Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

SAINTETÉ

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SECTION I.

Nature de la vraie religion.


Il est naturel que ceux qui ont passé par les agitations dont la conversion est souvent accompagnée, et qui ont senti la paix qui découle de notre réconciliation avec Dieu s'imaginent que le combat est fini, la victoire gagnée, et l'œuvre de la religion accomplie.

Cette illusion ne tarde pas à se dissiper. La naissance ne fait pas toute la vie, ni la conversion toute la religion. Une jeune mère peut, dans l'ivresse de sa joie, oublier un moment les devoirs impérieux qui se dressent devant elle ; mais quand elle regarde son enfant doué d'une organisation si admirable et d'une âme immortelle, elle sent qu'il dépend entièrement de ses soins.

De même le jeune chrétien, bien qu'il soit d'abord disposé à croire que son œuvre est terminée, s'aperçoit bientôt que le faible principe de la vie spirituelle a besoin d'être gardé et nourri avec des soins continuels. S'il était abandonné après sa naissance il périrait aussi certainement et aussi promptement qu'un enfant destiné à la mort.

Une autre erreur sur ce sujet consiste à se représenter la vie religieuse comme une vie où l'on agit par boutades, comme une alternative perpétuelle d'excitation et d'insensibilité. Ceux qui se trouvent sous l'empire de cette illusion ne sont religieux que dans de certaines circonstances.

Ils vivent tranquillement des mois entiers sans s'occuper de leur âme, et si après cela ils peuvent éprouver un mouvement de zèle ou de joie religieuse, ils ne craignent pas de retomber dans une nouvelle période d'affaissement.

Mais la vie n'a jamais cette forme intermittente, ni les animaux, ni les plantes ne vivent de cette manière. L'homme, lorsqu'il est en santé, ne passe point des convulsions à la défaillance, et de la défaillance aux convulsions. La vraie religion non plus ne se présente jamais sous cette forme.

Elle a sans doute ses alternatives comme il se trouve dans la vie du corps des périodes de santé ou de maladie, de vigueur ou de lassitude ; mais en tant qu'elle mérite le nom de religion, elle est ferme, active et progressive ; elle n'est rien moins qu'une série de spasmes.

C'est une erreur encore plus commune de supposer que la religion est un service extérieur, plutôt qu'une affection intérieure.

Une multitude de personnes s'imaginent être religieuses parce qu'elles suivent les services religieux, comme s'il suffisait de la fréquentation régulière du culte divin et des formes extérieures de la religion pour donner des titres au caractère de chrétien.

L'Écriture nous enseigne que la religion est une vie nouvelle et spirituelle. Aussi, le commencement de cette vie est-il appelé une nouvelle naissance, une création, une résurrection spirituelle. Elle est un mystère, quant à son principe ou à sa source. Nul homme ne peut dire ce qu'est la vie. Il l'aperçoit sous ses diverses formes dans les végétaux, dans les animaux et dans l'âme ; mais il ne peut découvrir le ressort caché de ses divers genres d'activité. La nature de la vie spirituelle échappe naturellement à nos recherches. « Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit : mais tu ne peux dire d'où il vient ni où il va ; il en est de même de quiconque est né de l'Esprit » (Jean III, 8.)

Un nouveau genre d'activité se manifeste dans l'âme qui est née de Dieu, mais d'où procède cette activité, et comment se conserve-t-elle, ce sont là de ces secrets dont Dieu s'est réservé la connaissance. Toutefois, nous ne pouvons douter qu'il n’y ait une cause permanente à cette activité nouvelle.

Nous savons que la vie du corps ne consiste pas dans les actes de voir, d'entendre ou de goûter ; ni l'âme dans la pensée et dans la volonté ; de même la vie spirituelle ne consiste pas dans les actes qui servent à la manifester.

Il y a dans la régénération un changement opéré dans l'état de l'âme qui explique pourquoi ses pensées et ses sentiments diffèrent de ce qu'ils étaient auparavant, et continueront à en différer. La cause de cette différence est appelée :

un nouveau cœur,

une grâce,

ou bien l'Esprit,

ou le nouvel homme,

ou encore le renouvellement de l'homme intérieur.

Tous ces termes s'emploient pour désigner le principe de la vie spirituelle qui se manifeste par les fruits de sainteté.

Il est appelé vie, parce qu'il est durable et permanent.

Ceux qui montrent pour un temps un certain degré de zèle et de vie religieuse, pour cesser ensuite de prendre aucun intérêt à la religion, sont comme des cadavres sur lesquels le galvanisme pourra bien produire momentanément quelques-unes des apparences de la vie, mais qui bientôt deviennent insensibles à tous les moyens d'excitation. En pareil cas, il n'y a point de principe de vie.

Là où la religion est réelle, elle a sa racine dans un cœur nouveau, et elle est par là même permanente.

C'est encore un trait caractéristique de la vie des êtres sensibles et intelligents, d'être spontanée dans l'exercice de son activité. Il y a certains actes auxquels elle se porte naturellement et dans lesquels elle se complaît. Ce n'est point par contrainte que les animaux mangent, boivent ou s'ébattent dans le sentiment de leur force ; ce n'est pas non plus par une impulsion étrangère que les hommes exercent leur esprit à recevoir et à communiquer des idées, ou à éprouver des affections.

Ce serait, pour eux, la plus sévère de toutes les condamnations, que de se trouver tellement isolés de leurs semblables, qu'ils ne pussent donner essor à la vie sociale et intellectuelle.

Semblablement l'adoration, la reconnaissance, l'amour, la soumission à Dieu sont les exercices spontanés du cœur renouvelé. Une religion obtenue violemment par la contrainte morale serait fausse. L'obéissance filiale, lorsqu'elle procède de la crainte du châtiment ou de considérations purement extérieures, est bien différente de celle qui vient du respect et de l'amour ; et à moins que le service que nous rendons à Dieu ne sorte spontanément de notre cœur ; rien ne prouve que nous soyons ses enfants.

La Bible représente le peuple de Dieu comme prenant son plaisir dans les choses de Dieu. Sa parole, ses ordonnances, son sanctuaire, sa présence font le principal sujet de sa joie.

Lorsqu'un homme est malade il prend peu de plaisir dans les objets ordinaires de jouissance, et quand le chrétien est en état de chute il ne connaît guère la joie qui appartient à la religion.

Néanmoins, tout ce qu'il peut y avoir de vie spirituelle dans une âme se manifestera nécessairement par l'exercice spontané de la piété.

De plus la vie, sous toutes les formes que nous lui connaissons, est progressive ; faible dans ses commencements, elle avance graduellement vers la maturité. Telle elle se montre dans les plantes, dans les animaux et dans l'âme ; telle aussi dans la vie spirituelle.

Le commencement d'une vie religieuse est accompagné d'un état de joie qui souvent ensuite décline, et cette circonstance peut conduire le chrétien à croire que la religion elle-même décline dans son cœur. Mais cette joie n'est qu'une pierre de touche bien incertaine du progrès ou du déclin de la vie spirituelle.

Les gambades des jeunes animaux témoignent d'une exubérance de joie que n'éprouvent plus ceux qui ont atteint l'âge de la maturité. Mais combien est imparfaite l'organisation de ces joyeuses créatures ! combien sont faibles leurs moyens de subsistance, combien leur force est peu de chose, si on les compare aux animaux plus avancés en âge qui ne connaissent pas la moitié de leurs joies. Il est donc conforme à la nature que les jeunes chrétiens, sous l'influence de sentiments délicieux par leur nouveauté aussi bien que par leur nature, éprouvent un bonheur que ceux qui sont plus avancés ont cessé de connaître, parce que chez eux les sentiments sont devenus des principes, et que les éclairs de joie ont fait place à une joie qui surpasse toute intelligence.

Bien que la joie ne soit pas la vraie pierre de touche du progrès dans la vie divine, cette vie est de sa nature aussi essentiellement progressive qu'il est dans la nature de la vie du corps de croître en stature à mesure qu'il passe de l'enfance à l'âge mûr, ou dans celle de la vie de l'esprit d'acquérir de nouvelles forces en passant par les mêmes périodes. Un homme doué de l'esprit d'un enfant est idiot ; il est destitué de ce qui appartient à un être raisonnable. De même le chrétien qui ne fait pas de progrès en sainteté, est essentiellement défectueux.

La marque la plus sûre de ce progrès est l'accroissement de la force dans tous les sens : force de foi, force de résolution, force pour faire le bien, pour résister au mal et pour supporter l'épreuve. Les enfants de Dieu vont de force en force, achevant leur sanctification dans la crainte du Seigneur.

