Je vous somme devant Dieu, qui donne la vie à toutes choses, et devant Jésus-Christ qui fit une si belle confession devant Ponce Pilate; je vous somme, dis -je, d'observer tous ces préceptes, en vivant sans tache et sans reproche jusqu'à l'avènement de Notre Seigneur. 1 Timoth., VI, 13, 14.
Pour une réception de
Catéchumènes.
C?EST à son cher Timothée que Saint
Paul adressait cette grave et imposante
exhortation. C'est à vous principalement,
Catéchumènes, que nous la
répétons aujourd'hui. C'est la grande
leçon que nous avons
à vous donner. Après avoir
travaillé de toutes nos forces à
former vos coeurs pour le Ciel: dans ce moment
où nous allons recevoir vos promesses, vos
sermens; où vous êtes prêts
à vous consacrer pour la vie au Dieu que
nous vous avons fait connaître, au Sauveur
que nous vous avons appris à aimer; dans ce
moment si solennel, il importe de vous retracer
l'engagement que vous allez prendre; il faut vous
en faire sentir les éternelles
conséquences, la redoutable
sainteté.
Le voilà donc arrivé ce jour qui doit
vous mettre en possession de tous les
privilèges de l'Évangile; ce jour
où vous allez contracter avec le Seigneur
une alliance indissoluble; où vous lui
appartiendrez par choix et non pas seulement par
votre naissance! Jour de bonheur pour vous, de
consolation pour les justes, d'instruction pour les
pécheurs, de joie pour l'Église. Elle
en fait une de ses principales
solennités. Elle y invite
tous les Chrétiens. Elle réunit leurs
voeux et leurs prières pour implorer sur
vous les bénédictions du Ciel. Elle
se rouvre à l'espérance. Elle croit
voir renaître ces temps heureux où le
Seigneur
ajoutait
sans cesse de nouveaux membres à son
Église pour être
sauvés
(Act.,
II,
47).
Puissiez-vous, ah! puissiez-vous ne pas tromper un
si doux, un si légitime espoir! Puissent nos
exhortations avec le secours de l'Esprit Divin
faire sur vos coeurs une vive, une profonde
impression! Puissent-elles vous affermir dans les
sentiers de la justice et du bonheur! Ainsi
soit-il.
I. Ces
préceptes que nous vous
sommons aujourd'hui d'observer, ce sont ceux qui
nous sont donnés dans l'Évangile,
ceux que nous vous avons expliqués ligne
après
ligne, commandement après
commandement
(Es.,
28,
10).
Pour les remettre en un seul tableau sous vos yeux,
prenons le formulaire dont notre Église se
sert pour vous admettre à la Sainte
Cène. Les questions auxquelles vous aurez
à répondre dans quelques instans
renferment l'abrégé de tous vos
devoirs. Il suffira de vous en donner une
idée nette pour ne vous rien laisser ignorer
sur la vocation du Chrétien.
Première
question. Vous
qui
souhaitez
d'être admis à la Sainte Cène
et qui avez été instruits des
vérités de l'Évangile,
êtes-vous si bien persuadés de ces
vérités que rien ne puisse vous faire
renoncer à la Religion Chrétienne, et
que vous soyez prêts à tout souffrir
plutôt que d'en abandonner la
profession.
Ainsi donc, Catéchumènes, dès
aujourd'hui vous reconnaissez Jésus-Christ
pour votre Sauveur et votre Chef: vous le
choisissez pour Maître; vous faites, gloire
de lui tout devoir, d'être
ses rachetés,
d'être à lui. Vous promettez de lui
demeurer à jamais fidèles, de
défendre sa Religion, de soutenir ses droits
avec courage en toute occasion. Je l'espère;
vous n'aurez pas à redouter, en confessant
Jésus-Christ, comme aux premiers
siècles de l'Église, les
proscriptions et les bûchers. Le temps de ces
épreuves si terribles pour la chair et le
sang semble désormais passé. Nous les
avons vues pourtant se renouveler en d'autres
Églises; nous les avons redoutées
pour nous-mêmes. Mais il est d'autres combats
à soutenir. Il est un genre de
persécution toujours subsistant dans
l'Église et qui demande aussi pour y
résister de la fermeté, du courage.
C'est celle que vous aurez à souffrir de la
part des hommes corrompus dans les moeurs ou dans
la foi, qui s'efforceront de vous rendre semblables
à eux.
