Neuf jours après la signature de l'accord israélo-jordanien à Washington, le Roi Hussein s'est rendu en Israël et à Jérusalem. Cette première visite, effectuée après 27 années de guerre, s'est bornée à être aérienne ; elle devait permettre de visualiser l'importance de l'accord signé par les deux pays pour mettre fin à l'état de guerre.
Cette visite du haut des airs a eu lieu à l'initiative du monarque en personne, désireux de concrétiser le passage de l'accord autorisant les appareils jordaniens à traverser l'espace aérien israélien pour se rendre en Jordanie et la quitter. Ainsi, au terme de vacances passées à Londres avec sa famille, le Roi Hussein a téléphoné à Yitzhak Rabin pour lui demander l'autorisation de survoler Israël en regagnant sa capitale Amman, permission qui lui a bien entendu été accordée par le chef du gouvernement israélien.
Ce vol historique s'est déroulé le 3 août 1994. Le Roi Hussein était lui-même aux commandes de l'appareil royal «Jordanie 001» ; il a survolé l'espace aérien israélien vers 18 heures, escorté par un escadron d'honneur composé de trois chasseurs de type «F-15». Le Roi, qui souhaitait voir Israël du haut des airs, volait à très basse altitude. Ainsi, tous ceux qui se sont trouvés à proximité de sa trajectoire ont pu reconnaître sans confusion possible l'avion royal, dont le carénage s'orne de la couronne jordanienne. A proximité de Tel-Aviv, Hussein s'est entretenu avec Yitzhak Rabin par l'intermédiaire de la radio de bord. «Je suis heureux de vous accueillir en hâte à Tel-Aviv», a déclaré Rabin au cours de cet entretien, enregistré et diffusé par la radio et la télévision israéliennes. «Vous avez une jolie ville», a répondu le souverain dont les mots étaient également retransmis. Rabin a profité de ce bref dialogue pour faire savoir au Roi Hussein que la Knesset avait approuvé à une écrasante majorité les accords de Washington. Hussein l'a chaleureusement remercié et a poursuivi son vol en direction de Jérusalem. Il a décrit deux cercles autour de la ville, survolant le Mont du Temple et les mosquées saintes des musulmans, poursuivant ensuite sa route vers l'Est en direction des frontières de son royaume. Avant de les franchir, le Roi s'est entretenu par radio avec le commandant de son escorte, l'a remercié ainsi que ses pilotes, puis a pénétré dans l'espace aérien jordanien.
La Knesset approuve les accords de Jérusalem. Comme nous l'avons signalé dans le précédent article, la Knesset a approuvé à une majorité de 91 voix contre 3 et 2 abstentions la déclaration de Washington. Ce soutien presque unanime a rassemblé toutes les fractions du parlement et tous les partis sauf le «Moledet» («Patrie»), dont le programme préconise le transfert de tous les Palestiniens hors du Grand Israël (y compris les territoires «occupés») vers la Jordanie.
Les débats à la Knesset ont été ouverts par le Premier ministre Rabin, qui a fait savoir que «c'en était fini de l'état de guerre entre Israël et le royaume hachémite de Jordanie». Rabin a promis que le paragraphe de la Déclaration de Washington évoquant «la mission particulière que remplit actuellement la Jordanie» vis-à-vis des lieux saints de l'Islam à Jérusalem reflétait la situation présente en vertu de laquelle le «Waqf» musulman est nommé et autorisé par la Jordanie. D'après lui, cette déclaration ne laisse en rien présumer de la volonté de renoncer politiquement, sur quelque point que ce soit, à Jérusalem. Les représentants des partis d'opposition ont également manifesté leur soutien à cet accord, reflétant ainsi l'humeur de l'opinion publique israélienne. Selon des sondages portant sur un échantillon représentatif de la population, la plupart des citoyens d'Israël se déclarent optimistes et confiants dans l'avenir de la paix avec les pays arabes au Moyen-Orient.
Inauguration du poste-frontière avec la Jordanie.
C'est par une cérémonie solennelle, impressionnante, enthousiasmante et presque surréaliste que le poste-frontière entre Israël et la Jordanie a été inauguré au nord d'Eilat. Dès la fin de la cérémonie, Yitzhak Rabin s'est rendu au palais du Roi Hussein à Akaba et s'est longuement entretenu avec le monarque.
