Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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ÉTUDES BIBLIQUES

JEAN-BAPTISTE

2° SON HISTOIRE.


Nous avons expliqué ce qui constitue principalement l’originalité de Jean-Baptiste, ce qui distingue si nettement sa prédication de celles des Pharisiens et des Sadducéens d'une part, et de Jésus-Christ de l'autre. Aujourd'hui, suivons-le dans sa vie.

L'Évangile de saint Luc nous fait voir comment Dieu, par un acte spécial de sa libre grâce, suscita cet homme extraordinaire dans une famille pieuse apparentée à celle de Jésus. Nous ne savons rien de sa jeunesse sauf qu’il grandit loin du luxe et de la corruption des villes, se préparant dans le désert à sa vie d’ascète, et mettant à profit le calme de la solitude pour puiser dans la communion de Dieu la force indomptable qu’il allait être appelé à déployer. (Luc 1, 80.)


Quelle émotion ce dut être dans tout Jérusalem et dans toute la Judée, chez tout ce peuple ne vivant que de la lecture des anciens prophètes, et de l'attente anxieuse du Messie, quand le bruit se répandit tout à coup qu’après 400 ans de silence Jéhovah visitait son peuple, et qu’un nouveau prophète avait paru dans le désert.

On accourt de toute part; et l'on voit un jeune Bédouin de 30 ans au front bronzé, à l’œil flamboyant, aux longs cheveux en désordre; une ceinture de cuir retient autour de ses reins une pièce de toile en poil de chameau. Le désert seul lui fournit sa maigre nourriture; des sauterelles comestibles et du miel ou résine végétale; sa boisson, c'est l'eau du Jourdain, comme celle d’Élie son devancier était l’eau du Kérith.

On s’approche, des paroles enflammées sortent de ses lèvres: il menace, il promet, il dénonce les péchés de tous, appelle petits et grands, pauvres et riches, soldats, péagers et pharisiens à la repentance; il déclare que le Messie est déjà au milieu d'eux, qu’il va paraître, qu’il a son van dans sa main, qu’il nettoiera parfaitement son aire, qu’il brûlera la balle, c'est-à-dire les pécheurs impénitents, au feu qui ne s'éteint point.

En entendant de tels accents, le peuple se demande ce que le souffle du désert va laisser de grains dans ce redoutable van; ils se repentent, ils confessent leurs péchés, et Jean les baptise, c'est-à-dire les plonge dans les eaux du Jourdain, comme signe de leur purification et de leur admission au nombre de ceux que le Messie trouvera prêts quand il arrivera.

Les autorités religieuses s’émeuvent à leur tour: le Sanhédrin, le plus haut tribunal à la fois civil et religieux des Juifs, lui envoie toute une délégation de sacrificateurs et de lévites, pour lui demander;

«Qui es-tu? Es-tu le Messie?»

Et c'est ici que se révèle tout le caractère du Baptiste.

Il ne répond ni qu'il est un prophète, ni un prédicateur, ni même un homme. Il n'est qu’une voix! Il ne vit que pour crier; il est la voix qui crie dans le désert:


«Préparez le chemin du Seigneur!»


Le missionnaire s'identifie avec sa mission, et sa mission est tout entière dans sa voix. Quant à toutes les préoccupations des hommes, il les dédaigne.

Il est supérieur à toutes les commodités de la vie:

«Ceux qui sont vêtus d’habits précieux ne sont pas dans le désert, mais dans les palais des rois;»

Supérieur à l'ambition:

«Celui qui vient après moi m'est préféré, car il est plus grand que moi, et je ne suis pas digne, en me baissant, de délier la courroie de ses souliers;»

Supérieur à l’orgueil:

«C’est moi, dit-il à Jésus, qui ai besoin d'être baptisé par toi, et tu viens à moi!»

Supérieur à la jalousie, car voyant ses disciples affligés de ce que «tous vont à Jésus», il n’hésite pas à leur dire:

«Il faut qu'il croisse et que je diminue;»

Supérieur à tous les grands du monde, car il flagelle sans ménagement l’hypocrisie des Pharisiens:

«Race de vipères, qui vous a appris à fuir la colère à venir?»

Supérieur à la mort même, car il la brave en disant à Hérode Antipas;

«Il ne t’est pas permis d’avoir la femme de ton frère


Hérode Antipas, tétrarque ou roi de la Galilée et de la Pérée, était fils d’Hérode le Grand le massacreur de Bethléhem. Étant un jour allé Rome faire sa cour à l’empereur Tibère, il reçut l’hospitalité chez son frère Philippe, qui, déshérité par leur père, vivait dans cette ville en simple particulier.

Hérodias, la femme de Philippe, crut l’occasion venue d’escalader un trône. Elle séduisit le faible Antipas, se fit enlever, arriva en Palestine avec sa fille Salomé, et eut assez de crédit pour faire chasser l’épouse légitime, la fille d’Arétas roi de Pétra.

Le crime ne resta pas impuni, car il fut l’occasion d’une guerre dans laquelle Arétas infligea à son gendre une sanglante défaite; il ne fut même pas perpétré en paix, car le prophète du désert accourut, et, avec l’intrépidité et l’autorité d'un Élie devant Achab dans le champ de Naboth, il osa dire au roi: «Il ne t’est pas permis!»

Peut-être Antipas, par une sorte de terreur religieuse, aurait épargné le courageux censeur, mais Hérodias ne put contenir sa haine; elle fit enfermer le Baptiste dans la prison de Machéronte et épia l'occasion de le mettre à mort; puis, abusant d'une folle promesse de son mari ivre, elle le fit décapiter.


Ainsi mourut le plus grand des prophètes.

Sa mission était remplie. Il eut, et il aura éternellement l’honneur unique d'avoir préparé la venue du Sauveur, et de l’avoir introduit sur la scène du monde.

Pendant son emprisonnement, ses disciples, privés de sa direction, entrèrent parfois en conflit avec les disciples de Jésus, par exemple au sujet du jeûne.

Après sa mort, son école ne se fondit pas immédiatement avec celle de Jésus. Nous lisons au livre des Actes que saint Paul, vers l’année 54, trouva à Éphèse une douzaine de disciples de Jean dont il compléta l'instruction évangélique, et qu’il rebaptisa au nom de Jésus.

Nous reparlerons de ce fait dans une étude ultérieure.

Philémon Vincent.

La pioche et la truelle N° 45 (1896)


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