II. - Éducation du couvent.

 

Il semble que lorsqu'on se mêle d'éducation, on ne doive avoir qu'un but, c'est d'amener l'enfant a l'état d'homme ; et que, lorsqu'il s'agit d'éducation religieuse, on ne doive se proposer d'autre fin que de faire des hommes religieux.

Est-ce là ce que se propose le Révérend Gabriel ? Veut-il faire de& hommes qui aient des convictions religieuses à eux, et une vie propre? Nullement ; son but unique est d'assurer la domination des prêtres ; et toute son éducation religieuse n'est qu'un moyen de préparer et de former des instruments de domination.

Son éducation ne tend point à développer, parce que développer un individu, ses facultés, sa raison, c'est lui apprendre à voir par ses yeux, et à juger par lui-même ; c'est l'acheminer à l'affranchissement et à l'indépendance. Le principe du Père Gabriel consiste, au contraire, à abrutir l'individu, à entraver et arrêter le développement de ses facultés, pour le mettre dans l'impuissance de juger par ses propres yeux, et le tenir dans une dépendance continuelle. Il fait des cadavres, conformément au désir de St.- Ignace de Loyola.

Ce principe s'applique en grand à l'éducation des religieux. On réduit pour eux toutes les vertus morales, cardinales et théologales, à une seule, savoir, l'obéissance au Supérieur. On ne demande pas à un moine de l'honnêteté, de la raison, de la piété on ne lui demande qu'une chose, c'est l'obéissance absolue. Il saura, lui dit-on, toutes ces autres choses, quand il sera parfaitement obéissant. Aussi, on ne lui apprend, on ne développe en lui qu'une chose, mais on la développe bien, c'est la sacrée obédience, l'obédience en tout, partout et surtout; l'obédience aveugle, sans borne ni contrôle.

 

Qui ne voit ce qu'il y a de profondément immoral et diabolique à tronquer ainsi l'homme, et a le perpétuer dans l'enfance, sous prétexte de l'élever?

Qui ne voit en même temps quelle puissance cela donne pour la domination, en mettant dans la main d'un Directeur, des hommes qui ne sont qu'une pâte molle, prête à recevoir toutes les formes et toutes les empreintes qu'on voudra lui donner; des êtres capables de tout... oui, de tout; capables de sacrifices et de dévouement, quand il plaira au Supérieur de les exiger capables aussi de ce qu'il y a de plus honteux et de plus bas, quand il plaira au Supérieur de le commander.

Et ce qu'il y a d'effrayant à dire, c'est que tout est si bien calculé qu'on réussit. On assouplit un homme au point de le pouvoir tourner et retourner comme un gant.

Voici comment:

On commence par lui ôter les forces physiques, et par tuer cette énergie du corps qui se lie si intimement à celle de l'âme. On le dompte et l'assouplit par la faim, comme on dompte l'animal sauvage. C'est là le but réel de ces abstinences et de ces jeunes forcés quatre fois la semaine, ainsi que du peu de nourriture qu'on lui donne dans les trois autres jours. Plus tard, on ]ni rendra les forces, quand on sera sûr du moral, et qu'on pourra compter sur une parfaite obéissance.

Pendant qu'on travaille ainsi le corps et prépare le sujet en l'affaiblissant, on ne demeure pas oisif à l'intérieur.

D'abord on arrache le jeune homme à tous les liens qui l'attachent à ce monde, même aux plus sacrés, comme ceux de la famille et du pays. Rien ne trouve grâce. Je ne pouvais pas écrire à mes parents sans une lecture préalable et sans l'autorisation du Supérieur, c'est-à-dire, selon la règle, une ou deux fois au plus l'an. Je ne puis recevoir aucune lettre; le Supérieur les reçoit, les lit, et me donne connaissance du contenu , s'il le trouve bon , c'est-à-dire, presque jamais. Penser a son père, a sa mère, ou à ceux qui nous tiennent au coeur, c'est une faute; il faut s'en accuser, et faire pénitence. Je dois oublier mon pays; ce qui s'y passe ne vient d'ailleurs jamais a mes oreilles; y penser seulement, c'est un péché qui peut être mortel ; il faut avouer, et en être puni (1). - Ainsi on vide le coeur de tous les sentiments les plus naturels; on voudrait arracher à un homme jusqu'à son passé. On m'ôte mon nom; je m'appelais Louis Girard, on m'appelle Paul de Sainte-Foi.