Quelques semaines à peine se sont écoulées depuis que le processus israélo-jordanien a commencé à porter ses fruits. Il ne fait aucun doute que l'ouverture du poste-frontière et la première visite du Premier ministre israélien à Akaba ont représenté le point culminant de cette période. Le prince héritier jordanien est arrivé en premier lieu, suivi de M. Madjali, chef du gouvernement jordanien, du ministre des Affaires étrangères américain Warren Christopher, et enfin d'Yitzhak Rabin et du ministre des Relations extérieures Shimon Peres. Au début de la cérémonie, ces personnalités sont entrées sous la tente bleue dressée par les jordaniens, et y ont occupé pour un bref entretien les magnifiques sièges dorés amenés du palais royal. Ensuite, le Prince Hassan et M. Rabin ont tranché le ruban symbolique à l'aide de ciseaux dorés, ouvrant ainsi le point de contrôle entre les deux pays.
Dans leurs discours, les trois personnalités ont évoqué le passé. Le chef du gouvernement israélien a déclaré: «Le rêve de paix se fait réalité concrète ; bientôt, nous aurons l'impression qu'il en a toujours été ainsi.» Et en regardant le site où se déroulait la cérémonie, il a ajouté: «Nous nous trouvons sur un champ de mines, et notre regard se tourne vers l'avenir. Voici trois semaines à peine, la paix semblait n'être qu'un rêve - mais nous avons déjà mis en commun des liaisons téléphoniques, certaines affaires et notre tourisme. Nos amis nous disent qu'il leur est difficile de suivre notre rythme. 'Attendez un peu', nous demandent-ils - et je leur réponds que nous avons attendu pendant 46 ans et que nous ne pouvons patienter un seul jour de plus.»
Le Prince héritier Hassan a notamment déclaré: «Voici un des fondements de notre avenir commun. Transformons la vallée du Jourdain et le désert en une vallée de paix!» Il a surpris l'assemblée en clôturant son discours par une citation tirée du livre d'Esaïe: «Et le désert se transformera en une porte de l'espérance.»
La cérémonie s'est accompagnée de gestes personnels émouvants: poignées de main échangées entre les ministres des Relations extérieures, et embrassade réunissant dans la canicule Eliachim. Rubinstein, chef de la délégation israélienne détachée aux négociations, et Abed El Chafez Qaabani, commandant en chef jordanien. Mais une partie 'de la cérémonie mise en scène par les jordaniens a revêtu une importance toute particulière: l'échange de cadeaux. Des familles israéliennes ayant perdu un parent à cause de la guerre se sont retrouvées face à face avec des généraux jordaniens, qui leur ont remis un présent de paix. Ainsi par exemple, un général jordanien a offert à Rachel Schomroni, qui a perdu son fils lors de la guerre du Kippour, un calendrier orné d'une gravure sur bois représentant Pétra. Des chefs de l'armée israélienne ont ensuite remis divers présents aux généraux jordaniens.
De nombreux hôtes avaient été conviés à assister à la cérémonie ; parmi ceux-ci se trouvaient d'anciens commandants du secteur jordanien. Des milliers d'habitants d'Eilat avaient pris position sur la colline située à proximité du point de contrôle, et on pouvait voir, du côté jordanien, des gens saluer en signe de paix. Israéliens et Jordaniens se sont rassemblés à la fin de la cérémonie.
Yitzhak Rabin et le chef de l'armée israélienne ont poursuivi leur route vers Akaba. Pendant que le chef du gouvernement rencontrait le Roi Hussein, les chefs militaires israéliens se rendaient dans les jardins du palais. Après un long entretien entre le souverain et le Premier ministre, il a été décidé que les entretiens bilatéraux des deux délégations reprendraient immédiatement, tant sur les rives de la mer Morte qu'à Akaba. Sur ces entrefaites, le Roi et ses invités ont effectué une brève croisière à bord du yacht royal, escorté par des navires israéliens.
Le lendemain de la fête, 287 personnes - des touristes et des israéliens en possession d'un passeport étranger - ont traversé le nouveau point de contrôle d'Eilat à Akaba et retour. Une police des frontières fonctionne déjà du côté israélien, et une banque ainsi qu'un bureau de douane sont ouverts. Les Israéliens ont très vite appris à quelles conditions les jordaniens accordent le passage, et la procédure semble aussi simple que rapide.
Le ciel est la seule limite.