J'avoue que la
piété a les promesses de la vie
présente
(1
Tim. 4, 8), que
c'est elle
qui assure à un jeune homme l'estime
publique, inspire pour lui à ceux qui
l'environnent des sentimens de bienveillance, et
lui ménage ainsi d'avance pour sa fortune et
son établissement des circonstances
favorables; mais cette opinion publique,
judicieuse, éclairée, se forme
lentement et en silence, tandis que la tourbe
méprisable et bruyante des libertins et des
moqueurs cherche a intimider, dès les
premiers pas, celui qui entre dans la
carrière que l'Évangile nous ouvre,
et à l'entraîner dans une autre
route.
Catéchumènes, voilà vos
ennemis et vos persécuteurs! Ils
blasphémeront peut-être la Religion en
votre présence. Soutenez alors les
intérêts, et la gloire de votre
Maître comme vous défendriez la cause
d'un bon père indignement outragé.
Si vous ne vous sentez pas en état de
fermer la bouche à l'impie par la force de
vos raisonnemens, confondez-le du moins par
l'horreur que vous
témoignerez pour son impiété,
par votre empressement à rompre tout
commerce familier avec lui.
Si ces ennemis de votre âme essaient de
tourner la piété en dérision;
s'ils traitent de petitesse les devoirs du culte ou
la simplicité de la foi; et votre
délicatesse, de scrupule minutieux,
opposez-leur une fermeté digne d'un soldat
de Jésus-Christ.
Comme leurs paroles sont vides de sens et de
sagesse, comme leur arrogance n'est fondée
que sur la faiblesse qu'ils vous supposent, pour
leur en imposer et les déconcerter, il vous
suffira d'un dédain tranquille et d'une
constance inébranlable. Dites-leur avec un
grand Apôtre; Nous
ne sommes pas de ceux, qui se
retirent pour se perdre, mais nous gardons la foi
pour sauver nos âmes (Hébr.,
X,
39).
Dites-leur, comme autrefois, Josué aux
Israélites: Choisissez
qui vous voulez servir:
pour moi et ma maison, nous
servirons
l'Éternel
(Josué,
XXIV,
15). Voilà
le langage que vous
devez leur tenir. Voilà comment vous
montrerez qu'elles sont toujours présentes
à votre esprit ces paroles énergiques
de notre Maître, et l'époque
redoutable à laquelle il fait allusion: Quiconque
aura
honte
de moi parmi cette race adultère et
corrompue, le Fils de l'homme aura aussi honte de
lui, lorsqu'il viendra accompagné des Saints
Anges et dans la gloire de son
Père
(Luc.,
IX,
26).
Il ne suffirait pas de déployer cette
fermeté lorsque vous serez en
présence des ennemis de la Religion, et
seulement pour les devoirs extérieurs
qu'elle vous prescrit; il faut que la même
fidélité se retrouve dans toute votre
conduite, et que votre foi paraisse par la
sainteté de votre vie. C'est pour vous le
rappeler que l'Église vous adressera cette
autre question.
Deuxième
question. Vous
êtes
vouséprouvés
vous -mêmes? Êtes-vous résolus
à renoncer au péché, et
à régler toute votre vie sur les
commandemens de Dieu?
Vous l'entendez, Catéchumènes, ce
n'est point le monde; ce ne sont point ses
exemples, ses maximes qui doivent être votre
règle, mais les commandemens de Dieu. Vous
ne
suivrez donc
jamais la multitude pour faire le
mal (Exod.,
XXIII,
2). On
n'entendra jamais sortir de
votre bouche cette misérable excuse: Je n'ai
rien fait que ce que beaucoup d'autres font, que ce
qu'on fait tous les jours. Vous vous souviendrez
que vous n'êtes pas du monde, que vous
appartenez à Jésus, qu'il faut vous
revêtir de son esprit, vous former à
son image, que vous avez dit comme lui à
notre Père Céleste: Me
voici, o Dieu, pour faire ta
volonté
(Ps.
XL.,
8.).
Cette volonté sainte doit régler
toutes vos actions; il ne s'agit
point de choisir dans les commandemens de Dieu ceux
qui s'accordent avec nos penchans pour les
observer, en vous déguisant a
vous-mêmes la loi sur d'autres articles par
une illusion volontaire. Celui
qui viole un seul
Commandement,
dit
l'Écriture (Jaq.,
II,
10), est
aussi
coupable que s'il les avait tous
violés, parce
qu'il outrage également la Majesté
Suprême qui les a tous
sanctionnés.
