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(La Bible: 1Thessaloniciens 5:21)

 MARS

 

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1 MARS.

 

Nul ne vient au Père que par moi. (Jean XIV, 42.)

 

Comment l'homme vient-il ordinairement à Dieu? Par ses opinions, ses rêveries, ou par des prières qui sortent de son esprit naturel et qui se perdent dans le vague? De tels rapports avec Dieu ne font pas avancer l'âme de la largeur d'un cheveu. Mais dès que la personne de Jésus-Christ prend vie dans le coeur et dans la prière, tout change. Lui-même a dit : Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père; moi et mon Père nous ne sommes qu'un; celui qui m'a vu a vu mon Père. La connaissance et la communion de Jésus-Christ est une clef qui nous ouvre le sanctuaire de Dieu et qui nous fait trouver en lui un Père. Ceux qui ne veulent pas du Médiateur resteront éternellement séparés de Dieu, car quiconque nie le Fils n'a point le Père; mats celui qui confesse le Fils a aussi le Père. Demandez à un homme qui a trouvé le Sauveur quelle action Dieu exerçait sur lui avant ce renouvellement. Il vous avouera qu'il avait une religion sans fondement, une prière sans garantie, un coeur sans paix. La connaissance de Jésus-Christ nous donne accès auprès de Dieu, dans un esprit nouveau, qui nous apprend à l'appeler Abba, c'est-à-dire Père. La confiance pleine et parfaite qu'on a de trouver Dieu quand on le cherche, de marcher avec lui et d'être exaucé de lui pour l'amour de Jésus-Christ, donne à la vie une éternelle fermeté et à l'âme le droit de dire : 0 Dieu, tu es mon Dieu!

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2 MARS.

 

Souviens-toi que Jésus-Christ, qui est de la race de David, est ressuscité des morts selon mon évangile. (2 Tim. II, 8.)

 

Nos souvenirs peuvent nous faire beaucoup de bien ou beaucoup de mal. Si vous avez derrière vous de grandes humiliations, de grands combats ou de grandes épreuves, ce sont des souvenirs bien efficaces pour vous jeter entre les bras de Dieu. De même, si dans votre vie passée vous avez rencontré des secours miraculeux, des délivrances, des exaucements remarquables, des grâces qui changèrent votre vie, c'est encore un bonheur de repasser de tels souvenirs. Mais il y a aussi des souvenirs qui rongent, qui énervent et qui jettent dans cette tristesse qui donne la mort et dans laquelle Dieu n'entre pour rien. Tels sont les souvenirs d'une ancienne prospérité qu'on regrette, d'un être qu'on a perdu et qu'on ne peut oublier, d'une vieille offense qu'on ne peut pardonner, d'une espérance longtemps chérie et qui a été trompée. En nous nourrissant de semblables souvenirs, nous ruinons notre repos, et nous empirons au lieu de prospérer pour Dieu. Saint Paul indique ici le souvenir le plus précieux et le plus puissant pour quiconque est né de Dieu. c'est celui de la résurrection de Jésus-Christ. Ce souvenir était l'arme victorieuse des apôtres, et si le Saint-Esprit le vivifie dans notre propre âme, il nous montrera notre propre personne comprise dans celle du Sauveur. Nous verrons en lui un homme de notre race, glorifié et triomphant, et cet homme, c'est nous. Sachant cela, nous plaindrons-nous encore quand nous serons affligés et misérables? Non, car nous sentirons que notre cause est gagnée, que notre sépulcre est ouvert, et qu'un héritage qui ne se peut corrompre, ni souiller, ni flétrir, brille à nos yeux. Parce que je vis, dit Jésus-Christ, vous vivrez; souvenez-vous, une fois pour toujours, que Dieu nous a ressuscités ensemble avec Christ, et qu'il nous a fait asseoir ensemble avec lui dans les lieux célestes. Mais qui sont ceux qui peuvent jouir de ce triomphe? Ce sont les coeurs aimants, gagnés, qui ne vivent plus pour eux-mêmes.

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3 MARS.

 

Avec toi je me jetterai sur toute une bande, et avec mon Dieu je franchirai la muraille. (Ps. XVIII. 29.)

 

Il y a une assurance qui est de l'effronterie; il y en a une autre qui est de la foi. On rencontre des hommes qui ont une imperturbable sécurité là où d'autres trembleraient, qu'il s'agisse d'un général d'armée ou d'un danseur de corde, n'importe; l'assurance qu'ils montrent vient de la chair et du sang, et non de la foi chrétienne. L'amour-propre, l'espérance de la gloire, la présence d'esprit seulement, peuvent donner des forces inouïes, mais ce qu'ils ne donnent jamais, c'est la paix. Il faut avoir été justifié par la foi en Christ pour avoir la paix avec Dieu. Dans le règne de Dieu, ce sont les faibles qui sont les forts; ceux dont le corps est amorti remportent les promesses. David dit quelque part : Je suis un ver, et non un homme; et c'est le même David qui ailleurs parle de se jeter sur toute une bande et de franchir la muraille. Grâces à Dieu, dit saint Paul, qui nous fait toujours triompher en Christ! Seulement, attendez que les bandes arrivent et que les murailles vous barrent le chemin. En allant au-devant du danger, en jouant au martyr, en ne demeurant point, en un mot, dans la vocation dans laquelle on a été appelé, on peut faire de cruelles chutes. La voie de l'Éternel est la force de l'homme intègre; mais il faut que ce soit la voie de l'Éternel. Il y a, vous le savez, des voies qui semblent droites, et dont l'issue est pourtant la mort. Assurez-vous d'abord que c'est Dieu qui vous a mis dans la position où vous êtes ; puis, certain de cela, y eut-il des lions ou des aspics sous vos pas, marchez à enseignes déployées au nom de votre Dieu. Vous serez plus que vainqueur par Celui qui vous a aimé.

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4 MARS.

 

Je rends Grâces à mon Dieu, toutes les fois que je me souviens de vous, priant toujours pour vous tous avec joie, dans toutes les prières que je fais. (Phil. I, 3, 4.)

