Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'ÉCHO DE LA VÉRITÉ

----------


LETTRE À UN AMI


CONSIDÉRATIONS SUR L'APPARENTE CONTRADICTION

ENTRE


1 TIM. II, 4, ET ROM. IX, 22.


Cher Monsieur et frère,

Concernant la seconde question que vous avez proposée, savoir la contradiction apparente entre «la volonté de Dieu que tous les hommes soient sauvés,» et le fait que certains hommes sont «disposés à la perdition,» il faut, pour avoir un peu de lumière, recourir à diverses sortes de considérations, correspondant aux divers côtés du problème lui-même.


1 — Considérations exégétiques.

La déclaration 1Tim. II, 4, n’est pas isolée dans la Bible. Les passages Ézéch. XXXIII, 11; 2 Pierre III, 9, et autres sont des passages parallèles qui manifestent LE DÉSIR DE DIEU QUE TOUS LES HOMMES SOIENT SAUVÉS,

désir prouvé surtout par le don de son Fils comme Sauveur,

don fait au monde,

et à quiconque veut l'accepter. (Jean III, 16-17).

Les paroles mentionnées par vous suivent une exhortation à prier pour tous les hommes; elles en expriment la raison, savoir «la volonté de Dieu que tous les hommes soient sauvés et viennent à la connaissance de la vérité», — et elles la font suivre de la déclaration que «comme» il y a un seul Dieu, il y a aussi un seul médiateur, Jésus-Christ homme, qui s’est donné eu rançon pour tous.

Tout cela fait voir que, tant dans l’intention du Seigneur que dans le moyen employé par lui, le salut a une portée générale, et que:


SI TOUS L’ACCEPTAIENT, TOUS SERAIENT SAUVÉS.


La déclaration Rom. IX, 22 semble contredire cette doctrine, en disant que les méchants sont «disposés à la perdition».

Mais en examinant avec soin le contexte on voit disparaître cette contradiction apparente. Toutefois pour comprendre ce même contexte, il faut remonter au sujet même de l’épître, et résumer ce qui est dit dans les chapitres qui précèdent le chapitre IX.

Le sujet fondamental est «le salut par la grâce pure et libre de Dieu, sans aucun mérite des œuvres et moyennant la foi seule.»

Donc AUCUNE DIFFÉRENCE entre Juifs et Gentils, parce que TOUS ONT PÉCHÉ et sont condamnés et incapables de se justifier eux-mêmes; et même une plus grande responsabilité du côté des Hébreux, à cause des lumières qu’ils ont reçues; donc encore:


UN SEUL MOYEN DE JUSTIFICATION POUR TOUS,

SAVOIR LA FOI EN CHRIST LE SAUVEUR.


Mais comme les Hébreux pouvaient accuser l’apôtre de les mépriser et d’annuler les promesses faites à leurs pères, il répond en protestant «qu’il aime ardemment son peuple, et que d’ailleurs les promesses de Dieu à Israël loin d’être annulées par l’Évangile en sont au contraire confirmées

Ce dernier point est précisément le sujet du chapitre IX, et des deux suivants.

Comment Paul le démontre-t-il?

D’abord en faisant remarquer que ces promesses subsistent et sont accomplies pour la VRAIE postérité d’Abraham, c'est-à-dire en ceux qui sont ses vrais fils selon le dessein de l’élection de Dieu, lequel se manifeste dans toute l'histoire de ce peuple (IX, 6-13);

puis en déclarant que nul pécheur n’a aucun droit à la grâce, dont Dieu dispose librement (14-24), chose qui est continuée par les prophètes (25-29);

enfin en prouvant qu’Israël, EN SE FONDANT SUR LA JUSTICE DE LA LOI, devait tomber,

tandis que les Gentils, RENONÇANT AU MÉRITE PROPRE pour recourir à la foi, ont été reçus de Dieu (30-33).


Au chapitre X, Paul démontre que la loi étant offerte à tous, et les Hébreux l’ayant méprisée, ils sont responsables de leur endurcissement, comme l’avait déjà dit Moïse.

