En ce mois de mai, Israël fête ses 50 ans d'existence. A cette occasion, Fredi Winkler, «père» et directeur de notre maison de repos Berri-Shalom, a écrit ce message spécial exclusivement à l'intention de tous les lecteurs des «Nouvelles d'Israël».
Que le 1er mai de cette année Israël célèbre son 50 ème anniversaire comme Etat indépendant, l'événement revêt une bien plus grande signification que pareille circonstance pour toute autre nation. Tout d'abord parce qu'il est le peuple de la Bible au travers duquel Dieu s'est révélé d'une manière unique et par lequel Il nous a donné les Ecritures. De plus, Jésus, notre Sauveur, est issu de ce peuple; de lui sont également sortis les apôtres et les premiers croyants qui nous ont transmis la bonne nouvelle du salut et de la foi, laquelle s'est répandue parmi les nations. Il y a aussi que l'histoire d'Israël sort de l'ordinaire. Aucun autre peuple n'a pu survivre à une dispersion dans le monde entier de pratiquement 2000 ans sans avoir son propre pays. Qu'est-ce qui a bien pu l'empêcher de se diluer jusqu'à sa totale disparition? Les réponses à cette question sont multiples.
Mais en fin de compte, c'est Dieu qui a tenu Sa promesse de le ramener, qui l'a gardé d'une assimilation définitive et a maintenu en chacun des Juifs l'espoir d'une patrie renaissante, et cela à travers la détresse et la persécution. A la fin du siècle dernier, la plupart des Hébreux avaient renoncé au rêve d'une nation qui serait leur. C'est ainsi que les Juifs réformés d'Amérique déclarèrent en 1885 : «Nous ne nous considérons plus comme une nation, mais comme une communauté religieuse; nous n'attendons dès lors plus un retour en Palestine ni une restauration des lois dans le cadre d'un Etat juif nous appartenant.»
Mais Dieu pensait différemment. La condition de la plupart des Juifs dans les pays qui s'éveillaient à l'industrie était bien meilleure que par le passé. Ils avaient obtenu la citoyenneté et l'égalité des droits dans presque toutes les nations où ils se trouvaient; et personne ne songeait à émigrer vers cette province turque qu'était la Palestine, transformée en désert et sous-développée. Mais il y eut la persécution qui incita les premiers Juifs russes à regagner la terre des pères. Les persécutions culminèrent durant l'époque des nazis, et elles déferlèrent sur toute l'Europe. Cette terrible épreuve fit comprendre aux Juifs que seul un Etat qui serait leur pouvait constituer la solution à leurs problèmes. Ce ne fut donc pas tellement leur aspiration profonde qui les conduisit à fonder l'Etat d'Israël, mais bien la lutte pour leur survie. Ce souhait «L'an prochain à Jérusalem! » n'était qu'un voeu pieux sans véritable contenu, jusqu'à ce qu'il devienne le chemin du salut pour des centaines de milliers de personnes. Mais l'arrivée dans le pays des patriarches fut pour la plupart d'entre eux un réveil brutal, car elle n'était pas synonyme de repos: elle marquait le début d'une âpre lutte pour la vie. Mais pouvoir être dans son pays en valait bien la peine.
La décision de proclamer un Etat juif après l'expiration du mandat britannique sur la Palestine en 1948 ne fut pas facile à réaliser, car il fallait s'incliner devant le plan onusien du partage de la Palestine en deux Etats: un juif et un arabe. Les Juifs marquèrent immédiatement leur accord, car ils y voyaient une chance unique d'obtenir leur indépendance. Par contre, les Arabes le rejetèrent dès le début. on ne se faisait aucune illusion: cela signifiait la guerre. C'est ainsi que commença le long conflit entre les Juifs et les Arabes, lequel dure jusqu'à ce jour et a fait couler beaucoup de sang et de larmes. Mais il importait tout d'abord que les membres de l'0NU votent ce plan. Chaque voix était attendue avec une tension fébrile: chaque «oui» déclenchait des explosions de joie. Lorsqu'il apparut que la majorité des votants se prononçait en faveur du partage, l'allégresse de la population juive atteignit son comble: les gens descendirent dans les rues et sur les places publiques pour crier leur satisfaction; on chanta et on dansa toute la nuit. Mais en même temps éclata la guerre d'indépendance, qui réunit, contre Israël, cinq nations voisines l'Egypte, la Jordanie, la Syrie, le Liban et l'Irak ainsi que des volontaires venus de Libye, du Yémen et d'Arabie Saoudite. Les Arabes pensaient résoudre le problème en quinze jours maximum. Mais le fait de savoir qu'il s'agissait de tout ou rien poussa le peuple juif à accomplir l'impossible. En 1949, on signa un accord d'armistice avec les pays voisins, Israël ayant réussi à élargir ses frontières. c'est ainsi que l'Etat hébreu de vint un miracle des temps modernes, ou l'on ne peut manquer de voir la main de Dieu. Après pratiquement 2000 ans d'exil, Il s'était de nouveau occupé de Son peuple en lui rendant une partie de ses territoires.
