LA PIOCHE ET LA TRUELLE

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JAMAIS TROP TARD

La veille du jour où nous devions quitter le village d’A.... que nous avions habité jusqu’alors, je voulus faire encore une tournée dans les environs,pour prendre congé des pauvres de ma connaissance. Je rencontrais sur mon chemin une jeune fille, qui accourut jusqu'à moi et me dit avec émotion :

« Ô Madame, je suis presque étrangère ici ; mais je connais votre sollicitude pour les âmes des pauvres pécheurs.

Mon frère est mourant. Hélas ! IL NE CONNAÎT PAS DIEU ; jamais il n’est entré dans une église ! C’est un impie ! Nous habitons à quelque distance du village. Oh! venez avec moi, je vous en supplie, et parlez-lui. »

Quoique je n’eusse que fort peu de temps à moi, je ne pus résister à un pareil appel. J’accompagnai la jeune fille dans sa misérable demeure et la suivis au chevet du pécheur mourant. Elle écouta alors si son frère respirait encore ; elle souleva sa main, qui retomba sans vie.

« Hélas! dit- elle, il est trop tard !... il n’a plus de connaissance. Excusez-moi, madame, de vous avoir donné la peine de venir inutilement jusqu’ici. »

«II respire encore », répondis-je,« Rien n’est difficile à Dieu : nous lui parlerons. La connaissance de ta parole, ô mon Dieu ! donne la vie !

Même à la onzième heure, nous annoncerons à ce malade le message du salut, et nous demanderons à l'Esprit Saintde l'appliquer à son coeur. »

Je m’approchai alors de l’oreille du pauvre mourant, et je lui répétai doucement et lentement les passages qui suivent :

- Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu. (Rom., III, 22.)

- Le péché est la transgression de la loi. (1 Jean, III, 4.)

- Quiconque aura observé toute la loi, s'il vient à pécher dans un seul commandement, est coupable comme s’il les avait tous violés. (Jacq., II, 10.)

- Le coeur est trompeur par-dessus toutes choses et désespérément malin. (Jér., XVII, 9.)

- A moins que vous ne vous couvertissiez et que vous ne deveniez comme de petits enfants, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux. (Matt , XVIII, 3.)

- Si un homme ne naît de nouveau, il ne pourra voir le royaume de Dieu. (Jean. III, 3)

- Détournez- vous, détournez-vous de votre méchant train; et pourquoi mourriez-vous, ô maison d'Israël ? (Ez.., XXXIII. 11.)

Après avoir achevé de lire ces sérieuses paroles, je commençai à répandre sur les plaies de son âme le baume de la bonne Nouvelle du salut et du pardon par Christ.

- Ô vous qui êtes altérés, venez aux eaux! et vous qui n'avez point d'argent, venez, achetez et mangez; venez, dis-je.,achetez, sans argent et sans aucun prix, du vin et du lait. (Esaïe, LV, 1.)

- Venez maintenant, dit l'Eternel, et débattons nos droits; quand vos péchés seraient comme le cramoisi, ils seront blanchis comme la neige, et quand ils seraient rouges comme le vermillon, ils deviendront blancs comme la laine. (Esaïe, I, 18.)

- Je vous donnerai un coeur nouveau et je mettrai en vous un esprit nouveau, et j'oterai le coeur de pierre et je vous donnerai un coeur de chair. (Ez. XXXVI, 26.)

- Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. (Jean, III, 16.)

- Le sang de Jésus-Christ, son Fils, nous purifie de tout péché. (1 Jean I, 7.)

- Regardez vers moi et soyez sauvés. (Esaïe, XLV, 22.)

- Puisque nous avons, par le sang de Jésus, la liberté d'entrer dans les lieux saints, allons avec confiance ou trône de la grâce, afin d’obtenir miséricorde et de trouver grâce pour être secourus dans le temps convenable. (Héb , X, 19.)

- Car vous êtes sauvés par grâce, par la foi, et cela ne vient point de vous ; c'est un don de Dieu. (Eph., II, 8.)

- Si vous qui êtes mauvais, savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père céleste donnera-t-il son Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent. (Luc XI, 13.)

- Demandez et il vous sera donné; cherchez, et vous trouverez; heurtez, et il vous sera ouvert. (Luc, XI, 9.)

Quand j’eus finis ma lecture, je me mis à genoux et je demandai à Dieu avec ardeur de répandre sur sa puissante et consolante Parole la rosée vivifiante de son Esprit. Puis je pris congé de la jeune fille, en lui recommandant de me faire chercher aussitôt si d’ici au lendemain matin son frère reprenait quelque connaissance. Je ne reçus aucun message, et le lendemain je partis...

Peu à peu, par un effet naturel du changement de lieux et de circonstance, l’affliction de la jeune fille, l'état terrible où j’avais vu son pauvre frère ; en un mot, cette scène si touchante et si sérieuse à la fois cessa de se représenter à mon souvenir.

Mais notre Dieu a dit: Ma Parole ne retournera point a moi sans effet. (Esaie, LV, 11.)

Environ huit ans après notre établissement à H..., le domestique vint un jour au salon m’avertir qu’un homme désirait me voir. Je fis introduire l’étranger, qui me dit aussitôt avec la plus vive émotion et les yeux remplis de larmes :

« O Madame ! comment pourrai-je vous exprimer toute ma reconnaissance?... Je suis celui que vous visitâtes à A... , il y a huit ans.

Alors je ne pouvais faire aucun mouvement, je ne pouvais prononcer une parole , mais j’entendis toutes celles que vous lûtes dans le livre précieux et béni, et il plut alors à ce Dieu,dont le nom est amour, de faire que sa Parole devint pour mon âme « odeur de vie ».

J'ai reçu Jésus-Christ pour mon Rédempteur, et il m’a rendu capable de continuer mon pèlerinage terrestre avec joie. Ce n’est pas sans bien des recherches, Madame, que je suis parvenu a découvrir votre demeure, afin d'avoir la douce joie de vous raconter tout ce que notre Dieu a fait pour moi. »

Lecteurs, êtes-vous appelés à visiter un malade, un mourant qui est encore mort dans ses fautes et dans son péché?

Ne dites jamais: Il est trop tard pour lui annoncer le message de la grâce.

Même quand il vous semble que vos paroles ne peuvent arriver jusqu’à lui, essayez toujours ; l’Esprit de Dieu est puissant pour leur frayer un chemin inaperçu jusqu'à l'âme du malade.

La pioche et la truelle N° 35 (1891?)