La vraie religion n'est donc pas un service extérieur, ce n'est pas non plus une simple excitation de crainte et de douleur suivie de paix et de joie ; ce n'est pas non plus une alternative capricieuse de ces sentiments. C'EST UN PRINCIPE D'ACTION PERMANENT, SPONTANÉ DANS SON EXERCICE ET PROGRESSIF DE SA NATURE.

Ces attributs lui sont essentiels, mais ils ne la constituent pas tout entière. Elle est une participation de la nature divine, ou une conformité de l'âme avec Dieu. Elle est représentée comme l'acte de « dépouiller le vieil homme avec ses œuvres, et de revêtir le nouvel homme qui se renouvelle en connaissance, selon l'image de celui qui l'a créé, ou encore comme un renouvellement qui a lieu dans l'esprit de notre entendement, afin que nous revêtions le nouvel homme qui est créé selon Dieu, en justice et en vraie sainteté (2 Pierre I, 4 ; Col. III, 10 ; Eph. IV, 23 à 24.).  »

Ces deux passages expriment la même vérité. Être renouvelé en connaissance, ou plutôt pour la connaissance, signifie être renouvelé de manière à connaître  ; et la connaissance renferme l'idée d'apercevoir et d'approuver ce qui est vrai et bon. Ce sens étendu du mot est fréquent dans l'Écriture, c'est dans ce sens qu'il est dit, que « la vie éternelle est de connaître Dieu et Jésus-Christ».

Une telle connaissance est la vie de l'âme, c'est la conformité avec Dieu dans l'acte d'apercevoir et d'approuver la vérité. On ne saurait se faire de l'excellence morale une idée plus élevée que celle qui la fait consister dans l'harmonie de l'âme avec Dieu sous le double rapport du Jugement et de la volonté. C'est ce que l'Apôtre, dans le passage parallèle, appelle justice et sainteté de la vérité (c'est-à-dire procédant de la vérité.) L'Apôtre nous donne la même idée de la sanctification dans Rom. XII, 2 , où il est dit : « Soyez transformés par le renouvellement de votre esprit, afin que vous éprouviez (ou approuviez) la volonté de Dieu, qui est bonne, agréable et parfaite.  »

C'est ici la vraie religion d'approuver ce que Dieu approuve, de haïr ce qu'il hait, et de prendre plaisir dans ce qui le réjouit. II résulte évidemment de là, que c'est l'homme tout entier qui est l'objet de ce changement.

Il s'agit d'acquérir des vues nouvelles, de nouvelles résolutions et des sentiments nouveaux. L'esprit devient de plus en plus éclairé, la volonté plus soumise à la règle du devoir, et les affections plus complètement purifiées. L'Apôtre dit dans son épître aux Thessaloniciens : « Le Dieu de paix veuille vous sanctifier lui-même parfaitement, et que tout ce qui est en vous, l'esprit, l'âme et le corps, soient conservés irrépréhensibles pour la venue de notre Seigneur Jésus-Christ  ».

Le corps est l'objet de la sanctification à divers égards. Il est le Temple du Saint-Esprit, et en conséquence il est saint en tant qu'il est consacré au service de Dieu et sanctifié par sa présence.

De plus, nos corps sont les membres de Jésus-Christ, et en vertu de cette union ils participent au bienfait de la rédemption pour être plus tard rendus conformes à son corps glorieux, d'ailleurs, l'influence du corps sur l'âme en bien ou en mal est si étendue, et dans notre état de chute si prédominante du côté du mal, qu'une grande partie de l'œuvre de la sanctification consiste à combattre cette influence. « Je traite durement mon corps, dit saint Paul, et je le tiens assujetti de peur qu'après avoir prêché aux autres, je ne sois moi-même rejeté.  » Et il déclare que c'est une des conditions de la vie spirituelle que les croyants mortifient par l'esprit les œuvres du corps. Ainsi, la sanctification du corps a lieu, non seulement en l'enlevant au service du péché pour le consacrer au service de Dieu, mais aussi en réprimant le pouvoir qu'il exerce sur l'âme, en abaissant ses exigences et en le soumettant à la volonté de l'homme régénéré.

Si l'œuvre de la sanctification s'étend sur toutes nos facultés, l'image de Dieu que cette œuvre a pour but de rétablir en nous, comprend toute espèce de bien moral. Les différentes grâces, telles que l'amour, la foi, la débonnaireté, etc., ne sont que des manifestations diverses d'un seul et même principe de bonté.

Non pas que la justice et la bienveillance ne soient deux dispositions distinctes, mais le même principe qui rend un homme juste, le rendra aussi bienveillant.

La religion ou le principe de la vie divine tend à tous les genres de vertus, sans distinction ni préférence, de même que le principe de la vie, dans les plantes, ou dans les animaux, ou dans l'âme, conduit à un développement harmonique de l'ensemble dans chacune de ses parties. La racine s'étend à mesure que les branches grandissent ; le corps prend de l'accroissement en même temps que les divers membres ; et le jugement et la mémoire acquièrent la même force que les autres facultés de l'esprit. Tout dépend de ce progrès harmonique.

Si les bras conservaient des proportions enfantines tandis que le reste du corps grandit, il en résulterait un état de difformité et d'impuissance.

Si le jugement et la sensibilité acquéraient tout leur développement, tandis que la conscience et la mémoire resteraient dans l'enfance, l'esprit serait dans un état de complet désordre.

La vie de l'âme est soumise à la même loi de développement symétrique. Si cette vie existe elle se manifeste par toutes les formes du bien moral. Il peut bien exister certain genre de vertus à l'exclusion des autres ; mais alors ces vertus-là n'ont pas leur source dans la vie divine ou dans un cœur nouveau ; car cette vie, par sa nature même, comprend l'excellence morale dans TOUTES ses manifestations.

Nous sentons qu'il y a contradiction à dire qu'un homme est bon lorsqu'il est juste sans être bienveillant, parce que la bonté comprend tout ensemble la justice et la bienveillance.

Il n'y a pas moins de contradiction à dire qu'un homme est religieux s'il n'est pas honnête, parce que la religion comprend l'honnêteté aussi bien que la piété.

Le respect, l'amour, la soumission, la bienveillance ne sont que des manifestations diverses d'un seul et même principe de sainteté.

L'homme donc qui est renouvelé dans son entendement selon l'image de Dieu, est un homme en qui se trouve cette excellence morale qui se manifeste selon les occasions par toutes les grâces diverses du Saint-Esprit.

L'Écriture met au premier rang l'amour de Dieu, comme étant de toutes les manifestations de la vie spirituelle la plus étendue et la plus importante. Nous sommes constitués de manière à prendre plaisir dans des choses qui conviennent à notre nature ; et quand nous apercevons dans les objets extérieurs des qualités appropriées à notre constitution, il en résulte pour nous un sentiment de plaisir et un désir de posséder ces objets.

L'âme les considère comme un bien qu'elle doit aimer pour lui-même, et plus ces qualités sont élevées, plus sont nobles et pures les affections qu'elles excitent.

La régénération a pour effet de nous rendre capables d'apercevoir et d'aimer la perfection infinie de la divinité, comme embrassant tout espèce de bien et comme appropriée aux facultés les plus élevées de notre nature. Aussitôt donc que le cœur est régénéré, il se tourne vers Dieu et considère sa perfection comme l'objet suprême de sa joie et de ses désirs.

Toutefois, l'amour de Dieu ne consiste pas seulement à se complaire dans l'excellence morale. C'est l'amour d'un être personnel qui soutient avec nous les relations les plus intimes en tant qu'il est l'auteur de notre existence, notre conservateur et notre directeur, notre Père qui, avec une tendre affection, veille sur nous, nous protège, pourvoit à tous nos besoins, entre en communion avec nous et se manifeste à nous comme il ne le fait pas à l'égard du monde.

Les sentiments de dépendance, d'obligation et de relation mutuelle entrent pour beaucoup dans cette affection si étendue qui est appelée l'amour de Dieu. Cette affection se modifie plus encore par la connaissance de la sagesse et de la puissance infinies de celui qui en est l'objet.

Ses attributs ont droit à l'admiration ; et lorsque portés eux-mêmes à un degré infini, ils s'unissent à une bonté infinie, ils nous transportent dans cet état d'étonnement, d'admiration, de respect et de joie qui constitue l'adoration et qui ne trouve d'expression suffisante qu'en se prosternant dans la poussière.

La religion n'a point d'attribut qui soit plus essentiel à sa nature que cette vénération pour Dieu. Toutes les fois que le ciel a été dévoilé à la vue de l'homme, il en a vu les habitants la face voilée et se prosternant devant le trône de Dieu. Et sur la terre le seul culte agréable à Dieu est celui qui procède des cœurs humbles et contrits qui tremblent à sa Parole.