Mais la lutte avec les voisins arabes n'était pas terminée pour autant. L'histoire récente nous est plus ou moins connue. La guerre des Six Jours remit tout le sol palestinien aux mains des Israéliens, mais il y avait là une forte population arabe, qui compte aujourd'hui environ 2,4 millions d'individus en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Les pays arabes, qui ne pouvaient encaisser ce coup, mirent au point une revanche qui surprit les Juifs non préparés. La guerre du Yom Kippour en 1973 exactement au milieu des 50 années fut une dure claque pour Israël, même si l'on put éviter le pire et arrêter les envahisseurs. Mais les pertes et le gaspillage, qui furent énormes, amenèrent Israël à une profonde réflexion. Ne serait-il pas possible de conclure un traité de paix avec les Arabes? En 1977, le Président Sadate d'Egypte se rendit à Jérusalem pour offrir un accord de paix, qui, certes, exigeait de l'Etat hébreu qu'il abandonne tout le Sinaï, mais qui finalement lui apportait le premier traité de paix avec un voisin arabe. Entre-temps, Israël fit la paix également avec la Jordanie, et il essaie de l'établir avec les Palestiniens. L'Etat juif est ainsi parvenu à un tournant important de son histoire; pour son 50 ème anniversaire, ce peuple se trouve placé devant des décisions capitales pour son avenir: faut-il céder des territoires en échange de la paix et peut-on faire confiance aux Palestiniens?
Si l'on regarde en arrière, on doit constater qu'en 1948, les Arabes, qui n'étaient pas décidés à renoncer, perdirent tout et empêchèrent une cohabitation pacifique. Entre-temps, les Palestiniens ont traversé des épreuves si pénibles qu'ils se contentent d'une partie du pays, bien que n'ayant pas réellement digéré la perte subie. Actuellement, il y a surtout des Juifs qui ne veulent pas renoncer; cela pose un point de rupture au sein du peuple israélien entre ceux qui sont prêts à faire des concessions pour la paix même à la Syrie et au Liban, et ceux qui n'y sont pas du tout disposés. Cette lutte interne a atteint son point cul minant en cette 50 ème année anniversaire de l'Etat d'Israël. Ce petit pays se voit pressé de toutes parts; et son souvent unique grand ami, les USA, est le premier à pousser Israël à tenter l'aventure de la paix.
Qu'apportera l'avenir? La guerre ou la paix? Je pense que nous pouvons affirmer avec certitude: comme la main de Dieu était présente en 1948, elle est là aujourd'hui encore. Le but final divin est d'instaurer la juste domination du Messie. Mais avant qu'il en soit ainsi, il y aura pour Israël et ce monde un temps particulièrement dur - c'est ce qu'enseignent les sages de Canaan. Il n'est pas aisé de dire si la chose est pour maintenant ou s'il y aura encore une période de paix. Personnellement, je crois qu'Israël ne commettra pas la faute des Palestiniens en 1948 en refusant de faire des concessions, mais qu'il parviendra à une certaine paix par la pénible voie du renoncement. Ces décisions lourdes de conséquences assombrissent les festivités du 50 ème anniversaire, et il n'y aura pas de véritable atmosphère de joie.
Une telle tranche de 50 années incite à regarder en arrière et à dresser un bilan, mais aussi naturellement à se tourner vers l'avenir dans l'espoir qu'il sera meilleur. C'est ce qui se fait actuellement en Israël par une série de films documentaires télévisés en 50 émissions, qui ont suscité bien des commentaires. Il est évident que l'on maîtrisera mieux l'avenir si l'on a retenu les leçons du passé. Ce 50 ème anniversaire a vu bien des luttes internes atteindre leur point culminant dans une société qui est tout sauf homogène avec toutes ses différences politiques allant de l'extrême gauche à l'extrême droite. A cela viennent s'ajouter tous les courants religieux; bien qu'une grande partie de la population ne soit pas strictement religieuse, le peuple, dans son ensemble, a conscience de sa mission en raison de son grand passé et il sait qu'il jouera, dans un avenir proche, un rôle important, même s'ils sont nombreux à ne pas vouloir y croire.
Ce rôle particulier, que Dieu a précisé dans la Bible pour Son peuple au temps de la fin avant la venue du Messie, nous incite, en tant que croyants, à porter des regards très attentifs sur Israël, conscients que nous sommes que les événements en et autour de cette nation sont de la plus haute importance.
Puisse ce verset de Jérémie 29 se réaliser sans tarder «Car je connais les projets que j'ai formés sur vous, dit l'Éternel, projets de paix et non de malheur afin de vous donner un avenir et de l'espérance» (v. l 1). La certitude nous habite que Dieu tiendra Ses promesses, mais le chemin menant au but est encore voilé. Que la paix soit sur Israël!
Nouvelles d'Israël 05 / 1998