UNE PROPHÉTIE NÉGATIVE - ET QUI S'ACCOMPLIT POURTANT
Durant le mois d'octobre, Israël a commencé à appliquer les traités signés par le nouveau gouvernement dirigé par Ehud Barak. A la mi-octobre, 151 détenus palestiniens ont été libérés et renvoyés chez eux. Parmi ceux-ci, il y avait notamment une douzaine de partisans du mouvement Hamas et du «Djihâd islamique» («Guerre Sainte») ayant commis des attentats sur des juifs.
La libération de prisonniers, y compris de ceux «ayant du sang sur les mains», autrement dit activement impliqués dans la perpétration d'attentats, a lancé une controverse publique en Israël. Le gouvernement a rejeté les critiques en bloc et rappelé en outre qu'en son temps, le précédent Premier ministre, membre du Likoud, avait lui aussi signé des accords similaires et libéré des détenus.
L'évacuation de quelques bases de colons en Judée et en Samarie constitue un élément supplémentaire attestant que la phase d'application a commencé en octobre. Les évacuations s'inscrivent dans le cadre d'un processus qui permettra, pour ainsi dire, de «concentrer» les colonies juives. Le morcellement des colonies pose un problème qu'il faut résoudre tant du côté de leur sécurité que de la protection des habitants.
Le gouvernement a d'abord envisagé d'évacuer les colonies illégales dans l'ensemble de la Judée et de la Samarie. Il s'agit de 47 points d'appui, dont la plupart se sont créés après les dernières élections. Ces points d'appui n'ont jamais été approuvés durant la période transitoire (c'est-à-dire avant que le nouveau gouvernement n'entre en fonction), excepté par des fonctionnaires subalternes.
L'annonce de la volonté d'évacuer ces colonies a provoqué une tempête d'indignation tant parmi les membres du Likoud, dans l'opposition, qu'auprès des colons proprement dits. Barak, conscient de la puissance de ces protestations, a au moins réussi à affaiblir la vague. Il a exprimé publiquement sa sympathie et son soutien pour le «travail des colons en Judée, en Samarie et à Gaza.>, Il a en outre accepté de mener des négociations avec les dirigeants du Conseil des colons au sujet des évacuations.
Ces négociations ont en effet eu lieu, et il a récemment été décidé d'évacuer 12 de ces 47 colonies. Les chefs des colons ont présenté cette décision comme «un grand succès à [notre] avantage». Selon eux, les colonies à évacuer sont «pratiquement désertes». En même temps, la décision a permis d'éviter l'évacuation des 35 autres colonies, elles aussi illégales.
Bien que l'on ait tenté de présenter l'affaire sous un jour positif, les milieux d'extrême-droite des colonies ont déclaré sans ambiguïté qu'ils n'accepteraient pas cette décision. Dans les milieux de droite, des milliers de personnes ont signalé très clairement qu'ils se défendraient physiquement contre l'application de cette décision, précisant toutefois que ce serait «dans le cadre légal». De fait, en voulant évacuer quelques bases, l'armée et la police se sont heurtées à une résistance acharnée de la part des jeunes colons.
Indépendamment de leurs activités dans les territoires, des milliers de colons, pour la plupart des jeunes, ont manifesté devant le domicile de Barak à Jérusalem. Durant cette manifestation, ce dernier a fait l'objet d'insultes et de menaces, les manifestants précisant qu'ils s'opposeraient de toutes leurs forces aux évacuations et citant même quelques jugements halachiques de certains rabbins refusant une évacuation des zones d'Eretz Israël.
L'atmosphère de cette démonstration, ainsi que le rapport qu'en ont fait les médias à caractère religieux, n'ont rappelé que trop douloureusement la période précédant l'assassinat de Rabin. Le public s'est montré inquiet, car ces événements se sont justement produits à une période qui, d'après le calendrier juif, est proche de l'anniversaire de l'assassinat de Rabin. Les chefs des colons étaient soucieux, eux aussi. Aussi le Conseil des colons a-t-il décidé de se plier, fût-ce partiellement, à la décision d'évacuer en Judée, en Samarie et à Gaza, de manière à pouvoir garantir l'existence des autres colonies. Le gouvernement a ainsi pu évacuer quatre des bases en quelques jours, en dépit d'une atmosphère échauffée et chargée.
A l'heure où nous écrivons ces lignes, fin octobre, on ne sait toujours pas comment se terminera cette affaire. Mais deux points centraux se dessinent déjà très clairement: d'abord, un précédent historique, dans la mesure où les chefs des colons ont non seulement reconnu la nécessité d'évacuer quelques colonies - même s'il ne s'agit pas de colonies importantes -, mais également coopéré. Le deuxième point n'est pas moins important, car une scission s'est produite au sein des colons, surtout entre les vétérans et les jeunes. La jeune génération de colons a continué à manifester sa volonté de protéger physiquement les colonies - «de leur propre corps» - contre toute tentative d'évacuation.
Commentaire:
Le fait que les colons collaborent déjà partiellement avec le gouvernement israélien n'est-il pas un signe que tout s'accomplit rapidement et que sur le terrain, des faits concourent à établir une fausse paix? Au moment où ce commentaire est rédigé, Clinton rencontre Barak et Arafat à Oslo pour, si possible, faire l'unanimité sur tous les problèmes. Durant les quelques mois restants avant la fin de son mandat, Clinton aimerait conclure un accord global d'Israël avec Arafat et la Syrie (et donc également le Liban). Il entrerait ainsi dans l'Histoire comme le président qui a réussi à mettre sur pied les accords de paix entre l'Etat d'Israël et ses voisins. Mais Clinton devrait savoir que Dieu voit les choses d'un tout autre oeil. Ce n'est pas ce que disent les hommes à ce propos, mais ce qu'Il en dit, Lui, qui est décisif!
CM
Nouvelles d'Israël Décembre 1999