 

La meilleure manière de sortir de nous-mêmes, c'est de prier pour les autres. On comprend difficilement comment saint Paul trouvait du temps pour cette sainte occupation, mais quand nous l'entendons dire dans toutes ses Épîtres qu'il priait de jour et même de nuit pour les Églises et pour ses amis, nous pouvons être sûrs que cette assertion n'est pas une phrase seulement, mais une vérité. N'attendons pas d'avoir du temps pour faire de même. Les meilleurs moments pour nous occuper des autres devant Dieu sont ceux où nous avons l'esprit traversé par une foule d'intérêts personnels. On ne sait alors ni par où commencer, ni par où finir pour soi-même. Au lieu de prier pour soi, on rêve à soi, ce qui n'est pas la même chose. Coupons court alors à nos soucis et à ce monde changeant qui nous fatigue, et occupons-nous de quelque âme qui nous soit chère ; allons de celle-ci à celle-là, puis à une troisième, et quand nous aurons fait cette tournée spirituelle, nous aurons plus reçu pour nous-mêmes que si nous avions plaidé notre propre cause. Saint Paul rend grâces à son Dieu, toutes les fois qu'il se souvient dans ses prières de ceux qui lui sont chers. La paix que nous demandons pour les autres, quels qu'ils soient, reflue sur nous; mais réfléchir à eux ne suffit pas, il faut les présenter à Dieu. La paix ne vient pas de nos réflexions, elle vient de la prière.

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5 MARS.

 

Mes iniquités ont surpassé ma tête et sont comme un pesant fardeau; elles sont plus pesantes que je ne puis les porter. (Ps. XXXVIII, 4.)

 

L'accablement des soucis n'est rien à côté de l'accablement du péché. Ayez dix soucis plutôt que de vous laisser aller à un seul péché. Si le souvenir de nos péchés nous saisit, il devient un fardeau plus pesant que nous ne pouvons le porter. Quand le Psalmiste crie des lieux profonds, il n'en sort pas facilement. On voit alors ce qu'est une âme quand elle est sous la main de Dieu. Nous marchons au milieu de gens qui rient, qui dansent, qui s'adonnent au train des plaisirs de ce monde, et qui pensent plutôt aux habitants de la lune qu'à leurs péchés. Cette vie continue jusqu'à ce que la conscience se réveille enfin. Alors Dieu rail cesser la voix de joie et la voix d'allégresse, la voix de l'époux et la voix de l'épouse, le bruit des meules et la lumière des lampes. N'attendons point jusqu'à ce moment. Faisons une bonne paix avec Dieu, avant que le jugement roule comme de Veau, et la justice comme un torrent impétueux. Tout péché est un oeuf d'aspic; celui qui en mangera mourra, et si on l'écrase il en sortira un aspic.

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6 MARS.

 

Vous n'avez pas encore résisté jusqu'au sang en combattant contre le péché. (Hébr. XII, 4 )

 

Combattre n'est pas du goût de tout le monde ; résister jusqu'au sang, encore moins. On aime mieux promettre que de combattre, mais l'enfer, comme nous savons, est pavé de bonnes résolutions. Qu'est-ce que résister jusqu'au sang ? C'est faire une guerre à mort aux convoitises qui séduisent, et ne pas attendre que le péché ait éclaté pour le combattre. Quand vous n'êtes qu'attiré et amorcé, tirez vivement l'épée, car après que la convoitise a conçu, elle enfante le péché et le péché étant consommé engendre la mort. Il y a trois mauvaises manières de combattre. Les uns combattent trop tard et ne luttent pas contre les petits commencements du mal. D'autres ne combattent pas contre tous leurs ennemis. Tolérer un seul mauvais penchant, c'est se perdre : l'exemple de Judas nous l'enseigne. D'autres enfin combattent avec des armes charnelles; ils n'ont pas recours à ces armes qui sont puissantes par la vertu de Dieu, pour renverser les forteresses. Il est facile de voir quand un chrétien est bon soldat de Jésus-Christ. Une vie religieuse, qui est dominée par la vigilance et par la prière, a un caractère de force et de santé. Au contraire, celui qui craint de faire mal à sa chair a quelque chose de mort et d'indolent, il n'inspire guère de confiance. Ne gardez point ce qui vous affaiblit et vous mine. Laissez venir le Seigneur avec l'épée, il vous affranchira, il vous frayera le chemin de la paix.

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7 MARS.

 

Il mit autour de lui les ténèbres pour sa retraite, comme une tente. (Pis. XVIII, 11.)

 

Chaque fois qu'il fait noir autour de nous, disons-nous : le Seigneur a une intention. Il veut d'abord que nous ayons confiance. Que celui qui marche dans les ténèbres et qui n'a point de lumière ait sa confiance au nom de l'Éternel, et qu'il s'appuie sur son Dieu. Cela seul est déjà une bénédiction. La confiance rend calme et ferme; l'agitation fatigue et ne change rien.

Avançons les yeux fermés et laissons-nous conduire, sans rien craindre des circonstances. Celui qui me suit, dit Jésus-Christ, aura la lumière de la vie. Le Seigneur éclaircit tout et fait tout concourir au bien de ceux qu'il aime. Quand les ténèbres seront devenues lumière, nous verrons encore mieux les intentions d'amour du Seigneur à notre égard. Nous sentirons que les voies particulières par lesquelles nous avons été conduits nous ont préservés de bien des dangers qui nous auraient enlacés dans une position plus calme et plus selon notre goût. Il vaut mieux entrer dans les ténèbres que le Seigneur met autour de lui pour sa retraite, que de suivre les combinaisons de notre propre sagesse et de notre propre volonté. Les ténèbres qui en résultent ne mènent point à la lumière, elles endurcissent le coeur au lieu de l'affermir par la foi.

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8 MARS.

 

Le règne de Dieu consiste, non en paroles, mais en vertu. (1 Cor. IV, 20.)

