Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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NOUS SOMMES DE BRAVES GENS


La bonne parole que voilà! Elle se trouve dans la Bible: je puis vous le donner pour certain. Ah! c’est pour le coup que vous êtes contents, vous qu’on ennuie en vous répétant toujours que vous êtes de pauvres pécheurs et qu’il faut vous convertir. C’est donc bien comme vous dites:

Nous ne sommes pas plus mauvais que les autres!

Nous n’avons fait tort à personne!

Nous n’avons ni tué. ni volé!

Nous sommes de braves gens!

C'est tout clair.


Vous me demandez dans quel chapitre de quel livre elle se trouve cette bonne parole. Vous nous rendrez service! me dites-vous. Il faut que nous puissions citer exactement ce beau passage à ceux qui prétendent que nous sommes pécheurs. Nous sommes de braves gens! oui! c'est bien cela! c’est précisément ce qu’il nous faut!

Eh bien, je suis à vous. Cherchons!


C’est l’apôtre Paul qui aura dit cela, dans quelqu'une de ses épîtres?

J’ouvre une de ses lettres intimes, celle qu'il écrivait à celui qu'il appelait son fils, son cher Timothée. J’y lis:

«C'est une chose certaine et entièrement digne d’être reçue que Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver les pécheurs dont je suis le premier.» (1 Tim. 1: 16).

Il parlait peut-être ainsi par excès d’humilité. Cherchons dans une autre de ses épîtres.

«Je ne suis pas digne d’être appelé apôtre, parce que j’ai persécuté l’Église de Dieu!» (1 Cor. 15: 9).

C'est vraiment trop de délicatesse. Après tout, si Paul avait persécuté les chrétiens, c’était dans les meilleures intentions et parce que, dans ce temps-là, les gens pieux lui donnaient sur les nerfs.

Il n’a sans doute pas toujours parlé de la sorte.


J'ouvre ailleurs.

«Il n’y a point de juste, pas même un seul! Nul n’est intelligent, nul ne cherche Dieu; tous se sont égarés; tous sont pervertis! Il n’en est AUCUN qui fasse le bien, pas même un seul!» (Rom. 3: 10-12.)

Décidément Paul voit tout en noir.


À un autre s’il vous plaît!

Notre bonne parole pourrait bien être celle de l’apôtre Pierre. Un brave, celui-ci! un compagnon qui ne faisait pas tant le fier et qui savait à l'occasion se chauffer avec les soldats romains dans la cour de Caïphe. Il est vrai que, dans cette circonstance, la mémoire lui fit défaut. Il ne se souvint pas du tout d’avoir connu Jésus-Christ et d’avoir vécu plus de trois ans avec lui.


UN PETIT MENSONGE, APRÈS TOUT!

UNE FOIS N'EST PAS COUTUME.


Cela n'empêche pas que c’était un brave homme! Ce mensonge, Pierre ne le trouva pas petit, cependant, car lorsque le regard de son Maître l'eût fait rentrer en lui-même, l’apôtre infidèle sortit et pleura amèrement. Du reste, bien avant d’avoir ce reniement sur la conscience, il a dit catégoriquement ce qu’il pensait de lui-même, ce jour où, à la vue d'un miracle de Jésus, il tomba à genoux et s’écria:

«Seigneur, retire-toi de moi, parce que je suis un homme pécheur!» (Luc 5: 8.)

Bon! le voilà encore! Ils sont donc tous les mêmes!


Cette parole sera alors de saint Jean. Un homme débonnaire, un «bon enfant!» Interrogeons-le.

«Si nous disons que nous n’avons point de péchés, nous nous séduisons nous-mêmes et la vérité n’est point en nous.» (1 Jean 1:8.)


Il n’y a donc pas un des disciples de Christ qui veuille convenir qu’il est un brave homme!

C’est un parti pris. C’est à qui dira le plus de mal de lui-même!


Eh bien, puisqu’il en est ainsi, cherchez-nous cette fois un militaire qui ne fasse pas tant d'embarras, un homme pas trop sensible, un guerrier de l’ancien régime! Voulez-vous David? Un vaillant, celui-ci! Il avait, jeune encore, abattu à lui seul, un ours et un lion. Plus tard, avec sa fronde de berger, il vous tua un géant qui faisait trembler tous les hommes d’Israël, et, après lui avoir ôté son glaive, il lui en coupa la tête. Eh bien, oui! David a bien dut dire quelque part qu’il était un brave homme. Lisons:

«Ô Dieu! aie pitié de moi dans ta bonté; selon ta grande miséricorde, efface mes transgressions. J’ai péché contre toi seul et j’ai fait ce qui est mal à tes yeux.» (Ps. 51.)


Prenez les uns, prenez les autres, c'est donc toujours la même histoire.

NOUS NE TROUVONS PARTOUT QUE DES GENS QUI S'ACCUSENT.


Où sont-ils donc, dites-Ie-nous enfin, où sont-ils ces braves gens, afin que nous puissions aller en leur compagnie?

Ce fut Tsaphnath-Paenéach, grand intendant de Pharaon, roi d’Égypte, qui eut l’honneur de voir de ses veux les seuls hommes de la Bible, qui se soient déclarés de braves gens, c'était dix Hébreux, fils d’un certain Jacob, qui étaient venus en Égypte pour acheter du blé. L’intendant les prit pour des espions et les traita durement:

«Vous êtes venus pour voir les lieux ouverts du pays.»

«Non, monseigneur, répondirent-ils épouvantés. Tes esclaves sont venus pour acheter de la nourriture. Nous tous, nous sommes fils d’un même homme; nous sommes de braves gens!» (Gen. 42: 10-11). (Selon d'autres versions: nous sommes sincères, de bonne foi, gens de bien...)

Mais il est inutile de vous raconter cette histoire; vous la connaissez aussi bien que nous.

Les seuls hommes de la Bible qui se soient appelés de braves gens, ce sont les frères de Joseph qui avaient autrefois COMPLOTÉ DE LE METTRE À MORT et qui s’étaient enfin arrêtés à le vendre comme esclave.


Décidément la Bible ne croit pas beaucoup à l’innocence de l’homme.

Chers Lecteurs, ne pensez-vous pas qu'elle a raison?

E. Grobet.

La pioche et la truelle N° 21 (1894)


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