Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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COMMENT LA GRÂCE DE DIEU S’EST MANIFESTÉE DANS MA VIE


C’est dans le sentiment de mon néant et du fond de la poussière que je me suis proposé, avec le secours de la grâce de Dieu, d’offrir aux lecteurs de ce journal le récit des grandes choses que Dieu a faites pour moi. Puissent seulement ces quelques lignes être marquées du sceau de son Esprit et être en bénédiction à tous ceux qui les liront.

Je naquis en 1862, à Ecurcy, petit village du département du Doubs, à quelques kilomètres de la frontière suisse. Ce village est bâti sur le penchant d’une colline au pied de laquelle se trouvent deux fontaines dont les eaux ne tarissent jamais. Des deux fenêtres de ma chambre, dont l’une donne au levant et l’autre au midi, on voit le Lormont avec ses forts et ses batteries.

Fils de cultivateur j’appris de bonne heure à manier la pioche, la bêche et le râteau, mais à côté de ces dispositions naturelles pour le travail des champs j’avais du goût pour l’étude. Tout en m’occupant de culture, je poursuivais donc mes études sous la direction de l'instituteur du village jusqu’à l’âge de 15 ans. Je fus pendant deux ans, c’est-à-dire jusqu’à mon départ pour la Charente, privé de leçons.


Rien de remarquable ne s’est passé dans ma jeunesse, sinon que je fus beaucoup éprouvé, gage certain de l’amour que Dieu me témoignait. Malgré toutes mes épreuves, toutes mes douleurs, ce n’est qu’à 28 ans que je me suis décidément tourné vers le Seigneur, et c’est au mois de mai 1890 que j’ai fait vœu de servir le Seigneur et que je me suis consacré à
 Lui.

Il y avait déjà plusieurs années que je connaissais la vérité; mais je n’avais pas encore fait le pas décisif: «TRAVAILLER POUR LE SEIGNEUR»; car tant qu’on ne fait rien pour le Maître, c’est une preuve que l’on n’est pas à Lui.

L’instruction religieuse que j’ai reçue dans ma jeunesse n’a apporté dans mon âme aucune lumière, et je puis vous dire que je n’ai pas trouvé alors la paix de mon âme, le bonheur de l’enfant de Dieu.

À cette époque de ma vie, c’est-à-dire à 17 ans. Je quittais le toit paternel pour faire mes études d'instituteur, sous la direction d’un maître chrétien. C’est là que je reçus les appels de la grâce de Dieu et que j’entendis parler de mon Sauveur. Je lisais la Parole et cependant il y avait quelque chose qui me séparait du Christ:

C’étaient ces vains plaisirs du monde que j’avais caressés dans ma jeunesse et dont la racine était encore dans mon cœur.

Je n’étais pas justement un ivrogne avant de quitter Ecurcy, mais j’aurais pu le devenir; j’étais plutôt un grand farceur, un ami des sociétés où l’on se divertissait bien et un premier danseur.

Mon caractère était doux, mais je m’irritais facilement quand j’avais bu un verre. Toute ma vie n’a été que remplie d’épreuves, appels sincères de la grâce de Dieu, et C’EST POUR N’Y PAS AVOIR RÉPONDU qu'il m’a envoyé une terrible maladie dans le but de la gloire du beau Nom de Jésus.


NE CONSIDÉRANT PAS QUE LA BONTÉ DE DIEU NOUS CONVIE À LA REPENTANCE, c’est après avoir méprisé les richesses de sa patience et de sa longue attente qu’il m’arrêta soudainement. En une nuit, suite à la rougeole, il me paralysa complètement. Je fus pendant plusieurs semaines chez mon professeur, M. Nicolet, couché sur un lit de douleur, sans même pouvoir remuer un seul de mes doigts, sans pouvoir faire entendre un seul son.

À présent les mouvements sont un peu revenus, mais je suis constamment assis sur un fauteuil, les mains crispées, la bouche à demi ouverte et ne pouvant me faire comprendre qu’aux personnes qui sont habituées à moi. Je ne puis manger seul et je ne marche qu’avec peine, et parfois très courbé; ainsi pour me rendre aux réunions je m'appuie sur le bras de ma bonne mère toujours prête à m’aider.