 

Combien il y a de bavardages chrétiens parmi les chrétiens 1 Quel fruit retirent les autres de ce flux de paroles? Apportent-elles avec elles l'édification? Elles la chassent plutôt. Ce ne sont point des discoureurs que le Seigneur demande, ce sont des disciples qui abondent en force et en vertu. C'est du coeur, c'est de l'homme caché que vient la force ou la faiblesse. Si le Seigneur a restauré votre âme, que de l'abondance du coeur votre bouche parle. Mais bien des chrétiens, au lieu d'apporter les eaux vives de la grâce, viennent avec leur propre fonds. Ils ont des phrases, des tirades de mots, une loquacité qui s'efforce de dissimuler la pauvreté de la réalité. La plaie d'un tel christianisme vient de l'absence de la prière. Le flux de paroles vient toujours de l'esprit de dissipation, qui lui-même vient de la mauvaise manière de prier. On ne s'est pas installé près du Seigneur; on regarde à droite et à gauche. Ce qui doit dominer la vie glisse sur le coeur et sur la conscience. Le vrai recueillement est un rare trésor. Et qu'est-ce que la vie ou l'activité chrétienne, si les forces que l'on doit montrer sortent de l'antichambre du monde et non du sanctuaire du Tout-Puissant ? Recherchons des démonstrations d'esprit et de puissance. Quand le Seigneur régnera sur nous, nous pourrons parler de son règne et y travailler.

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9 MARS.

 

Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux, (Matth. V, 3.)

 

La première disposition que le Seigneur réclame de, ses disciples, c'est la pauvreté en esprit. L'homme ordinaire est plein de lui-même. L'un est préoccupé de sa figure, l'autre de sa naissance; un autre, de son crédit, de ses succès, de son honnêteté peut-être, ou de son christianisme. Videz, si vous le pouvez, un coeur ainsi rempli de lui-même. Le Seigneur le peut. Il envoie son Esprit, et il donne à ce coeur mal rassasié faim et soif d'autre chose. Quand le vide des choses humaines commence à se faire sentir dans notre existence, le royaume des cieux s'approche. Le vide des choses qui sont hors de nous nous amène à sentir notre propre néant. Examinons-nous dans celle de nos heures que nous jugeons la meilleure, et nous serons effrayés de la vanité de notre coeur. Or, tout nous échappe quand notre coeur nous échappe. N'ayant plus de fondement sur lequel nous appuyer, nous sommes heureux de trouver le seul qui ait été posé et qui est Jésus-Christ. Allons à lui comme des pauvres. Dans cette pauvreté il y a déjà quelque chose d'heureux. C'est le sentiment du dénuement qui attire vers le Seigneur; ce sont aussi les pauvres en esprit qui peuvent prier, qui peuvent aimer. Que sera-ce quand nous serons amenés jusqu'à croire que le royaume des cieux est à nous? Ne craignons pas d'élargir ce vide que nous ne pouvons remplir nous-mêmes, mais qu'un monde nouveau remplira. Ce sont des choses que l'oeil n'avait point vues, que l'oreille n'avait point entendues, et qui n'étaient point venues à l'esprit de l'homme, mais que Dieu ,avait préparées à ceux qui l'aiment.

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10 MARS.

 

C'est lui qui est notre paix. (Éphés. II, 14.)

 

Pourquoi y a-t-il tant de chrétiens qui n'ont point de vraie paix? Il faut aller jusqu'aux sources de la vie pour en trouver la cause. Laissons de côté les gens du monde dans la vanité de la vie. Il est clair que la vanité ne peut donner la paix. Ne parlons pas non plus de ces chrétiens d'église qui n'ont pour fondement que leurs pratiques mortes. La routine ne donne pas plus de paix que la vanité. Parlons de ceux qui sont vraiment réveillés. Pourquoi tant de chrétiens, en qui il y a certainement un travail de Dieu, n'ont-ils pourtant point de paix? La raison en est, pour quelques-uns, qu'ils sèment encore parmi les épines. Ils sont ébranlés, mais ils ne peuvent pas se résoudre à rompre avec quelque péché particulier, ni à se détacher de telle ou telle idole; c'est leur coeur partage qui leur ôte la paix. D'autres veulent tirer la paix de leur propre fonds; ils font un singulier mélange de foi et de propre justice; le mystère de la grâce leur est encore voilé. D'autres encore se fondent sur la paix qu'ils ont une fois sentie, mais qui présentement leur échappe ; ils s'appuient sur ce qu'ils éprouvent, et parce qu'ils n'éprouvent plus rien, ils ne croient plus à rien. D'autres enfin font dépendre leur paix du degré de leur sanctification : quand ils voient qu'ils n'avancent pas, ou, quand ils en voient d'autres qui les dépassent, ils s'attristent, ,et cette tristesse leur ôte la paix. Nous voudrions graver dans le coeur de toutes ces personnes la parole de l'Apôtre : C'est lui qui est notre paix. Notre paix n'est pas premièrement un état, elle est premièrement une personne. C'est Jésus-Christ, c'est son corps crucifié qui est notre paix. Cherchez votre paix sur la croix, et personne ne vous la prendra. C'est le grand fait du Calvaire qui est le contenu et la proclamation de votre paix. Ce qui vient de nous ne peut jamais nous servir de fondement, car personne ne peut poser d'autre fondement que celui qui a été posé, et qui est Jésus-Christ. Une fois fondé sur le Rocher des siècles, nous ne regardons plus à notre nature; elle nous crée tous les jours des embarras, mais c'est pour ces embarras mêmes que Jésus-Christ est venu, afin qu'une fois pour toujours nous regardions à lui, à son sang, à sa justice, à sa parole et à ses promesses; c'est là le Jésus-Christ qui demeure éternellement, et c'est lui qui est notre paix.

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11 MARS.

 

Je puis tout par Christ qui me fortifie. (Phil. IV, 13.)