L'exercice de ces sentiments de respect et d'amour peut être accidentel, comme il arrive lorsque la pensée de Dieu passe et repasse dans l'esprit au milieu des occupations de la journée ; il peut aussi se prolonger davantage, lorsque l'âme se retire à l'écart du monde et se place dans la présence de Dieu pour adorer sa sainteté , pour lui rendre grâce de sa bonté et pour implorer sa bénédiction.

L'esprit de dévotion qui distinguait si éminemment le Rédempteur se retrouve chez tous les siens.

Tous ils sont portés à la dévotion ;

tous ils marchent avec Dieu ;

tous ils sentent qu'il est près d'eux et se réjouissent de sa présence ;

et tous ils entrent en communion avec lui dans leur culte public ou particulier.

II n'y a point de religion en dehors de ce commerce de l'âme et Dieu, comme il n'y a point de vie corporelle sans mouvement et sans chaleur.

Et de même que le corps tombe rapidement en dissolution lorsqu'il est mort, de même l'âme périt lorsqu'elle n'est pas en communion avec Dieu.


Cet amour de Dieu se manifeste par la soumission et par l'obéissance.

La première est un humble acquiescement à la volonté de Dieu, qui suppose qu'on reconnaît que tous les commandements de Dieu sont justes, et que toutes ses dispensations sont sages et bonnes. Alors même qu'il est entouré de nuages et d'obscurité, la religion nous force à reconnaître que la justice et l'équité sont la base de son trône. L'âme régénérée, profondément convaincue de la sagesse, de la puissance et de la bonté de Dieu, s'abandonne entre ses mains en disant : TA VOLONTÉ SOIT FAITE.

Sous l'influence de cet esprit, elle ne connaît pas le mécontentement et les craintes qui détruisent la paix et aggravent la culpabilité de ceux qui n'ont pas la même assurance que le juge de toute la terre ne fera rien qui ne soit juste et bon.

L'amour de Dieu doit nécessairement produire l'obéissance, parce qu'il suppose que l'âme se rapproche de Dieu en connaissant et en aimant ce qui est vrai et bon ; et l'obéissance n'est que la manifestation extérieure de ce rapprochement, DE MÊME QUE LA DÉSOBÉISSANCE PROUVE UNE OPPOSITION ENTRE NOTRE VOLONTÉ ET CELLE DE DIEU.

Là où se trouve la réconciliation avec Dieu ou le rétablissement de l'image divine, il doit y avoir conformité du cœur et de la vie à la volonté de Dieu.

Il y a contradiction à dire qu'un homme est semblable à Dieu ou qu'il participe de sa nature, s'il n'aime pas ce que Dieu aime, et s'il ne fuit pas ce que Dieu hait.


L'OBÉISSANCE N'EST QUE L'AMOUR EN ACTION.

Elle n'est autre chose que la voix, le regard et la livrée que l'affection doit nécessairement revêtir. Car l'amour de Dieu, comme nous l'avons déjà dit, n'est pas simplement l'attachement au bien moral ; c'est l'amour d'un Père céleste ; et dès lors il emporte obéissance, non seulement parce qu'il suppose une conformité de disposition entre le peuple de Dieu et Dieu lui-même, mais encore parce que sa volonté est que nous soyions obéissants : c'est là ce qui lui est agréable ; et l'amour n'est plus amour s'il n'a pour résultat de nous exciter à faire des efforts pour nous rendre agréables à celui qui en est l'objet.

«  Celui qui a mes commandements et qui les garde, dit notre Sauveur, c'est celui-là qui m'aime. » L'obéissance n'est pas tant la preuve de l'amour qu'elle n'est l'amour même exprimé et rendu visible. Le cours habituel de la vie d'un homme révèle l'état de son cœur plus fidèlement que ne peut le faire une explosion accidentelle de sentiment ou une profession verbale ; et quand le cours de la vie n'est pas conforme à la volonté de Dieu, le cœur est nécessairement en opposition avec cette volonté.

Si l'exercice de la vie spirituelle n'était pas accompagné de paix et de joie, ce serait là un fait sans analogie dans l'ordre que Dieu a établi dans l'univers. Le bonheur est si étroitement uni à cet exercice que l'Apôtre dit : « L'affection de l'esprit est vie et paix.  » Le bien moral et le bonheur sont unis par un lien indissoluble ; en sorte que toutes les émotions et toutes les affections qui sont bonnes sont accompagnées de jouissance. Cette jouissance est proportionnée à la dignité des facultés dont l'exercice la produit. Les sens procurent le bonheur de l'ordre le moins élevé ; viennent ensuite, en remontant l'échelle, les affections sociales ; puis les facultés intellectuelles ; puis les émotions morales ; puis enfin les affections religieuses.

L'espèce de jouissance qui accompagne cette dernière est plus élevée et plus pure, plus satisfaisante et mieux appropriée à notre nature que toutes celles qui découlent d'une autre source. Aussi l'Écriture assigne-t-elle à la communion avec Dieu une joie ineffable et pleine de gloire, et une paix qui surpasse toute intelligence. La joie est donc un des fruits de l'Esprit, elle est un accessoire inséparable et un indice nécessaire de la vie spirituelle ; c'est comme une huile salutaire que le Saint-Esprit répand sur l'âme renouvelée, pour fortifier son activité, pour faire briller ses traits et pour lui faire servir et louer Dieu avec plus d'ardeur.

Comme l'image de Dieu, d'après laquelle l'âme est renouvelée, consiste dans l'excellence morale, c'est-à-dire dans un état d'âme qui nous porte à avoir de bons sentiments et à bien agir en toute occasion, il est impossible que ceux qui ont des vues et des sentiments justes à l'égard de Dieu, ne sentent pas et n'agissent pas d'une manière bonne à l'égard de leurs semblables. Ceux que la Bible désigne comme des hommes bons sont justes et bienveillants autant qu'ils sont religieux. Notre devoir général à l'égard de nos semblables est renfermé dans ce commandement : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même.  »

L'amour dont il s'agit ici, est cette disposition qui nous conduit à regarder notre prochain avec respect et avec bonté, et à chercher à lui faire du bien.

Cet amour est patient et bon ;

il ne porte point envie au bonheur des autres, mais il se réjouit de leur prospérité.

Il n'est pas orgueilleux, et il ne se comporte pas d'une manière inconvenante.

Il ne cherche pas son intérêt propre.

Il ne se réjouit pas de l'injustice, mais il se réjouit de la vérité.

Il supporte tout, croit tout, espère tout.

Sans cet amour tous les témoignages extérieurs de piété, tous les dons, tous les actes extérieurs de renoncement ou de charité sont sans valeur.

Il appartient essentiellement au caractère chrétien, car de même que l'amour de soi qui nous pousse à la poursuite de notre propre bonheur appartient à notre nature d'homme, de même la bienveillance qui nous pousse à rechercher le bonheur des autres appartient à la nature du nouvel homme.

Un nouvel homme c'est un homme bon, un homme qui est comme Dieu, saint, juste, miséricordieux et bienveillant.

Ce caractère débonnaire et confiant que la religion ne manque jamais de produire, se modifie diversement suivant le caractère des individus et les relations de la vie. La Bible n'enseigne nulle part que nous devions éprouver pour tous les hommes les mêmes sentiments. Tout en nous demandant de la bienveillance pour tous les hommes, elle respecte les relations particulières et plus intimes que les hommes soutiennent entre eux, comme membres d'une même société ou d'une même famille. Et le même principe de religion qui produit cette bienveillance générale, active aussi toutes les affections qui se rattachent aux différentes relations de la vie.

Il nous apprend à rendre l'obéissance à qui nous devons l'obéissance, l'honneur à qui l'honneur, la crainte à qui la crainte. Il apprend aux hommes dans leurs rapports avec leurs égaux, à se montrer respectueux et aimables ; et dans leurs rapports avec leurs inférieurs, animés de condescendance, de justice et de bonté.

On ne saurait trop faire attention que ces vertus sociales sont une partie essentielle de la vraie religion. Le peuple de Dieu se compose de ceux qui sont comme Dieu : et Dieu, nous l'avons vu, est juste, miséricordieux, patient, abondant en bonté et en vérité.

Ceux donc qui sont malhonnêtes, rudes, orgueilleux, vindicatifs ou trompeurs, ne sont point son peuple  ; ils ne portent point l'image céleste, et ils n'ont jamais été renouvelés dans l'esprit de leur entendement. Que nul homme ne se berce de la fausse espérance que tout en étant mauvais père, mauvais fils ou mauvais voisin, il pourra être bon chrétien. UN CHRÉTIEN EST SEMBLABLE À CHRIST.

