Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA PIOCHE ET LA TRUELLE

----------

INCRÉDULITÉ

L’OEIL EST SOUVENT OBSCURCI PAR L'IGNORANCE ORGUEILLEUSE


Les manifestations de la puissance de Dieu s’imposent aux esprits non prévenus. «Les perfections divines éclatent à l’œil», disait le Psalmiste. Certaines gens n’en voient nulle part: il serait plus raisonnable d’en voir partout.

Je me rappelle avoir admiré longtemps dans ma toute jeunesse une gravure qui faisait l’enchantement de la famille; il est vrai qu’elle en valait la peine. C’était un arbre énorme planté au milieu d’une tombe sur laquelle on lisait:

«Concession perpétuelle. — Moi, X..., j’ai eu soin de me faire sceller dans mon tombeau, et il n’y a pas une puissance au monde qui puisse soulever la pierre de mon sépulcre.»

L’incrédule avait compté sans son maître, car par une ironie véritablement providentielle, une graine chassée par le vent était venue s’abattre dans les interstices du ciment; puis, sous l’effet de la pluie, probablement aussi du tassement des terres, y avait poussé sa petite racine. Cette radicelle, frêle et menue, s’était fortifiée de la rosée du ciel, et avait été chercher dans la profondeur du tombeau les entrailles du matérialiste, et alors, gorgée de la substance du bonhomme, avait acquis assez de vigueur pour déplacer la pierre; et maintenant, on vient voir de vingt lieues à la ronde ce tronc énorme qui prospère et se renforce tous les jours.


Y a-t-il rien de plus mystérieux que la vie latente dans la graine?

En fouillant sous les Pyramides les tombes des anciens Pharaons, des explorateurs découvrirent récemment parmi les ossements séculaires une sorte de menue poussière comme des grains de sable. Ils la recueillirent à tout hasard et la semèrent. Quelle ne fut pas leur surprise de la voir germer! C’étaient des grains de blé flétris, décolorés, racornis, contemporains peut-être de Joseph, le fils de Jacob, et en qui la vie était restée avec toute sa puissance.

Je ne passe jamais devant l’église Saint-Jacques sans regarder avec admiration un petit vernis du Japon (Toxicodendron vernicifluum, anciennement Rhus verniciflua), qui a bien deux mètres de haut, et qui est là, juché au-dessus du porche, narguant la sécheresse, les pieds dans la pierre, et se nourrissant, Dieu sait comment; toujours est-il qu’il ne manque point de vigueur. Car, bien qu’à cette époque de l’année la plupart des arbres de Paris aient perdu leur parure, il arbore fièrement un panache de feuilles luisantes de santé.

Tout à côté, dans la cour des Sourds-Muets, s’élève majestueusement, à la hauteur des tours Notre-Dame, un cotonnier gigantesque, qui est peut-être le plus bel arbre du pays, jusqu’aux grandes forêts de Compiègne et de Fontainebleau.

Quand les incrédules attestent à grand renfort de gosier qu’il sont enfin sauvés de la foi chrétienne, je ne puis m'empêcher de penser à l’âne de Balaam. Son maître le frappait à tour de bras pour le faire avancer, n'apercevant pas l’ange de l’Éternel qui barrait la route, une épée flamboyante à la main. L’oeil, obscurci par son ignorance orgueilleuse, le prophète ne voyait rien, et cependant l'ange était si visible que l’âne l’avait vu.

S. Vincent.

La pioche et la truelle N° 63 (1897)


Table des matières