S'il y avait quelque distinction à faire
entre eux, ce serait pour vous attacher avec plus
de soin à l'observation de ceux qui
contrarient vos inclinations, parce que c'est
là que vous devez vous surveiller et vous
défier de vous-mêmes.
Ce n'est pas tout. En déclarant que vous
êtes résolus de renoncer au
péché, et de régler votre vie
sur les commandemens de Dieu; en réunissant
ces deux choses, vous reconnaissez que pour plaire
à Dieu il ne suffit pas
d'éviter le mal qu'il
défend, mais qu'il faut aussi faire le bien
qu'il commande.
Vous n'emprunterez donc jamais le langage de tant
de Chrétiens de nom qui, lorsqu'on leur
reproche leur tiédeur, leur
négligence dans le service de Dieu,
répondent avec audace qu'ils ne font point
de mal. Ne vous y trompez pas,
Catéchumènes; quand il serait vrai
que vous ne faites point de mal,
c'est-à-dire, comme on l'entend d'ordinaire,
que vous n'avez aucun de ces vices grossiers,
indignes également de l'honnête homme
et du Chrétien, que vous n'êtes ni
impudiques, ni avares, ni médisans, ni
vindicatifs, ni injustes; hélas! sont-ils
exempts de tous ces vices, ceux qui disent, je ne
fais point de mal? Mais quand vous n'en seriez
point souillés, si vous ne faites pas de
bonnes oeuvres, vous n'êtes encore semblables
qu'à ce figuier stérile, à cet
arbre qui ne porte point de bons fruits et dont le
Sauveur a dit: qu'il
serait coupé et jeté
au
feu
(Matt.,
III,
10). Vous
ne pouvez entrer dans Je
royaume du Ciel.
Nos Livres Saints ne nous présentent- ils
pas le Chrétien sous l'emblème du
laboureur? Et suffit-il pour se promettre de riches
moissons, de n'avoir pas ensemencé la terre
de graines empoisonnées? Le royaume du Ciel
ne nous est-il pas proposé ailleurs comme
une récompense, un salaire qu'il faut
acheter par le travail de la journée?
Vous-mêmes, croiriez- vous devoir quelque
chose au serviteur qui se contenterait de ne pas
nuire dans votre maison, sans y rendre aucun
service? Accorderiez-vous le prix convenu à
des ouvriers qui n'auraient point fait la
tâche que vous leur auriez prescrite, qui
n'auraient pas même mis la main à
l'oeuvre que vous leur auriez donné à
faire? Par quelle étrange
inconséquence vous flatteriez-vous donc
d'être récompensés par le
Seigneur, si vous ne faites rien pour vous en
rendre dignes?
Troisième
question. Comme
dans le Sacrement de la Sainte Cène nous
faisons profession d'être tous un même
corps, voulez-vous vivre dans la paix et dans la
charité, aimer sincèrement vos
frères et leur en donner des marques dans
toutes les occasions?
Catéchumènes, que la Religion qui
vous parle ainsi doit vous paraître aimable!
à votre âge où le coeur n'est
pas encore gâté par les passions,
ulcéré par l'injustice, flétri
par la triste connaissance des hommes; à
votre âge où il s'ouvre naturellement
à une bienveillance générale,
que cette loi d'amour; est douce! qu'on en sent
bien l'attrait! C'est celle de notre Divin
Chef. Il règne sur nous par l'amour; il nous
a acquis par le sacrifice de l'amour; il nous
unit les uns aux autres par l'amour; il a fait de
l'amour la livrée de ses disciples: tous ses
Chrétiens auxquels par la rédemption
il a donné une nouvelle
naissance, ne doivent former qu'un seul corps dont
il est le Chef, et comme les membres du même
corps ne se bornent pas à ne point se nuire,
à ne point se déchirer mutuellement
mais qu'ils souffrent des mêmes maux ou
partagent le même bien-être, ainsi une
étroite sympathie doit vous unir a vos
frères. Vous devez les regarder comme une
partie de vous-mêmes;vous devez ressentir
leurs maux, les soulager quand cela dépend
de vous, les secourir, les défendre autant
qu'il est en votre pouvoir. Comme votre Divin
Maître, il faut être occupés
sans cesse de la pensée de leur faire du
bien.
