Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

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CE QUI SE PASSE


D’un pas rapide nous allons à la réunion. Il fait froid et sombre. Les rares passants serrent leurs vêtements, montent leur col, chacun semble se hâter vers un foyer attrayant. Je frôle une jeune fille qui, elle, n’est pas pressée. Pourtant ni jaquette, ni châle n’abritent sa frêle taille. Son corsage bleu clair et son chapeau d’été prouvent quelle n'a pas d’argent, pas d’intérieur, pas de soutien.

«Nous avons une réunion, lui dis-je, venez-y?

«Oui je veux bien, fut la réponse.

Elle nous suit timidement. Près du poêle bien chaud elle s’assied et écoute respectueusement jusqu’à la fin de la réunion. Je vais lui parler:

«Ou demeurez-vous?

J’ai une chambre tout près d’ici.

N'êtes-vous jamais venue aux réunions?

Non, jamais, je ne savais pas qu’elles existent

Quel travail faites-vous?

Point.

Pourquoi?

Maman ne veut pas, et je sorte le soir.

Toute seule?

Oui.

Pourquoi seule, que faites-vous?

(Confuse et baissant la tête):

Vous le devi nez bien.

Ô ma chère sœur pourquoi mener une si triste vie?

Maman le veut, car je dois l’assister.—

Quel âge a votre mère?

62 ans.

Et vous?

dix-huit.

La mairie ne fait-elle rien pour votre mère?

Non. J’ai essayé de gagner notre pain, je me suis placée à 15 fr par mois (en 1899) et il n’y avait pas moyen de vivre Tout travail féminin est si peu payé que nous ne pouvions nous suffire. Maman demeure très loin, dans un quartier pauvre, et chaque matin je vais lui porter l’argent.

Combien je vous plains et vous aime! venez souvent ici et quand vous voudrez quitter cette vie, venez chez nous, au 10, Montée de la Boucle. Vous travaillerez quelque temps, puis on vous placera.

Merci.

Et elle s’en alla attendre encore, sur le froid boulevard, le pain de la honte que sa mère renvoyait chercher. Pauvre enfant! Si seulement elle était seule dans ce cas, mais ses infortunées compagnes se comptent par milliers dans notre chère France.


Ces milliers de vies demandant leur pain à la passion brutale, sont retranchées du nombre des mères vertueuses dont la France a besoin.

Ces milliers représentent les dix milliers de fils et de filles virils et purs, qu’il faut déduire encore, de la phalange qui fait la force et la gloire de la patrie.

Pourquoi cet enlisement de la jeunesse dans la pire des fanges, la souillure du corps et de l’âme?

Pour le pain de celle-ci, pour la convoitise de celui-là!

Quand donc l’homme cessera-t-il de spéculer sur la faiblesse de la femme?

Quand lui donnera-t-il le prix raisonnable du travail de ses mains?

Où sont les législateurs intègres qui lui conféreront la protection et l’honneur dont elle a besoin pour être l'ange gardien de sa famille.

Les sages disent reconnaître l’élévation morale d'un peuple au respect qu’il porte à la femme.


LE VÉRITABLE ENNEMI DE LA FRANCE, LE VOILÀ, C’EST L’IMMORALITÉ.

(De la France et de presque tous les pays en ce 21e siècle ! Pensons-y!)


Qui va se lever et combattre?

Tout mutisme, toute inaction devant ce mal est une complicité, une lâcheté.


Les armes sont à la croix,

car Le sang de Jésus-Christ purifie de TOUT péché.


J. B., Lyon,

En avant 1899 12 02



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