Alors un des vieillards prit la parole, et me dit : Ceux qui sont vêtus de robes blanches, qui sont-ils, et d'où sont-ils venus ?
Et je lui dis : Seigneur tu le sais. Et il me dit : Ce sont ceux qui sont venus de la grande tribulation, et qui ont lavé leurs robes, et les ont blanchies dans le sang de l'Agneau.
C'est pourquoi ils sont devant le trône de Dieu, et ils le servent jour et nuit dans son temple ; et celui qui est assis sur le trône, habitera avec eux.
Ils n'auront plus faim, et ils n'auront plus soif ; et le soleil ne frappera plus sur eux, ni aucune chaleur.
Car l'Agneau qui est au milieu du trône, les paîtra et les conduira aux sources d'eaux vives, et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux.
Saint Jean, exilé par l'empereur Domitien
sur le rocher désert de Patmos, voit, dans
une série de visions, les destinées
futures de l'Église de Christ. C'est une de
ces visions qui nous est décrite dans le
chapitre duquel est tiré notre texte. Le
monde éternel s'ouvre aux yeux du disciple
bien-aimé ; une multitude que
personne ne peut compter, de toute nation, de toute
tribu, de tout peuple et de toute langue, entoure
le trône de Dieu. Tous sont vêtus de robes blanches, ce
qui est
une image de la glorification céleste ;
tous aussi ont des palmes à la main, ce qui indique que cette
multitude est une
armée de vainqueurs.
Fraîchement arrivés et se voyant au
terme de leurs combats, ils entonnent un chant de
louange qui retentit jusques dans les oreilles du
disciple qui écoute avec adoration. Son
coeur désire savoir quelle est cette
armée bienheureuse, et une voix
céleste, qui semble prévenir son
désir, lui demande : Ceux qui sont
vêtus de robes blanches, qui sont-ils, et
d'où sont-ils venus ? Et l'humble
serviteur de Dieu, le front dans la
poussière, répond : Seigneur, tu le sais. Et
la
même voix lui donne la clé de ce
mystère : Ce sont ceux qui sont
venus de la grande tribulation, et qui ont
lavé leurs robes et les ont blanchies dans
le sang de l'Agneau.
Le temps qui est derrière eux a
été un train de guerre ; l'avenir qui est devant eux est
une
éternelle allégresse. Autrefois,
ils erraient loin de leur Dieu, gémissant
sous le poids d'un corps de mort ;
désormais, ils sont devant le trône
de Dieu et le servent jour et nuit dam son
temple.
Autrefois, ils marchaient dans une terre
déserte, où ils
étaient altérés et sans
eau ; désormais, ils logeront
parmi les biens, car leur Rédempteur
les paîtra et les conduira aux sources d'eaux
vives, et Dieu essuiera toute larme de leurs
yeux.
Est-ce un rêve ou est-ce une
réalité ? Ce ravissement
de saint Jean, dans une île déserte,
a-t-il quelque valeur pour nous ? Un
tel avenir de gloire serait-il aussi
réservé pour nos
âmes ?
Mettez-vous devant la croix de
Jésus-Christ : c'est sur cette
croix que tout s'explique ; l'avenir qui se
déroula devant les yeux du disciple
bien-aimé, est l'avenir de tout coeur
touché et qui peut dire : J'ai cru. La croix de Jésus
est le centre de notre
repos, le centre de l'histoire du monde, le centre
de notre éternité. Ôtez cette
croix, vous ne savez plus où vous marchez ni
où vous allez ; rendez à cette
croix sa vraie place, tout devient lumière,
derrière vous, en vous, devant vous. Notre
texte nous montre comment il faut
faire l'expérience de
cette croix. Il y a trois points qui vont nous
occuper : la grande tribulation, ce sang
qui lave et ces vêtements blanchis. Réunissez ces
trois points, c'est notre éternelle rédemption que vous
voyez.
Il faut passer par une grande
tribulation, pour arriver à la palme de
la victoire. Où est cette tribulation ?
Je vais vous la montrer en trois endroits.
D'abord autour de vous. Si, pour un jour seulement,
vous pouviez regarder du haut du ciel sur la terre,
que verriez-vous ? Une grande
tribulation.
Que de remuements ici-bas, que d'agitations, de
quelque côté que vous regardiez !
Rien de stable, aucun état permanent, nous nous envolons, dit
l'Écriture. Le plus beau jour n'est que travail et que
tourment ; le pain que nous mangeons est un pain de
douleur. Il y a quelque chose qui
pèse sur nous ; cet
ordre de choses n'est pas un ordre normal. Je parle
de vous, de moi, de toute la création. Toutes les créatures
ensemble soupirent
et sont en travail jusqu'à maintenant. Ces feuilles qui
tombent, cette vie qui se
décolore, cet assujettissement à la
vanité, ces voix plaintives qui vous
viennent de tous les côtés, tout vous
dit que vous vivez dans un monde déchu, et
que ce que vous appelez la vie n'est, à vrai
dire, qu'une grande tribulation.
