Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

SECONDE ÉPÎTRE DE SAINT PAUL A TIMOTHÉE

CHAPITRE PREMIER

Salutation. Paul bénit Dieu de la fidélité de Timothée. Excellence et grandeur de l'Évangile ...

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423. Verset 11. Pour la propagation duquel j'ai été établi prédicateur, apôtre et docteur des gentils.

Nous avons souvent vu saint Paul se donner ces titres; mais le voici se les donnant encore , peu de temps avant sa mort, à Rome même. Ce dernier trait met le comble à l'impossibilité, déjà si grande, de supposer qu'il s'attribuât à lui seul un honneur et un titre qu'il eût partagés avec saint Pierre. Paul se nommant, à Rome même, peu de temps avant son martyre, l'apôtre des gentils, - c'est Paul réduisant définitivement à l'absurde la supposition que Pierre eût prêché l'Évangile à Rome.

Versets 12 et suiv- Souffrances de l'apôtre. Le dépôt confié à Timothée (note 422). bontés d'Onésiphore.


CHAPITRE II


424. Verset 2. Les choses que tu as apprises de moi en présence de bien des témoins, confie-les à des hommes fidèles, qui soient eux-mêmes capables d'en instruire d'autres.

Il est curieux que le système romain ne se trouve nulle part moins, en réalité, que dans les passages qu'on a le plus cités en sa faveur.
En voici un. Paul remet le dépôt de la foi à Timothée; Timothée à d'autres; ceux-ci à d'autres. Voilà la chaîne romaine, nous dit-on. Qu'y manque-t-il?

Une seule chose, mais l'essentielle. Remarquez, en effet, que l'apôtre ne sort pas des éléments humains de la question. Timothée instruira des hommes fidèles ; ces hommes devront être, en outre, capables d'en instruire d'autres. Fidèles, capables, voilà tout. Saint Paul ne garantit nullement à Timothée que ceux qu'il aura choisis comme fidèles restent fidèles; non seulement il ne le lui garantit pas, mais il lui a parlé, dans l'autre épître, de l'infidélité de plusieurs hommes qu'il avait lui-même instruits, lui, Paul. Rien donc ici n'indique une transmission infaillible, ni actuelle, ni future; allez jusqu'au bout de l'épître, et, jusqu'au bout, rien de semblable. Paul parle avec douleur des fausses doctrines, des faux docteurs ; il conjure Timothée de veiller sur lui-même et sur les autres, afin que l'erreur ne trouve pas à s'insinuer plus avant; mais, cette prétendue transmission inaltérable, cette grande et suprême garantie qu'il eut évidemment invoquée la première comme encouragement à Timothée, comme consolation et assurance pour lui-même en présence des erreurs actuelles et futures, - cherchez bien : il n'en parle pas.

Est-ce à dire qu'il se figure la vérité abandonnée au caprice des hommes , l'Église cessant d'être protégée, dirigée, par son divin chef? Nullement; mais, cette protection et cette direction qui le rassurent, il ne les rattache à aucune forme visible, à aucun système d'Église. Dieu a promis ; Dieu saura tenir sa promesse. Quelques versets plus loin, au moment où il vient de signaler une nouvelle erreur très - dangereuse : « Néanmoins, dit-il, le solide fondement de Dieu subsiste, ayant pour sceau cette parole : Le Seigneur connaît ceux qui sont siens. » L'Église, poursuit-il, est comme « une grande maison, où il n'y a pas seulement des vases d'or et d'argent, mais aussi de bois et de terre, » et si quelqu'un « se conserve pur » des erreurs qui auront été enseignées, il sera un des vases d'or, un des vases d'honneur. Si quelqu'un « se conserve pur,- à notez ce mot. A chacun donc la tâche de se conserver pur d'erreur, c'est-à-dire de faire, dans ce but, tous les efforts dont il sera capable, et d'user de tous les moyens que Dieu aura mis à sa disposition. Jamais vous n'expliquerez comment l'apôtre aurait pu ne pas indiquer ici s'il l'eût connu, le plus facile, le plus sûr, l'unique moyen, selon l'Église romaine, de rester en dehors de toute erreur : - Être soumis à une autorité infaillible et toujours présente.