 

Faisons d'abord l'expérience que hors de Jésus-Christ nous ne pouvons rien faire, et cette expérience nous conduira à celle-ci : c'est que nous pouvons tout par, Christ, s'il nous fortifie. Ne mesurons jamais notre propre faiblesse, quand nous sommes en présence d'un sacrifice que Dieu nous demande, on d'un combat que nous avons à soutenir. Les forces que Dieu a réparties dans la nature, ne sont qu'une faible image de l'infinie grandeur de la puissance de Dieu envers ceux qui croient. Au moment où nos propres forces nous échapperont, Dieu interviendra. Laissons arriver ce moment, et la force d'en haut s'accomplira dans notre faiblesse. Tout ce qui s'est fait de grand dans le monde chrétien, s'est accompli dans un état de pauvreté et de misère. Il y a des chrétiens qui n'ont pas un jour de santé, d'autres qui sont d'un caractère timide, d'autres qui croient toujours qu'ils rétrogradent, et c'est d'eux que le Seigneur se sert de préférence pour accomplir ses desseins. Je ne vous laisserai point orphelins, a-t-il dit, je viendrai à vous; et il tient parole. Ne nous mettons point en souci des difficultés qui nous entourent; donnons à nos rapports avec le Seigneur plus de clarté et de développement, et nous pourrons tout par Celui qui nous fortifie.

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12 MARS.

 

Soyez toujours joyeux. (1 Thess. V, 16.)

 

La joie chrétienne a un côté intérieur et un côté extérieur. Elfe n'est pas toujours un bonheur qui rayonne au dehors, elle est plus souvent un bon dépôt que le Saint-Esprit surveille et que personne n'aperçoit. Il peut même arriver que nous n'ayons pas conscience de ce dépôt, que nous ne sentions rien de la joie de l'Évangile, mais le fond de notre âme n'en est pas moins un fond de joie. La possession du salut est aussi la possession de la joie, et comme notre salut est un salut éternel, il n'est pas étonnant que saint Paul dise : Soyez toujours joyeux. Il faut souvent qu'on nous rappelle que nous devons être des enfants joyeux. Il y a tant de choses qui nous empêchent de croire à notre propre bonheur! Mais de même que les heureux du monde sont plus tristes qu'ils ne le savent, les affligés de Dieu sont plus joyeux qu'ils ne le croient. Les joies mondaines ont toutes quelque chose de creux et d'inquiétant; les tribulations chrétiennes, tout amères qu'elles paraissent, n'en sont pas moins tempérées par un élément céleste qui est la joie. Laissez venir les grands moments, ceux où le monde entier pèse sur vous, et vous sentirez que vous avez vaincu le monde; si pourtant l'Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts, habite en vous.

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13 MARS.

 

Il m'a serré dans son carquois. (Esaïe XLIX, 2.)

 

Le corps vit de mouvement et de repos, l'âme aussi. Dieu seul connaît la juste mesure d'activité et de repos nécessaire pour tempérer la vie chrétienne. Ce mélange, Dieu ne le fait pas toujours selon nos désirs. Les uns voudraient du repos, et il leur survient du trouble; d'autres voudraient s'élancer dans un beau champ d'activité, et Dieu les tient serrés dans son carquois. Ce sont des flèches qui voleront plus tard, quand l'heure de l'Eternel sera venue. Souvent aussi, quand ces flèches ont déjà volé, le Seigneur les reprend et les remet dans son carquois. Il y a des serviteurs de Dieu qui voudraient continuer un ministère béni, et qui sont forcés de se retirer dans quelque coin tranquille et de renoncer à leur activité. Pourquoi? Voici, dit l'Eternel, je l'attirerai, après que je l'aurai fait aller dans le désert, et je parlerai selon son coeur. Dieu n'a pas besoin de nous; il reprend souvent brusquement ceux qui nous semblent les instruments les plus nécessaires. Il les attire dans une atmosphère de silence, et ils n'y perdent rien, si ]'Eternel leur parle selon son coeur. Le règne de Dieu n'y perd rien non plus. Nous donnons si volontiers la gloire aux hommes, qu'il faut que le Seigneur nous enseigne par des faits que c'est lui qui paît ses brebis et qui les fait reposer. Si nous voyions partout des serviteurs éminents à qui Dieu multipliât les années et les bénédictions, nous trouverions tout naturel l'avancement du règne de Dieu. Mais dans ce règne tout est grâce, tout est miracle. Dieu lance en bon nombre des flèches qui semblent manquer leur but, tandis que les vraies flèches, il les tient serrées dans son carquois. Quand nous aurons d'autres yeux, nous jugerons autrement; en attendant, adorons et croyons que Dieu fait tout ici-bas pour sa gloire.

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14 MARS.

 

On donnera à celui qui a déjà, et il aura encore davantage; mais pour celui qui n'a pas, on lui ôtera même ce qu'il a. (Matth. XIII, 12.)

 

L'exercice, comme on dit, fait le maître. Une charrue qu'on n'emploie pas se rouille; celle qui trace de profonds sillons devient luisante comme un miroir. Il en est de même des dons, des occasions, de toutes les grâces de Dieu. Soyons fidèles dans l'emploi des talents qu'il nous confie, et ils se multiplieront; l'incurie, au contraire, nous fait perdre le peu d'habileté que nous avons. S'il y a des millionnaires qui ont commencé par un petit commerce, et des fortunes colossales qui se sont fondues entre les mains de leurs possesseurs, il y a de même des emplois obscurs qui sont devenus une source de bénédictions, et des champs de travail magnifiques qui se sont couverts de ronces et d'épines, selon ceux qui y travaillaient. Ne regardons pas aux choses, ne regardons qu'à l'esprit qui nous anime. Suivons cette règle d'or : Quoi que vous fassiez, faites tout de bon coeur, comme pour le Seigneur et non pour les hommes. Travailler ainsi, c'est s'édifier soi-même, et c'est être en édification aux autres. Dieu fait croître le froment, après qu'il l'a ainsi préparé. Au lieu du buisson, croît le sapin, et au lieu de l'épine, croît le myrte. Mais le souhait du paresseux le tue, parce que ses mains refusent de travailler. Où sera le corps mort, les aigles s'y assembleront.