Mais cet état général n'est
plus rien, si vous regardez à
vous-même. La grande tribulation est
aussi en vous, elle n'est pas seulement autour de
vous. Allez au coeur de votre vie : croyez-le
ou ne le croyez pas, il y a en vous une plaie
hors d'espérance. Cette plaie vient d'un
renversement qui a faussé toute votre
nature.
Ce qui doit gouverner est captif ; ce qui doit
servir gouverne. Regardez à votre
état général, ce sont vos
péchés qui ont fait séparation
entre vous et votre Dieu.
Le lien de la paix est rompu, et qu'est-ce qui
reste, quand il n'y a plus de paix ? Une
grande tribulation. Un coeur vide, une
âme desséchée, une conscience
qui ronge, des convoitises qui séduisent. Prenez les
ailes de l'aube du
jour et allez demeurer à
l'extrémité de la mer, la
vérité vous suivra ; et la
vérité, c'est votre
péché.
Ah ! ce mot n'est pas comme un autre ; ce
mot est aussi une chose, et cette chose est aussi
un enfer. Qu'il brûle aujourd'hui ou qu'il
brûle plus tard, il brûlera ;
faites votre paix avec Dieu, il est temps de vous
juger vous-même. Quand toute la tête
est en douleur, quand tout le coeur est
languissant, il y a folie de dire : Paix, paix, puisqu'il
n'y a point de
paix.
Mais la grande tribulation est encore
ailleurs : elle est aussi sur la croix de
Jésus-Christ. Si nous souffrons pour nos
péchés, nous ne souffrons que pour
les nôtres ; mais la grande victime du
Calvaire a été faite
malédiction pour nous tous. L'Éternel
a fait venir sur Lui
l'iniquité de nous tous. Comptez, si vous
pouvez, les millions de
péchés de la postérité
d'Adam ; or, si un seul péché,
bien réveillé, est déjà
une malédiction, quel jugement, quand toute
cette charge vient à tomber sur le
représentant des pécheurs !
Et c'est une coupe qu'il n'a point
détournée de Lui, car il a voulu faire la propitiation pour nos
péchés, et non seulement pour les
nôtres, mais aussi pour ceux de tout le
monde. Ah ! si nous pouvions
pénétrer dans cette nuit de
Gethsémané, dans cette agonie pendant
laquelle le monde dormait, quand Lui veillait et
combattait, si nous pouvions entrer dans ces grands cris et ces
larmes, dans ces prières et ces supplications,
jusqu'à ce cri final : Mon Dieu, mon
Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ! Nous verrions une
tribulation pour laquelle il
n'y a plus de langage. Dieu seul a pu voir ici
jusqu'au fond ; tout ce que nous savons, c'est
que le Médiateur de nos âmes a
été enlevé par la force de
l'angoisse et de la
condamnation ; que
l'Accusateur invisible n'aura rien oublié,
pas un iota de notre dette, pour la faire payer
dans son entier à ce garant ;
Jésus ne dit-il pas lui-même : Tout est accompli ? Tout
notre salut
est le fruit d'une grande tribulation ; suivez l'Agneau
de Dieu qui porte les
péchés du monde, et vous le
saurez. Vous estimerez le prix de ce sang,
dans lequel la multitude céleste avait lavé et blanchi
ses
vêtements. C'est le second point que nous
avons à voir.
L'Écriture a soin de dire : En
qui nous avons la rédemption par son
sang, savoir la rémission des
péchés. Sans effusion de sang, il ne
se fait point de rémission des
péchés. C'est le sang de
Jésus-Christ qui purifie de tout
péché ; ce n'est point sa
doctrine, ce n'est point son exemple. Le Sauveur
dit lui-même, au moment où il institue
la sainte Cène : Cette coupe est
la nouvelle alliance en mon
sang, qui est répandu pour vous.
L'expiation est dans ce sang
répandu ; portez-la ailleurs, ce ne
sera plus l'expiation. C'est dans le sang qu'est le
siège de la vie naturelle, et c'est dans le
coeur de la vie naturelle qu'est aussi le
siège du péché.
