LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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LE VIN DU PURGATOIRE.

Un jeune homme était fort en souci pour l’âme de son père, retenue dans le purgatoire depuis dix-huit mois déjà.

Il s’en alla trouver son curé pour lui commander une messe.

La servante l’introduisit dans la pièce où le prêtre était justement en train de finir son repas et ce dernier offrit à son visiteur un verre de vin. Comme le jeune homme semblait le trouver bon:

— «Que dites-vous de mon vin?» demanda le curé.

— «Il est rudement bon», répondit l’invité.

— «Eh bien, prenez encore un verre, j’en ai d’autre à la cave. Entre vous et moi, fit le prêtre en clignant de l’œil, c’est du vin pareil qu’on sert en purgatoire. Mais, au fait, quel est le but de votre visite?

— «Eh bien! dit le jeune homme, vous savez que mon père est mort, il y a un an et demi, et j’étais venu vous demander une messe pour faire sortir son âme du purgatoire, mais, j’hésite...»

— «Comment donc! interrompit le curé. Hésiter! Et pourquoi! En affaire si grave, l'hésitation est un péché. Qu’est-ce qui vous arrête?»

— «C’est que, dit le jeune homme, je ne suis pas très riche et mon argent me fait besoin. Et puis, voyez-vous, du moment que c'est là le vin que vous donnez aux gens en purgatoire, mon père est à son affaire: II AIMAIT LE BON VIN; puisqu’il en boit de si bon là-bas, je suis sûr qu’il aime autant y rester.

La pioche et la truelle N° 8 (1891?)