Et le chapitre XI fait voir que Dieu n’a pas rejeté son peuple,

soit en ce que bon nombre ont été sauvés,

soit en ce que la réjection partielle du peuple a pour conséquence l’appel des gentils et le salut de ceux d’entre eux qui sont de vrais fils d’Abraham,

soit enfin en ce qu’Israël sera de nouveau appelé et sauvé.

Or, notre verset 22 appartient à cette portion, où Paul veut démontrer la liberté et la souveraineté de la grâce de Dieu. Dans cette portion, après avoir déclaré que Dieu «fait miséricorde à qui il veut et endurcit (C’EST À DIRE ABANDONNÉ À LUI-MÊME) qui il veut», il met en avant l’objection du verset 19. «Pourquoi donc se plaint-il ? Qui peut résister à sa volonté ?» — et il y répond par la comparaison du potier, qui forme avec notre verset la vraie difficulté de ce passage.

Je n’entrerai pas ici dans la question dogmatique à laquelle je toucherai plus tard; je me borne à observer que cette comparaison ne doit pas se prendre en un sens tout à fait littéral ou matériel, parce que tant Paul que ses lecteurs savaient très bien qu’entre les vases de terre et les hommes, il y a une très grande différence, savoir celle de la liberté morale et de la responsabilité qui en est la conséquence; ils savaient très bien que les pécheurs ne peuvent devenir «des vases à honneur» sans l'intervention de la grâce, tandis que ceux qui veulent se confier en la seule loi portent en eux-mêmes le mal auquel il n’y a que la grâce elle-même qui puisse porter remède.

J’ajoute que dans ce raisonnement, donc aussi dans la comparaison, Paul raisonne au point de vue du droit pur, de la justice pure.

L’expression du verset 20, «Qui es-tu pour contester avec Dieu,» est un terme juridique qui signifie plaider, répondre. C’est comme si l’apôtre disait:

Tu te places sur le terrain du droit, tu préfères la justice à la grâce, et tu veux plaider avec le Seigneur! Sache donc que sur ce terrain il n’v a qu’une seule réponse pour toi: TU ES TRANSGRESSEUR DE LA LOI, et Dieu peut te condamner et te rejeter pour toujours sans que tu puisses répondre un seul mot sur le terrain choisi par toi.

Sache, ô orgueilleux, que LA GRÂCE DE DIEU EST LIBRE ET SOUVERAINE, qu’il ne le doit rien, et que, selon la justice, il te doit la mort.


Quant à notre verset 22, j’ai à faire deux remarques, l'une et l’autre exigibles.

D’abord c’est que les «vases de colère», qui sont dits «disposés à la perdition» ont été et sont «supportés de Dieu avec une grande patience.»

Or cette patience ne se comprendrait pas s’il y avait en Dieu la volonté et le décret de perdre ces hommes.

La seconde est que, de fait, le verbe de l’original disposés, à la forme réfléchie et signifie se disposant on s’étant disposé soi-même.

Cette expression reflète donc:

non pas l’intention de Dieu, mais celle des méchants,

non pas un décret divin éternel et individuel qui constitue une prédestination à la damnation, mais bien une loi très-simple du monde moral et spirituel, savoir que celui qui résiste à la grâce de Dieu et méprise sa patience, SE DISPOSE LUI-MÊME À LA PERDITION.

Cette loi, Dieu l’a faite et c’est ce qu’exprime avec une énergie remarquable, Prov. XVI, 4: «L'Éternel a fait toute chose pour son but, et même le méchant pour le jour du malheur...»

Mais cela ne signifie pas que Dieu rende l’homme méchant ou le pousse à la méchanceté; cela ne détruit ni ne diminue la responsabilité de L’HOMME QUI SE REND LUI-MÊME MÉCHANT; cela veut simplement dire que DIEU A ÉTABLI CETTE LOI; que CELUI QUI AURA PÉCHÉ, MOURRA; ou bien, QUE LE SALAIRE DU PÉCHÉ EST LA MORT

(À Suivre.)

L'écho de la Vérité - Mai 1881


Table des matières