Ce chapitre est donc profondément instructif, soit pour ceux qui se sont laissé imposer ce dernier système, soit pour ceux qui, le repoussant, s'inquiètent cependant parfois de ce que la vérité peut devenir avec la liberté. Qu'ils entrent simplement dans la pensée, dans le sentiment de saint Paul. Saint Paul ne voit que deux choses : d'un côté, les promesses de Dieu, source et gardien de toute vérité de l'autre, le devoir imposé à chacun de faire tout ce qui est en lui pour se maintenir en possession de la vérité évangélique. Non seulement il ne dit rien qui suppose l'existence d'une autorité visible dont vous n'ayez qu'à écouter la voix, mais il nous fait clairement entendre que la possession de la vérité , même complète, incontestable, ne crée pas une autorité de ce genre, ne donne pas droit de contrainte contre ceux qui pensent autrement. Le serviteur du Seigneur, dit-il, «doit être doux envers tous, instruisant avec douceur ceux qui sont d'un sentiment contraire, dans l'attente que Dieu leur donne une fois de changer d'esprit et de connaître la vérité. » Ainsi , même quand le « serviteur dit Seigneur » est considéré comme l'organe direct de la pensée divine, saint Paul ne lui assigne encore d'autre rôle que d'«instruire avec douceur,» et c'est à Dieu que l'apôtre s'en remet pour que la vérité soit écoutée. Il y a loin de là à cet odieux « Contrains-les d'entrer, » qui a partout et toujours été le résumé pratique du système romain de l'infaillibilité.


CHAPITRE III

Nouveau tableau des erreurs et des passions qui agiteront l'Église. Dieu saura protéger les siens; mais qu'ils s'attendent à souffrir , car « les méchants et les imposteurs iront en empirant, séduisant et étant séduits. »


425. Verset 12. Aussi, tous ceux qui veulent vivre dans la piété en Jésus-Christ seront persécutés.

De tous les accomplissements qu'a eus cette prophétie de saint Paul, aucun n'a été plus complet que celui dont les rigueurs de l'Église romaine ont si longtemps donné le spectacle.

Qu'est-ce, en effet, que cette « piété en Jésus-Christ » dont parle ici saint Paul? Est-ce la foi chrétienne en général, persécutée par les païens ou par les incrédules? Non. Saint Paul n'a parlé et ne va parler encore que de ce que l'orgueil, l'intérêt, les passions, un grossier judaïsme ou un spiritualisme exagéré, ajouteront aux pures doctrines chrétiennes. La «piété en Jésus-Christ » ne peut donc vouloir dire, ici, que l'attachement à ces doctrines , la ferme volonté de ne les recevoir soi-même et de ne les prêcher aux autres que dans leur pureté divine.

C'est cette volonté-là que Rome a surtout persécutée. Que voulaient-ils, au moyen-âge, ces hérétiques qu'elle a écrasés par milliers et par cent milliers? Ils voulaient ôter du christianisme ce qu'on y avait ajouté ; ils voulaient revenir à ces doctrines dont saint Paul conjure Timothée de ne s'écarter jamais. Leur crime, aux yeux de l'Église, fut infiniment moins dans les erreurs où l'effervescence de la lutte les jeta parfois eux-mêmes, que dans le grand principe qu'ils posaient. Que voulurent, plus tard, avec plus de modération et de science, les Réformateurs du seizième siècle? Toujours cette piété en Jésus-Christ, toujours le retour à ce que saint Paul avait entendu par là, toujours l'Évangile dégagé et du matérialisme judaïque, et du faux spiritualisme. Voilà ce qui leur a valu les anathèmes et les persécutions de Rome ; voilà ce que veulent, comme eux, ceux contre qui Rome renouvelle aujourd'hui ses anathèmes, et, autant que les moeurs modernes le permettent, ses persécutions. Voilà ce que nous voulons , ici même , dans ces quelques remarques contre les erreurs romaines. Ajoutons-nous quelque chose à l'Évangile? En retranchons-nous quelque chose? Nous ne vous demandons que d'y revenir simplement, et d'avoir un christianisme qui soit la religion de Jésus-Christ, la piété en Jésus-Christ, non la piété en un tas de choses que Jésus-Christ et les apôtres n'ont jamais enseignées, que saint Paul a prédites comme des corruptions et des malheurs.

