POUR LA PREMIERE FOIS DE SON HISTOIRE, ISRAEL N'A PAS RÉPLIQUÉ AUX ATTAQUES DONT IL FAISAIT L'OBJET, PENDANT LA GUERRE DU GOLFE. CETTE RETENUE EST APPAREMMENT MAL RÉCOMPENSÉE. LES AMÉRICAINS SEMBLENT, AU CONTRAIRE, RÉCLAMER AUX ISRAÉLIENS DE NOUVEAUX GESTES EN RÉCOMPENSE DE LEUR VICTOIRE DANS LE GOLFE. LE PREMIER MINISTRE ITZHAK SHAMIR EST RESTÉ FERME LORS DE LA VISITE DU CHEF DE LA DIPLOMATIE AMÉRICAINE, JAMES BAKER, LES 11 ET 12 MARS. LA «GUERRE DES COUTEAUX» LUI DONNE RAISON: EN UN MOIS, DE LA FIN DE LA GUERRE DU GOLFE À LA FIN MARS, 16 PERSONNES ONT ÉTÉ POIGNARDÉES DANS LA RUE. SIX D'ENTRE ELLES ONT PERDU LA VIE.
Saddam Hussein s'appelait «la mère de toutes les batailles». Et sous la menace de sa gigantesque armée, il réveilla le monde de sa torpeur. La guerre froide entre l'Est et l'Ouest venait juste de s'achever avec la chute du Mur de Berlin, quand le tyran babylonien fit sursauter tout le monde en engageant sa danse de mort. En réalité, vue de plus près, cette crise du Golfe n'était qu'une affaire interne aux Arabes comme il y en eut tant entre Musulmans.
Le fait que les Américains se soient mis fraternellement et rapidement du côté du Koweït, bien que les Etats-Unis n'importent que 3% de leur pétrole de ce pays, étonna plus d'un spécialiste du Proche-Orient, et pas seulement les experts israéliens. Fallait-il y voir le souci personnel du président George Bush, décrit comme faible, de profiter de la situation pour prouver le contraire? Fallait-il y voir le besoin des Américains de faire oublier le traumatisme vietnamien et de s'imposer à nouveau comme une Super Puissance, en s'engageant dans une guerre dictée par la mégalomanie de Saddam Hussein? Ceux qui connaissent l'histoire du monde savent que les grands évènements ont pour origine l'orgueil de ses dirigeants! Mais dans ce cas précis, un certain aveuglement, l'absence de discernement de la réalité, a aussi joué un rôle. Cet aveuglement a été conduit par Dieu qui dirige tout mieux que ne le ferait un être humain en se fiant à sa seule raison. Car, maintenant, on s'aperçoit que les Etats-Unis se sont lourdement trompés sur la puissance de l'Irak. On sait désormais que ce pays n'avait pas un potentiel militaire tel qu'il devait susciter ce formidable déploiement de forces internationales. Cela étant, à présent, l'ONU et les grandes puissances se sont détournées du Proche-Orient et Israël a été placé en ligne de mire de façon plus forte qu'auparavant.
Bien que la guerre du Golfe n'ait pas été une «guerre juive», et que les Américains aient toujours affirmé qu'il n'y aurait pas de «linkage», pas de lien, entre la guerre du Golfe et le problème israélo-palestinien, tout revient quand même vers ce problème. Saddam Hussein est presque oublié, ainsi que la répression sanglante contre ses opposants: le monde ne s'en soucie guère. Dans les conversations, seuls reviennent Israël et les exigences des Palestiniens. Le «nouvel ordre mondial» de George Bush veut imposer à Israël la «Pax Americana», à savoir: la restitution des territoires en échange de la paix avec les terroristes.
Mais le gouvernement israélien ne l'accepte pas. Qu'Itzhak Shamir traîne les pieds profite à Israël, car il bloque tout rapport fait entre le problème palestinien et la guerre du Golfe. A Jérusalem, on sait très bien que les USA aimeraient redorer leur blason sur le compte d'Israël, en obtenant qu'il rende les territoires.
Le responsable de l'OLP, Yasser Arafat, cherche aussi à réhabiliter son image en Occident, il fait soudain des concessions en annonçant qu'il renoncerait à la rive ouest du Jourdain si, en échange, Jérusalem était reconnue comme capitale du futur Etat palestinien. Mais en Israël tout le monde est unanime:. Jérusalem restera la capitale éternelle et indivisible de l'Etat hébreu d'Israël. Ainsi, les retombées fâcheuses de la guerre du Golfe n'atteignent que Sion!