On ne permet plus de dire : Bonjour, ou bonsoir; il faut dire : Vive Jésus! Vive Marie! Les jours ne se désignent plus guère que par les noms des Saints. On m'isole même des Frères qui vivent avec moi, car il est défendu d'être jamais deux ensemble: il faut toujours être trois, et la délation est de règle: chaque Frère est l'espion de ses Frères. Je n'ai personne à qui épancher mon coeur ou confier une impression secrète.... excepté le Supérieur. A moins d'une puissance de cacher bien rare, il finit, bon gré mal gré, par s'installer en maître au dedans de nous, et posséder, tôt ou tard, nos plus sécrètent pensées.

Mais ce n'est que le commencement encore.

Pour former à la sacrée obédience, il contrarie tous nos goûts, nobles ou bas, bons ou mauvais, n'importe. Il étudie nos penchants, nos désirs, pour les contrecarrer. Un Frère manifeste-t-il de l'inclination pour une chose, on lui en fait faire une autre. A-t-il de la répugnance pour certaines occupations, on les exige. Aime-t-il l'étude, on le fait labourer. Laboure-t-il avec zèle, le Supérieur lui ordonne d'aller doucement et de ne donner que tant de coups par minute; laboure-t-il avec lenteur, il commande d'aller vite. Cette contradiction perpétuelle brise tellement le caractère, qu'au bout d'un certain temps l'homme devient indifférent à tout ; ou, si le goût persiste, il devient hypocrite. Il calcule avec la contradiction même : il feint d'aimer ce qu'il n'aime pas, et de ne pas vouloir ce qu'il désire; il parait joyeux de ce qui l'afflige, et affligé de ce qui le réjouit, et c'est l'ordinaire.

 

A cette contrariété se joint l'abrutissement de l'esprit. Cultiver la raison, ce serait préparer des hommes qui jugeront ; ce serait se créer une opposition et une force de résistance. Aussi l'abrutissement est de règle, et on l'obtient au nom de la très-sainte obédience. On abrutit par des heures d'oraison et de chant; qui fatiguent l'esprit et l'hébète; on abrutit par une étude qui ne développe rien, comme la mémorisation de psaumes en latin, de litanies, etc., ou la lecture de légendes de saints, de récits de faux miracles, etc.; on abrutit par l'exécution d'ordres qui sont absurdes, ou déraisonnables. Un Frère plante-t-il des choux par le pied, le Supérieur ordonne de les planter par la tète ; il fait balayer avec le manche du balai : il ordonne de sarcler les allées, et de ratisser les plates-bandes. il fait arracher la bonne herbe, et laisser la mauvaise; il commande d'essuyer trois assiettes et demie, etc. etc. On taxerait ces ordres de folie ou de sots caprices, si l'on ne savait que tout cela a un but machiavélique, celui de former à l'obéissance même dans les choses qui apparaissent à notre esprit absurdes et déraisonnables.

Mais ce n'est pas tout.

On ôte à un Frère jusqu'au sentiment du juste et de l'injuste, du moral et de l'immoral. La conscience morale aussi est une force, une puissance dans l'homme ; par cette raison même, elle est un obstacle qu'il faut renverser. Pour être parfaite, l'obéissance doit être aveugle. A cet effet, ou ne se contente pas de pervertir le coeur du novice par cette compression continuelle qui le porte toujours à tout cacher, et l'amène infailliblement à l'hypocrisie ; on marche droit au but par la démoralisation. Sous prétexte de la confession, on lui dévoile toutes les turpitudes que l'imagination la plus déréglée ait pu inventer; on lui prêche une morale relâchée et casuistique, où on lui montre comment le mai se peut, et même se doit faire, en vue du bien qui en peut résulter pour la religion ou le monastère. On excite au mai par la contradiction même. Plusieurs fois le Père Gabriel me demanda si j'avais fait telle chose ; je répondis que non, et c'était vrai. « Vous êtes un menteur!» me dit le Père, et il m'imposa des pénitences. Mais je n'oublierai jamais ce jour, où, fatigué des punitions, je mentis, et répondis que je l'avais fait. Ses yeux brillèrent; dans sa joie, il m'embrassa, en s'extasiant sur sa perspicacité je n'eus point de pénitence. On fait renier toute pudeur par l'horrible institution de la reddition de comptes. Enfin on triomphe des derniers scrupules de la conscience, en prêchant le mensonge et la fourberie, en y exerçant même au nom de l'obédience.