Une autre forme sous laquelle le cœur régénéré ne peut manquer de se manifester, est le renoncement à soi-même. « Si quelqu'un veut venir après moi, dit le Sauveur, qu'il renonce à soi-même, qu'il se charge de sa croix et qu'il me suive.  » La nécessité du renoncement résulte, d'un côté, de ce que la satisfaction de nos propres désirs est souvent incompatible avec le bien des autres ; de l'autre, de ce qu'un grand nombre de nos passions et de nos désirs sont désordonnés ou mauvais.

L'Évangile nous donne pour règle que nous ne devons pas chercher notre propre satisfaction, mais que chacun doit procurer celle de son prochain pour produire l'édification ; de même que Christ n'a point cherché sa propre satisfaction, mais « étant riche il s'est fait pauvre pour nous, afin que par sa pauvreté nous fussions enrichis.  »

Les relations ordinaires de la vie nous fournissent des occasions continuelles d'exercer ce genre de renoncement. Celui qui est animé de la même disposition qui était en Christ, au lieu d'être égoïste, est prêt à faire céder son avantage propre à celui des autres, à laisser de côté sa satisfaction personnelle et même ses droits pour le bien des autres.

Si la viande est un sujet de scandale pour son frère, il ne mangera jamais de viande.

Auprès des Juifs il se fait Juif, afin de gagner les Juifs.

Avec les faibles il consent à paraître faible, afin de gagner les faibles.

Il ne vit point pour lui-même.

Son propre intérêt n'est point le but principal de ses efforts.

Cette recherche désintéressée du bien des autres qui distingua si éminemment le Rédempteur, caractérise aussi tous ses disciples, car Dieu les a prédestinés à être conformes à l'image de son Fils.

Le renoncement qui est nécessité par la corruption de notre nature, est plus fréquent encore.

En conséquence de la chute, les sens ont usurpé sur l'âme un empire illégitime : ils sont insatiables dans leurs exigences et deviennent d'autant plus importuns, qu'on leur cède davantage. Il est contraire à la raison de nous soumettre à l'empire de ces principes inférieurs de notre nature ; car la raison elle-même nous enseigne que lorsqu'un homme est gouverné par son corps il est serviteur d'un esclave. Si donc l'homme rationnel lui-même sent l'obligation de soumettre le corps à l'esprit, à plus forte raison l'homme religieux ne saurait être sensuel.

Ceux qui sont chrétiens ont mortifié la chair avec ses affections et ses convoitises, ils tiennent leur corps assujettis.

Tout ce qui appartient au corps est, dans un certain sens, extérieur, les mauvaises dispositions du cœur sont dans un rapport plus intime avec l'âme. L'orgueil, la vanité, l'envie, la malice, l'amour de soi, sont des ennemis plus redoutables que les penchants purement corporels. Ils sont plus forts, plus persistants et plus capables de séduire. Comme ces dispositions sont profondément enracinées dans notre nature, le dépouillement du vieil homme qui est corrompu ou la destruction de ses mauvais principes est de tous les devoirs chrétiens le plus difficile ; et c'est ce qui fait de la vie du croyant un combat continuel.

La chair lutte contre l'esprit, et l'esprit contre la chair, en sorte qu'il ne fait pas ce qu'il devrait faire. Toutefois dans ce combat le bon principe remporte habituellement, quoique non constamment, la victoire ; car les enfants de Dieu ne marchent pas selon la chair, mais selon l'esprit.

Ce résumé rapide suffit pour montrer que les vrais chrétiens sont renouvelés selon l'image de Dieu pour être saints ; ils aiment Dieu, ils se plaisent à contempler ses perfections ; ils acquiescent à sa volonté, ils se réjouissent d'être ses créatures et ses enfants. Ils ont un esprit habituel de dévotion et vivent dans la communion avec le Père de leurs esprits et avec Jésus-Christ son Fils.

Enfants obéissants ils ne se conforment plus à leurs anciennes convoitises  ; mais comme celui qui les a appelés est saint, eux de même sont saints dans toute leur conduite. Comme ils portent l'image d'un Dieu juste et miséricordieux, ils sont honnêtes et bienveillants envers leurs frères, ne cherchant pas leur propre intérêt, mais celui des autres. Et comme cette victoire sur eux-mêmes et cette conformité à l'image de Dieu ne sauraient s'obtenir sans renoncement et sans combats, ils entretiennent une lutte continuelle contre les péchés les plus subtils du cœur.

Quelques-uns diront peut-être que si c'est là ce qu'il faut entendre par la piété, il n'y a point d'homme qui soit pieux. Il est vrai qu'il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus.

La porte est étroite et le chemin est étroit qui mènent à la vie, et il y en a peu qui les trouvent.

L'idée que nous nous formons de la piété doit être prise dans la Bible et non dans la vie de ceux qui font profession de piété.

On ne peut nier que la Bible ne fasse consister la religion dans l'amour de Dieu et des hommes, et l'on ne peut mettre en doute que l'amour de Dieu doit nécessairement se manifester par le respect, la dévotion et l'obéissance, comme l'amour des hommes par la bienveillance et la justice.

D'un autre côté, la conscience nous dit que, ni la profession extérieure, ni l'assiduité au culte divin ne peuvent nous donner droit au titre de chrétien si nous ne sommes pas réellement dévoués et obéissants à l'égard de Dieu, justes et bienveillants à l'égard de nos frères, purs et sévères à l'égard de nous-mêmes.

Mais s'il est certain que ces traits sont tous essentiels au caractère du chrétien, il ne s'en suit pas, que tous les chrétiens les possèdent au même degré. Il existe la même diversité dans leurs caractères chrétiens, que dans leurs constitutions physiques, leurs facultés intellectuelles, ou leurs positions sociales. Mais de même que tous les hommes au milieu de cette variété infinie, ont pourtant jusqu'à un certain point les mêmes traits, les mêmes facultés et les mêmes affections, de même tous les chrétiens, bien qu'ils puissent différer quant à la force ou à la combinaison des diverses grâces chrétiennes, sont tous conduits par l'Esprit, et portent tous les fruits de l'Esprit.

Après avoir tracé cette esquisse de la nature de la vraie piété, il convient de dire quelques mots de sa nécessité. Il ne faut jamais oublier que la sainteté est d'une nécessité absolue.

À l'égard des autres choses, quelques-unes, bien que désirables, ne sont pas indispensables, et d'autres, bien que nécessaires dans les circonstances ordinaires, ne sont pas d'une nécessité universelle et absolue.


MAIS LA SAINTETÉ EST TELLEMENT NÉCESSAIRE QUE LE SALUT SANS ELLE EST IMPOSSIBLE, parce que le salut consiste principalement dans cette transformation du cœur qui est la sainteté.

Jésus est un Sauveur parce qu'il sauve son peuple de leurs péchés.

Ceux donc qui ne sont pas sanctifiés ne sont pas sauvés.

Dire qu'un homme peut être en état de salut tout en vivant dans le péché, implique une contradiction tout aussi complète, que de dire qu'un homme peut se porter bien, tout en étant malade.

L'état de salut est un état de sainteté. Ces deux choses sont inséparables, parce que :

le salut n'est pas simplement la rédemption à l'égard de la pénalité du péché,

mais aussi à l'égard de sa puissance.

C'est une délivrance de l'asservissement aux appétits du corps et aux mauvaises passions du cœur ; c'est l'introduction dans la faveur et dans la communion de Dieu ; c'est le rétablissement de l'image divine dans l'âme, en sorte qu'elle aime Dieu et prend plaisir dans son service.

Ainsi le salut commence déjà sur la terre. « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi a la vie éternelle.  » Tel est le langage du Sauveur. L'affection spirituelle est la vie : l'affection de la chair est la mort.

L'idée qu'un état de grâce soit compatible avec une vie de péché est de toutes les illusions la plus inexcusable, parce qu'il n'en est point qui soit en opposition plus directe avec les doctrines de la Bible, « SANS LA SANCTIFICATION PERSONNE NE VERRA DIEU.  »

Quelles que puissent être nos relations ecclésiastiques, notre profession ou nos privilèges,

si nous ne sommes pas saints de cœur et de vie ;

si nous ne sommes pas dirigés habituellement par le désir de faire la volonté de Dieu ;

si nous ne faisons pas notre joie de goûter sa communion et d'être rendus conformes à son image ;

si nous ne sommes pas conduits par l'Esprit,

et si nous ne montrons pas dans notre vie la charité, la joie, la paix, la patience, la douceur, la bonté, la foi, et la tempérance que cet Esprit ne manque jamais de produire,

alors nous ne sommes pas des hommes religieux, et nous ne sommes pas non plus en état de salut.

La Bible ne connaît pas de chrétiens orgueilleux, égoïstes, avares ni impurs.

