La chute du gouvernement Netanyahou était inévitable. Au cours de ces quelques derniers mois, surtout après les négociations menées par Netanyahou à Wye-Plantation, le gouvernement s'est désagrégé en composantes disparates et divergentes, tirant chaque membre du gouvernement à hue et à dia, tant au niveau de la politique nationale que des principes sociaux et économiques. Cette situation ne pouvait naturellement que conduire à l'incapacité du gouvernement à prendre des décisions et, partant, à la paralysie totale de tout le système politique.
Le budget national représente un des exemples les plus marquants de cette situation. Selon la loi en vigueur, le gouvernement doit voter le budget avant le 31 décembre. Le gouvernement Netanyahou n'y est pas parvenu. Il a été impossible de le voter, car les partis de la coalition étaient mécontents et chacun réclamait des subventions selon ses secteurs de prédilection. Celles-ci s'élevaient à des milliards de shekels, une somme qui menaçait la stabilité économique.
Suite à cette incapacité à voter un plan budgétaire, et personnellement déçu par Netanyahou, le ministre des Finances Jaakov Neeman a présenté sa démission. Neeman, un ami très proche de Netanyahou, aurait joué les intermédiaires entre ce dernier et son épouse à l'époque où son couple était en crise, à la veille des élections du conseil municipal. Son départ a porté un coup personnel très rude à Netanyahou - la légendaire goutte faisant déborder le vase - et lui a fait prendre conscience qu'il n'avait plus d'autre choix que la démission.
Avant le départ de Neeman, Netanyahou avait été contraint d'investir une grosse partie de son temps dans des luttes d'influence politique au lieu de pouvoir se consacrer aux affaires courantes. C'était d'autant plus flagrant, y compris dans le domaine des affaires étrangères, que le gouvernement - et donc aussi la coalition - s'était mis dans une situation inextricable rendant plus manifeste que jamais le fossé entre l'idéologie proclamée et les contraintes objectives. Lorsqu'il s'est agi de faire ratifier les accords de Wye-Plantation par la Knesset, la situation de Netanyahou est tombée dans l'absurde. Il a promis aux partis de droite de ne pas appliquer les accords et de ne pas procéder à d'autres retraits d'Eretz Israël, tandis qu'il s'engageait, vis-à-vis des partis de gauche et des représentants des partis arabes, à respecter intégralement les accords et à procéder au retrait des troupes comme convenu. Signalons au passage qu'il a fait ces deux promesses le même jour... Au vu d'une situation politique aussi confuse, humiliante et contradictoire, il n'avait pratiquement pas d'autre choix que de renoncer à son portefeuille de Premier ministre, six mois avant la fin prévue de la législature.
Depuis l'arrivée au pouvoir de Netanyahou, voici trente six mois, son gouvernement a dû surmonter une série presque ininterrompue de crises. Chaque fois, les commentateurs politiques s'accordaient à dire qu'il s'agissait d'une crise plus que sérieuse, qui menaçait à tout instant de provoquer la chute du gouvernement et de son chef. Ce cadet des Premiers ministres de l'Etat d'Israël devrait faire son balluchon et s'en aller.
Mais ces prévisions ne se sont jamais réalisées. Netanyahou s'est révélé être un homme politique au profil très particulier, qui est parvenu à maîtriser des crises que l'on croyait sans issue, à les surmonter et même à en sortir grandi.
Netanyahou a survécu à la signature des accords de Hébron, par lesquels il renonçait pour la première fois à des territoires d'Eretz Israël situés dans cette ville. Il a également maîtrisé l'enquête judiciaire de la crise connue sous le nom de «l'affaire Hébron-Bar-On», ainsi que le camouflet qu'a représenté pour lui l'attentat manqué sur le leader du Hamas, commandité par le Mossad.
Au vu de tout cela, Netanyahou s'est bâti une réputation d'«insubmersible» abonné au succès. Certains l'ont même nommé le«magicien» inébranlable.
Mais la dure réalité politique a contraint ce «magicien» et ce «veinard», comme d'autres le surnommait, à jeter l'éponge. Il convient cependant d'ajouter que Netanyahou est lui-même fermement convaincu qu'il sera réélu aux prochaines élections et qu'il formera le futur gouvernement. Les gens de son parti en sont nettement moins sûrs. Quelques jours à peine après l'annonce des élections anticipées, la presse israélienne a fait savoir qu'il se formait, au sein du Likoud, une opposition dont le but avoué était l'exclusion de Netanyahou. Cette opposition veut présenter un candidat attrayant tant comme chef du parti que comme porte-parole de la campagne qui pourrait mener le Likoud à une victoire électorale.