Et ne croyez pas que ce noble devoir de
Chrétien ne soit le privilège que du
Grand, du Puissant. Dans toutes les conditions,
avec un coeur animé du feu de la
charité, vous pourrez être utiles par
des services, des conseils, des secours
proportionnés à vos moyens, par le
charme tout seul de cette
aimable disposition qui fera le
bonheur de tous ceux qui vous entourent, qui
répandra autour de vous la douceur et la
paix; Fût-elle sans influence sur le sort des
autres hommes, elle n'en trouverait pas moins sa
récompense auprès du Seigneur, Mais,
au contraire, du moment où les passions
ennemies de la charité infecteraient votre
coeur; du moment où vous y cacheriez quelque
levain d'égoïsme, de haine, de
ressentiment, de vengeance, de malice, de
jalousie, lors même qu'elles ne produiraient
pas encore d'effet au-dehors, vous ne seriez plus
à Jésus-Christ: son Ministre qui ne
lit point dans votre âme vous recevait encore
à la Table Sainte, mais vous ne seriez plus
membres de l'Église invisible; vous n'auriez
plus communion avec le Seigneur.
Mais, direz-vous peut-être, comment remplir
ces obligations diverses et conserver cette
fermeté, cette fidélité
entière, cette charité pure, tandis
que les passions, les
agitations, les intérêts de la terre
tendent sans cesse à les altérer?
Ici, Catéchumènes, la Religion vient
à votre aide. Écoutez,
écoutez, quels secours, quels moyens de
salut elle vous a préparés.
Quatrième
question. Pour
affermir toujours plus votre foi et votre
piété, promettez-vous de vous
appliquer avec soin à la lecture, à
la méditation de la parole de Dieu et
à la prière: de fréquenter
assidûment les saintes assemblées, et
d'employer tous les autres moyens que la Providence
vous fournira pour avancer votre
salut?
Vous le sentez, Catéchumènes, ce
n'est pas là un nouveau joug que la Religion
vous impose; c'est une précaution de sa
tendresse. Quels soins touchans elle prend de vos
âmes! Ce n'est pas assez pour elle de vous
recevoir dans la Communion des Saints; elle veille
sur vous. Ce n'est pas assez de
vous ouvrir le bercail; elle
veut vous y retenir. Ce n'est pas assez d'avoir
formé vos âmes à la vertu; elle
veut protéger votre innocence, vous lier
à la piété, vous entourer de
barrières et d'appuis.
Entre ces appuis, ces secours, elle compte d'abord
nos saintes assemblées. Ici vous pouvez
continuer, perfectionner votre instruction
religieuse qui n'est rien moins qu'achevée,
et de laquelle on peut dire que s'arrêter, ce
serait retourner en arrière; ne pas
acquérir, ce serait oublier. Ici tout vous
élève au-dessus de la terre et des
passions; tout vous rappelle ces objets spirituels
que les fantômes du monde et les soins de la
vie font trop oublier, votre âme, votre
sublime vocation, le Ciel, l'immortalité, un
Dieu Créateur, un Dieu Rédempteur, un
Dieu qui sera votre Juge. A peine êtes- vous
entrés sous les voûtes de ce temple
consacré au Seigneur, où nous sommes
réunis en son nom, que ces grandes
pensées se
réveillent
d'elles-mêmes dans votre esprit. Ici l'on
vous retrace vos devoirs, non d'après les
maximes du siècle, mais d'après
l'Évangile. Ici vous entendez dans toute
leur sévérité, dans toute
leur pureté, ces.vérités
éternelles qui doivent régler notre
conduite. Ici nos voix mêlées
ensemble, nos prières faites en commun, nos
émotions, nos sentimens confondus, tout nous
unit les uns aux autres et à notre
Père commun.
N'abandonnez donc jamais nos saintes
assemblées (Héb.
X,
25), vous
dirons-nous avec
l'Apôtre. Ah! remplissez-le cet engagement
sacré qui sera le gage de votre
fidélité sur tous, les autres,
points. Ne trompez pas les espérances,! de
ceux qui vous ont nourris du lait de la parole. Ne
portez pas la douleur et, l'inquiétude dans
leur âme. Si vous commenciez jamais à
vous relâcher à cet égard,
l'indifférence et la tiédeur
suivraient de près: il y aurait
quelque chose de
gâté dans votre coeur.
Hélas! ceux qui s'éloignent de ces
temples nous donnent le premier signal de l'oubli
du devoir, de l'oubli de Dieu et des choses du
Ciel. Les gens de bien en jugent comme nous; et
nous ne tardons pas à voir confirmer ce
triste présage. Nous ne tardons pas à
les voir s'égarer dans les routes des
passions, se plonger dans le désordre,
devenir des hommes tout charnels.
