Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'ÉCHO DE LA VÉRITÉ

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SAINT ÉLOI ET LES BAS-BRETONS

(De la fidélité à l'hérésie)


Il y a peu de Français, à qui le nom de Saint Éloi ne soit familier; mais bien peu d'entre eux prononcent ce nom avec le respect qu’il mérite, car Éloi n’était autre qu’un pieux et fidèle serviteur de Dieu. Puisse le Seigneur, dans sa miséricorde, envoyer de pareils évêques à notre chère patrie!

Éloi ou Élegius naquit en 588, près de Limoges et reçut dans sa jeunesse, sous le rapport religieux, une bonne éducation. Placé en apprentissage chez un orfèvre pieux et estime de la ville, le jeune homme ne tarda point à pousser l’art de l’orfèvrerie à un degré extraordinaire de perfection pour son temps.

Appelé à la cour de Clotaire II, le roi, admirant le talent de l’artisan et sa probité, le prit à son service et le fit directeur de la Monnaie.

Éloi n’oublia point, dans ce nouveau poste, les exercices de piété.

Au milieu de ses travaux, il avait toujours devant lui la Bible, dans laquelle il s’instruisait et s’édifiait. Il ne passait pas un seul jour, sans en employer une portion à la méditation de la parole de Dieu, dans le recueillement et la prière. Dans toutes les positions de sa vie, il s’appliqua à répandre l’Évangile parmi les Francs.

Devenu évêque du diocèse de Noyon et Tournai, il s’appliqua particulièrement à former des ouvriers pour étendre l’œuvre d’évangélisation. Plusieurs des païens, que Dieu avait convertis par son moyen, furent à leur tour, employés par lui à l’évangélisation de leurs compatriotes; et, au bout de quelque temps, on vit des villages entiers renverser leurs temples et leurs idoles et demander le baptême.

Dans ses nombreuses courses à travers le royaume des Francs, a-t-il passé par la Bretagne?

Ou a-t-il fait la connaissance de Judicaël, chef îles Bretons, lorsque celui-ci fit sa soumission au roi des Francs?

Toujours est-il, que les Bas-Bretons ont ce saint en grande vénération et le sol de la vieille Armorique possède quantité de chapelles qui lui sont dédiées.



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Appelé, par mes deux braves colporteurs, à présider une réunion évangélique, organisée par eux, auprès d'une des églises placée sous le patronage de ce saint, localité située à 21 kilomètres de nous et où ils étaient en tournée, nous avons eu l’occasion de voir, chose hélas, qui n’est pas rare ici, combien nos chers compatriotes sont encore plongés dans des superstitions dignes d’un autre âge.

Le prêtre de la commune ayant été prévenu de notre arrivée réussit à nous faire refuser le local qu’on nous avait promis et nous empêcha d’en trouver d’autres dans les environ. Nos chers frères y avaient été traités, du haut de la chaire: de loups, d’émissaires de Satan et même de Satan lui-même.

Dans une commune voisine, l'un des prêtres rencontrant un de nos colporteurs, lui cracha à la figure. Enfin, voyant nos démarches devenir infructueuses, nous ne voulûmes point quitter la localité sans visiter l’église.


C’était la veille du pardon; et, saint Éloi est en Bretagne, pour les chevaux, ce que saint Herbot y est pour les vaches. Les Bretons croient ce saint doué de qualités extraordinaires; maréchal-ferrant, il avait le pouvoir de couper les quatre sabots d’un cheval, de les transporter sur l’enclume, de les ferrer et de les remettre à leurs places sans causer la moindre douleur à l’animal; aussi, lui décerne-t-on ici, le titre de patron et de protecteur des chevaux. Dans l’église, il est représenté, tenant d’une main, sur une enclume, une jambe de cheval et de l'autre, les outils du maréchal-ferrant.

La dévotion à saint Éloi, attire chaque année, le premier dimanche de juillet, jour du pardon, une affluence considérable de pèlerins et six à sept mille chevaux que les cultivateurs des environs conduisent là, pour les vouer à saint Éloi.

Comme les saints, en Bretagne, ne font jamais rien gratis, on voit ici se répéter les mêmes scènes qu’à saint Herbot.

Autour de l'église, quantité de pauvres montrent également de hideuses plaies. Dans le sanctuaire, des clous et des fers rouillés, arrachés des pieds des chevaux, d'énormes tas de crin, coupé à leurs queues, des piles de gros sous, etc..

À peine étions-nous entrés dans l’église que nous fûmes reconnus par un marguillier qui sortit prendre le recteur pour nous mettre à la porte. Heureusement qu’à l’arrivée de ce dernier, nous étions déjà éloignés de sa maison de commerce.


Le dimanche matin, le prêtre dit la messe aux chevaux. Il va sans dire que les propriétaires des centaines de chevaux qui y sont conduits, paient largement ce privilège. De là, ces animaux sont menés auprès d’un ancien baptistère du VIIe ou du VIIIe siècle, en parfait état de conservation, où se trouvaient une trentaine de femmes munies d’écuelles remplies d’eau du baptistère; et chacune d’elles s'approchant doucement d’un quadrupède et lui prenant l’oreille, y lance avec force l’eau dont elles ont eu soin au préalable de se remplir la bouche. Le reste de l’eau est répandue, en forme de croix, sur les différentes parties du corps de l’animal.

Comme nous quittions, avec un serrement de cœur, ce triste nid de superstitions, quelqu'un nous appela. C'étaient les femmes aux écuelles qui voulaient entendre un sermon protestant. Nous retournâmes sur nos pas; et, assis sur le bord de cet antique baptistère, nous leur parlâmes de l’entretien de Jésus avec la Samaritaine. Elles, ainsi que plusieurs pèlerins, nous écoutèrent très attentivement et nous remercièrent de leur avoir dit d'aussi bonnes paroles.

Puissent ces vérités évangéliques, jetées auprès de ce lieu qui a été, sans nul doute, témoin du baptême de plus d'un païen converti, produire du fruit à la gloire de notre bien-aimé Sauveur.

Du 20 décembre dernier au 20 janvier, l’un de nos colporteurs a vendu 12 Nouveaux Testaments bretons dans ces environs.


Rien n'est impossible à Dieu;

un jour viendra, où la terre entière sera remplie de la connaissance du Seigneur.


G. Lecoat.

L'écho de la Vérité - Mars 1881


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