Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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LE MARCHAND DE MOURON

JE NE PARLE JAMAIS À DIEU NI NE VEUX PLUS JAMAIS L’ENTENDRE PARLER


Marie Bernard était une charmante petite fille de 10 ans qui habitait, avec sa mère, veuve depuis quelques années, un quartier excentrique de Paris. Mme Bernard était pieuse et possédait l'assurance de son salut par Jésus-Christ; c'est vous dire que Marie était élevée sous l'influence de l'Évangile. Oui, cette petite amie fréquentait l'école du dimanche et elle aimait son école qu’elle appelait l’école du Seigneur. Une voisine lui donna un petit serin jaune et vert qui était très bon chanteur.

L’enfant fut enchantée de ce cadeau vivant et toute joyeuse l'apporta à sa mère.

Chaque jour, dans la cour, de la maison un honnne très singulier venait crier du beau mouron pour les petits oiseaux. C'était chanté si drôlement que la petite fille s'en était toujours amusée beaucoup; mais dès qu'elle fut en possession du serin, elle ne manqua jamais de descendre rapidement ses quatre étages pour faire sa provision et s'enfuir au plus tôt, car la présence de cet homme l’effrayait un peu. Cependant le marchand était toujours très aimable avec sa jeune cliente.


Un matin, Marie fut fort surprise d'entendre un son inaccoutumé, malgré cela elle comprit que ce n’était personne d'autre que le marchand de mouron.

En effet, ce pauvre homme avait une extinction de voix et la remplaçait au moyen d'une crécelle; l'enfant fut affligée de le voir souffrant et obligé de travailler pour gagner le pain du jour.

Elle fit part de ses réflexions à sa mère, et lui dit:

«Maman, j'ai quelques sous dans ma bourse; si vous vouliez me le permettre, je lui achèterais un cache-nez avec lequel il aura plus chaud, sa voix reviendra, et cette horrible machine ne nous écorchera plus les oreilles.»

La permission accordée, Marie courut avec les vingt-huit sous qu'elle possédait, faire l'achat de ce précieux objet.

Elle revint toute joyeuse; il lui tardait de revoir le pauvre homme pour lui faire son présent. La mère souriante, était heureuse du bon cœur de sa chère enfant. Enfin, le moment arriva. Marie s'élançant dans la cour, et agitant le cache-nez, cria au marchand, du plus loin qu'elle l’aperçût:

«C’est pour vous!»Le marchand se confondit en remerciements.

Maintenant, vous mettrez de côté, n’est-ce pas, cette vilaine machine?

Oui, ma petite demoiselle, quand ma voix sera revenue.

Oh! je vais demander au Seigneur ce soir dans ma prière, qu’il vous guérisse, il le fera; mais il faut que vous le lui demandiez aussi vous-même dans votre prière.

OH! pour cela non, ma petite demoiselle, reprit I’homme avec frayeur. Je ne parle jamais à Dieu ni ne veux plus jamais l’entendre parler.

L'enfant, un peu étonnée de ces paroles, m répondit pas, mais Mme Bernard, qui n'avait rien perdu de la conversation, comprit qu'il avait quelque chose de particulier et se promit d'éclaircir ce mystère un jour ou l’autre.


Quelque temps après cet incident, Mme Bernard fit un paquet de différents vêtements et pria le marchand de venir chez elle le chercher. À cette occasion, la pieuse femme amena doucement la conversation sur le sujet qui réjouissait son cœur, elle lui parla du sacrifice de Jésus, lui montra ses péchés et le sang de la croix, et enfin le pressa de se réfugier sans retard en Jésus le Sauveur.

Tout en larmes, cet homme répondit:

«C'est bien beau, Madame, ce que vous dites là. Si c'est la vérité, comme vous le dites, je voudrais bien moi aussi aller au Ciel; mais, voyez-vous, jamais je n'oserai rien demandera Dieu à présent.»

Pressé de questions, il raconta à Mme Bernard ce qui suit:

L’année dernière, au mois de juillet, j’étais occupé à faire ma récolte de mouron, quand tout à coup survint un orage épouvantable, qui m'effraya d'autant plus que je ne savais où me réfugier: j’aperçus un pommier touffu, dont les branches touchaient à terre; ce fut pour moi l'affaire d’une seconde de profiter de ce faible abri. Peu à peu l'orage se dissipa, et je crus le moment favorable de quitter mon arbre pour mettre en ordre ma petite récolte.

Jamais je n'avais vu un orage aussi épouvantable.

À peine sorti de dessous l'arbre, je fus ébloui par un éclair, et assourdi par un formidable coup de tonnerre. Je me sentis paralysé. Ensuite, je ne puis vous dire ce qui se passa; quand je repris conscience de moi-même, le temps était beau et je constatai avec terreur que je pouvais à peine parler; j’étais là au milieu de la campagne, seul, anéanti et bien affligé; puis, étant un peu remis de ma frayeur, je me dirigeai lentement vers ma maison.

Mes voisins s'aperçurent bien vite de ma situation; ils m’entourèrent et me questionnèrent, mais ma pauvre langue était pesante, et à toutes les questions ma réponse fut la même: C'est le tonnerre! c'est le tonnerre!»

Si bien que le nom de Tonnerre m’est resté, et aujourd’hui encore, on ne me connaît que sous ce nom.

Ma plus proche voisine, la mère Leprêtre, me dit avec un ton très solennel:

«Mon voisin, c'est Dieu qui vous a parlé là; c'est comme cela qu'il nous parle à nous autres; et vous pouvez me croire, il faut vous préparer à mourir, c’est un avertissement.»

Depuis cette époque, je ne veux rien, mais absolument rien avoir à faire avec Dieu. Car vous comprenez, bien, Madame, que cette fois ce serait la folie. Mais si vous voulez le faire pour moi, alors c'est autre chose.

Je me souviens qu’autrefois ma pauvre mère me parlait de Dieu, et même elle m’avait appris à le prier; mais il y a bien longtemps de cela.» Puis Tonnerre resta pensif et rêveur.


Il fallut des mois entiers pour convaincre Tonnerre que Dieu est amour et que si nous voulons bien apprendre à le connaître dans sa Parole, nous pourrons nous réjouir et le recevoir dans notre cœur comme un puissant Sauveur. Peu à peu la vérité pénétra dans son âme et sa figure toute réjouie témoignait assez de sa paix intérieure.

Il devint infirme avec l'âge; sa bienfaitrice obtint pour lui l'entrée dans un asile de vieillards, où il termina sa vie en paix et dans la joie du salut.

Mme Lambert

La pioche et la truelle N° 59 (1897)


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