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15 MARS.

 

Soyez remplis de la connaissance de sa volonté , avec toute la sagesse et toute l'intelligence spirituelle. (Col. 1, 9.)

 

La force du chrétien est dans la connaissance de la volonté de Dieu, mais comment faire pour la connaître?' Il faut distinguer les cas ordinaires des cas extraordinaires. L'homme du monde croit, en suivant ses propres impulsions, avoir toute la sagesse et toute l'intelligence spirituelle nécessaires. Mais quand Dieu lui ouvre les yeux, et qu'avec cette lumière nouvelle ce même homme considère son passé, il s'écrie : Oh! qu'alors j'étais abruti! Je n'avais aucune connaissance; j'étais devant Dieu comme les bêtes. Désormais ce sera d'une autre manière qu'il sera rempli de la connaissance de la volonté de Dieu. Il renoncera à sa propre sagesse, et suivra cette Parole qui est une lampe à nos pieds et une lumière dans nos sentiers. Si, sur quelque point, il lui reste quelque obscurité, il se rappelle que Dieu a promis que si quelqu'un manque de sagesse, il doit la demander à Dieu, qui la donne à tous libéralement, sans rien reprocher; et elle lui sera donnée. Après cela, je vous accorde qu'il y a des. cas extraordinaires, où il n'est pas si facile d'être mis au clair sur la volonté de Dieu. Il y a des perplexités de position, des situations délicates où l'on craint de se déterminer soi-même, et où le pour et le contre sont également embarrassants. Que faire alors ? Consulter le sort? Ce doit être la dernière ressource d'un enfant de Dieu. Ce moyen rentre dans la défense : Il ne se trouvera personne parmi toi ni qui soit devin et qui se mêle de deviner, ni pronostiqueur de temps, ni aucun qui fasse des prédictions, ni qui fasse des prestiges. Le meilleur moyen de sortir d'embarras, c'est de céder à la force des circonstances. Si nous sommes jetés hors d'une position, sans qu'il y ait de notre faute, ou forcés de prendre une résolution à laquelle nous n'aurions point pensé en dehors de la nécessité, prenons cela pour la volonté de Dieu. Rarement nous nous tromperons. Mais s'il y a devant nous deux portes ouvertes et que nous ayons la liberté du choix, attendons; ne faisons rien avec précipitation; différons de nous prononcer aussi longtemps que nous pourrons. Dans le doute, dit-on, abstiens-toi. Cependant, continuons à prier et à mettre fidèlement notre volonté aux pieds du Seigneur. Peut-être que la force des circonstances, qui ne nous pressait point d'abord, se manifestera enfin. Le Seigneur peut aussi, pendant que durent ces combats et ces prières, nous donner les clartés directes ou la joie qui nous manquait. Notre voie se trouvera ainsi tracée. Il nous a promis de nous rendre intelligents, de nous enseigner le chemin par lequel nous devons marcher, de nous y guider lui-même. La lumière se lève souvent dans les ténèbres pour ceux qui sont droits de coeur.

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16 MARS.

 

J'ai appris à être content de l'état où je me trouve. (Phil. IV, 11.)

 

C'est bien ici un des signes les plus sûrs d'une bonne conversion. Si le coeur est gagné, il reçoit aussi de la plénitude du Seigneur grâce sur grâce. Saint Paul, en possession par la foi des richesses incompréhensibles de Christ, se plaisait dans la faiblesse, dans les opprobres, dans les misères, dans les persécutions, dans les afflictions extrêmes pour Christ. Le Seigneur peut entrer dans tous ces états, et faire que, malgré eux, notre possession nous soit échue dans des lieux agréables. Si la position dans laquelle nous nous trouvons est celle où le Seigneur nous a mis, et que nous n'ayons point de signe certain qu'il veuille nous en faire sortir, n'en cherchons point d'autre. On paye souvent bien cher, quand on l'a obtenu, ce qu'on veut avoir avec passion. Au lieu d'améliorer notre sort de cette manière, nous le rendons quelquefois plus insupportable ou plus dangereux pour notre âme. Si nous devenons plus malheureux, nous sommes obligés de nous dire que nous avons été les artisans de notre malheur; si nous nous endormons dans un faux bonheur, c'est un véritable jugement de Dieu, puisqu'il ne peut durer que jusqu'au moment où les écailles tomberont de nos yeux. Dieu connaît mieux que nous les situations qui nous conviennent. Notre bonheur ne dépend pas d'un changement d'état, mais d'un changement d'esprit; dites-vous que la terre est partout la terre, et que notre pauvre coeur nous suivra partout. Entrez dans les votes du Seigneur, elles sont droites; les justes y marcheront, mais les rebelles y tomberont.

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17 MARS.

 

Vous demandez, et vous ne recevez point. parce que vous demandez mal. (Jacq. IV, 3.)

 

Dieu seul lit au fond de la prière. Les exaucements dépendent toujours de nos rapports habituels avec lui. On ne peut point prier d'une manière et vivre de l'autre ce qui nous prive presque toujours des grâces de Dieu, c'est notre duplicité. Il n'y a que deux directions de vie possibles : l'une est celle de l'égoïsme, l'autre est celle de l'abandon filial à Dieu. Si vous demandez dans un esprit opiniâtre et, comme dit saint Jacques, dans la vue de fournir à vos voluptés, vous ne recevez rien, car vous êtes alors l'enfant à qui son père ne veut donner ni pierre ni serpent. Dieu ne veut pas que nous changions ses grâces en dissolution, et c'est dans notre propre intérêt qu'il ne nous exauce point. Mais si notre âme sait entrer dans la volonté du Seigneur, et que nous demandions dans un esprit d'humilité, nous ne recevrons pas toujours ce que nous demandions, mais quelque chose de mieux. Dieu exauce souvent l'intention et le fond, quoiqu'il n'exauce pas toujours les paroles. Le but final de toute prière chrétienne est la glorification du nom de Dieu et l'avancement de son règne. Notre propre cause gagne avec celle de Dieu, tandis que nos intérêts propres, si nous les détachons des intérêts de Dieu, ne concourent qu'à notre perte. Notre âme, bien fondée dans la foi en Jésus-Christ, est toujours unie à la personne du Sauveur et se présente ainsi devant Dieu. Dans cette attitude, on a toujours une confiance pleine et parfaite, car Dieu ne peut rien refuser à son Fils, et notre prière a une garantie que ne donne aucune autre manière de prier.

