de notre correspondant à Jérusalem.
Depuis le retrait de Begin l'ambiance était tendue en Israël. La tentative de former un gouvernement d'union nationale avec une grande coalition avec le Ma'arach - l'opposition actuelle - et le Likoud - le parti gouvernemental de Begin - a échoué à cause de la divergence d'opinions dans les questions fondamentales. Ainsi, par exemple, le Likoud cherche à favoriser la politique d'implantations. Par contre le Ma'arach, dont Shimon Peres est le chef, veut freiner cette expansion de colonisation, éventuellement même le sacrifier pour la paix dans le cadre d'une option jordanienne. Ce serait un autre Yamit. En outre, on reproche au Likoud d'avoir fait naufrage avec sa politique des finances. L'inflation atteignit un niveau record, alors que l'exportation diminua de 15% en moyenne. Le moment arriva où le président d'Etat Chaïm Herzog chargea officiellement le ministre des affaires étrangères, Yitzhak Shamir (68), de constituer un nouveau gouvernement. L'optimisme du début disparut brusquement lorsque l'ancienne coalition, déjà trop faible avec seulement 62 députés sur 120, commença à se compromettre. En effet, six des députés du parti gouvernant, dont l'ancien ministre des finances Hurvitz, se révoltaient. Par conséquent il ne restait plus que 58 sièges gouvernementaux. Toutefois, Yitzhak Shamir, dont la persévérance de combattant clandestin est bien connue, continua son chemin sans pour autant leurrer les renégats en leur proposant des postes de ministres, mais en présentant le cabinet existant comme ancien gouvernement rénové. Lui-même, Premier ministre et ministre des Affaires étrangères tout à la fois, se présenta le 10 octobre à la Knesseth pour les élections. Cela n'aurait pu être plus juste: Avec 60 voix, la Knesseth vota pour l'ancien gouvernement rénové, 53 députés votèrent contre. Menachem Begin, qui par tristesse, se fait pousser la barbe, est resté chez lui. Abuhatzera n'était pas non plus présent, Melamed se trouvait en Corée du Sud pendant ce temps et Hurvitz s'abstint de voter. Autrement dit, la coalition gouvernementale pourra, en réalité, compter sur 63 à 64 voix lors de ses délibérations. En ce qui concerne d'éventuelles élections anticipées, cela dépend des circonstances économiques et de la façon dont le problème de l'inflation sera résolu. S'il devait y avoir d'autres effondrements de la bourse, si l'inflation devait encore augmenter, une anticipation des nouvelles élections serait inévitable. Seulement, il est peu sûr qu'il en résulterait la victoire pour l'opposition actuelle avec Shimon Peres - et Peres le sait car: Son programme gouvernemental d'opposition n'aboutirait pas à une solution heureuse.
Cependant, derrière les coulisses, on Pense que ces problèmes économiques passeront bientôt à l'arrière-plan en raison du front des grandes puissances qui se forme au Liban. L'OLP, tout en existant encore, ne joue plus qu'un rôle insignifiant. Toutefois, elle a offert ses bons offices aux grandes puissances pour qu'elles entrent en lice. Dans la baie de Beyrouth on aperçoit déjà 12 importants cuirassés d'escadre, parmi eux le porte-avions Eisenhower. A moins de 40 km à l'est, la Syrie stationne ses troupes, et des combats entre soldats américains et syriens ont été enregistrés. Mais l'Amérique a déjoué stratégiquement ces incidents sachant qu'en Syrie et derrière la frontière attendent 8000 conseillers militaires russes et 52 000 , soldats russes pour une éventuelle contre-attaque. Pour les USA ce serait un deuxième Vietnam. Cependant, ils ne pourront plus se contenir longtemps, car la semaine dernière, les Russes ont installé en Syrie les fusées très modernes SS-21 qui sont équivalentes aux Pershing Il américains ... pourtant, qui manifeste là-contre?
L'Arabie Saoudite a remis trois milliards de DM à Damas, afin de gagner la Syrie pour un traité de paix au Liban c'est ce qui a été publié. Mais la vérité est que cet argent servait à payer les factures que Damas devait à Moscou pour les livraisons d'armes. Ce n'est que de cette façon-là que le Kremlin pouvait fournir ces super-fusées. L'Amérique et l'Europe qui se disent amies des Saoudites, ont été trompées une nouvelle fois. A côté de cela, des Libanais, des terroristes de l'OLP revenus au Liban, des Syriens et des druses communistes conduits par Jumblatt, se battent jusqu'au sang. Chacun proclame sa propre victoire. C'est comme si l'un jouait à l'échec et l'autre à la reine sur le même échiquier. Personne ne peut vaincre mais tous peuvent dire: J'ai gagné. Les ennemis d'Israël restent dans l'aveuglement!
Israël, pressentant ce qui se trame au pays des cèdres, construit sa ligne de front le long du fleuve Awali qui forme la limite des 45 km. Cela lui permettra, en cas d'urgence, un blocage direct de la frontière de l'Awali. Malgré le cessez-le-feu officiel entre druses et chrétiens, le flot des réfugiés libanais vers la zone israélienne ne s'arrête pas, car les Libanais - qu'ils soient chrétiens, druses ou musulmans - ont reconnu que: «Sous l'étoile d'Israël nous sommes plus sûrs que parmi nos propres frères et les troupes de paix de l'ONU» - c'est ce que déclara un chef de tribu. Ils appellent déjà le secteur israélien du Sud-Liban «pays du salut», rejoignant ainsi la notion de «Terre Sainte» - le coeur du pays d'Israël. Heureux celui qui s'apprête à considérer le sioniste non comme un ennemi, mais d'y voir la nation par laquelle vient le salut. C'est pourquoi Israël, qui de toute manière est destiné, selon les promesses divines, à être une bénédiction pour toutes les nations - on en voit les premiers signes au Liban - attend le Messie - d'autant plus que ce peuple est politiquement ballotté à l'intérieur comme à l'extérieur.
Nouvelles d'Israël 01 / 1984