Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

ÉPÎTRE DE SAINT PAUL AUX COLOSSIENS

CHAPITRE PREMIER

Salutation. Paul Prie pour l'avancement spirituel des Colossiens. La rédemption. Grandeur de Jésus-Christ, chef de l'Église (note 368). Nous étions autrefois éloignés de Dieu, ennemis de Dieu.


392. Versets 22 et 28. Mais maintenant Christ vous a réconciliés avec lui par la mort qu'il a soufferte en son corps, afin de vous faire paraître devant lui saints, sans tache et irrépréhensibles... C'est lui que nous prêchons, reprenant et instruisant tout homme en toute sagesse, afin de rendre tout homme parfait en Jésus-Christ.

Nous rapprochons à dessein ces deux versets, unis par le sens; le reste n'est qu'une parenthèse où l'apôtre exprime sa joie d'avoir à prêcher cette doctrine, et à souffrir, pour cela, comme son divin maître. (01)
Ainsi, dans le premier verset, Jésus-Christ est l'auteur de la réconciliation , du salut ; dans le second , il est la source du perfectionnement chrétien.

Nous avons vu (notes 150, 153, 171, etc.) combien l'Église romaine a amoindri le rôle de Jésus-Christ comme auteur du salut ; nous pourrions montrer également combien peu elle fait de lui la source du perfectionnement religieux et moral.

Tantôt , attachant la notion de ce perfectionnement à des observances, à des mortifications, elle la porte sur un terrain qui n'est pas celui du christianisme, et où le Christ n'a rien à faire. Les païens ont connu ce perfectionnement-là ; les Hindous le pratiquent avec plus de persévérance et de rigueur que n'a jamais fait l'Église romaine.

Tantôt, prêchant le perfectionnement par l'exemple de ceux qui, selon elle, y ont fait le plus de progrès, il est rare qu'elle ne choisisse pas, parmi ses saints , ceux qui ont cherché la perfection dans ces observances grossières , dans ces mortifications superstitieuses. Voilà ce qu'elle aime à proposer à l'admiration, à l'imitation. Si nos modèles sont là, Jésus n'en est plus un, car il n'y a rien de semblable à imiter en lui.

Enfin, quand l'Église romaine ne prêcherait que les saints chrétiennement saints, il y aurait à lui reprocher encore d'abuser de cette prédication, de mettre les fidèles beaucoup trop en face d'hommes, et beaucoup trop peu en face de Jésus-Christ. Non que nous blâmions , en soi, l'usage de louer les saints véritablement dignes d'être proposés pour modèles; mais cet usage a ses dangers, et l'Église romaine, au lieu de les éviter, s'y est jetée en plein. Elle loue trop de saints; elle les loue trop souvent; elle les lotie trop. Chacun d'eux est comme un prince qu'entoureraient cent mille courtisans prêts à dépasser, pour sa gloire, toutes les bornes du vrai, du vraisemblable. Il faut, à chaque nouveau panégyrique, de nouvelles louanges, de nouvelles merveilles. C'est la divinisation par l'éloge, menant droit à la divinisation par le culte.

Que devient, parmi tout cela, Celui en qui seul et par qui seul saint Paul parlait de mener les chrétiens à la perfection ? Le moindre saint en renom est plus et fait plus que Jésus-Christ.


CHAPITRE II

Le mystère de la rédemption renfermant tout ce qui est nécessaire au perfectionnement et au salut de l'homme, que les Colossiens repoussent toute doctrine plaçant le perfectionnement et le salut dans des observances qui rappellent celles de l'ancienne loi.


393. Versets 16, 20 et 21. Que personne donc ne vous condamne au sujet du manger et du boire... Si donc vous êtes morts avec Christ à ces grossières et matérielles instructions du monde, pourquoi vous laissez-vous imposer encore ces préceptes, comme si vous étiez encore du monde (du monde grossier de jadis)? Ne mange pas de ceci, vous dit-on; ne goûte pas de cela, ne touche pas à cela...

Un catholique, à qui on citait ces lignes, commença par nier qu'elles pussent être de saint Paul, tant il lui semblait impossible que l'Église romaine eût osé, les connaissant, établir la loi des jours maigres.
Mais ne vous bornez pas à reconnaître que cette loi est d'invention humaine, et que vous pouvez y désobéir; comprenez surtout combien le système dont elle n'est qu'une partie est en opposition avec le système chrétien.