Les chrétiens sont l'objet d'une vocation sainte :

ils sont lavés, justifiés et sanctifiés au nom du Seigneur Jésus et par l'Esprit de notre Dieu ;

ils sont saints, sanctifiés en Jésus-Christ ;

ils s'affectionnent aux choses spirituelles ;

ils ont crucifié la chair avec ses affections et ses convoitises,

ils sont pauvres en esprit, débonnaires, purs de cœur, miséricordieux ;

ils ont faim et soif de la justice.

Non qu'ils aient déjà atteint le but ou qu'ils soient déjà parvenus à la perfection, mais ils font leurs efforts pour y parvenir, et c'est pour cela aussi que Jésus-Christ les a pris à lui, oubliant les choses qui sont derrière, et s'avançant vers celles qui sont devant, ils courent vers le but, vers le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus-Christ. Ils se conduisent comme étant citoyens des cieux, d'où ils attendent aussi le Sauveur, le Seigneur Jésus-Christ, qui transformera notre corps vil pour le rendre conforme à son corps glorieux, par le pouvoir qu'il a de s'assujettir toutes choses.

De plus, il est nécessaire que le peuple de Dieu soit saint, parce que Dieu est saint.

La communion ne peut exister sans la similitude des sentiments.

Si l'une des deux parties aime ce que l'autre hait, approuve ce qu'elle condamne, désire ce qu'elle repousse, il ne peut y avoir entre elles de rapprochement. Quelle concorde peut-il exister entre Christ et Bélial ? ou quelle communion entre la lumière et les ténèbres ? Aussi longtemps que nous sommes dans un état que Dieu désapprouve, aussi longtemps que nous n'aimons pas ce qu'il aime, il ne saurait y avoir communion entre lui et nous. C'est pourquoi Christ dit : « Ne t'étonne point de ce que je t'ai dit : Il faut que vous naissiez de nouveau. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'esprit est esprit.  »

L'esprit charnel est inimitié contre Dieu ; et tant qu'il a le dessus il est impossible que nous jouissions de sa présence. Puisque Dieu est la seule possession qui puisse suffire à notre âme ; puisque sa faveur et sa communion sont essentielles à notre bonheur ; puisque le ciel consiste à voir Dieu, à l'aimer et à le servir, il est clair, qu'à moins d'être sanctifiés, nous ne saurions être sauvés ; nous ne saurions jouir de la société, des occupations ou des plaisirs du peuple de Dieu dans le ciel, si nous ne trouvons pas notre bonheur dans ces choses dès ici-bas.

La nécessité de la sainteté résulte donc de la nature même de Dieu ; aussi, est-elle absolue et invariable !

Enfin nous savons que la sainteté est le but de la rédemption. « Christ s'est donné pour son église, afin qu'il la sanctifiât et qu'elle fût sans tache.  » « Il est mort lui juste pour nous injustes, afin de nous amener à Dieu.  »

Le but de la rédemption n'est pas atteint à l'égard de ceux qui demeurent dans le péché  ; en d'autres termes, ils ne sont pas rachetés. C'est donc renverser tout l'Évangile et rendre inutile la mort de Christ, que de supposer que la rédemption puisse se concilier avec le péché.

Le but de la mission et des souffrances du Sauveur serait entièrement manqué si son peuple n'était pas rendu participant de sa sainteté, car ils ne font briller la gloire de Dieu qu'en tant qu'ils sont rendus saints, et la récompense du Rédempteur est d'amener son peuple à la ressemblance de sa propre image, « afin qu'il soit le premier né entre plusieurs frères. »

Tout enfant de Dieu sent que le charme et la gloire de la rédemption c'est la délivrance de l'état de péché et la ressemblance avec Dieu. Là est la couronne de justice, le prix de la céleste vocation que Dieu lui adresse, la bénédiction glorieuse en vue de laquelle il souffre et il prie.

Lui dire qu'il peut être sauvé sans devenir saint, c'est confondre toutes ses idées du salut et anéantir toutes ses espérances. La nature du salut, le caractère de Dieu, les déclarations de sa Parole, le but de la rédemption, tout se réunit pour prouver que la sainteté est d'une nécessité absolue, tellement que si nous ne sommes pas saints, quoique nous puissions être d'ailleurs, ou quoique nous puissions posséder, nous ne sommes pas enfants de Dieu, ni héritiers de son royaume !


SECTION II

Moyens de sanctification.

On traite souvent la question de la sainteté comme une simple question de morale, ou tout au plus de religion naturelle. On engage les hommes à réprimer par la force de la raison leurs penchants vicieux ; à se rappeler les motifs qui doivent les porter à la vertu et à fortifier leur volonté par des actes de renoncement. On somme la conscience de sanctionner les exigences de la raison ou d'avertir le pécheur des conséquences qu'aurait la transgression. On s'appuie plus ou moins sur les doctrines de la présence de Dieu, de sa Providence et d'une rétribution future pour détourner du péché et pour exciter à la pratique de la vertu. On donne enfin des directions spéciales pour cultiver les habitudes vertueuses ou pour corriger celles qui sont mauvaises.

Puisque nous sommes des êtres rationnels, et qui doivent être gouvernés par la raison en opposition à l'appétit et à la passion ; il y a beaucoup de choses vraies et importantes dans ces dissertations sur la pratique de la vertu.

Mais comme nous sommes aussi des êtres déchus et absolument destitués de la faculté de nous régénérer nous-mêmes, des règles de ce genre et les efforts qui en sont la suite ne peuvent qu'être par eux-mêmes sans efficace. Dieu a doué le corps d'une énergie de rétablissement qui le met à même de rejeter ce qui est nuisible à son organisation, et de guérir les blessures qui sont la suite des accidents ou de la méchanceté. Mais quand c'est l'organisation elle-même qui est dérangée, au lieu de corriger ce qui en a besoin, elle aggrave ce qui, dans d'autres circonstances, ne serait qu'un désordre momentané. Que si par des moyens extérieurs on arrête le mal d'un côté, il reparaîtra de l'autre. Aussi longtemps que le système est dérangé, de tels moyens ne sont que des palliatifs qui peuvent bien cacher ou détourner le mal, mais qui en laissent subsister la source.

De même, aussi longtemps que le cœur est irrégénéré, tout ce que peuvent faire la raison et la conscience est de peu d'efficace. Elles peuvent bien placer des obstacles devant le courant ou en détourner le cours dans des canaux secrets, mais elles ne sauraient atteindre la source. Comme nous avons conservé depuis la chute la raison, la faculté de choisir, la conscience, les affections sociales, des sentiments de justice, de crainte, de honte, etc., on peut, en dirigeant avec art ces principes d'action, arriver à produire une conduite convenable et digne, et même une grande amabilité de caractère. Mais il est impossible par ces moyens-là de créer des vues justes et des sentiments irréprochables à l'égard de Dieu et du prochain, ou de déraciner l'égoïsme, l'orgueil et les autres péchés dont notre nature est infectée.

La raison et la conscience pourront bien amener un homme à changer de conduite, mais non pas à changer de cœur.

Le sentiment du devoir pourra l'obliger à faire l'aumône à son ennemi, mais il ne changera pas sa haine en amour. Le désir du bonheur pourra l'engager à servir Dieu extérieurement, mais il ne lui fera pas trouver du plaisir dans ce service.

Les affections n'obéissent pas aux exigences de la raison ni aux ordres de la conscience. Elles peuvent être, jusqu'à un certain point, réprimées dans leurs manifestations, mais non pas changées dans leur nature. Elles suivent leur propre loi. Elles se complaisent dans ce qui est conforme à la disposition morale de celui qui les éprouve. Il ne suffit pas pour s'assurer leur assentiment de leur présenter ce qui devrait faire leur bonheur.

Nous ne prétendons pas déprécier la raison et la conscience ; mais il est nécessaire de bien déterminer jusqu'où s'étend leur sphère légitime, afin que dans nos efforts pour acquérir la sainteté, nous ne mettions pas notre confiance dans des moyens sans efficace.

Bien que l'Écriture et la conscience nous enseignent que nos facultés livrées à elles seules sont insuffisantes pour nous amener à connaître et à aimer Dieu, les règles que nous suggère la raison pour cultiver la bonté morale, sont loin d'être sans valeur pour l'homme régénéré. Il est certainement utile que nous connaissions sur ce sujet les conseils des sages, et que nous nous habituions à faire un usage vigilant de tous ces moyens secondaires de travailler à notre perfectionnement, sans oublier toutefois que ce n'est point par la force de nos résolutions, ni par celle des considérations morales, ni par aucune règle de discipline, que la vie de Dieu dans l'âme peut être ou créée, ou entretenue.

S'il est une classe d'hommes qui s'appuient principalement sur la raison et sur la morale, une autre classe, plus nombreuse peut-être, ont recours à des moyens qui n'ont, par eux-mêmes, aucune tendance à produire la sainteté, mais auxquels on suppose à tort que Dieu a voulu attribuer une efficace particulière pour produire cet effet.