Un autre secours d'un prix inestimable et que vous
seriez bien coupables de négliger, ce sont
nos Écritures. Qu'il soit dans vos mains, ce
divin livre, lumière, trésor du
simple comme du savant. Qu'au sortir de ce temple,
il vous soit remis par vos parens ou par vos
bienfaiteurs, comme le Code immortel où vous
devez puiser tous vos principes, comme le guide
avec lequel vous ne sauriez vous égarer.
Qu'il soit pour vous ce qu'est pour le voyageur le
plan qui lui trace sa route et
qu'il consulte tous les jours,
à chaque pas, pour ainsi dire, de peur de se
tromper et de se perdre.
Heureux si vous savez y mettre votre plaisir, si
vous pouvez le méditer
nuit et
jour! Heureux
encore
si même dans une vie agitée et remplie
de travaux, vous ne le perdez jamais de vue!
Heureux si ne pouvant vous en occuper à
loisir, vous en lisez du moins chaque jour quelques
lignes pour vous en faire l'application, pour en
tirer quelque leçon, salutaire!
Ajoutez enfin à la lecture, à la
méditation de cette parole céleste
l'exercice de la prière qui nous unit
à Dieu d'une façon plus intime
encore, et auquel il attache des consolations si
douces et des grâces si puissantes. Il n'est
pas un de vous qui ne puisse élever son
âme à Dieu, au milieu même des
occupations de la vie, et l'invoquer avec ardeur,
avec droiture, avec simplicité. Vous
comprenez assez que je ne veux point parler ici de
quelques formulaires appris par
coeur, récités sans attention,
peut-être même sans en bien comprendre
le sens.
Je parle de ce divin commerce, de ce doux entretien
de l'âme avec son Dieu, de ces prières
du coeur dont Saint Paul a dit: Priez
sans cesse (1
Thess., 5, 17).
Le fidèle parle au
Seigneur comme un ami à son ami, comme un
fils à son père; il lui raconte
ses peines; il lui expose ses besoins; il examine,
il éprouve ses sentimens, et repasse ses
actions en sa présence et sous ses regards;
il implore son secours. Le moins instruit, le plus
timide d'entre vous, mes chers Enfans, peut avec
confiance s'entretenir ainsi avec son Dieu, et
compter sur cette bonté Divine qui daignera
l'écouter et venir à son aide. Ne
négligez jamais un tel privilège. Si
vous savez vous en prévaloir, vous
conserverez toujours votre innocence. Revêtus
des
armes de Dieu,
suivant l'expression de
l'Écriture (Ephés.
VI,
13), vous
serez assez forts contre
toutes les tentations.
Catéchumènes, c'est là ce que
vos parens promirent pour vous lorsqu'ils vous
apportèrent dans ce temple pour être
lavés dans les eaux du baptême. Vous
ne pouviez alors comprendre cet engagement:
aujourd'hui que votre raison et votre coeur se sont
développés vous venez la ratifier en
présence de l'Église, en
répondant à cette dernière
question.
Cinquième
question. Confirmez-vous
sincèrement
le voeu de votre baptême,
qui vous oblige à combattre vos passions,
à vous consacrer à Dieu et à
Jésus-Christ votre Sauveur, à vivre
dans sa Communion selon la tempérance, la
justice et la piété?
Quel tableau de la vie du Chrétien! Sous
quel point de vue on vous le présente! Pur
et modéré dans ses
moindres actions, dans ses
actions les plus secrètes,
irréprochable devant les hommes, fervent
devant Dieu, brûlant des nobles ardeurs de
l'amour Divin, étranger enfin à
toutes les séductions, à tous les
vices du siècle.
Voilà sa belle vocation, voilà la
vôtre, Catéchumènes! Vivre dans
le monde sans appartenir au monde, sans ressembler
au monde, sans respirer la contagion du monde;
faire partie de cette Église Sainte,
invisible, de ce peuple que Jésus s'est
formé et qui marche à la
lumière (1
Jean 1, 7),
telle est votre destination, tel
est votre devoir; tel est le chemin qui vous est
tracé et que vous devez suivre
jusqu'à la fin de votre vie,
jusqu'à l'avènement du fils de
Dieu.
