Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

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NOTRE OEUVRE SOCIALE À PARIS

(suite)

Les enfants


P... âgé de 15 ans, emballeur, né à Paris, a logé pendant quelques semaines à l'Hôtellerie populaire. Ses parents étant décédés, P... fut recueilli par une tante à la mode de Bretagne qu’il quitta un matin sans motif.

Nous n’eûmes qu’à nous louer de sa conduite et de son affabilité. Il trouva un soir un porte-monnaie renfermant une dizaine de francs perdu par un de nos locataires, et le remit immédiatement au cuisinier.

En diverses circonstances, nous eûmes la preuve de la droiture de conscience de cet enfant. P... a cessé de venir il y a quelques mois: nous l’avons rencontré récemment boulevard Magenta. Il habite chez son patron et semble être en bonne situation au point de vue matériel. Nous croyons que Dieu veille sur lui et le sauvera.


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Je viens vous demander l’hospitalité pour quelques nuits si vous pouvez me recevoir, nous disait un soir du mois de décembre dernier, le jeune Louis L... âgé de 17 ans, garçon-épicier, né à Château-Gonthier (Mayenne). Il y a quelques semaines, j’ai vu en passant l’inscription qui est sur la porte du couloir et j’ai pensé que votre œuvre était une bonne œuvre pour les pauvres. J’étais bien placé à ce moment et je ne pensais pas que je serais obligé de venir loger ici: actuellement mes ressources sont modestes et j'attends une place!

Le jeune enfant qui nous tenait ce propos avait bonne tournure et semblait mal à l'aise au milieu de nos locataires habituels. Il logea une première fois pendant quelques nuits et nous quitta en nous disant qu’il avait retrouvé un emploi dans un magasin d’épicerie.

À deux reprises, étant inoccupé, Louis L... a été de nouveau notre hôte. Il a assisté à quelques-unes de nos réunions, salle Auber: il est sincère, doué d’un grand cœur, mais peu intelligent.

Sa mère est décédée il y a plusieurs années; son père voyage en province pour représenter une maison de denrées coloniales, il ne touche que de faibles appointements, par suite d’un état de santé précaire, et son fils ne veut pas s’adresser à lui de peur qu’il ne s’impose des privations.

Nous croyons que les excellentes dispositions de Louis L... porteront leurs fruits, et nos prières pour son salut seront exaucées,


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C’est un récit bien intéressant que nous donne avec preuves à l’appui le jeune Joseph L... âgé de 16 ans, né à New-York. Ses parents originaires de la Pologne, ont émigré aux États-Unis d’Amérique, il y a une vingtaine d’années. Il y a quinze ans, sa mère voulut revoir son pays d’origine, et L... père, berger dans une grande exploitation, accompagna jusqu’au Havre sa femme et son enfant, puis retourna dans l’État de New-York. La mère et l’enfant continuèrent leur voyage et, arrivés à Varsovie, l’enfant devint orphelin.

Par suite de circonstances dont l’énumération serait trop longue, l’enfant fut envoyé à l’orphelinat agricole, fondé par le baron Hirsch, en Terre sainte. Il y grandit, apprit un métier et aurait pu y demeurer s’il n’avait été pris d’un grand désir de rejoindre son père en Amérique. Il a pu venir de Jaffa à Marseille sur un paquebot des Messageries maritimes, et le Consul des États-Unis d’Amérique dans cette ville l'a envoyé à Paris.

Joseph L... a utilisé les lettres de recommandation dont il était muni, et après deux semaines de séjour à notre hôtellerie populaire, ii a été dirigé sur Le Havre et de là à New-York. Que Dieu bénisse ce cher enfant et lui donne ce qui lui fait défaut: le salut.


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Le jeune Pierre Le T... âgé de 17 ans, né à Quimper, est venu à Paris, il y a trois ans. Son oncle maternel exerçait dans cette ville la profession d’épicier et avait appelé chez lui son neveu pour l’aider. Les affaires brillantes d’abord périclitèrent et, après une liquidation laborieuse, l’oncle entra comme homme d’équipe dans une Compagnie de chemin de fer.

Pierre Le T... fut donc réduit à ses propres ressources et entra successivement chez plusieurs négociants, qui, mécontents de son travail, le congédièrent. Il en arriva à vivre comme tant d’autres du produit de quelques corvées, de courses, de la vente de journaux, etc., etc.