Voilà comment le Révérend Gabriel arrive à anéantir dans un homme goûts, sentiments, raison, moralité, tout ce qu'il y a en lui de noble, de relevé, de divin, jusqu'à sa volonté même. Il le forme à l'image de la brute, si bien qu'il n'est plus dans la main du Supérieur qu'un instrument docile, prêt a tout exécuter, l'absurde comme le raisonnable, le mal comme le bien, jusqu'à l'infamie.... et cela, sans regret, sans répulsion, sans remords, mais par principe religieux et sous l'autorité magique de la sacrée obédience.

Veut-on des faits? en voici:

Le vendredi a lieu l'avertissement des défauts. Chaque Frère s'accuse. des fautes qu'il a faites, et les autres complètent le rapport par leurs dénonciations ! Le père Supérieur prêche ensuite sur les matières de la confession. Il développe, en plein chapitre et devant une centaine de jeunes gens, les vices les plus immondes et les impudicités les plus raffinées, déclare crûment les noms, le mode, les circonstances aggravantes ou atténuantes, sans faire grâce d'un détail. C'est son thème favori, et les paroles abondent.

Cela s'appelle au couvent enseigner la morale!

Bien plus, dans des conférences spéciales, le Révérend Gabriel propose des questions sur les fautes graves que les Frères peuvent commettre dans les postes ou dans, la communauté. Il demande comment on doit s'y prendre pour dérouter les poursuites de la justice.

Un jour il prit pour texte l'affaire du Frère Léotade. Il tenait le journal à la main, lut l'acte d'accusation, et à chaque déposition il s'arrêtait et disait: « Comment feriez-vous, si telle chose nous arrivait, pour sauver l'honneur du religieux et de la communauté ?

Les Frères donnèrent leur avis, et chacun déploya les ressources que son imagination lui suggéra. C'était à qui mentirait le plus et le mieux.

Le Père Supérieur nous fit ensuite une exhortation sur la nécessité de l'obéissance aveugle. Au lieu de stigmatiser la conduite de Léotade, et de déclarer à ses religieux que si pareille chose leur arrivait, il les dénoncerait lui-même aux tribunaux, pour qu'ils portas sent la peine de leur crime, et qu'on sût bien que l'Ordre ne tolère pas dans ses rangs de pareils scélérats, il prit, au contraire, le parti du criminel contre la justice, et ténorisa les moyens de le soustraire aux recherches et de lui assurer l'impunité. Il déclara qu'il faudrait aussitôt assembler la communauté, pour convenir des réponses et ne pas se contredire ; qu'il commanderait alors à chacun, au nom de la très-sainte obédience, de dire ce qu'il pourrait pour sauver le religieux ; que le reste le regardait. Il montra qu'un religieux ayant fait voeu d'obédience ne pêche pas en obéissant, mais qu'il pêche en désobéissant ; que son obéissance est un acte d'humilité et de renoncement qui est méritoire devant Dieu ; qu'il n'a point à s'inquiéter au delà, parce que lui, le Supérieur, prend tout sur sa conscience.... Quelle conscience ! !

Il termina la conférence, et donna sa bénédiction.

C'est, parler clair, ce me semble, et enseigner à pleine bouche le mensonge et le parjure. J'ai ouï dire qu'à Londres il y a des écoles où l'on enseigne les filous à voler montres et mouchoirs. L'école du Révérend Gabriel vaut-elle mieux? Du reste, chacun peut faire ses réflexions.

 

Voici maintenant une leçon de fourberie.

Un jour le Révérend Gabriel dit au Frère cuisinier d'aller chercher pour deux sous d'oseille chez M. N**-, homme très religieux de Belley.

LE FRERE. Monsieur, voulez-vous nous vendre pour deux sous d'oseille ?