Tout ce que j'avais fait jusqu’alors pour mon salut tomba en ruines; ce fut une grande catastrophe où il ne me restait que l'amour de mon Sauveur, qui veillait sur moi et qui m'empêcha de me donner la mort.


Ici je m’arrête et j’hésite à vous faire connaître le tableau de mes péchés.

Je me suis révolté contre Dieu,

j’ai battu père et mère,

j’ai donné cours à toutes mes passions.

Je m’aigrissais de jour en jour, et j’aigrissais les miens.

Cet état de choses ne pouvait qu’avancer ma ruine ou mon relèvement.


Au lieu de la mort, j’ai choisi l'humiliation, la repentance et la foi en Christ.

J’ai choisi le renoncement et la souffrance et c’est au pied de la croix de mon Sauveur que j’ai trouvé le pardon de mes iniquités, la paix et le bonheur que nul, oui, que nul ne peut me ravir.

Maintenant je me tiens pour mort au péché et s’il m'arrive quelquefois de commettre quelque faute, j’éprouve une profonde douleur d’avoir offensé mon Père céleste. Il m’est impossible de vous dire toute la joie que j’éprouve au service de Jésus-Christ et mon seul désir est de glorifier mon Maître dans ma faiblesse et malgré mes imperfections jusqu'à la fin de mes jours. Que Dieu par sa grâce m’en donne la force! À Lui en sera toute la gloire

Jusqu’à ce jour, ma maladie qui dure depuis douze ans est unique sur le témoignage qu’en ont rendu tous les médecins qui en ont eu connaissance, entre autres M. Pitres, doyen de la Faculté de médecine de Bordeaux, que j’ai consulté durant le séjour d’un an que j’ai fait aux asiles John Bost, à La Force (Dordogne).

Ce que la science humaine ne saurait expliquer, c’est ce fait extraordinaire qui se produit chez moi pendant un quart d'heure à mon réveil, où j’ai une pleine liberté de mes membres; ce qui me permet d’employer ces moments bénis à travailler pour le Seigneur en écrivant tous les matins et quelquefois la nuit pour sa gloire.

Celui qui veut suivre Jésus doit renoncer non seulement à ses péchés, mais il doit se renoncer lui-même et se charger de sa croix.


TOUT CHRÉTIEN A UNE CROIX À PORTER.


L'enfant de Dieu doit vivre dans la fidélité envers son Dieu et doit marcher dans la vérité et dans la haine contre le péché. Celui qui réalise toutes ces choses est appelé à souffrir, car c’est justement là le sujet de mes souffrances, mais Dieu m’a soutenu, fortifié et encouragé dans toutes mes luttes contre le péché, le monde et Satan, et il m’a donné de réaliser cette belle devise: «Plus je souffre, plus je suis heureux!» que j’ai placée sur un écriteau au-dessus de ma tête. Car j’ai fait dans mon épreuve l’expérience de l'apôtre quand il dit par rapport à d’autres souffrances; «En toutes ces choses nous sommes plus que vainqueurs, par Celui qui nous a aimés.» (Rom., VIII.)


Vous qui lisez ces lignes, ne soyez pas aussi insensés que j’ai été:

N’attendez pas de vous convertir que Dieu vous arrête par l’épreuve, c'est toujours un moyen dur au cœur de Dieu que le châtiment, aussi ne l’emploie-t-il que lorsqu’il y est contraint.

C'est pourquoi, ami lecteur, convertis-toi aujourd’hui, ne renvoie pas à demain, car demain c'est peut-être trop tard!

«C’est maintenant le temps agréable, c’est maintenant le jour du salut.» (II Cor., VI, 2.)

«Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas vos cœurs.» (Héb., IV, 7).

Dieu vous dit: «Mon fils (ma fille) donne-moi ton cœur!» (Prov., XXIII. 26)

Ch. Briguel.

La pioche et la truelle N° 23 (1894)


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