Tels sont, non seulement les ablutions, les pèlerinages et les mortifications des païens, mais aussi les rites multipliés des églises chrétiennes corrompues.

Répandre sur le corps une eau consacrée, répéter des formules de prières, suivre des services religieux qu'on ne comprend pas, recevoir l'imposition des mains, ou une onction matérielle, participer même sans foi aux sacrements : voilà tout autant de moyens qu'on s'imagine propres à faire pénétrer la grâce dans l'âme. On met aussi une grande confiance dans l'acte de se retirer du monde ; dans la prière faite en certains temps ou en certains lieux, dans telle ou telle posture particulière, et dans toute la routine et la discipline ascétique. L'histoire de l'Église renferme de tristes preuves du zèle persévérant et laborieux avec lequel on a employé ce moyen de détruire ses péchés.

Déjà du temps des Apôtres commençait à se manifester la disposition à recourir à de telles inventions pour acquérir la sainteté. Alors déjà il se trouvait des hommes qui ordonnaient de s'abstenir de l'usage de la viande, qui défendaient le mariage, qui disaient : « Ne mange point de ceci, n'en goûte point, n'y touche pas  » ; lesquelles choses, dit l'Apôtre, ont à la vérité quelque apparence de sagesse dans un culte volontaire et dans une certaine humilité, en ce qu'elles n'épargnent point le corps, et qui néanmoins ne servent qu'à satisfaire la chair.

L'Écriture nous enseigne une doctrine différente. Elle nous enseigne que les croyants sont tellement unis à Christ, qu'ils sont rendus participants, non seulement du mérite attaché à sa mort, mais aussi de son Saint-Esprit qui habite en eux comme un principe de vie, les rendant de plus en plus conformes à l'image de Dieu, et opérant en eux tant la volonté que l'exécution selon son bon plaisir.

Elle enseigne qu'aussi longtemps que les hommes sont sous la loi, c'est-à-dire qu'ils sont tenus d'en satisfaire les exigences pour être justifiés devant Dieu, et qu'ils sont gouvernés par un esprit légal ou par le seul sentiment du devoir ou la crainte du châtiment, ils se trouvent dans la condition d'esclaves incapables d'éprouver pour Dieu les sentiments qu'il demande, et de produire des fruits de sainteté.

Mais quand par la mort de Christ ils sont affranchis de la loi dans le sens que nous venons de dire, leur relation à l'égard de Dieu est entièrement changée.

Ils ne sont plus esclaves, mais enfants.

Étant unis à Christ dans sa mort, ils sont rendus participants de sa vie, et en vertu de cette union, ils portent du fruit pour Dieu.

Ils sont désormais conduits par l'Esprit qui habite en eux ; et cet Esprit est une source de vie, non seulement pour le corps mais aussi pour l'âme « car si l'esprit de celui qui a ressuscité Christ d'entre les morts habite en eux, celui qui a ressuscité Christ d'entre les morts vivifiera aussi leur corps par son esprit qui habite en eux.  » Ainsi la doctrine de la sanctification telle que la Bible nous l'enseigne, c'est que nous sommes rendus saints, non par la force de la conscience ou par celle des considérations morales, ni par des actes de discipline, mais par l’union avec Christ qui tout à la fois nous réconcilie avec Dieu et nous rend participants du Saint-Esprit.

Christ devient notre sanctification en même temps que notre justification. Non seulement il affranchit de la pénalité de la loi, mais il rend saint. Il n'y a donc, selon l'Évangile, point de sanctification sans la justification ou avant celle-ci.

Ceux qui sont en dehors de Christ sont sous la puissance du péché aussi bien que sous sa condamnation ;

et ceux qui sont en Christ sont affranchis, non seulement de la condamnation du péché, mais aussi de son empire.

Quant à la nature de cette union entre Christ et son peuple, qui a des conséquences si importantes, l'Écriture reconnaît que c'est un mystère. Après avoir dit, nous sommes membres de son corps, étant de sa chair et de ses os, saint Paul ajoute aussitôt : Ce mystère est grand. Il serait donc inutile d'essayer d'abaisser un pareil sujet au niveau de notre intelligence.

La manière dont Dieu est présent et dont il opère dans tout l'univers, est pour nous un secret impénétrable. Nous ne pouvons pas même comprendre comment nos âmes sont présentes et agissent dans les corps qu'elles occupent. Dès lors, nous ne pouvons nous attendre à comprendre la manière dont Christ habite par son Esprit dans le cœur des siens.

Le fait qu'une telle union existe est clairement révélé, les effets en sont décrits expressément, et la nature nous en est représentée, tout autant que nous pouvons la connaître, par les comparaisons les plus frappantes. Dans sa prière sacerdotale, notre Sauveur dit : « Je te prie que tous soient un ; comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient un en nous. Je suis en eux et tu es en moi, afin qu'ils soient perfectionnés dans l'unité. Celui qui garde ses commandements, dit l'Apôtre, demeure en Christ et Christ en lui. Et à ceci nous connaissons qu'il demeure en nous, savoir par l'esprit qu'il nous a donné. Si quelqu'un n'a point l'esprit de Christ, il n'est point à lui ; mais, ajoute l'Apôtre, si Christ est en vous, le corps mourra sans doute, mais l'âme vivra. Ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous, que vous avez reçu de Dieu, et que vous n'êtes point à vous-mêmes ?

Et encore  : ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu et que l'Esprit de Dieu habite en vous ? »

L'Écriture est pleine de cette doctrine. La grande promesse de l'Ancien Testament était, qu'à l'avènement du Messie, le Saint-Esprit serait abondamment répandu sur les hommes. Il est dit que Christ nous a rachetés, afin que nous reçussions cet Esprit qui avait été promis, (Gal. III, 13 et 14). Et la seule preuve qui aux yeux des Apôtres démontre que l'on a part au bienfait de la rédemption, c'est la participation au Saint-Esprit, laquelle se manifeste, ou par les facultés miraculeuses qu'il conférait alors, ou par ces fruits aimables de sainteté qui ne manquent jamais de marquer sa présence.

Comme nous l'avons déjà dit, les effets attribués à cette union sont la participation aux mérites de Christ pour produire notre justification, et l'habitation de son Esprit au dedans de nous pour produire notre sanctification.

La nature de cette union est représentée sous plusieurs points de vue. Elle est comparée à celle qui existe entre un représentant et ceux au nom desquels il agit, sous ce point de vue il est dit qu'Adam est semblable à Christ, et Christ est appelé le second Adam, car comme tous meurent en Adam, de même tous revivront par Jésus-Christ.

Cette même idée est présentée toutes les fois qu'il est dit de Christ qu'il est mort pour ses brebis ou à leur place ; ou quand il est dit des chrétiens qu'ils sont morts avec lui, sa mort étant virtuellement leur mort, puisqu'elle satisfait pour eux aux exigences de là justice et qu'elle les rachète de là malédiction de la loi.

Cette union est encore comparée à celle qui existe entre la tête et les membres d'un même corps. Pour expliquer le sens de cette comparaison, ce n'est pas assez de dire que Christ gouverne son peuple, ou qu'il y a entre lui et les siens une communauté de sentiments et d'intérêts. L'idée essentielle est qu'il y a communauté de vie ; que le même Esprit habite en lui et en eux. De même que le corps est partout animé d'une même âme qui lui donne l'unité et qui transmet à tous les membres une vie commune, de même le Saint-Esprit qui habite en christ est communiqué par lui à tous les siens  ; il les rend dans un sens particulier, un avec lui et un entre eux, et leur transmet à tous cette vie dont le siège et la source sont en lui.

«  Comme le corps n'est qu'un, quoiqu'il ait plusieurs membres, et que tous les membres de ce corps, quoiqu'ils soient plusieurs, ne forment qu'un corps, il en est de même de Christ. Car nous avons été baptisé dans un même esprit pour n'être qu'un seul corps, et nous avons été tous abreuvés d'un même esprit.»

Christ emploie une autre comparaison qui a la même valeur lorsqu'il dit : « Je suis le cep et vous êtes les sarments : celui qui demeure en moi et en qui je demeure, porte beaucoup de fruit ; car sans moi vous ne pouvez rien faire.  »

De même que les sarments sont tellement unis au cep, qu'ils participent de sa vie et qu'ils en dépendent absolument, de même les croyants sont tellement unis à Christ qu'ils participent de sa vie et qu'ils sont à son égard dans une dépendance absolue.

Le Saint-Esprit qu'il leur communique est en eux le principe de la vie et de la fécondité.

Christ et les siens sont un.

Il est le fondement et eux l'édifice.

Il est le cep, ils sont les sarments.

II est la tête, ils sont le corps.