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18 MARS.

 

Je sais que tu es revêche et que ton cou est comme une barre de fer, et que tu as un front d'airain. (Esaïe XLVIII, 4.)

 

La disposition revêche du peuple d'Israël n'était en grand que ce que le coeur déchu est en petit. Même dans la vie chrétienne, ce qui fait souffrir le plus, c'est la dureté du coeur. On veut le briser, et l'on ne peut pas; on veut se donner de la contrition, et c'est en vain qu'on frappe le rocher, l'eau n'en découle point. Il est plus facile de donner ce qu'on a que ce qu'on est. Le brisement du coeur exige une force plus puissante que notre force naturelle. Quoi qu'il en soit, combattons toujours, et montrons au Seigneur ce coeur de pierre qui nous fait souffrir. Je vous donnerai un nouveau coeur, a-t-il dit, et je mettrai en vous un esprit nouveau; j'ôterai le coeur de pierre de votre chair, et je vous donnerai un coeur de chair. Il y a dans la grâce du Seigneur une force toute-puissante, mais cette grâce est libre. Attendez-la sous la croix, et celui qui doit venir viendra. Il y a de ces influences subites qui inclinent le coeur sans effort. Dussiez-vous attendre des années, vous aurez certainement la joie de voir votre coeur changé. Plus la chose vous est impossible, plus vous pouvez être sûr qu'elle vous sera donnée. Nos impossibilités, au lieu de nous abattre, doivent au contraire nous rassurer. La plus grande des impossibilités n'était-elle pas celle de nous sauver nous-mêmes? Dieu l'a pourtant levée en envoyant son propre Fils dans une chair semblable à celle des hommes pécheurs., Au prix de cette grâce, les autres grâces de Dieu sont comparativement peu de chose.- Demandons dans un esprit sincère, car souvent on prie d'être délivré d'un mal qu'on retient des deux mains. Nous ne serons délivrés de notre coeur de pierre que quand il sera devenu notre supplice.

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19 MARS.

 

Nous n'avons point ici de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir. (Héb. XIII, 14.)

 

Le sentiment qui dans notre vie devrait dominer tous les autres, c'est le sentiment de l'éternité. Nous nous envolons, dit l'Écriture. Plus on avance en âge, plus cela est vrai; ce qui est devant nous, de notre itinéraire terrestre, passera infiniment plus vite que ce qui est derrière nous. Chaque jour nous dit: Détache-toi; que tes reins soient ceints, que ta lampe soit allumée ! Quand on voit de ces hommes qui entassent projets sur projets et espérances sur espérances, sans penser au moment où Dieu leur dira: Insensé, cette même nuit ton âme te sera redemandée! on ne conçoit point une telle folie. Mais êtes-vous moins attaché à la terre, vous qui jouez si bien le chrétien ? Si vous n'aviez plus que deux heures à vivre, seriez-vous prêt? Votre coeur est-il enfin un coeur détaché? Ah! ils sont rares les chrétiens qui ont tout mis sous la croix et qui se sont donnés une fois pour toujours. Le plus grand nombre ne pensent à déloger pour être avec Christ que dans leurs mauvais moments. Dès que la vie leur sourit de nouveau, ils chérissent de nouveau leur vigne et leur figuier. Et qu'est-ce que tout cela à côté de la cité permanente ? Demandons que l'éternité nous domine, et nos chaînes tomberont. Notre vie terrestre ne perdra point en intérêt. Nous rachèterons le temps, semant notre semence dès le matin, et ne laissant point reposer notre main le soir. On peut attendre avec patience, et pourtant se hâter au-devant de la venue du jour de Dieu.

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20 MARS.

 

Nous connaîtrons l'Éternel, et nous continuerons toujours à le connaître; son lever se prépare comme celui de l'aurore, et il viendra à nous comme la pluie, comme la pluie de l'arrière-saison, qui arrose la terre. (Osée VI, 3.)

 

La connaissance de l'Éternel est notre bien suprême. Et quand on a savouré combien le Seigneur est bon, on ne demande plus qu'une chose, c'est de continuer à le connaître. C'est une connaissance qui ne s'épuise point. Les esprits bienheureux, qui sont devant le trône de Dieu et qui le servent jour et nuit dans son temple, ne sont point encore à la fin de cette connaissance. Ici-bas nos communications avec Dieu n'ont fait que commencer; son lever se prépare comme celui de l'aurore. Mais, quelque pauvre que soit ce commencement, c'est déjà la vie éternelle. Nous le sentons quand, en cette terre déserte, où nous sommes altérés et sans eau, l'Eternel vient à nous comme la pluie, comme la pluie de l'arrière-saison, qui arrose la terre. Nous reprenons alors conscience de notre vraie destination. Ce coeur flétri et assujetti à la vanité a un bien vivant et qui n'est point comme les autres; connaître l'Éternel et continuer à le connaître, c'est secouer la poussière du monde, triompher des choses visibles et se nourrir de la plénitude des dons de Dieu.

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21 MARS.

 

Sachez que vous avez été rachetés de la vaine manière de vivre que vous aviez apprise de vos pères, non par des choses périssables, comme l'argent ou l'or, mais par le précieux sang de Christ, comme de l'Agneau sans défaut et sans tache. (1 Pierre I, 18, 19.)

