Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

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NOTRE OEUVRE SOCIALE A PARIS

Cas toujours plus intéressants 


B... (Louis), âgé de 55 ans, sculpteur, né dans le département de la Somme, est une victime de l’alcool. Un regard jeté sur son nez enluminé vous en dira plus qu’une description en vingt lignes.

Son métier pouvait le faire vivre à Paris et lui assurer des ressources supérieures à ses besoins, mais il a subi dans le passé l’influence de ses camarades, et aujourd’hui, lorsque l’état de son porte-monnaie le lui permet, il subit l’influence de l’habitude.

Depuis longtemps, il a abandonné sa profession, n’étant plus en état de l’occuper par suite d’une vieillesse anticipée. Chaque matin, il quitte l’asile sans savoir de quel côté il doit se diriger, sans savoir comment il se procurera du pain. Il erre à l’aventure, heureux s'il peut trouver de temps à autre «une corvée.»

Nous l’avons rencontré un jour traînant plutôt que portant une malle; il peinait tellement qu’il nous inspira une profonde pitié. Cet homme est malheureux, il sent sa misère morale et matérielle et, certes, il désirerait être soulagé; mais IL SE COMPLAÎT DANS LES TÉNÈBRES DE SON CERVEAU OBSCURCI PAR L’IVROGNERIE, Dieu n’étant pour lui qu’un «système» rien de plus.

B... a assisté, cependant, à quelques réunions de l’Armée du Salut et a paru porter quelque intérêt aux témoignages rendus. Nous prions pour que Dieu éclaire ce cher ami et l’amène à Lui.


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Nous ne vous avons pas vu hier soir, disions-nous un mardi au sieur Lucien H..., âgé de 28 ans, né en province, ouvrier typographe dans une imprimerie voisine de la rue de Chabrol; étiez-vous malade?

Non, Monsieur, mais j’avais bu «un coup de trop». C’est pourquoi je ne suis pas venu, car je savais que vous n’alliez pas me recevoir en cet état. Je suis resté dans un bar jusqu’à deux heures du matin et je me suis ensuite promené dans les rues jusqu’au jour. Comme j’étais fatigué, je n’ai pu travailler aujourd’hui que quelques heures seulement.

Ne sentez-vous pas combien vous êtes coupable de ruiner ainsi la santé que Dieu vous a donnée pour l’employer utilement, et; de dépenser dans la débauche le produit de votre travail? Si vous aviez des enfants, voudriez-vous qu’ils agissent comme vous?

Oh! non, Monsieur. Je conviens que j’ai grandement tort, mais que voulez-vous? Je ne puis pas résister au désir de boire une chopine, surtout depuis que ma femme m’a abandonné pour retourner chez sa mère. La boisson me fait oublier mon chagrin.

Cette triste révélation nous a péniblement affectés.

ENCORE UNE MISÈRE DE PLUS CAUSÉE PAR LE PÉCHÉ, mais une double espérance nous reste: la conversion de cet homme tout d’abord et ensuite celle de sa femme. Il a été heureux autrefois, nous dit-il. Élevé chrétiennement, il avançait joyeux, la tête haute, dans la vie. Un jour, il rencontra une jeune fille qui lui plut. Le mariage eut lieu et deux enfants naquirent de cette union, (Ce pauvre homme connaît seulement l’aîné.)

Une séparation volontaire est intervenue après dix-huit mois de ménage; H... a quitté son pays, est venu à Paris. Pour calmer la douleur qu’il éprouve, IL SE LIVRE À L’IVROGNERIE.

Voilà donc l’unique consolation que notre siècle offre à l’humanité au désespoir;

voilà le bonheur que les gens sans Dieu peuvent donner;

voilà la perfection idéale que certains publicistes préconisent pour la classe ouvrière!

Nous avons frappé à la porte du cœur de ce pauvre homme que Dieu nous a envoyé; nous lui avons rappelé les vérités qu’il a connues et aimées dans sa jeunesse, nous lui avons montré le tendre père de notre pauvre humanité, l’Homme-Dieu, versant son sang sur le Calvaire, et nous l’avons amené à reconnaître que le péché est la source de tous les maux. C’est un pas en avant; ce n’est, toutefois, qu’un commencement; nous comptons sur notre Dieu pour le reste.


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Quelle terrible odyssée est celle du sieur Eugène R..., âgé de 50 ans, chanteur ambulant, né dans un chef-lieu de canton du département du Calvados et depuis longtemps sans domicile.

Après avoir gaspillé une certaine somme d’argent et les plus belles années d’une existence très enviable dans des voyages qui n’avaient d’autre but que de voir des sites à lui inconnus et de s’amuser, R... entra comme garçon de cave chez un vigneron du centre de la France. Il prit, dans cette occupation l’habitude de s’enivrer et devint rapidement un alcoolique.

Comme beaucoup d’autres gens adonnés à ce vice, R... savait que son intelligence et sa santé sombreraient un jour, mais il buvait quand même. «Après moi le déluge!» répondait-il aux observations qui lui étaient présentées.

Il y a quatre ans, R... se trouvait, après boire, devant la porte du magasin de son patron, lorsqu’il aperçut de l’autre côté de la rue quelqu’un à qui il voulait parler. Tout titubant, il se mit en devoir de rejoindre ce compagnon, mais il glissa et tomba sur la chaussée. Une voiture pesamment chargée arrivait en ce moment et le conducteur ne put arrêter à temps ses chevaux, de sorte que R... fut renversé et sa jambe gauche écrasée sous une des roues. On le releva, et l’amputation du membre, jugée indispensable, eut lieu le lendemain.

Sous l’empire de l’alcoolisme, R... ne put, que quelques jours seulement après l’accident, se rendre compte du malheur qui le frappait. À sa sortie de l’hospice où il avait passé six semaines, R... se trouvait sans aucune ressource; il était impropre à toute besogne et ses anciens amis et camarades de débauche ne mirent à son service que des consolations banales ou des conseils impossibles à suivre.

R..., livré à ses propres moyens, devint chanteur ambulant. Cet homme exploite quelques départements, va de localité en localité et tend la main pour recevoir une aumône. Il regrette amèrement sa vie passée, mais ses regrets sont superflus. Il déclare à qui veut l’entendre qu’il aurait pu, s’il avait voulu mener une autre vie, être un homme heureux. Ses regrets ne visent que sa situation matérielle.

Le malheureux oublie qu’il a gravement offensé Dieu et semé le mauvais exemple dans l’âme de ceux avec lesquels il a vécu, il oublie que LE CHÂTIMENT QUI L’A FRAPPÉ N’EST RIEN EN COMPARAISON DE SON PÉCHÉ.

Il a passé deux nuits sous notre toit; nous lui avons présenté le Dieu qui, non seulement absout les pécheurs, mais encore libère de tout péché. Nous avons peine à croire qu’il nous ait compris, car R... a conservé sa terrible habitude; c’est sa seule consolation, nous dit-il. En dépit du proverbe diabolique «qui a bu boira», nous croyons que Dieu éclairera l’âme de ce pécheur et la sauvera.

En avant 1899 06 10


 

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