Les entretiens bilatéraux ont repris le lendemain même de l'ouverture du point de contrôle frontalier entre Israël et la Jordanie. Le tourisme constitue un des thèmes favoris évoqués en premier lieu; il a déjà été décidé qu'Israël autoriserait les appareils civils jordaniens à traverser son espace aérien. C'est un des premiers pas importants sur la voie de la normalisation entre les deux pays. Dans la convention, les deux parties ont défini les droits aériens, l'altitude du couloir aérien et le service de contrôle pour la protection des avions jordaniens dans l'espace aérien israélien. Le trafic quotidien à destination et au départ de la Jordanie devrait compter une quarantaine de vols dont 15 affrétés par des compagnies aériennes étrangères.
D'autres accords ont été conclus sur toutes les questions concernant le tracé de la frontière entre les deux pays. Les délégations sont parvenues à s'entendre sur la création de cartes à partir de clichés aériens ainsi que sur les moyens techniques auxquels ferait appel la commission chargée de délimiter la frontière entre les deux Etats. La commission commune pour les questions de sécurité a également décidé que la lutte contre le terrorisme s'effectuerait désormais en commun.
Economie de paix.
Les réseaux électriques israélien et jordanien seront bientôt raccordés l'un à l'autre. L'encre des conventions politiques passées avec la Jordanie n'a pas encore séché que de nouveaux accords font reculer les frontières de la collaboration. Ainsi, la «Banque Hapoahm» et la «Banque de Jordanie» ont souscrit un accord portant sur les services bancaires offerts par les succursales de la Banque jordanienne à Namallat et à Naplouze dans les territoires «occupés». Ce sont les toutes premières relations bancaires entre les deux Etats.
Pendant ce temps, Usi Braham, ministre israélien du Tourisme, s'entretiendra avec son homologue jordanien Machmud Radouan à propos de la création d'un parc archéologique commun au sud de la mer Morte. Plus encore, Israël et la Jordanie proposeront des programmes touristiques communs à l'étranger; ceux-ci, qui seront vendus aux juifs et aux pèlerins chrétiens et arabes d'Amérique du Nord, comprendront quatre jours en Israël et en Jordanie. Des experts en tourisme sont déjà venus de Jordanie pour faire découvrir les trésors touristiques jordaniens aux agences israéliennes.
L'eau de la paix.
Parmi les signes de bonne volonté manifestés à l'égard du Roi Hussein, Israël offrira à titre gracieux un million de mètres cubes d'eau à la Jordanie. En outre, Israël a déjà commencé à acheminer vers la Jordanie une quantité d'eau supplémentaire de quatre millions de mètres cubes puisés dans le Jarmouk. La contre-valeur de cette eau, qui représente un pour cent de la consommation annuelle de la Jordanie, s'élève à deux millions de shekel. La totalité de l'eau promise, fournie par une dérivation-barrage du fleuve au sud du lac de Génézareth, sera livrée progressivement jusqu'au début des pluies hivernales. A cet endroit, le débit de l'eau atteint un mètre cube toutes les trois secondes.
L'eau sera fournie à la suite de la pénurie aiguë qui frappe la Jordanie ; les jordaniens attendent d'autres livraisons qui font déjà l'objet de longues et âpres négociations au sein de la commission commune responsable de la gestion de l'eau dans le cadre des négociations politiques entre les deux pays. Conformément aux accords déjà conclus, Israël recevra 25 millions de mètres cubes du Jarmouk et la Jordanie 75 millions. Toutefois, l'urgence guette la Jordanie: l'an dernier, il a fallu y rationner l'eau.
Autre élément de la collaboration israélo-jordanienne: la création d'un commerce de gros en commun destiné à mettre sur le marché les produits agricoles, ainsi que d'une ferme-école pour la formation à l'agriculture. C'est ce qu'a communiqué le ministre israélien de l'Agriculture.
Paix privée.
En plus des conventions passées entre les deux Etats, on voit également se développer des initiatives privées. Ainsi, la société Afrique-Israël et un groupe d'hommes d'affaires jordaniens et palestiniens ont fondé leur propre société d'investissement. Conformément à cet accord, qui a vu le jour au milieu du mois, l'entreprise s'emploiera, dans les territoires autonomes ainsi que dans d'autres pays, à promouvoir les affaires, le commerce, le tourisme et la construction en Jordanie. Les dirigeants de cette société mixte ont déjà fait savoir qu'ils envisageaient la construction d'une série d'hôtels et de lieux touristiques près de la mer Morte, de Pétra et d'Akaba, ainsi que la création d'industries. Les hommes d'affaires israéliens et jordaniens disposent à Akaba, à Pétra et sur les rives de la mer Morte de terrains privés susceptibles d'accueillir les hôtels, la société Afrique-Israël, concessionnaire de la chaîne Holiday-Inn, en assurant la gestion.
