Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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HONOREZ VOS PARENTS.


Soyez pour eux, partout, toujours, plein de déférence, de respect, de soumission; entourez-les de tous les témoignages d’estime, d’amour qui sont — vous le comprendrez un jour — la menue monnaie de leur bonheur: après Dieu, donnez-leur, dans votre pensée, dans le sanctuaire intime de votre cœur, une place de choix, la meilleure.


Un orgueil stupide pousse souvent des parvenus à rougir de l’humble condition de leurs parents.

J’ai connu un étudiant, homme politique aujourd’hui, qui avait honte de se montrer en compagnie de sa mère dans les rues de la ville universitaire où il poursuivait ses études, parce qu’elle portait un bonnet de paysanne, et qui chargeait un de ses camarades de la promener à sa place, durant les rares visites qu’elle venait lui faire du fond du village....

Voyez-vous d’ici les trésors de dévouement que ce mauvais fils a pu tirer, plus tard, de son cœur vide et desséché, pour la patrie qu’il a eu l’ambition de servir?

Vous, du moins, donnez d’autres exemples, comme Joseph, qui, parvenu aux premières dignités de l’Égypte, se prosternait devant son vieux père dans l'indigence; comme Salomon, qui, monté sur le trône de David, en descendait pour aller au-devant de sa mère suppliante et se jetait à ses pieds.

Les progrès de l’âge amènent souvent chez les vieillards de l’étroitesse dans les idées, de l’entêtement dans les opinions, des caprices dans l'humeur, des infirmités qui exigent non seulement de la patience, mais encore des soins minutieux et pénibles.

Écoutez cette histoire et apprenez ce que peut supporter la piété filiale quand elle est animée par un esprit chrétien.


J'ai connu un capitaine d'artillerie qui habitait dans la même ville que son père, un homme bon, mais brusque et quelque peu maniaque, avec lequel il vivait dans les meilleurs termes.

Le vieillard ne pouvait pas supporter en particulier que son fils fume devant lui. Inutile de dire que celui-ci, fort respectueux, s'en abstenait absolument en sa présence, et ne s’accordait cette satisfaction que lorsqu'il était chez lui.

Un jour qu’il savourait dans son cabinet une modeste cigarette, son père arriva sans se faire annoncer et, trouvant sans doute qu’il ne se débarrassait pas assez vite de l’objet de son antipathie, il leva la main et le souffleta...

Le capitaine était un homme dans la force de l’âge: il était décoré...

Qu’eussiez-vous fait à sa place?

Sans se départir de son calme, il ouvrit la fenêtre et y jeta — non pas son père, comme me le dit un jour un enfant à qui je racontais cette histoire —, mais sa cigarette.


Ce n'est pas seulement à cause des soins que nous leur avons coûtés que nous avons le devoir de supporter leurs importunités ou leurs défauts: c’est encore pour adoucir pour eux les amertumes de la vieillesse et leur faire comprendre que leur présence est et sera toujours un privilège et un bienfait pour nos cœurs.

Les soucis, les inquiétudes, les épreuves, les infirmités ont assombri leur horizon sur la fin du jour.

Les laisseriez-vous descendre au tombeau sans éclairer le plus possible des rayons de votre tendresse la tristesse de leurs derniers moments?

Que tout en vous:

dans votre conduite,

dans vos paroles,

dans votre altitude,

dans vos regards,

dans vos gestes,

dans l'expression de votre visage,

que tout en vous les défende contre ce sentiment douloureux, tourment des vieillards, qui los porte à croire et à dire qu’ils sont à chargea leurs enfants: que tout leur répète que leurs conseils vous sont nécessaires, que leur mission à votre foyer est encore grande et belle, et que, bien loin d'être pénibles, les soins dont vous les entourez sont la plus grande douceur qu'il vous soit possible de goûter:

Hélas! Cette douceur vous sera toujours trop vite enlevée!

La pioche et la truelle N° 7 (1890)


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