Les lecteurs qui apprécient les
ouvrages de M. Funcke recevront volontiers de ses
nouvelles. Je sais heureux de leur dire,
qu'après avoir été assez
souffrant au commencement de 1900, il reprend
maintenant des forces.
M. Funcke a souvent connu la douleur. Par la
délicatesse de son organisme, il fut
appelé dans son enfance à des
renoncements nombreux. C'est sous une discipline
sévère qu'a jailli la joie dont son
coeur est plein, sait communiquer aux autres, ainsi
que le don d'observation dont il est abondamment
pourvu. Tant il est vrai que l'épreuve
chrétiennement supportée produit des
fruits bénis.
Que dirons-nous du livre récent dont nous
offrons la traduction ? C'est que Toi et ton
âme, formant la première partie de cet
ouvrage, nous avait frappé par le
caractère pressant de ses appels. On verra
que l'enjouement de l'écrivain ne
l'empêche nullement d'être profond,
d'apercevoir la nature tragique de l'existence
humaine. M. Funcke vous dira lui-même dans sa
Préface pourquoi, malgré les aspects
sombres de la vie en général et de
l'heure présente en particulier, l'humour
demeure le privilège du chrétien.
Les Esquisses norvégiennes suffiraient
à prouver qu'il existe un sentiment de la
nature réellement chrétien et propre
au chrétien.
L'éditeur français de ce volume, M.
Jeheber, l'a enrichi d'un nouveau portrait de
l'auteur, plus récent que celui du Secret du
bonheur. On s'aperçoit que des années
ont passé sur l'écrivain. Mais
serai-je seul à trouver que l'expression de
sa figure, loin de perdre avec les ans, a
gagné en vie ? Dans ces traits, un peu
austères, ne voyez-vous pas à
l'oeuvre une pensée personnelle, toujours en
éveil ? Dans la lumière du
regard ne découvrez-vous pas cette jeunesse
d'âme qui est l'une des qualités
maîtresses de M. Funcke, et l'une des forces
de son talent original ?
COMMUGNY, septembre 1900.
Jules GINDRAUX.
« Qui s'excuse s'accuse »,
dit-on. Je me garderai donc bien de m'excuser de
publier un nouvel ouvrage. Je sais qu'il est des
lecteurs prenant plaisir à mes
écrits. Je cause volontiers avec eux, la
plume à la main. Ce livre est-il le meilleur
de tous ceux que j'ai fait paraître ?
À vrai dire, je l'ignore. Ce que je puis
affirmer, c'est que je me suis efforcé d'y
donner ce que j'avais de meilleur.
L'ouvrage se compose de morceaux
détachés, dont l'unité est
exprimée dans le titre : Toi et ton
âme. Chaque morceau invite le lecteur
à descendre en lui, à se chercher et
à se trouver, à se rendre compte de
l'existence de son âme et à se mettre
en quête de la paix de
Jésus-Christ.
Je lisais hier une prédication fort
originale, où retentit sans cesse cet
appel : « Place pour
Jésus ! » J'aurais volontiers
donné ce titre à mon petit livre,
car, à mes yeux, c'est en
Jésus-Christ que nous obtenons la possession
de nous-mêmes, la vie et le salut de
l'âme.
« Place pour
Jésus ! » tel est le cri qui
s'élève des divers
morceaux de mon écrit. « Place
pour Jésus ! », qui n'a point
eu de place en ce monde, pour qui il n'y avait
point de place dans l'hôtellerie de
Bethléem, pas une place plus tard, pendant
son ministère, où il prit
habituellement reposer sa tête, dont la
place, lorsqu'il dut mourir, fut la croix.
« Place pour
Jésus ! », pour celui dont
parlent avec éloges nos socialistes, nos
athées, aussi bien que nos piétistes,
nos catholiques et nos méthodistes, nos
philosophes et nos paysans. En vérité
qui, aujourd'hui, n'a pour Christ une parole de
respect ? Mais qui donc donne à Christ
la place à laquelle celui-ci prétend,
à laquelle il a droit ? Qui donc parmi
nous lui ouvre son coeur, celle âme faite
pour Lui, heureuse seulement en Lui ?
Si je m'occupe de l'âme, on le voit,
c'est avant tout en chrétien et en serviteur
de Christ.
« Mais que viennent faire ici les
Esquisses norvégiennes? » demande
un lecteur. « Elles sont là, lui
répond le critique qui a de
l'expérience, pour accroître le format
du livre. » À qui nourrit ce
soupçon, je ne saurais démontrer avec
évidence qu'il se trompe. Je me bornerai
à déclarer que je n'étais
point à court de matériaux, que
j'aurais pu jusqu'à la fin du volume
poursuivre mon premier sujet.
Mon voyage en Norvège me tenait encore
sous le charme, lorsque j'ai écrit ces
lignes. Mon mobile fut le plaisir que
j'éprouvai à les tracer. J'aime
à conter. Et je me suis senti pressé
de faire part à mes amis de quelques-uns des
souvenirs de mon excursion vers les contrées
septentrionales.
Je me suis dit d'ailleurs qu'il est des
lecteurs encore éloignés de
l'Évangile, qu'ils pourraient être
attirés vers mon livre par ces Esquisses et
que celles-ci serviraient cette cause de notre
âme qui me tient à coeur, que j'ai
plaidée dans la première partie de
mon volume.
Post-scriptum. - J'oubliais d'inviter les
lecteurs qui ne goûtent pas l'humour à
ne pas regarder ces pages. Quelqu'un
m'écrivait récemment :
« Le temps actuel est trop sérieux
pour permettre aux chrétiens de se livrer au
jeu de l'humour. » Je ne partage pas cet
avis. L'humour ne saurait en aucun temps perdre ses
droits chez le chrétien. L'humour et le
sérieux ne sont pas deux contraires. Ils
s'appellent, ils vivent fort bien ensemble. Et
l'humour a été plus d'une fois le
meilleur moyen de faire réfléchir, de
rendre sérieux.
J'irai plus loin. À mon sens, l'humour
ne convient bien qu'au chrétien. Seul, le
chrétien est logique en se livrant à
l'humour. Pourquoi ? Parce que le
chrétien attend la victoire de la
lumière sur les ténèbres,
parce qu'il sait qu'une éternelle et
parfaite harmonie succédera un jour aux
dissonances du présent. Le croyant se
transporte par l'espérance au moment du
triomphe final du bien, et de ce sommet il peut
dominer avec sérénité les
luttes, les tristesses de la vie. À la
clarté du glorieux avenir qui doit
être le nôtre, les obscurités du
présent s'illuminent par avance, le sourire
naît même au milieu des larmes.
Je voudrais que ce volume fît luire un
rayon de soleil dans les demeures riches et dans
les demeures pauvres. Jamais, en
vérité, le monde n'eut autant besoin
de rayons de soleil qu'aujourd'hui.
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