Quand le Chef de l'Iran, Khomeiny, condamnait Israël, cela se passait encore au large. Mais l'Est et l'Ouest maintenaient l'équilibre en armant l'Irak pour éviter que les Iraniens ne deviennent trop puissants. Puis, armés par l'Est et l'Ouest, les Irakiens se sont sentis assez forts pour déclarer la guerre sainte à Israël. C'est ainsi que, pendant la guerre du Golfe, l'Irak a envoyé 39 missiles «Scud» capables de couvrir 650 km et d'atteindre Tel Aviv. 1644 familles israéliennes ont perdu leur toit et les dégâts se chiffrent à près de 4 milliards de dollars.
Les Etats-Unis ont jubilé quand les Syriens se sont laissés convaincre d'entrer auprès des Américains dans la coalition anti-Saddam Hussein. Cela a, en revanche, provoqué une grande inquiétude en Israël, car le tout-puissant Hafez-el-Assad ne s'est pas engagé ainsi pour plaire aux Américains, mais pour se débarrasser de son rival irakien et pour reprendre le leadership de la guerre contre Israël après la chute de Saddam Hussein. Le Ministre des Affaires étrangères israélien, Moshe Arens, a ainsi averti le monde que, pour son pays, la Syrie représentait un plus grand danger que l'Irak. Les Syriens se sont dotés d'un arsenal plus important et plus moderne que l'Irak avant la guerre du Golfe. Aujourd'hui, les puissances mondiales se sentent obligées de fournir à la Syrie, en remerciement de sa coopération pendant la crise, des armes et de fortes sommes d'argent, comme les Soviétiques le font depuis longtemps. Pendant que le Président américain George Bush évoquait la Pax Americana, de gros navires amenaient de Corée du Nord en Syrie de nouveaux missiles «Scud». Pour atteindre leurs cibles contre Israël, les missiles syriens n'ont pas besoin d'une portée de 650 km. 300 km suffisent!
Le cercle se referme de plus en plus, avec Jérusalem comme objectif final. Il est clair que, pour Israël, la diplomatie prend fin quand Jérusalem est en cause: c'est ce que le Secrétaire d'Etat américain James Baker a dû entendre à plusieurs reprises pendant sa visite en Israël, réalisant que Jérusalem est «une pierre pesante» (Zacharie 12, 3) dont on ne peut se débarrasser facilement.
Les rabbins d' Israël ont répondu par cette affirmation au discours triomphal de George Bush constatant que la véritable guerre du Golfe n'avait duré que 100 heures: «.si seulement elle avait duré 101 heures, cela aurait été l'affaire de l'Archange Michaël, dont le nom a une valeur numérique de 101, cela n'aurait pas été complètement l'affaire des Etats-Unis qui auraient connu un nouveau Vietnam».
Immédiatement après l'annonce de la capitulation de Saddam Hussein, toutes les Autorités d'Israël, du président Herzog et du premier Ministre Shamir aux ministres et aux élus de la Knesseth, se sont rendues à la grande synagogue de Jérusalem, pour remercier Dieu de ce nouveau miracle de «Purim» (1), car, une fois de plus, Dieu a empêché la destruction d'Israël. Dans l'histoire du peuple juif, on trouve beaucoup de Haman, qu'ils s'appellent Haman Hitler, Haman Nasser ou Haman Hussein, mais Dieu a toujours protégé son peuple et il continuera à le faire dans l'avenir, même si, un jour, tous les peuples de la terre doivent se tourner contre Jérusalem; à la fin se produira ce grand miracle de «Purim»: la délivrance par le Messie.
D'un côté Israël attend donc, dans l'avenir, un nouveau «Purim». Mais d'un autre côté, les Israéliens se préparent militairement pour une guerre prochaine, par exemple en testant le missile anti-missiles «Hetz». La guerre du Golfe leur a en effet enseigné qu'il est préférable de s'engager eux-mêmes dans le combat, le prix à payer après coup (la soumission d'Israël au nouvel ordre mondial) étant décidément trop élevé.
Lévi Hayatt
(1) «Purim» est une fête juive instituée pour commémorer la délivrance des juifs exilés en Perse, quand Haman complota de les exterminer, au Ve siècle avant Jésus-Christ selon le livre d'Esther de l'Ancien Testament.
AVENEMENT Avril 1991 No 25 / P 7