C'est le péché, dans son principe,
qu'il a fallu frapper, pour que la satisfaction
réclamée par la conscience ait
été la véritable. Il a fallu
que ce sang, c'est-à-dire cette vie
intérieure qui était devenue une
inimitié envers Dieu, se
répandît volontairement sur l'autel,
pour que l'harmonie primitive entre la
créature et le Créateur se
retrouvât. Mais cette vie, qui a dû
s'immoler elle-même, ne pouvait
représenter une vie étrangère,
tant que la victime n'était qu'un
homme ; Dieu seul a pu
réconcilier le monde avec soi ; mais Dieu, se faisant
homme, Homme-Dieu, seul Médiateur entre deux
mondes ; et c'est comme tel qu'il se donne
à nous sur la croix. Par une seule
oblation, il a amené pour
toujours à la perfection
ceux qui sont sanctifiés. Ce que le
sauvage n'avait qu'entrevu, ce que
l'Ancien-Testament ne donne que comme une ombre, le
pressentiment de tous les peuples est
confirmé dans la seule victime qui est
Jésus. Le fondement de notre paix est dans le mystère de piété que
Dieu était en Christ, réconciliant
le monde avec soi, en ne leur imputant point leurs
péchés et mettant en nous la Parole
de la réconciliation.
L'Évangile est la nouvelle du
pardon ; il tourne vos regards vers Celui que
vous avez transpercé ; car, quiconque contemple le
Fils et croit en Lui, a
la vie éternelle.
Allez à cette source ouverte pour le
péché et pour la souillure, et ce
qui est rouge comme le cramoisi sera blanchi comme la
laine. Il le dit
lui-même à toute âme
travaillée et chargée, Lui qui ne
saurait mentir : J'ai effacé tes
forfaits comme une nuée épaisse, et
tes péchés comme un nuage ;
retourne à moi, car je t'ai
racheté.
C'est alors qu'on s'écrie avec le
prophète : Qui est le Dieu fort,
semblable à toi, qui
ôte l'iniquité et qui passe par-dessus
les péchés du reste de son
héritage ? Il ne tient pas toujours sa
colère, parce qu'il se plaît
à faire miséricorde. Il a eu
compassion de nous ; il a mis sous ses pieds
nos iniquités, et il a jeté tous nos
péchés au profond de la mer.
Mais qui est capable de s'approprier ce
salut ? Vous êtes en présence du sang de l'aspersion et qui
prononce de
meilleures choses que le sang d'Abel ; mais y avez-vous lavé
vos robes,
blanchi vos vêtements ? Examinons
encore ce dernier point, c'est le plus important de
tous.
Nécessairement, il faut vous
demander : Qu'ai-je fait jusqu'ici de mes
péchés ?
Ce n'est qu'un pauvre pécheur que le sang de
Jésus-Christ puisse laver. Suis-je sorti de
ma propre justice ?
Les vêtements, c'est ce qui couvre tout le
corps ; c'est de toute votre personne qu'il
s'agit ou de votre esprit
dominant. Ce qui a faussé votre vie, c'est
la recherche de vous-même ; que, si
Jésus-Christ doit vous sauver, il faut vous
convertir à Lui. Revêtez-vous du
Seigneur Jésus-Christ, en lui donnant
tout empire sur vous ; il est l'Auteur du
salut éternel, mais pour ceux qui lui
obéissent.
Êtes-vous à
Jésus-Christ ? Je vais vous dire
à quel signe vous pouvez le
reconnaître : c'est quand votre coeur
est un coeur brisé ; cet acte s'est-il
accompli en vous ?
L'un ne pense pas à ses
péchés ; la routine, le souci du
matériel, voilà sa vie ; il ne
connaît pas autre chose.
Un autre se pardonne lui-même et se blanchit
par ses propres raisonnements ; le sang de
l'Agneau est perdu pour lui.
Un troisième est un honnête homme et
tout couvert de considération ; ne
discutez pas avec lui, vous ne l'atteindrez pas
sous sa cuirasse.
Un autre encore a reçu des
avertissements ; il sent bien qu'il n'est pas
dans l'ordre, mais la dissipation du monde chasse
tous ces mouvements.
Enfin, en voici un dernier qui est sous la
main de Dieu et depuis longtemps ; vous
attendez beaucoup de ses épreuves, mais le
coeur peut s'user dans le malheur comme dans le
train de la vie journalière. Allez de maison
en maison, prenez une lanterne, comme
Diogène ; ce que vous trouverez le
moins, c'est un pauvre pécheur.
Ce n'est pas que pour tous ces hommes ou pour
toutes ces familles Jésus-Christ soit un
inconnu, mais on ne veut pas de ce
Jésus-Christ qui lave ; ce qui
fait frémir le plus, c'est l'obligation de
changer. Cependant, Jésus-Christ a
dit : Si je ne te lave, tu n'auras point de
part avec moi. Il veut autre chose qu'une
orthodoxie de salon, il veut une nouvelle
créature.
Le vrai Jésus-Christ est Celui qui jouit du travail de son âme
et qui en est
rassasié. Il demande amour pour amour,
et un crucifié pour un crucifié.
