Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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UNE PRIÈRE EXAUCÉE


L'empereur Licinius persécutait les chrétiens d’Arménie.

Tout à coup, on apprend que quarante soldats appartenant à la légion chargée de mettre ses projets à exécution se sont déclarés chrétiens.

Comment punir une telle audace?

Le châtiment fut aussi terrible qu'extraordinaire; on les condamna à être exposés, nus, jusqu'à ce que mort s'ensuive, sur un étang gelé. Mais on leur fera grâce s'ils veulent renier Christ!

Pas un ne renie son Sauveur, les voilà à quarante sur le lac.

À la torture physique se joignit une tentation en apparence irrésistible: dans une maison, tout au bord du lac un grand feu avait été allumé, de la nourriture, du vin, un bain chaud, avaient été préparés (le tout bien exposé à la vue des martyrs), sous la direction de Sempronius, un centurion, accompagné d'une bande de soldats; puis on avait annoncé aux quarante que si l'un d’eux quittait l’étang et entrait dans la maison, il aurait droit à tout ce qu'elle offrait mais serait considéré comme ayant renié Christ.

Oh! quelle devait être attrayante cette maison, chaudement éclairée, là, à quelques pas des malheureux dont le vent glacial du Caucase mordait les chairs!

Or, du lac s’élevait toujours cette prière:

«Seigneur, quarante soldats se sont présentés pour combattre pour toi, permets que quarante martyrs reçoivent la couronne de la victoire!»


La nuit est venue, le froid est intense, les fidèles serviteurs du Christ attendent patiemment la mort. Les uns se tiennent debout, absorbés dans la prière, d’autres marchent, quelques-uns sont sur le point de s'endormir de ce sommeil qui ne finit qu'avec la mort, mais toujours, incessamment, tandis que les heures s'écoulent lentement, ils prient, et disent:

«Seigneur, quarante soldats se sont présentés pour combattre pour toi, permets que quarante martyrs reçoivent la couronne de la victoire!»

Et il arriva que comme le froid devenait encore plus vif, l'un d'eux ne put l'endurer davantage et, quittant ses frères, entra dans la maison où Sempronius et ses hommes montaient la garde.

Ils n'étaient plus quarante, cependant la prière des chrétiens n’avait pas changé:

«Seigneur, permets que quarante martyrs puissent recevoir la couronne de la victoire!»


ET LEUR PRIÈRE FUT EXAUCÉE.

Sempronius, le centurion, profondément touché de la constance, du courage de ses camarades, se déclare tout à coup chrétien, et, jetant bas manteau, casque, armure, il prend la place du renégat sur l’étang glacé.

Et quand le froid eut fait son œuvre et que les quarante corps se trouvèrent étendus sur la glace, quarante âmes glorieuses, et, parmi elles, celle de Sempronius, entrèrent en la présence de leur Roi.

Carus.

La pioche et la truelle N° 60 (1897)


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