Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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LA BÉQUILLE.

(Un don pour Dieu)


Un pasteur en tournée d’évangélisation rencontra en haut d'une montagne toute une population privée de tout secours religieux et n'ayant même gardé que de bien vagues notions de l'existence de Dieu. Décidé à aider une Société d'évangélisation à y envoyer un missionnaire, il s'adressa à son Église pour trouver l'argent indispensable, mais son appel fut vain.

Quelques semaines plus tard, il réitéra son appel avec plus d'ardeur; il avait les yeux pleins de larmes, et termina par cette prière angoissée; «Ô Dieu, aide-moi!»

Tout au fond de la Chapelle se trouvait une petite tille de dix ans: elle était boiteuse, et s'appelait Marguerite. Elle fut touchée de l'appel pressant qu’elle entendait, et surtout le dernier cri: «Ô Dieu, aide-moi!» retentit fortement dans son petit coeur:

«Ô Seigneur, dit-elle, je ne suis qu'une pauvre enfant, et je n’ai rien à te donner, si seulement j'avais quelque chose, comme je te le donnerais volontiers!»

Elle achevait à peine cette prière qu’elle crut entendre dans son cœur une voix qui lui disait; «Marguerite, tu as quelque chose à donner, tu as ta béquille. Un ami t'en a fait cadeau pour que tu ailles chaque jour au parc entendre chanter les oiseaux. Cette béquille a coûté plus de 10 francs!»

La première pensée de l'enfant fut de dire: «Ô Seigneur, pas ma béquille, elle m'est trop nécessaire»: mais il lui sembla encore que son cœur lui disait: «Si, je le veux!»


Dès ce moment, la petite Marguerite fit le sacrifice de sa béquille, et aussi de ses promenades au parc, elle dit adieu dans sa pensée aux belles fleurs et aux petits oiseaux «Maintenant, se dit-elle, il faudra rester à la maison, mais Jésus a plus souffert que moi; je puis bien faire cela pour lui montrer que je l'aime.»

Une des premières visites du diacre chargé de recevoir les offrandes fut pour les parents de Marguerite. Quel ne fut pas son étonnement quand la petite lui apporta sa béquille en le priant de la vendre pour évangéliser les montagnards. Trop surpris pour objecter quoi que ce soit, il la mit sous son bras, s'en débarrassa dans une petite chambre attenante à la Chapelle, et n'y pensa plus.

Mais le pasteur, en entrant à quelques jours de là dans cette chambre, vit la béquille de Marguerite; il comprit tout le sacrifice de la chère petite, et quand eut lieu la première réunion, il prit la béquille et la montra à l’assemblée.

«Voici, dit-il, la béquille de la petite Marguerite; c'est tout le confort qu'elle avait dans la vie, et elle l'a donnée au seigneur. Et vous, qu’avez-vous fait?»

Nul ne soufflait mot, tous se sentaient mal à l'aise.

Le pasteur reprit:

«Nous allons mettre cette béquille aux enchères en faveur de la mission, pour moi, j'en donne 50 francs. — 100 francs, dit une autre voix. — 500, fit une troisième. — 1000, dit une quatrième.»

À la fin la béquille fut adjugée pour 3000 francs; le pasteur lui-même n'en croyait plus ni ses yeux ni ses oreilles;«Enfin, dit-il, Dieu a remué vos cœurs, qu'il en soit béni.»

Le lendemain une dame vint trouver Marguerite et lui dit:

«Chère petite, votre béquille a produit 3000 francs pour la mission dans la montagne. Maintenant, je vous la rapporte. Qu’elle vous rende désormais doublement heureuse.»

La petite Marguerite ne regretta jamais son sacrifice.

Adapté par E. Lambert.

La pioche et la truelle N° 47 (1896)


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