M. N**. Oui, mon bon Frère. Mais comment?... vous n'en avez plus?

LE FRERE. Non, Monsieur... ni de pain non plus

M. N**. Il faut en acheter.

LE FRERE Le Révérend Supérieur m'a dit qu'il n'a pas un sou dans sa caisse.

M. N**. Oh! que dites-vous, mon pauvre frère ?

LE FRERE Je dis la pure vérité.

Là-dessus, ce monsieur fit remplir le panier du frère, d'oseille et de toutes sortes de légumes; il y ajouta quatre pains de 12 livres. Une heure après, on le vit arriver au couvent avec un sac de 2000 fr. Il le présenta au Supérieur, en lui disant que lorsqu'il en aurait besoin, sa bourse lui était ouverte ; qu'il le priait d'en disposer; qu'il serait heureux de contribuer au soulagement d'hommes aussi pieux ; qu'il ne faisait d'ailleurs que de suivre l'avis de son confesseur, qui l'avait engagé à faire un don de 10 à 12,000 fr. à une maison de religieux. Il l'invita à aller le lendemain toucher le restant de la somme, et se recommanda aux prières des Frères.

Le lendemain, le confesseur et le Révérend Gabriel dînaient ensemble. L'un avait suggéré le conseil en confession, l'autre l'avait exploité. Le tour était joué, et les bons Pères en fêtaient la réussite.

L'histoire circula dans le couvent et l'on en rit de bon coeur.

 

Une autre leçon dans le même genre.

Quand il vient quelque visitant du dehors, ce dont on est averti par un premier coup de sonnette, le Révérend Gabriel a soin de faire mettre tous les religieux sur deux rangs, le front en terre, pour chanter le Miserere mei Deus. La personne qui attend sonne de nouveau, alors un Frère va ouvrir, et salue en tenant les mains croisées sur la poitrine. Il fait signe aux étrangers de le suivre, et les conduit devant la communauté.

Les étrangers reculent ordinairement d'un pas devant ce spectacle, pendant que le Frère va reprendre sa place et sa posture. Ils sont confus, comme s'ils avaient troublé la dévotion de ces saints, n'osent avancer, et écoutent en silence. Lors le Révérend Supérieur, qui jusque-là n'a pas fait semblant de les apercevoir, plongé qu'il est dans sa dévotion, lève un peu les yeux, regarde, reconnaît... se lève et va à eux. Il les conduit obligeamment au parloir et les entretient d'un air sérieux et dévot.

Souvent l'intérêt que cette scène éveille, touche les coeurs. On s'informe du couvent, de la vie des Frères, de leur nourriture, de leurs ressources, et... le Père de faire sonner les mots de pauvreté et de charité sur toutes les notes de la gamme, et à toutes les octaves. C'est bien rare s'il n'obtient pas de la charité les dons les plus aimables.

Un jour que le présent était sans doute considérable, il revint avec les étrangers à l'assemblée des Frères, pour relever les religieux, et leur dit: « Voici nos bienfaiteurs; chantez en leur honneur un cantique d'action de grâces. » Après leur départ, le Supérieur nous dit : cou rage! mes enfants, vous avez bien fait votre devoir; la très-Sainte Vierge vous bénira, et Saint Joseph aussi. Courage ! encore quelques-uns comme ceux-là, et nous bâtirons un beau monastère. »

 

Ce qui étonnera sans doute, c'est d'apprendre que le Révérend Gabriel fait aussi de nous des contrebandiers. L'obédience s'applique à tout, jusqu'à faire des, menteurs et des voleurs.

Voici le fait tel qu'il m'est arrivé.

La seule satisfaction permise est de priser. Il y a dans le couvent un grand vase où l'on met le tabac ; chacun y puise à volonté. Quand le vase est vide, le Révérend Gabriel dit aux religieux: «Mes enfants, il faut aller à la provision, » et il assigne à chacun son rôle. Le Frère Paul de Sainte-Foi prendra à la main la boite aux saintes huiles. Le Frère Anselme tiendra le sac du devoir (on appelle ainsi un sac vert dans lequel on porte les ornements du prêtre lorsqu'il sort pour administrer l'extrême-onction). Le Frère Lucien prendra la ceinture de cuir, et vous irez à Yenne (2) accompagnés du Frère Vincent. Vous passerez le pont en silence; le Frère Lucien paiera le passage, et le Frère Directeur de la maison de Yenne vous dira ce que vous avez à faire. »