Parce qu'il vit, ils vivront aussi ; car ce n'est pas eux qui vivent, mais Christ qui vit en eux.

Le Saint-Esprit dont il a dit à ses disciples : « II demeure avec vous et il sera en vous.  » est pour eux la source, non seulement de la vie spirituelle, mais de toutes les manifestations de cette vie. Ils sont baptisés du Saint-Esprit ; ils sont nés de l'Esprit ; ils sont appelés spirituels, parce que l'Esprit de Dieu habite en eux ; tandis qu'au contraire, les irrégénérés sont appelés hommes naturels ou sensuels, « en qui n'est point l'Esprit.  »

Les croyants sont sanctifiés par l'Esprit ;

ils sont conduits par l'Esprit ;

ils vivent par l'Esprit ;

ils sont fortifiés par l'Esprit ;

ils sont remplis de l'Esprit.

Par l'Esprit ils mortifient le péché ? par l'Esprit ils attendent l'espérance de la justice ; ils ont accès auprès de Dieu par l'Esprit ; ils prient et ils chantent par l'Esprit.

L'Esprit est pour eux une source de connaissance, de joie, d'amour, de patience, de bonté, de foi, de douceur, de tempérance (Jean XIV, 17 ; Luc III, 16 ; Jean III, 5 ; 1 Cor. III, 16 ; Jude 19 ; 1 Cor. VI, 11 ; Rom. VIII, 14 ; Gal. V, 25 ; Eph. III, 16 ; Eph. V, 18 ; Rom. VIII, 13 ; Gal. V, 5 ; Eph. II, 18 ; Jean IV, 24 ; Jude 20 ; Eph. 1 , 17 ; 1 Thes. 1,6 ; Gal. V, 22.).

Cette doctrine de l'habitation du Saint-Esprit au dedans de nous tient tellement au tissu même de l'Évangile, qu'elle en fait une partie absolument essentielle. Ce ne serait plus l'Évangile si nous en détachions cette grande vérité, savoir que l'Esprit de Dieu, qui nous a été acquis et qui nous est donné par Christ, est toujours présent avec les siens pour diriger et leur culte intérieur et leur conduite au-dehors, et pour les introduire enfin sans défaut et sans tache dans la pureté et la félicité du ciel.

Le secret d'une vie sainte se trouve dans celte doctrine de l'union du croyant avec Christ. C'est là, non seulement le fondement de son espérance de pardon, mais la source de la force par laquelle il meurt au péché et vit à la justice.

C'est en étant enraciné et fondé en Christ, qu'il est puissamment fortifié par son Esprit dans l'homme intérieur, qu'il est rendu capable de comprendre la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur du mystère de la rédemption, et de connaître l'amour de Christ qui surpasse toute connaissance, et qu'il est rempli de toute la plénitude de Dieu.

C'est cette doctrine qui le soutient dans toutes ses épreuves et qui le fait triompher de tous ses ennemis ; car ce n'est point lui qui vit, mais Christ qui vit en lui, lui donnant de jour en jour la grâce qui lui suffit et le purifiant pour lui appartenir en propre comme un membre de son peuple de prédilection, zélé pour les bonnes œuvres.

L'union avec Christ étant la source de la vie spirituelle, les moyens par lesquels cette vie se conserve et se propage se rapportent tous à cette doctrine et tirent d'elle leur efficace. C'est ainsi qu'il est dit que nous sommes :

purifiés par la foi,

sanctifiés par la foi,

que nous vivons par la foi,

que nous sommes sauvés par la foi. (Actes XV, 9 ; XXVI, 18 ; Gal. 11,30 ; Eph. II, 8.)

Ce rôle important est assigné à la foi, parce qu'elle est le lien qui nous unit à Christ. Non seulement elle nous donne le droit de faire valoir ses mérites pour notre justification, mais elle nous rend participants de son Saint-Esprit.

Christ à promis que tous ceux qui viennent à lui recevront une eau vive, par où l'Apôtre nous déclare qu'il faut entendre le Saint-Esprit.

C'est par la foi, et dans la persuasion de l'union, qu'elle établit entre nous et Christ que nous pouvons nous approcher de Dieu avec confiance et ouvrir nos cœurs à l'influence sanctifiante de son amour.

C'est par la foi que nous recevons de sa plénitude, et grâce sur grâce.

C'est par la foi que nous regardons à lui pour obtenir la force de vaincre les tentations et d'accomplir nos devoirs.

C'est par la foi que nous recevons ses grandes et précieuses promesses qui nous rendent participants de la nature divine.

Tous les chrétiens savent, par expérience, que la foi en Christ est pour eux la source de la sanctification et de la paix. Lorsqu'ils sont tentés de se laisser aller au découragement ou au péché, s'ils regardent à lui pour obtenir du secours, ils se sentent une force pour résister au mal ou pour supporter l'épreuve que ni la force de leur volonté, ni la puissance d'aucune considération ne pourrait jamais leur fournir.

Lorsqu'ils s'approchent de Dieu en leur qualité de membres de Christ, ils ont auprès de lui un libre accès, et ils éprouvent une joie ineffable et pleine de gloire. Lorsqu'ils sont abattus par l'affliction, s'ils se rappellent qu'ils sont un avec celui qui a souffert pour eux, leur laissant un exemple à suivre, ils se réjouissent en leurs tribulations, assurés que s'ils souffrent avec lui ils régneront aussi avec lui.

De plus, puisque l'union avec Christ nous procure le Saint-Esprit source de la vie spirituelle, NOUS DEVONS POUR CONSERVER CETTE VIE, ÉVITER TOUT CE QUI POURRAIT PORTER CET ESPRIT À S'ÉLOIGNER DE NOUS.

La Bible nous enseigne que l'Esprit peut être contristé ; que son influence peut être éteinte ; que Dieu dans ses jugements la retire souvent à ceux qui la méprisent.

Les mauvaises pensées, les paroles amères, les actes de péché doivent être évités, non seulement à titre de péchés, mais comme étant des offenses contre le Saint-Esprit.

Nous devons nous rappeler que souiller l'âme par le péché ou le corps, par l'intempérance ou l'impureté, c'est un sacrilège, parce que nous sommes les membres de Christ et que nos corps sont les temples de l'Esprit Saint.

D'un autre coté, nous devons cultiver avec soin les bonnes pensées et les saints désirs, non seulement comme étant des choses bonnes en elles-mêmes, mais comme procédant de cet agent céleste duquel dépend notre sanctification.

Il y a bien loin de ce que nous venons de dire à l'état d'un homme qui résiste au péché et qui cultive les bons sentiments uniquement d'après des considérations morales et en se reposant sur sa propre force.

Cette dernière disposition est ce que le monde appelle moralité, mais ce n'est pas ce que la Bible appelle religion. De pareilles considérations doivent avoir et auront toujours pour le chrétien leur valeur légitime, mais ce n'est pas sur ses propres efforts et sur ses propres ressources qu'il s'appuie pour devenir saint. La vie dont il est animé procède de la foi en Jésus-Christ ; et c'est par un recours continuel au Saint-Esprit que cette vie se maintient.

Il est tout aussi incompatible avec la religion de l'Évangile que nous puissions nous sanctifier par nos propres forces, que de supposer que nous puissions nous justifier par nos œuvres.

C'est principalement par l'efficace de la prière que nous recevons la communication du Saint-Esprit. La prière n'est pas seulement l'instinct d'une nature dépendante qui cherche du secours auprès de l'auteur de son être ; il ne faut pas non plus y voir seulement l'expression naturelle de la foi et du désir, ou un mode de communication avec le Père des esprits ; nous devons la considérer aussi comme le moyen établi de Dieu pour obtenir le Saint-Esprit. « Si vous, qui êtes mauvais, savez bien donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père céleste donnera-t-il le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent (Luc, XI, 13).  »

C'est pour cela que nous sommes invités à être persévérants et importuns dans la prière, insistant surtout pour obtenir ces communications divines par lesquelles la vie de Dieu dans l'âme se maintient et se propage.

La doctrine que le Saint-Esprit opère dans le peuple de Dieu et la volonté et l'exécution suivant son bon plaisir, cette doctrine n'est pas incompatible avec l'usage diligent de tous les moyens rationnels et scripturaires pour croître dans la grâce et dans la connaissance de Dieu. Car, bien que le mode d'influence de l'Esprit soit insondable, cette influence nous est décrite comme une œuvre qui éclaire, qui enseigne, qui persuade toutes expressions qui supposent un sujet rationnel, affecté rationnellement.

Ainsi l'habitation du Saint-Esprit dans le cœur des enfants de Dieu n'anéantit point leur activité propre. Il agit en nous portant à agir.