Les crises du passé ont démontré qu'il ne faut pas prophétiser quant à l'avenir de Netanyahou. Cette fois, néanmoins, il est clair que le gouvernement ne sortira pas indemne de cette crise résultant des accords de Wye. La signature de ces accords et les premiers retraits de troupes ont valu à Netanyahou des problèmes avec sa droite. Celle-ci a menacé de voter contre le gouvernement dans un vote de confiance. Pour écarter cette menace et consolider son équipe, Netanyahou a invoqué l'aide du centre et de la gauche. Il a tenté de s'assurer le soutien du leader du parti Gesher, David Levy, lui promettant le portefeuille des Finances ou de l'infrastructure. Levy, qui avait démissionné de son poste de ministre des Affaires étrangères onze mois plus tôt (non sans critiquer vertement Netanyahou), a accepté l'offre. Mais les négociations ont capoté lorsqu'il est apparu que Netanyahou n'avait aucunement l'intention de céder aux desiderata de Levy.
En même temps, le Premier ministre a tenté de s'opposer à un projet de loi visant à organiser des élections anticipées, et introduit par quelques membres du parti travailliste. A cette fin, ses émissaires ont fourni des efforts héroïques pour récupérer la moindre voix: le ministre de l'intérieur, Ariel Sharon, s'est engagé auprès des représentants du groupe arabe à respecter les retraits prévus dans les accords de Wye-Plantation, leur faisant en outre miroiter de l'aide et un soutien financier pour le secteur arabe.
Tandis qu'il faisait ces promesses, Netanyahou convoquait plusieurs importants représentants de la droite pour leur signifier qu'il gèlerait les traités avec les Palestiniens et suspendrait les retraits.
Ces promesses contradictoires se sont évidemment ébruitées, et Netanyahou s'est retrouvé assis entre deux chaises. Deux semaines avant la visite de Clinton, son gouvernement affrontait la défaite face à la Knesset. On annonça l'exercice parlementaire de la dissolution, procurant ainsi un répit provisoire à Netanyahou.
Pendant ce temps, la pression montait au sein du gouvernement. La presse israélienne faisait état de critiques mordantes et d'échanges vigoureux entre Netanyahou et nombre de ses ministres, dont certains passaient jadis pour ses fidèles acolytes: Limor Livnat et Silvan Shalom, respectivement ministres des Communications et de la Politique scientifique.
Toutes les dissensions internes ont été mises de côté pendant la visite de Clinton. Netanyahou, entièrement consacré à cette visite, était avant tout occupé à essayer de garder la tête hors de l'eau sur le plan de la politique intérieure. Mais en constatant que la gauche ne l'aiderait pas à s'en sortir, il a durci sa position et refusé de poursuivre le retrait des troupes tel que le prévoyait le traité, provoquant de ce fait une confrontation inouïe avec son invité, le président des Etats-Unis.
Après le départ de Clinton, il est apparu que l'estrade politique restait branlante. Jaakov Neeman, ministre des Finances, que l'on croyait être le plus proche de Netanyahou parmi tous les membres du gouvernement, a annoncé sa démission. Cette démission, deux semaines avant la fin de l'année et à un moment où aucun budget n'était prêt, a porté à Netanyahou un coup d'autant plus rude queue s'est accompagnée de critiques farouches de l'entourage du ministre des Finances. Selon ces derniers, le départ de Neeman était fondé sur l'absence d'appui de la part du Premier ministre.
Mais le pire restait à venir: un journal israélien a publié un article fondé sur les déclarations de collaborateurs anonymes du ministre de la Défense. On pouvait y lire que Yitzhak Mordechai était extrêmement courroucé par l'intransigeance de Netanyahou et le gel des accords de Wye, et qu'il s'était prononcé en faveur d'élections anticipées.
Commentaire:
Notre Seigneur Jésus disait déjà qu'un royaume divisé en son sein ne peut exister. C'est pourquoi le gouvernement Netanyahou devait tomber. Mais les méthodes de Netanyahou ne sont-elles pas aussi à l'image de certains chrétiens qui, par amour de la paix, ne veulent léser personne et ne sont plus disposés à défendre fermement leur position et à rester entièrement aux côtés de Jésus? Comme Netanyahou, bien des chrétiens se tiennent eux aussi dans le mensonge.
Car on ne peut servir plusieurs maîtres. Aujourd'hui, ü s'agit de défendre de toutes nos forces la cause de notre Seigneur. Bien entendu, cela nous vaudra des ennemis. Mais il faut que nous, chrétiens, adoptions une attitude claire à cette époque où tout est permis. Qui est encore prêt à nager à contre-courant, et ce, coûte que coûte? CM
Nouvelle d'Israël 02 / 1999