Syrie.
Au milieu du mois, la télévision nationale syrienne a fait état sans le moindre commentaire de la visite imminente du chef du gouvernement israélien en Jordanie et de ses entretiens avec le Roi Hussein dans le palais royal. Le journal principal a retransmis les fêtes d'ouverture du nouveau point de passage frontalier, suivies d'images de la rencontre du Roi Hussein avec Yitzhak Rabin et Warren Christopher, et de l'expédition du yacht royal, escorté de navires israéliens, dans les eaux territoriales israéliennes. La retransmission était exempte de toute critique vis-à-vis du processus de paix jordano-israélien.
Entre-temps, les Etats-Unis poursuivent, par leurs contacts avec la Syrie, leurs efforts pour proposer de nouveaux compromis. Cependant, Itshak Rabin a dû concéder que «la faille qui sépare les positions d'Israël et de la Syrie est large et profonde». Selon les estimations émises par des sources officielles de haut rang, ce fossé entre les propositions défendues par les deux parties pour mettre au point un retrait progressif et un horaire est encore loin d'être comblé dans la réalité des faits. Israël a proposé de se retirer du plateau du Golan en trois étapes échelonnées sur cinq ans, tandis que le président syrien Hafîz-al-Asad insiste pour que le retrait ne dure pas plus d'un an.
Dans notre dernier numéro, nous écrivions déjà quelques mots au sujet du râle prophétique de la Jordanie. Les accords israélo-jordaniens nous donnent un avant-goût de la félicité qui attend l'ensemble du Proche-Orient lorsque le Messie aura instauré son règne de paix sur le monde entier. Mais, aussi positives que soient les nouvelles que nous rapporte notre correspondant Zwi Lidar de Jérusalem, nous ne devons pas nous laisser abuser. Cette paix n'est pas encore la véritable paix si longtemps attendue, qui ne viendra que par Jésus Christ. Au contraire: comme nous l'avons expliqué à plusieurs reprises, les actuelles négociations de paix qu'Israël poursuit avec son voisin ne sont qu'un piège, comme il est écrit dans Osée 7, 8-9: «Ephraïm se confond avec les peuples, Ephraïm est devenu un gâteau qui n'a pas été retourné. Des étrangers dévorent sa force, et il ne le reconnaît pas.» Au heu du nom «Ephraïm», nous pourrions écrire «Israël». Ce texte met le doigt sur le noeud du problème, car Israël est aujourd'hui sur la bonne voie pour se confondre avec les peuples, le plus grave étant que les Israéliens n'en remarquent rien. Nous en sommes au point du texte qui dit: «... et il ne le reconnaît pas». Dès à présent, les «étrangers», tels que les Palestiniens, s'en prennent aux forces d'Israël et les dévorent. Car Israël doit déjà partager avec des Arabes la terre que le Tout-Puissant lui a promise: «Des étrangers dévorent sa force».
Mais, cher lecteur, ne pavoisons pas: la situation est bien plus grave encore chez de nombreux chrétiens! Le Nouveau Testament nous apprend que ce qui arrive à Israël doit servir d'exemple à nous qui sommes nés de nouveau. La plupart des chrétiens actuels se sont mélangés au profane. Ce phénomène a pénétré tous les domaines du christianisme. Et le pire est que les chrétiens n'en ont pas conscience! Aujourd'hui, tout est permis, bien souvent sous le prétexte de «l'amour». Ce n'est plus le Seigneur qui règne en nous, mais le séculier. Notre texte dit: «Des étrangers dévorent ses forces». Cela signifie que votre vie n'appartient plus entièrement au Seigneur, puisque le prince de ce monde fait à nouveau valoir ses droits. Mais la Bible nous avertit très clairement par ces mots: «Celui donc qui veut être ami du monde se rend ennemi de Dieu» (Jacq. 4, 4). Plus que jamais, nous devons aujourd'hui être attentifs à rompre avec tout péché, à nous tourner vers le Seigneur notre Dieu et à l'aimer de tout notre coeur, car le retour de Jésus est imminent! Nous devons également continuer à bénir Israël et à l'entourer de nos prières afin que le Seigneur abrège le temps pour Son peuple et qu'Israël soit porté à travers cette ère difficile. Dieu y pourvoira!
RAPPORT ZWI LIDAR / COMMENTAIRE: CONNO MALGO
Nouvelles d'Israël 10 / 1994