Le chrétien est mort, vous dit saint Paul, à toutes les instructions de cette espèce, à toutes les observances judaïques on rappelant le judaïsme ; celui qui y cherche son salut renonce , par cela même , à le chercher où il est, savoir en Jésus-Christ.

On vous dira que ces choses servent au moins à mortifier la chair ; mais saint Paul va encore au-devant de cet argument, et, au verset 23, il l'appelle « apparence de sagesse, » vaine apparence contre laquelle tous les versets précédents sont autant de protestations. Nous avons vu (note 316) que le précepte de mortifier la chair est , sous l'Évangile, tout spirituel ; c'est à l'esprit qu'il est dit de dompter la matière, d'être le maître , de régner. L'Évangile ne pourrait pas dire autre chose sans cesser d'être l'Évangile, et c'est pour cela que saint Paul (verset 22) appelle maximes humaines, ordonnances humaines, tout ce qui tendrait à nous sortir de la spiritualité évangélique.


394. Verset 18. Que personne ne vous ravisse le prix de votre course, vous faisant, sous prétexte d'humilité, rendre un culte aux anges, et, vainement enflé de son esprit charnel, se lançant dans des choses qu'il n'a point vues.

Deux questions dans ce verset, l'une de détail, l'autre générale.

A. La première est celle du culte des anges.
On a cherché à adoucir l'évidente condamnation que saint Paul prononce sur ce point. De ce que le mot grec que nous traduisons par culte signifie aussi superstition, on a voulu conclure que saint Paul condamnait, non pas tout culte rendu aux anges , mais des superstitions introduites dans ce culte par quelques chrétiens du temps.

L'ensemble du verset, l'absence de toute distinction, l'absence, dans le Nouveau Testament , de toute mention d'un culte aux anges, tout s'oppose à cet adoucissement. Ce qui s'y oppose encore , c'est ce que saint Paul nous dit du prétexte allégué par les partisans de ce culte , l'humilité. Si l'humilité qui conduit à rendre un culte aux anges lui paraît une humilité mal entendue, il est clair que ce culte lui paraît condamnable en soi, condamnable toujours, et non pas seulement dans certains cas.

Paul confirme, par conséquent, ce que nous en avons dit, dans ce même point de vue, en parlant du culte des saints. Quand Dieu, non seulement nous permet, mais nous ordonne, dans toute l'Écriture, d'aller à lui, droit à lui, et nous indique Jésus-Christ comme notre unique intercesseur, - ce n'est plus de l'humilité que d'aller chercher ailleurs, moins haut, des protecteurs et des intercesseurs : c'est pure désobéissance.

B. La seconde question , qui amènerait aussi pins d'une remarque sur les tendances romaines, est celle de cet « esprit charnel » qui porte l'homme à se lancer « dans des choses qu'il n'a point vues.»

Pourquoi saint Paul l'appelle-t-il charnel, ce penchant qui nous entraîne, au contraire, vers les régions les plus mystérieuses du monde spirituel?
Parce que ce penchant est toujours fortement mêlé de curiosité, d'orgueil ; parce qu'il nous conduit toujours, dans les choses religieuses, à affirmer au delà de ce qui nous est révélé, au delà de ce que Dieu a donné pour limite à nos connaissances.

Voyez comme l'Église romaine a été entraînée à dépasser , non seulement la révélation, mais même les droits, déjà si larges, qu'elle s'attribuait comme interprète de la révélation. Elle n'a pas, disait-elle, le droit de créer des dogmes ; elle n'a que celui de décider, d'après l'enseignement divin , ce qui est dogme ou non. En fait, s'en est-elle tenue là? Non ; plusieurs de ses dogmes ne sont point des interprétations de l'enseignement divin , mais purement son enseignement à elle, ses inventions, ses créations.

Où a-t-elle pris, par exemple, ce qu'elle enseigne sur les limbes, séjour, selon elle, des enfants morts sans baptême ?
Si elle l'a pris quelque part, c'est dans les poètes païens.
Où a-t-elle pris le Purgatoire?

Il est vrai qu'elle affirme apercevoir ce dernier dogme dans quelques endroits de l'Écriture; mais quand le fond du dogme - ce que nous nions - s'y trouverait, nous demanderions encore où elle a pris les assertions dont elle l'entoure. Qui lui a dit ce que sont , ce que font, ce que souffrent ou ne souffrent pas les âmes enfermées dans ce lieu?

