, que le ministre des Finances tente de désamorcer à temps. Une partie des problèmes a sa source dans l'ancien règlement, selon lequel les étudiants du Talmud sont libres du service militaire aussi longtemps qu'ils fréquentent l'école; pour cette raison, leur nombre devient toujours plus grand, même si certains d'entre eux sont loin d'être doués. Neeman a proposé que les élèves des écoles du Talmud ne servent qu'un mois. Ils y recevraient une formation de défense passive (Haga). En même temps, des cours d'informatique et d'économie devraient aussi être organisés pour les étudiants du Talmud. Le nombre des personnes occupées s'en trouve ainsi élargi, le produit intérieur brut agrandi et la dépendance des étudiants à l'égard du soutien financier de l'Etat amoindrie. Beaucoup de familles d'élèves des écoles du Talmud vivent dans la misère. Cette solution améliorerait certainement leur situation.

Par cette proposition, Neeman s'est attiré de sévères critiques, surtout dans les rangs des partis ultraorthodoxes; c'est par ceux-ci que passent les allocations pour les écoles talmudiques. Ils ne sont naturellement pas prêts à renoncer à cet important canal d'exercice du pouvoir, dont ils disposent grâce au système actuel. Résultat: les partis montent aux barricades tandis que l'opinion reste indifférente.

Nouvelles d'Israël 11 / 1997

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