Je sais qu'à votre âge on porte
d'ordinaire avec plaisir le joug du Seigneur. Le
souvenir encore récent des instructions
qu'on a reçues, le charme
des premières
émotions de la piété, la
délicatesse d'un coeur où les
passions n'ont pas encore porté le trouble,
d'une conscience qui n'a pas encore
été souillée par de grandes
fautes, tout cela inspire du zèle et du
courage pour marcher dans les voies de Dieu; mais
par degrés on se croit tenu à moins
de régularité; les soins de la terre
remplacent les habitudes de la piété;
les pensées de la foi s'effacent; les
sentimens religieux s'affaiblissent et
s'éteignent. De là
l'infidélité de tant de lâches
Chrétiens qui retournent sur leurs pas, plus
coupables sans doute de se livrer au monde
après avoir connu les joies du Seigneur, que
s'ils ne les avaient jamais
goûtées.
Mettez-vous en garde à l'avance contre cet
écueil, mes chers Enfans; dites-vous bien
à vous-mêmes que la
sévérité de la morale
Évangélique ne change point, et que
les lois du Seigneur, ses droits sur vous, ses
promesses et ses menaces étant toujours les
mêmes, votre fidélité
doit être toujours
égale; que le jour qui fermera pour vous la
carrière doit ressembler à celui-ci
pour la soumission, la foi, la ferveur.
Mais que dis-je? Ce ne serait pas assez que le
dernier jour fût semblable au premier. Vous
devez croître sans cesse dans la grâce
et la connaissance de
notre Seigneur et Sauveur
Jésus-Christ
(2
Pier., III, 18).
Ne pas faire des progrès dans le chemin de
la piété, c'est nécessairement
reculer. Chaque jour d'ailleurs vous offrira de
nouveaux motifs à la vertu; chaque jour
ajoutera de nouvelles grâces à celles
que vous avez déjà reçues du
Seigneur; et si vous n'en profitez pas pour vous
perfectionner davantage, chaque jour vous rendrait
plus ingrats et plus coupables. Chaque jour, vous
approchant du terme de votre vie, de la grande
époque des rétributions et du
jugement, doit voir s'accroître votre
espérance, votre crainte,
votre vigilance.
Le but du Chrétien, c'est la perfection. Ne
pouvant l'atteindre, il doit du moins y tendre sans
cesse; il doit pouvoir dire avec un grand
Apôtre: Je ne me
flatte point d'être parvenu à la
perfection; mais voici ce que je fais: je laisse
les choses qui sont derrière moi, et
m'efforçant d'aller vers celles qui sont
devant moi, je poursuis ma course pour remporter le
prix auquel Dieu m'appelle par
Jésus-Christ
(Philip.,
III,
13, 14).
II.Je
vous somme à présent
Catéchumènes d'observer
tous ces préceptes,
et de vivre sans tache et sans reproche jusqu'
à l'avènement de notre
Seigneur.
Je vous en somme, à la décharge de ma
conscience et au péril de votre âme,
de cette âme immortelle que Jésus a
sauvée, et que vous ne voulez pas
perdre.
Je vous en
somme devant
cette
assemblée. Qu'elle doit vous
paraître
intéressante et respectable! Ce sont des
fidèles qui viennent se réjouir de
votre entrée dans l'Église. C'est
votre Pasteur qui vous chérit comme ses
enfans dans la foi. Ce sont vos amis, vos parens,
vos maîtres; ce sont des Supérieurs
qui vous connaissent, qui auront les yeux sur vous.
Faudra-t-il que, dans la suite de votre vie, ils
soient réduits à vous dire: Jeune
homme! est-ce là ce que tu avais promis
à la face des autels? Au
dérèglement de tes moeurs peut-on
reconnaître un disciple de Jésus? Ah!
l'Église te désavoue: tu l'affliges;
tu la déshonores par tes excès...
Voudriez-vous entendre les hommes de bien vous
adresser ce langage?
Je vous en
somme
devant Dieu qui donne la vie à toutes
choses. Pour
quoi
vous a-t-il créés ce Dieu saint et
juste? Quels sont ses desseins sur vous? S'il vous
a donné la vie, s'il vous a placés
sur la terre, est-ce afin que vous ne pensiez
qu'à la terre?
Est-ce afin que vous courriez en
insensés après des biens et des
plaisirs frivoles?