 

L'oeuvre souveraine de Dieu est celle de notre rédemption. Notre paix, notre liberté, notre éternelle joie sont dans l'assurance que nous avons été rachetés. Les titres et les décorations du monde n'ont rien qui approche du titre de racheté de l'Éternel. Si vous aviez gémi dans un bagne ou dans une sombre prison, et que quelqu'un vous eût ouvert la porte après bien des années, en vous disant : Tu es libre, tu as été racheté ! vous comprendriez, n'est-ce pas ? Comprendre serait alors tressaillir de joie et vivre pour votre libérateur. Pourquoi le grand rachat par le précieux sang du Fils de Dieu ne nous fait-il pas tressaillir de la même manière ? Cette joie est pourtant offerte aux maudits de Dieu, aux captifs du péché, aux misérables qui gémissent dans un corps de mort. C'est aux coeurs assujettis à la vanité, aux consciences chargées d'accusations, aux âmes incapables de se vivifier, aux volontés enchaînées dans le mal, qu'il appartient de se réjouir à cette bonne nouvelle. Tu as été sauvé par grâce, il n'est plus question de ce que tu es en toi-même, ton rachat est éternel, car le sang de Jésus-Christ purifie de tout péché. Quand nous aurons été retirés du fond de cette misère, et retirés gratuitement, nous sentirons le prix de celui qui nous a servi de rançon, et nous ne vivrons plus pour nous-mêmes, mais pour celui qui nous a aimés et qui s'est donné lui-même pour nous.

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22 MARS.

 

Je n'ai pas jugé que je dusse savoir autre chose parmi vous, que Jésus-Christ. et Jésus-Christ crucifié. (1 Cor. II, 2.)

 

Vivez un jour, un seul jour, sans la croix de Jésus-Christ, que sera votre vie ? Une vie animale ou une vie d'enfer. Manger, boire, courir, travailler pour avoir la nourriture qui périt, est-ce vivre ? Mais d'un autre côté, vivre avec deux yeux ouverts sur nous-mêmes et avec notre nature déchue, je vous le demande aussi - est-ce vivre ? Ne vaudrait-il pas mieux n'être jamais né? Sentir entre Dieu et nous un abîme, et ne point pouvoir le remplir; traîner avec nous un coeur mort et un monde de malédiction ; rencontrer à chaque pas notre triste personne et les tourments qu'elle nous donne ; crier, sans savoir à qui; torturer notre nature pour la refaire, et nous épuiser inutilement; marchander avec la loi de Dieu, et n'entasser que de nouveaux remords; être sous ce glaive, quarante, cinquante, soixante ans, puis tomber dans un feu qui ne s'éteint point, et devenir la proie d'un ver qui ne meurt point ; voudriez-vous de cette vie, de cette existence d'un réprouvé ? Tel serait notre sort, si nous enlevions, ne fût-ce que pour un jour, la croix du Calvaire. Ne vous étonnez point si, telle étant notre condition, quand nous serions livrés à nous-mêmes, saint Paul ne juge point qu'il doive savoir autre chose ici-bas que Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié.

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23 MARS.

 

Si nous marchons dans la lumière, comme il est lui-même dans la lumière, nous avons une communion mutuelle, et le sang de son Fils Jésus-Christ nous purifie de tout péché. (1 Jean I, 7.)

 

Les hommes vont si rarement à la racine des choses ! Ils errent dans des tâtonnements, dans des excursions dans le vague, ils bandent leurs plaies à la légère, ils ont des religions qui reposent on ne sait sur quoi. Examinons-nous plus sérieusement, allons au coeur de notre vie. Avons-nous quelque chose de ferme, sur quoi nous appuyer si nous devions mourir cette nuit même ? Sommes-nous heureux, ou bien y a-t-il en nous quelque chose qui cloche ? Ce qui nous rend l'esprit inquiet, c'est le sentiment secret de notre état de péché. Nous parlons de Jésus-Christ, mais de quel Jésus-Christ ? Celui que vous invoquez comme Sauveur ne serait-il peut-être pas un être vaporeux au lieu d'être un Sauveur vivant? Nous ne connaissons point notre ennemi mortel, et c'est pourtant pour détruire ses oeuvres que Jésus-Christ est venu. Il est venu pour détruire ce vieil homme qui se corrompt par les convoitises qui séduisent, et que nous ne pouvons ni guérir ni remplacer par un homme nouveau. Il y a des maladies corporelles qui sont dans le sang; le poison qui nous mine est aussi au ,coeur de notre nature. Le vrai Jésus-Christ est celui qui ,a donné son sang en rémission de nos péchés. Ce n'est pas seulement pour nous instruire et pour nous prêcher d'exemple qu'il est descendu sur la terre : c'est pour nous racheter et nous purifier de tout péché. Marchons donc dans la lumière, et ne nous faisons plus illusion à nous-mêmes. Croyons, ainsi que Dieu le dit, que depuis le sommet de la tête jusqu'à la plante des pieds, il n'y a en nous rien d'entier; que tout est plaie, plaie sans espérance, si Jésus-Christ n'était venu mettre sa vie en oblation pour la nôtre, s'il n'avait tout expié, tout accompli. Sa rédemption est une guérison radicale: tout est accompli, il le dit lui-même. Les pécheurs qui ,croient à ce rachat ont entre eux une union commune, puisqu'ils ont reçu tous le même pardon, la même paix. et que la même vie coule dans leurs veines. Il y a, dans le monde, des associations de bien des genres, des .amitiés, des sympathies de diverses natures, mais tout lien humain s'efface devant la communion de ceux qui marchent dans la lumière et que le sang de Jésus-Christ a purifiés de tout péché.

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24 MARS.

 

Il a été navré pour nos forfaits, et frappé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous apporte la paix est tombé sur lui, et nous avons la guérison par sa meurtrissure. (Esaïe LIII, 5.)