Sitôt dit, sitôt fait. Nous arrivons à Yenne. Le Frère Directeur prend la boite aux saintes huiles, la remplit de tabac Virginie (12 kil.), l'entoure d'un ruban rose, et la scelle du cachet de l'Evêque. Il avait devant lui une masse de cachets des différents évêques et archevêques de France. Vient le sac vert. Il met dedans six aubes magnifiques. Jamais mes yeux n'avaient vu rien de plus beau. La plus simple devait coûter au moins 600 fr. Il remplit ensuite de tabac la ceinture de cuir; elle est fort large, et peut en contenir 15 kil. La soutane mise par-dessus cache tout. Vient le tour du Frère Vincent, on le déshabille, et l'on enroule autour de son corps, à trois reprises, de la dentelle de 30 a 55 centimètres de largeur. Je regardai avec des yeux ébahis.

L'opération terminée, le Directeur nous donne ses ordres ainsi: « Quelques minutes avant le pont, vous entonnerez le Te Deum, et passerez en chantant.

Vous marcherez un à un, la tête et les yeux baissés; néanmoins, vous regarderez un peu de côté pour voir si le douanier ne vient pas à vous. Ce cas échéant, le Frère Lucien prendra la parole, pendant que vous continuerez votre chemin. Si l'on vous demandait d'où vous venez dans cet ordre et équipage, vous répondriez que vous venez de rendre les devoirs à un Frère malade. En effet, mes Frères, je ne suis pas bien, et vais me coucher à l'instant. Vous direz au Révérend Père Gabriel que je ne suis pas bien, et vous, mes Frères, je vous remercie de votre bonne visite.» Là-dessus nous partîmes. Le Frère Anselme entonna le chant près du pont, et nous suivîmes. Je marchai le premier, tenant dévotement entre mes deux mains, la sainte boite surmontée de sa croix, et appuyée contre ma poitrine, les yeux saintement baissés comme tous les Frères., Chaque personne qui nous rencontrait saluait en faisant le signe de la croix; le douanier lui-même en fit autant.

Après un passage aussi glorieux, nous allâmes nous décharger vers l'économe. D'après les recommandations, nous dîmes au Révérend Supérieur que le Frère Directeur était malade.

Ah! tant mieux, tarit mieux! dit-il, en aspirant une bonne prise de tabac; j'enverrai deux religieux tous les jours à Yenne, pour me rapporter la baptiste, les dentelles et toutes les marchandises qui y sont en dépôt. Nous en vendrons à la Cathédrale, et nous en donnerons aux Soeurs de St.-Joseph pour qu'elles nous en vendent. »

Les religieux ont fait pendant huit jours le voyage de Yenne à Belley. Les douaniers voyant ces allées et venues, en demandèrent le motif aux Frères. Ils leur apprirent que nous avions été rendre les devoirs à un Frère malade à Yenne, et qu'eux allaient tous les jours s'informer de sa santé.!!!

Cela se fait tous les trois mois, et plus souvent si le magasin en a besoin, car le monastère fournit tous les couvents et séminaires, des environs.

 

On a vu l'éducation. et je viens d'en montrer les fruits. La pratique répond parfaitement à la théorie. Le but est atteint. Il n'y a plus rien dans le religieux qui s'oppose à la volonté du Supérieur. Sa raison soumise, sa moralité éteinte, ses goûts domptés n'offrent plus aucune résistance; il est souple, docile, propre à tout. Il est parfait moine, car l'obédience absolue, aveugle, c'est la perfection.

Et ce moine parfait.... ce n'est pourtant, en réalité, qu'un hypocrite, un menteur, un fourbe et un contrebandier, le tout par la volonté du Père Supérieur et à la plus grande gloire de Dieu ! ! !

Se peut-il au monde une école plus perverse et plus indigne que cette institution-là?

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(1) En fait de politique on ne sait qu'une chose . chaque soir on prie pour son Altesse Royale Monseigneur le Duc de Bordeaux, pour son rétablissement sur le trône de France, et pour ses partisans. On ne prie ni pour le Président, ni pour la République.

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(2) Yenne est un village sis au-delà du Rhône, sur la frontière sarde, à une lieue environ de Belley.