Qui lui a révélé cette comptabilité, si bien tenue, grâce à laquelle tout ce que vous aurez gagné d'indulgences sur la terre est retranché de vos jours de peine après la mort? Tout cela, ce n'est pas interprétation de choses révélées, mais enseignement direct, et enseignement reposant... sur quoi? Votre curé vous dit : « Sur l'autorité de l'Église. » Mais l'Église , nous le répétons , déclare elle-même n'avoir pas le pouvoir de créer des dogmes. Donc , encore une fois, sur quoi reposent des enseignements de ce genre?

Cette remarque a été souvent faite, de nos jours, à l'occasion du dogme de 1854, l'Immaculée Conception. Quand l'histoire de Marie, telle que les Évangiles la racontent, laisserait, ce qui n'est pas (voir notes 105, 109, 268, etc.), quelque probabilité au nouveau dogme,- on pourrait toujours dire au pape: « Qu'en savez-vous? Que pouvez-vous en savoir? Où avez-vous pris ce que vous en dites?

Quel moyen avez-vous eu d'affirmer, en 1854, ce que vous n'affirmiez pas en 1853? Cette affirmation n'est pas seulement celle d'un dogme, d'une idée , mais celle d'un fait historique ; l'affirmation d'un fait historique suppose la découverte de preuves historiques, - et vous ne dites pas que vous en ayez découvert. Encore une fois, quand vous avez affirmé l'Immaculée Conception, qu'en saviez-vous? Que pouviez-vous en savoir? »

Aussi voyons-nous que l'on commence, pour se tirer d'affaire, à élargir en théorie ces droits qu'on a si témérairement élargis dans la pratique. L'Église romaine continue, officiellement, à ne se donner que pour l'interprète infaillible de la révélation ; mais elle permet que ses docteurs lui accordent davantage, et le moment approche, évidemment, où elle s'érigera en révélation permanente, enseignant sans être tenue de dire où elle a pris ce qu'elle enseigne. Ce qu'elle a fait pour l'Immaculée Conception, elle veut pouvoir le faire pour tout ce qu'il lui conviendra d'enseigner ; elle espère aussi mettre en sûreté, par là, bon nombre d'enseignements plus anciens qu'elle sait bien n'être guère mieux fondés sur aucune preuve appréciable. Ainsi achèvera-t-elle de mériter la condamnation prononcée par saint Paul contre les docteurs « enflés de leur esprit charnel, » et se lançant témérairement dans des choses « qu'ils n'ont point vues, » qu'ils n'ont eu aucun moyen de savoir.


CHAPITRE III

Exhortation a une vie nouvelle. C'est Jésus-Christ qui est notre vie (note 359). Dépouiller le vieil homme. Bonté, humilité, modestie, support, charité. Les chrétiens forment un seul corps (note 368) , appelé à la paix de Christ. Édification mutuelle. Devoirs des maris, des femmes, des pères, des enfants, des serviteurs.


CHAPITRE IV

Devoirs des maîtres. Exhortations diverses. Éloges donnés par l'apôtre (voir 334) à plusieurs de ses compagnons d'oeuvre. Salutations.


395. Verset 16. Et lorsque cette lettre aura été lue parmi vous, faites qu'on la lise aussi dans l'Église des Laodicéens, et que vous lisiez aussi celle de Laodicée.

Ces épîtres que Paul recommandait de faire lire à tout le monde, - croirez-vous, comme l'Église romaine voudrait vous le faire croire, que ce même saint Paul vous défendrait aujourd'hui de les lire? Mais vous les avez lues; vous comprenez de reste pourquoi on voudrait vous les ôter. Désobéissez sans crainte ; vous obéissez à saint Paul.


(01) Le verset 24, où l'apôtre se félicite de souffrir pour les Colossiens, pour l'Église, et d'achever ce gui lui reste à souffrir des souffrances de Jésus-Christ, a été quelquefois cité comme prouvant l'efficacité rédemptrice des souffrances des saints et des martyrs.

C'est mettre saint Paul en contradiction flagrante avec ce qu'il a cent fois dit sur Jésus auteur du salut, unique auteur parfait autour; le verset 22 suffirait seul pour renverser ce qu'on a prétendu fonder sur le 24 éme L'apôtre ne peut donc avoir parlé , dans celui-ci, que de la joie qu'il a de poursuivre , comme précédemment son maître , une carrière de souffrances. Il souffre pour les Colossiens , pou), l'Église , mais en ce sens qu'il souffre pour la prédication de l'Evangile , salut (les Colossiens et de l'Église. Aucune trace de l'idée que ses souffrances aient une vertu rédemptrice, profitant à qui que ce soit.
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