Versets 14 et suiv. - Que Timothée demeure ferme, car il sait de qui lui vient l'Evangile.


426. Verset 15. Et tu as eu, dès ton enfance, la connaissance des Saintes Lettres, capables de te rendre sage à salut, par la foi qui est en Jésus-Christ.

Si l'Ancien Testament, simple préparation à l'Évangile, doit être cependant, selon saint Paul, un des remparts de la foi de Timothée au milieu des erreurs et des tempêtes qui sont en train de l'assaillir, - que dirons-nous de cet autre Testament où la foi chrétienne est tout entière, directement exposée, développée, appliquée?

On objecte que vous pouvez mal entendre ce livre, et n'y trouver, au lieu d'un rempart pour votre foi, qu'une source d'erreurs. Mais, quand saint Paul attribuait à l'Ancien Testament une si grande et si salutaire influence, il savait bien que beaucoup de gens s'étaient égarés en le lisant, que les pharisiens et lui-même s'en étaient armés contre l'Évangile, que les judaïsants s'en appuyaient pour défigurer le christianisme. N'importe : il félicite Timothée de l'avoir entre les mains, de le connaître, de l'avoir connu dès son enfance. C'est la Parole de Dieu ; la Parole de Dieu fera son oeuvre. Ne vous arrêtez donc pas plus que saint Paul à l'objection qui pourra toujours être tirée de ce que l'Écriture, mal comprise , devient une source d'erreurs.

La question n'est pas là ; ceux qui s'efforcent de la concentrer sur ce point sont des gens qui ne veulent que s'en débarrasser. Heureux, dans tous les siècles, celui à qui on pourra dire, comme Paul à Timothée, qu'il a été, dès son enfance, nourri des Saintes Lettres! L'Église romaine elle-même n'a pas toujours parlé comme aujourd'hui.

Au neuvième, au dixième siècle, malgré tant d'erreurs déjà admises, l'étude des Saints Livres était encore universellement recommandée, ordonnée, comme la base et le rempart de la foi. Nul n'aurait encore eu la pensée de ne pas étendre au Nouveau Testament ce que saint Paul avait dit de l'Ancien, et c'était avec confiance, avec joie, qu'on répétait ce qu'il ajoute, que l'Écriture, divinement inspirée, est « utile pour enseigner, convaincre, corriger, former à la justice, afin que l'homme de Dieu soit accompli, et propre à tout ce qui est bon. »


CHAPITRE IV

Dernières exhortations à Timothée. Qu'il se prépare à de rudes combats. Quant à lui, Paul, il sait que son heure approche. Que Timothée se bâte de venir le voir.


427. Versets 9, 11 et 16. Car Démas m'a abandonné... Luc est seul avec moi ... Nul ne m'a assisté, et tous m'ont abandonné ...

Remarquez bien ces détails. Paul est à Rome, prisonnier, et sur le point de subir son martyre. Luc est seul avec lui, dit-il. Où était donc Pierre? On a essayé de répondre qu'il était peut-être enfermé dans une autre prison, peut-être déjà mort. Qu'est-ce que cela change à la question ? Qu'est-ce que cela ôte à l'étrangeté du fait que Paul continuât à parler uniquement de lui, Paul, et de ses souffrances à lui? Ne rien dire de celles de, son collègue, ne pas même le nommer, ce serait, ici, plus encore qu'en aucun des endroits où nous en avons déjà fait la remarque, d'une injustice et d'un égoïsme énorme, scandaleux, monstrueux.

Au verset 17, il bénit Dieu de l'avoir soutenu jusqu'au bout, afin que « toutes les nations entendissent » la prédication de l'Évangile. Au verset 21, il salue Timothée au nom de Lin, de ce même Lin dont on a fait le successeur de Pierre. Rien ne manque, vous le voyez, pour que l'absence du nom de Pierre soit aussi significative, aussi concluante que possible. On croit rêver quand on entend soutenir, en présence de tout cela, que Pierre était ou avait été à Rome.

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