Est-ce pour assouvir brutalement vos sens et vos
passions, pour tout rapporter à vous
mêmes, à vos intérêts
charnels? Non, non; quand il vous a formés,
je ne saurais trop vous le répéter,
il vous a formés pour être ici-bas son
image, pour aspirer sans cesse à ce bonheur
infini qu'il nous réserve dans son sein. Nous
sommes
l'ouvrage
de Dieu, dit
l'Écriture, ayant
été
créés pour faire des bonnes oeuvres,
que Dieu a préparées, afin que nous y
marchions
(Eph.,
II,
10).
Oseriez-vous, Catéchumènes, tromper
votre destination? Le pourriez-vous
impunément? Pouvez-vous vous soustraire
à l'autorité de ce Dieu qui donne la
via à toutes choses, de qui votre sort
dépend, qui n'a qu'à retirer sa main
pour que vous retombiez en poussière; de ce Dieu
qui
peut
non-seulement ôter la
vie du corps, mais jeter l'âme
dans la géhenne (Luc,
XII,
5)?
Je vous en
somme
devant Jésus- Christ, qui fit, en
présence de Pilate, cette belle confession,
je suis venu dans le monde pour rendre
témoignage à la
vérité
(Jean,
XVIII,
37).
Jésus-Christ! voila votre modèle,
Catéchumènes. Comme lui, montrez-vous
fidèles à la Religion,
défenseurs intrépides de la
vérité, Jésus-Christ! C'est en
lui que nous
avons été créés pour
faire de bonnes oeuvres.
Les hommes étaient morts dans
leurs fautes et dans leurs péchés;
ils étaient perdus pour le bien; ils ne
vivaient que d'une vie grossière,
animale; et non de la vie spirituelle des enfans de
Dieu. Jésus nous à donné une
seconde naissance; il nous a tirés de
l'abîme du péché pour nous
rendre à la vertu. C'est donc pour la vertu
seule que des Chrétiens doivent
vivre puisque c'est pour elle qu'ils ont
été reproduits, et qu'ils ne
vivent devant le Seigneur
qu'autant qu'ils travaillent à devenir
Saints, qu'autant que Jésus-Christ vit en
eux. C'est en lui et par lui seul que nous pouvons
produire toute sorte de bons fruits. Il
est le
cep, et nous
en sommes les branches: comme la branche de la
vigne ne saurait d'elle- même porter du
fruit, ainsi nous n'en pouvons porter aucun, si
nous ne demeurons en lui
(Jean
XV,
5).
Il vous parle encore en frère, en ami; il
est présent dans ce temple; il se tient
auprès de vous; il frappe à la porte
de vos coeurs: c'est lui qui les remue; c'est lui
qui les échauffe, c'est lui qui dit à
chacun de vous: Mon
fils! au nom de
tout
ce que j'ai fait, de tout ce que j'ai souffert pour
toi, mon fils!
donne-moi ton coeur
(Prov.
XXIII,
26).
Hélas! il ne vous
préviendra pas toujours ainsi par sa
grâce: un jour, et qui sait si ce jour est
fort éloigné pour quelques-uns de
vous? un jour il ne sera plus
que votre Juge. Ce serment de
fidélité que vous allez lui
prêter, et que les Anges écriront dans
le Livre de vie, il vous le rappellera au jour de
son avènement; il en fera la règle de
votre éternelle destinée.
Qu'elle est donc importante la démarche que
vous allez faire! A cette idée ne sentez
vous pas palpiter votre coeur? ne sentez-vous pas
un frémissement secret circuler dans vos
veines? Ah! plutôt mourir aux pieds des
autels que d'être jamais infidèle!
Mais écartons de si lugubres images.
Serait-il besoin de tant de sommations pour vous
faire désirer de conserver votre innocence,
d'être agréables au Ciel et
approuvés des hommes, d'attirer sur vous la
protection du Tout-Puissant, de vous assurer une
éternité de bonheur? Ah! vous le
voulez, j'en suis certain; mais, pour le vouloir
avec succès, sachez nourrir la
piété qui vous anime, sachez
résister aux
premières tentations qui
vont s'offrir à votre jeunesse. Ces premiers
efforts attireront sur vous des grâces
abondantes; Dieu sera plus attentif à vous
préserver: ces prémices pures de
votre vie, il les acceptera comme les gages de
votre salut, comme l'offrande d'une créature
qui lui appartient, et qu'il a mise au nombre de
ses rachetés et de ses élus.
