Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

----------

ALLONS-Y!


Allez évangéliser les païens de l’Afrique! nous dit-on souvent. Ne vous en déplaise, je n’ai pas besoin d’aller si loin pour évangéliser et ici, à Paris, Ville-Lumière, j’ai trouvé des gens aussi ignorants des choses de Dieu que le pauvre noir des coins les plus reculés du globe.

Vous en doutez peut-être? Eh bien! écoutez le récit que je vais vous faire, il est parfaitement authentique.

Un soir, je me trouvais sur la porte de notre salle, invitant les gens à la réunion, une mignonne fillette qui nous avait suivis à la réclame, s’était approchée de moi et semblait fascinée (par mon grand chapeau, sans doute).

Elle paraissait très intéressante, avec sa jolie petite figure propre, elle portait au bras un petit panier garni de bouquets qu’elle allait vendre de café en café.

Eh bien, fillette, que fais-tu? Tu devrais être dans ton dodo, à présent.

Madame, le jour je vais à l’école et le soir je vends des fleurs, maman travaille toute la journée et moi je dois gagner quelque argent le soir.

Quel âge as-tu?

Douze ans bientôt, Madame.

Dis-moi, connais-tu le Seigneur Jésus? Le Seigneur Jésus?

Après un moment d’hésitation, fixant sur moi ses grands yeux déjà remplis de tristesse: — Le Seigneur Jésus! Non Madame, je ne connais pas ce monsieur; d’ailleurs, il n’y a que quatre ans que nous habitons Paris; est-il du quartier? — Voyons, réfléchis un peu, je suis sûre que tu en as entendu parler! le petit Jésus! Noël! la Crèche! une croix!...

Ah! oui je crois que sur un journal je l’ai lu. Cet homme avait, n’est-ce pas, tué, quelqu’un, et pour le punir on l'avait pendu à une croix; c’est bien de celui-là que vous me parlez?

J’étais confondue! !

Ne fais-tu pas ta prière quelquefois?

Prière! si vous croyez madame, que nous avons le temps de penser à tout cela; prier! mais pourquoi faire?


Me mettant à sa portée, j’essayais de lui raconter bien simplement l’histoire du Seigneur Jésus. Elle m’écouta très attentivement. Quand j’eus fini, quelle ne fut pas ma surprise de l'entendre dire: merci madame pour votre belle histoire, est-ce vous-même qui l’avez composée?

Mais non, elle est vraie!

Vous l’avez vu, vous y étiez?

Non.

Oh! alors je ne crois pas que tout cela est arrivé...

Et la fillette partit; branlant sa petite tête, je l’entendis murmurer: c’est égal pour une histoire, c’en est une belle, mais chez nous on est trop occupé pour entendre toutes ces choses-là...


Un autre jour, faisant une visite à une femme qui habite non loin d’ici, elle me demanda si j’avais jamais vu un protestant. Ne répondant pas tout de suite, elle continua, moi je n’en ai jamais vu, mais on dit que ce sont des gens qui disent des choses très étranges, ils n'ont rien dans leur chapelle, il ne croient pas en Jésus-Christ ni à la Sainte-Vierge et puis ils lisent toujours dans un gros livre on ne sait pas trop quoi. Un jour je voudrais bien aller chez eux, mais voyez-vous j’ai peur et puis on m’a dit que cela me porterait malheur.

Inutile de vous dire combien je fus heureuse de la détromper et de pouvoir lui lire quelque chose dans le grand livre.


* * *


Souvent on rêve de partir dans une mission lointaine (quelle est la jeune fille qui n’a pas eu ce rêve). Oui on rêve et pendant ce temps, ON LAISSE DANS LES TÉNÈBRES LES PLUS PROFONDES, CEUX QUI VIVENT À CÔTÉ DE VOUS.

Quant à moi je suis heureuse d’évangéliser, non les païens de là-bas, mais les païens de Montmartre.

Semons, lorsque dans sa tristesse

Notre cœur murmure: «A quoi bon?»

Répétons à tous la promesse,

Et l’Évangile du pardon.

Semons! bientôt même à Montmartre

Luira le jour de la moisson.

E. Lourde.

En avant 1899 08 19


 

Table des matières