La nuit, il dormit parfois à l’asile de nuit, le plus souvent dans une gare de chemin de fer, ou sous une arche de pont. À plusieurs reprises il vint passer la nuit à l’hôtellerie populaire.

Quelques entretiens que nous eûmes avec lui nous donnèrent la conviction que nous pouvions lui être de quelque utilité. Il assista à quelques-unes de nos réunions, sans cependant que son cœur fût touché à salut. Nous lui fîmes part de notre désir d’intéresser à sa situation précaire un directeur d’œuvre sociale. Il parut joyeux et vint pendant une semaine coucher à l’hôtellerie. Nous lui donnâmes rendez-vous pour une présentation le dimanche suivant, mais il ne vint pas. Nous ne l’avons plus revu. Il continue, nous a-t-on dit, à vendre des journaux et perd dans ce passe-temps délétère le peu d’énergie qui lui reste encore.

Dans quelques mois, ce pauvre enfant, cependant bien doué sous le rapport intellectuel, aura connu toutes les étapes du vice et deviendra comme tant d’autres un danger permanent pour la société.


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À diverses reprises, pendant plusieurs mois, nous avons donné l’hospitalité au jeune Louis G..., âgé de 17 ans, originaire du département de Maine-et-Loire. Tout d’abord, il s’était fait inscrire comme cuisinier; puis il figura au registre avec les qualifications les plus invraisemblables; enfin, il échoua dans une maison de publicité, qui lui allouait la somme dérisoire de 0 fr. 95 centimes par jour (en 1899).

Ce pauvre garçon agissait de son mieux afin de remonter le courant, mais loin de rencontrer une main amie qui le rémunérât convenablement, il ne trouvait que gens s’empressant d’exploiter sa bonne volonté et sa jeunesse. Nous lui fîmes envisager la situation sous son véritable jour et l’adjurâmes de regagner le domicile paternel, pensant qu’à défaut du veau gras sur lequel il ne pouvait compter à sa rentrée, il jouirait du bien-être familial et trouverait un métier lucratif.

Mais, tout d’abord, Louis G... refusa de suivre nos conseils; il tenait à ses haillons parisiens et aux mauvaises habitudes de la grande ville. Il ne fallut rien moins qu’une arrestation pour délit de vagabondage pour lui faire comprendre les réalités de la vie; et il partit pour son pays natal, promettant d’y chercher ce que Paris n’avait pu lui donner.

Malheureusement, Louis G... n’est pas chrétien; nous croyons cependant que le Dieu des miséricordes se révélera à notre ami et lui donnera la possession du salut.


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Pourriez-vous me procurer un lit pour deux nuits? nous demanda un soir le sieur Henri L..., âgé de 17 ans, né à Paris, exerçant la profession de marin. Je suis sorti ce matin de l’hôpital Lariboisière, où j’ai passé deux mois pour me faire soigner des fièvres paludéennes contractées au cours de la navigation, et je désire dormir tranquillement. Ma bourse est légère et je ne toucherai mon arriéré de solde que dans deux jours!

Nous accueillîmes amicalement ce jeune homme en lui demandant qui lui avait indiqué notre hôtellerie populaire. Il nous apprit que notre adresse lui avait été donnée par un de nos hôtes, malade à l’hospice.

Je connais l’Armée du Salut depuis plusieurs années, ajouta-t-il; c’est à Londres que j’ai vu pour la première fois les Salutistes et j’ai même assisté à des réunions. Dans mes voyages, j’ai vu l’Armée du Salut à l’œuvre. À Gap-Town, à San Francisco, à New-York, au Brésil, au Canada, etc., on ne voit que des salutistes. Je regrette qu’il n’en soit pas de même en France, mais je suis convaincu que mes compatriotes, essentiellement blagueurs (sic), apprécieront un jour prochain le côté pratique de l’œuvre salutiste et reviendront alors de leurs injustes préventions.

Ce jeune homme passa deux nuits à l’hôtellerie populaire et reprit la mer quelques jours après. Que Dieu le bénisse en lui donnant le salut et le témoignage d’une bonne conscience.

(À suivre)

En avant 1899 07 22




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