Heureux, mes chers Catéchumènes,
heureux celui qui porte le joug du Seigneur
dès sa jeunesse! Dieu le bénira: ses
penchans, tournés d'abord vers le devoir,
s'y porteront d'eux-mêmes; ses jours seront
tranquilles, sa vie sainte, sa vieillesse
honorée; et sa mort, semblable à sa
vie, ne sera qu'un passage à la bienheureuse
immortalité.
Pères et Mères, qui voyez aujourd'hui
vos enfans entrer dans la communion des
fidèles et devenir vos frères selon
la foi, notre coeur partage les émotions du
vôtre: recevez nos félicitations. La
Religion accepte l'offrande que vous lui
présentez de ces enfans
chéris. Elle-même a voulu les
instruire et diriger leurs premiers pas. Elle vient
de leur parler encore par notre bouche. Maintenant
elle les remet sous votre garde; elle vous impose
le soin d'achever son ouvrage, de nourrir les
heureux sentimens qu'elle a fait naître dans
leur coeur. Ah! veillez, veillez avec plus de soin
que jamais sur ce dépôt
précieux. Que votre exemple les soutienne et
les fortifie. Que votre piété anime
la leur. Que votre sollicitude éloigne d'eux
les dangers.
Prolongez, prolongez pour leur bonheur ce temps
précieux où vos fils coulent des
jours paisibles à l'ombre de votre
protection. Ne la déposez point encore cette
autorité bienfaisante que vous tenez de la
Religion et de la nature, qui fut en honneur chez
les peuples les plus illustres, et à
laquelle on n'a porté atteinte en des jours
de licence que pour mieux sentir ensuite combien
elle importe aux moeurs. Non, ce n'est pas au
moment où les vents
vont troubler les airs qu'il faut abandonner le
gouvernail. Ne vous dépouillez pas
vous-mêmes de ce caractère auguste qui
fait votre force. Vous n'en serez que plus chers
à vos enfans en vous rendant plus
respectables. Vous n'en serez que mieux leurs amis
en continuant d'être leurs pères.
Ainsi vous les préserverez des écarts
de la jeunesse: vous en ferez la gloire et la
consolation de vos derniers jours: en les
conservant pour Dieu, vous les conserverez pour
vous-mêmes.
Et vous, mes chers Frères, qui assistez
à cette sainte cérémonie, ne
croyez pas qu'elle vous soit
étrangère. Voici de nouveaux
Chrétiens qui vont former avec vous une plus
étroite union, qui désirent de vivre
avec vous dans la communion des Saints, Leur
jeunesse, leur candeur, leur faiblesse, les dangers
qui les menacent, tout vous intéresse en
leur faveur, tout vous attendrit sur eux. Vous
contenteriez-vous d'implorer
pour eux les
bénédictions du Ciel? Ah! pour plaire
au Dieu de charité, ce n'est pas assez de
les soutenir par des voeux et des prières;
il faut les exhorter, les édifier, les
reprendre; il faut être auprès d'eux
l'instrument des miséricordes du
Très-Haut; il faut les enchaîner
à la vertu, en la leur faisant aimer, en
leur montrant en vous la paix et le bonheur qu'elle
assure.
Et ne songeriez-vous qu'a eux à cette heure?
Ne feriez-vous aucun retour sur vous-mêmes?
Une pensée vive, un sentiment profond, ne
s'élèverait-il point dans votre
âme? Vous aussi, en présence de
l'assemblée des fidèles, avec un
coeur ému, vous avez promis de vous
dévouer à votre Dieu. Vous aussi vous
avez pris l'engagement que ces
Catéchumènes vont prendre; vous avez
fait les promesses qu'ils vont faire. Les avez-
vous remplies? Redoutable question! Heureux celui
qui peut y répondre sans trouble et sans
honte!
Je reviens à vous,
Catéchumènes. Recueillez toutes les
puissances de votre âme! voici le moment
solennel. Priez le Seigneur d'accepter l'offrande
que vous allez lui faire. Priez-le de ne pas
regarder aux imperfections de la victime qui
s'offre elle-même, mais au plaisir, à,
l'empressement avec lequel elle se dévoue.
Priez-le de vous rendre dignes de lui, de vous
conserver à lui. C'est sa grâce qui
vous a conduits dans ce lieu saint. C'est elle qui
vous soutiendra. C'est par son secours que chacun
de vous pourra dire: Je l'ai juré, et je le
tiendrai, d'observer les ordonnances de la justice
(Ps. CXIX, 108), Amen. Amen.
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