Ah ! comme tout change, quand ces voix
commencent à parler. Il y a un travail qui
se fait en silence, et qui part de la croix
de Jésus. Les mauvais
fondements sont ébranlés, la
volonté rebelle se rend, le coeur sent le
pouvoir d'un amour nouveau. Ce ne seront plus des
mouvements passagers, c'est une transformation
d'esprit, une vie spirituelle, à la
place de la vie naturelle, et cet
état va croître et sanctifier
parfaitement. Quand j'aurai été
élevé de la terre, dit
Jésus, j'attirerai tous les hommes
à moi.
C'est l'attraction de la croix qui, de toutes,
est la plus forte. Dieu a bien des
puissances ; mais sa puissance souveraine,
c'est Jésus-Christ crucifié.
Pourquoi saint Paul est-il si fort ? comment
est-il soutenu dans les faiblesses, dans les
opprobres, dans les misères, dans les
persécutions, dans les afflictions
extrêmes ? C'est qu'il ne veut
savoir autre chose que Jésus-Christ et
Jésus-Christ crucifié.
Sur cette croix, le péché est
immolé, le mur de séparation est
abattu ; par le sang de Jésus, il y a
liberté d'entrer dans les lieux saints, par
le chemin nouveau qui mène à la
vie : tous ceux qui
sont venus de la grande
tribulation et qui ont lavé leurs robes dans
le sang de l'Agneau, sont des vainqueurs. La
joie du salut est leur force ; ce ne sont plus
eux qui vivent, c'est leur vainqueur qui vit en
eux ; et la croix est aussi la bannière
qui unit les peuples et les époques.
Il y a bien des nuances d'hommes ; mais ce
sang, qui nous lave tous, est aussi une puissance
qui nous unit tous. Vous qui étiez
autrefois éloignés, vous avez
été rapprochés par le sang de
Christ. Élevez vos yeux et regardez tout
autour : quelles sont ces volées,
épaisses comme des nuées, qui volent
comme des pigeons à leurs colombiers ? Ce sont de
pauvres pécheurs qui
viennent d'orient et d'occident, du septentrion et
du midi ; ils ont compris l'appel : Vous tous les
bouts de la terre, regardez vers
moi et soyez sauvés.
Sous l'étendard de la croix, les
nationalités s'effacent, les siècles
se tendent la main ; il n'y a plus ni Grec,
ni Juif, ni circoncis, ni incirconcis, ni
barbare, ni scythe, ni esclave,
ni libre : mais
Christ
est toutes choses en tous.
Il y a peut-être une âme encore
à gagner, et cette âme c'est la
vôtre.
Vous avez besoin de pardon, de paix, d'un bonheur
qui comble tous vos vides et qui soit
éternel comme Dieu. Eh bien ! vous
pouvez l'avoir, et, qui plus est, gratuitement.
Faites-vous montrer votre grande tribulation, et
sentez comme elle vous navre, comme tout en vous
est souillé.
C'est ce vieux vêtement qui est la cause
profonde de vos misères. Ne le gardez point,
quand vous pouvez avoir autre chose. Il y a un
vieil Adam, mais il y a aussi un nouvel
Adam ; dépouillez-vous du premier,
et vous serez revêtu du second.
Votre vie avance, et bientôt vient une heure
qui sera votre dernière heure. Toute une
nuée de témoins s'assemblera sur
votre lit de mort ; ces voix
demanderont : Qui est celui qui vient de la
grande tribulation ?
Ah ! que Dieu vous donne cette
réponse : C'est un de ceux qui ont
lavé leurs robes et qui
les ont blanchies dans le sang de l'Agneau. Il
n'aura plus faim, il n'aura plus soif, et le soleil
ne frappera plus sur lui, ni aucune chaleur ;
car son Rédempteur le paîtra et le
conduira aux sources d'eaux vives, et Dieu essuiera
toute larme de ses yeux.
L'esprit se perd quand il regarde à
cette gloire à venir. Arriver comme un
coupable, et être reçu comme un
enfant ! ne rien apporter que des souillures,
et se voir lavé, blanchi, conforme
à l'image du Fils de Dieu ! derrière vous une
tribulation de
tous les jours, de tous les instants ; devant
vous des palmes et une allégresse
éternelle sur votre tête !
Cela est-il vrai, cela est-il
réel ? Ah ! si vous en doutez,
regardez à la croix ; les puissances
de l'enfer ne prévaudront point contre
elle ; à vos doutes présents
et futurs, opposez l'assurance : II m'a
aimé d'un amour éternel ; vous,
deux, écoutez ; et toi, terre,
prête l'oreille, le miracle des miracles,
c'est un pécheur sauvé, c'est moi.
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