EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

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LE CREDO DE LA DOULEUR

Je crois que la douleur est le secret des forts,

Que sans elle notre âme ignore ses trésors,

Qu’on n’est grand que par elle, et que sa dure étreinte

Laisse toujours en nous quelque divine empreinte.

Je crois qu’en chaque tombe on rencontre un berceau,

Et que, pour enfanter en nous l’homme nouveau,

Doit mourir le vieil homme ainsi que meurt en terre

Le grain qui de l’épi renferme le mystère.

Je crois que dans le monde il n’est point de bonheur

Qu’il ne faille semer dans la peine et les pleurs;

Que plus dur est le sol que notre fer sillonne,

Plus joyeux sont les chants à l’heure où l’on moissonne.

Je crois que pour aimer il faut avoir souffert;

Qu’à la compassion aucun cœur n’est ouvert,

S’il n’a de la douleur connu la loi sévère,

Et qu’à l’amour qui sauve il fallait un Calvaire.

Je crois qu’il faut souffrir et sans savoir pourquoi ;

Afin d’offrir à Dieu l’encens de notre foi,

D’affirmer Sa bonté quand tout semble contraire,

De L’aimer en enfant, d’obéir sans salaire.

Je crois qu’à la clarté du céleste séjour

Nous comprendrons demain nos épreuves d’un jour,

Et qu’ainsi notre foi sera changée en vue

Comme l’ombre en splendeur quand l’aurore est venue.

Je crois que Dieu Lui-même essuira, dans les cieux,

La sueur de nos fronts, les larmes de nos yeux,

Qu’un jour II changera nos combats en victoire,

Et tous nos maux passés en un faisceau de gloire.

A. Decoppet.

En avant 1903 02 01