C'est pour cela que la Parole de Dieu nous ordonne de faire ce qu'elle nous dit que le Saint-Esprit fait pour nous. Nous croyons, bien que la foi soit l'œuvre de Dieu, nous nous repentons, bien que la repentance soit un don de Christ ; nous aimons, bien que l'amour, le support, la douceur et toutes les autres grâces soient des fruits de l'Esprit.

Le progrès de l'œuvre de la sanctification consiste en ce que nous sommes portés ainsi sous cette influence divine à cultiver de bonnes dispositions et de bons sentiments. La loi de notre nature qui fait suivre d'un accroissement de force l'exercice répété de nos facultés, n'est nullement suspendue à l'égard des dispositions de l'âme régénérée. Des philosophes ont prétendu que la vibration communiquée à l'atmosphère quand nous prononçons un mot ne s'arrête jamais.

Quoiqu'il en soit de cette hypothèse, il est certain que toutes les émotions pieuses fortifient le principe de la piété et laissent l'âme dans un état meilleur. Le bien moral que nous recueillons de l'exercice de la foi, de l'amour ou de la reconnaissance, n'est point passager comme cet exercice lui-même. Bien loin de là. Une heure de communion avec Dieu produit une impression qui ne s'effacera jamais ; elle rend à jamais l'âme moins susceptible pour le mal et plus susceptible pour le bien. Et comme le Saint-Esprit excite constamment l'âme vers l'exercice de la sainteté et qu'il la met en rapport avec Dieu, il la rend ainsi de plus en plus sainte et mieux préparée pour la sainteté parfaite du ciel.

La contemplation de la vérité, le culte de Dieu et l'accomplissement du devoir, sont les principaux moyens de produire dans nos âmes ces saintes dispositions.

Toute affection suppose un but en vue duquel elle a lieu et qui tend à la produire lorsqu'il est présenté à l'esprit.

Nous ne pouvons pas craindre Dieu, à moins que sa puissance et sa sainteté ne soient présentes à notre esprit.

Nous ne pouvons pas l'aimer, si ce n'est en vue de son excellence et de sa bonté ;

nous ne pouvons pas croire, si non en vue de sa Parole, ni espérer sinon en vue de ses promesses.

Comme chacune de ces affections suppose un but qui leur est approprié, ce but tend naturellement à exciter l'affection. Si nous n'étions pas déchus, ce but ne pourrait pas nous être présenté sans que l'affection correspondante se réveillât dans notre cœur. Malgré notre déchéance morale ces divers buts conservent la tendance qui est inhérente à leur nature : et comme cette déchéance est plus ou moins corrigée par le Saint-Esprit, ils exercent sur l'âme l'influence qui leur est propre. Aussi est-il dit que nous sommes sanctifiés par la vérité  ; que nous sommes purifiés par la Parole de Christ  ; que nous naissons de nouveau par la parole de vérité  ; que nous sommes transformés à l'image de Dieu en contemplant sa gloire. (Jean, XVII, 19 ; XV, 3. Jacques, I, 18-2 Cor. III, 18.)

Il serait déraisonnable de s'attendre que nous soyions rendus conformes à l'image de Dieu, à moins que la vérité relative à Dieu agisse fréquemment et continuellement sur l'âme.

Comment un cœur rempli des pensées et des soucis du monde, et surtout un cœur souvent entraîné au mal par la pensée ou la vue du péché ; pourrait-il s'attendre à voir se fortifier en lui les affections qui répondent à la sainteté ou à la grandeur de Dieu ?

Comment l'amour de Christ, croîtrait-il dans le cœur de ceux qui ne pensent presque jamais à lui et à son œuvre ?

Un pareil résultat ne peut avoir lieu sans un changement dans la nature même des choses, et c'est pourquoi nous ne pouvons faire des progrès dans la sainteté, à moins de consacrer beaucoup de temps à lire, à entendre et à méditer la parole de Dieu, qui est la vérité par laquelle nous sommes sanctifiés.

Plus cette vérité nous est mise devant les yeux ; plus nous entrons en contact avec elle,

en en comprenant le sens,

en l'appliquant à notre position,

en nous en appropriant les principes,

en en pénétrant les motifs,

en nous réjouissant de ses promesses,

en tremblant devant ses menaces,

en nous élevant par son influence, de ce qui est visible et temporel à ce qui est éternel et invisible,

plus nous pouvons nous attendre à être transformés par le renouvellement de notre esprit ; de manière à aimer tout ce qui est saint, juste et bon.

Les hommes distingués par leur piété ont toujours été des hommes de méditation et de prière ; des hommes habitués à se recueillir loin de l'influence du monde avec ses mille joies et ses mille chagrins, pour se placer sous l'influence des doctrines, des préceptes et des promesses de la Parole de Dieu.

Outre la contemplation de la vérité, le culte divin est un moyen important de croître dans la grâce ; non seulement parce qu'il comprend l'expression et l'exercice de tous les sentiments pieux que cet exercice doit nécessairement fortifier, mais aussi parce qu'il est le moyen établi de Dieu pour entrer en communion avec lui et pour recevoir les dons de sa grâce ; « Ceux qui s'attendent à l'Éternel prendront de nouvelles forces ; ils s'élèveront sur des ailes comme des aigles ; ils courront, et ne se fatigueront point ; ils marcheront, et ne se lasseront point  ». « Bienheureux ceux qui habitent en ta maison : ils te loueront incessamment. Ils marchent de force en force pour se présenter devant Dieu en Sion ( Ésaïe XL, 31 ; Ps. LXXXIV, 5 et 8.)

L'expérience aussi bien que la révélation rend témoignage à la vérité de ce fait. Les enfants de Dieu ont toujours trouvé dans le culte, soit privé, soit public, du Père des esprits, les principaux moyens de renouveler leurs forces spirituelles.

Le culte qu'on rend à Dieu dans ses temples terrestres est une préparation à celui qui aura lieu dans ce temple éternel des cieux qui n'est point fait par la main des hommes.

Les sacrements sont pour nous, ce qu'étaient pour les Israélites les sacrifices et les rites de l'ancienne économie. Ils sont des signes et des sceaux des promesses de Dieu et procurent à ceux qui les reçoivent dignement les bénédictions qu'ils représentent.

Le chrétien donc qui désire croître dans la connaissance et dans l'amour de Dieu observera fidèlement toutes les formes établies du culte divin.

Il priera beaucoup dans son cabinet,

il sera ponctuel au temple et à la table du Seigneur.

Il recherchera les occasions d'entrer en rapport avec Dieu, comme un ami recherche la société de son ami ;

et plus il jouira de cette communion, mieux il sera préparé pour cette communion parfaite avec le Père des lumières, qui constitue la félicité du ciel.

Enfin, pour devenir bons, nous devons faire le bien.

Quelques personnes s'imaginent à tort que l'action est tout dans la religion. Il n'y a point de religion dans les actes extérieurs, à moins qu'ils ne soient dictés par un esprit de piété. C'est peut-être une des tendances funestes de notre âge, de chasser la religion de nos intérieurs, de ne lui laisser d'autre asile que la rue ou les assemblées...

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... L'exercice de la bienveillance en fortifie le principe, que la pratique du bien tend à rendre les hommes meilleurs, mais parce que Dieu a ordonné que celui qui a arrosé les autres serait arrosé lui-même.

IL RÉPAND SA GRÂCE SUR CEUX QUI TRAVAILLENT AU BIEN TEMPOREL ET SPIRITUEL DE LEURS FRÈRES et qui suivent l'exemple de notre bienheureux Rédempteur, marchant avec Dieu et faisant du bien.

La vraie religion, telle que nous la trouvons dépeinte dans la Bible, n'est donc ni une manifestation purement extérieure ni une excitation de sentiments intermittente et passagère. C'est un principe de vie spirituelle permanent, spontané et progressif, qui modifie l'homme tout entier et qui produit les fruits de la justice. Ce n'est point telle ou telle bonne disposition isolée, mais bien la racine et le principe de tout ce qu'il y a de bons sentiments et de bonnes actions, qui se manifeste par l'amour et l'obéissance envers Dieu, par la justice et la bienveillance envers les hommes, et par l'empire sur nous-mêmes.

Cette vie divine ne peut être obtenue ni conservée par de simples efforts de la raison ou de la conscience, ou par des observances superstitieuses : elle découle de notre union avec Christ, qui envoie son Saint-Esprit dans le cœur de tous les siens.

Pour faire croître cette vie divine, nous avons à éviter tout ce qui tend à contrister l'Esprit de grâce et à pratiquer tout ce qui peut favoriser sa sainte influence sur le cœur.

C'est par cette influence que nous sommes sanctifiés, car elle nous conduit à cultiver toutes les dispositions saintes, par la contemplation de la vérité, par le culte de Dieu et par l'accomplissement de tous nos devoirs mutuels.

FIN

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