 

Nous nous apitoyons quelquefois sur un animal souffrant, sur un chien qu'on maltraite, sur un cheval que l'on frappe outre mesure : nous faisons bien ; mais avons-nous aussi pleuré quelquefois sur Celui qui a été navré pour nos forfaits et frappé pour nos iniquités? Nous avons déjà répandu bien des larmes depuis que nous sommes au monde, et pas une seule peut-être n'a coulé pour Jésus-Christ. Nous pleurons au théâtre, nous pleurons à une lecture émouvante, nous avons compassion d'un animal, et aux yeux du monde nous sommes humains; mais, aux yeux de Dieu, somme-nous supérieurs au cannibale des mers du Sud ? On nous dit que le châtiment qui nous apporte la paix est tombé sur le Juste, et nous écoutons sans frémir. Nous ne nous soucions pas plus des meurtrissures par lesquelles il a opéré notre guérison, que s'il les avait souffertes en peinture et non en réalité. Nous voyons ce qu'il y a d'infernal dans les jugements dont Dieu frappe le péché, et nous ne voyons pas ce qu'il y a d'infernal dans nos coeurs; nous poursuivons notre route endurcis dans l'ingratitude. Par qui la croix de Jésus-Christ est-elle comprise? Par ceux oui sont navrés de l'avoir navré, et qui sont frappés dans leur conscience de l'avoir frappé. La vraie foi est celle d'un coeur brisé. Pleurer sur les conséquences des péchés commis, pleurer sur Eden après en avoir été chassé, ne seraient point encore de vraies larmes. L'amour seul, donne la repentance dont on ne se repent jamais. Quand le châtiment qui vous apporte la paix sera en quelque sorte tombé sur vous-même, et que vous aurez pu pleurer sur celui qui a été frappé, battu de Dieu et affligé, alors, et non point avant, vous serez, chrétien, vous serez heureux.

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25 MARS.

 

Dieu a fait éclater son amour envers nous, en ce que, lorsque nous n'étions que pécheurs, Christ est mort pour nous. Etant donc maintenant justifiés par son sang, à plus forte raison serons-nous garantis par lui de la colère de Dieu. (Rom. V, 8, 9.)

 

Ce passage nous montre la vie divisée en deux parties, l'une avant, l'autre après la connaissance du Sauveur. Le monde la divise autrement. Il nous montre ce que nous sommes avant et ce que nous serons après la réalisation de nos projets, de nos espérances ; il nous place en un mot entre des convoitises et un bonheur illusoire. Où il n'y a point de réalité, il n'y a point de changement possible; à quoi bon alors diviser? Dieu partage la vie autrement que le monde. Pendant de longues années il nous suit en silence comme un saint inconnu qui veut nous aimer en dépit de nous-mêmes, ,et de cet amour nous ne sentons que les effets jusqu'au moment où il éclate. C'est la croix de Jésus-Christ qui fait la vraie division. Nous avons vécu d'amour et de pardon, quand nous n'étions que _pécheurs ; le soleil luisait pour nous, mais nous étions aveugles ; le sang de Christ avait coulé, mais nous étions ses ennemis. Que sera-ce quand nous pourrons l'aimer nous-mêmes, et qu'il sera pour nous tout ce qu'il veut être ? S'il a tant l'ait pour des ennemis, que ne fera-t-il pas pour des ,amis? Réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, lorsque nous étions ses ennemis, combien plutôt, étant déjà réconciliés, serons-nous sauvés par sa vie? Mais, singulier contraste! ses ennemis croient l'aimer, ses amis tremblent de le haïr encore. L'incrédule le plus aveugle ne laisse pas de prétendre qu'il aime Jésus-Christ, et le chrétien le plus croyant gémit toujours de se surprendre à être l'ennemi de son Sauveur. Il est donc bien nécessaire que Dieu vous répète, à vous qui ,regardez encore à vous-mêmes, qu'étant maintenant justifiés par le sang de Christ, à plus forte raison serez-vous garantis par lui de la colère de Dieu.

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26 MARS.

 

Alors ils prirent Jésus et le lièrent. (Jean XVIII, 12.)

 

Les liens de Jésus sont d'abord ceux de sa nature humaine. Toute la plénitude de la divinité est liée en, lui quand nous le considérons dans une chair semblable à celle des hommes pécheurs. Cet anéantissement volontaire fait la contre-partie de l'usurpation. orgueilleuse du premier homme, qui, pour avoir voulu être égal à Dieu, tomba dans le péché. Mais les liens. de Jésus sont aussi les liens de nos iniquités. L'Éternel a fait venir sur lui l'iniquité de nous tous. Qu'est-ce; qui lie comme le péché? Nous le sentons tous les jours. Donnez suite à une mauvaise pensée, et vous êtes un homme lié. Quiconque s'adonne au péché est esclave du péché. Bien souvent les occasions seules nous manquent pour nous montrer ce qu'il y a en nous de passionné, d'entraînant et de vendu au péché. Une seule étincelle peut allumer toute une forêt, et une seule parole, quand nous n'en sommes point maîtres, peut nous enchaîner à tout un monde d'iniquité. Qu'est-ce qui nous affranchit et nous rend véritablement libres?, Ce ne sont point Dos résolutions ni ce qui part de nous-mêmes. Nous ne sommes jamais sûrs de nous, pas, même dans nos meilleurs moments. La foi seule nous, libère, la foi en celui qui a porté nos liens. Si nous souffrons de notre endurcissement, sans pouvoir rompre nos chaînes, regardons à Jésus, il a porté ces liens. Il s'est substitué à notre personne et à tout ce que notre vie renferme. Ces liens visibles du Sauveur sont aussi les liens invisibles de nos péchés. Croyez que, quoi qu'il vous soit arrivé, et quelque enchaînée que soit votre volonté, votre délivrance est accomplie, non point par vous, mais par l'oeuvre de réparation de Christ. Cette foi, quand le Saint-Esprit nous l'applique, a aussi une force sanctifiante. Dès que nous croyons à ce que Christ a fait pour nous, il le fait aussi en nous : Ceux qu'il appelle, il les justifie, et ceux qu'il justifie, il les glorifie. Que dirons-nous donc à tout cela? Si Dieu est pour nous, qui sera contre. nous ?

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27 MARS.

 

Alors Pilate fit prendre Jésus et le fit fouetter. (Jean XIX, 1.)

 

La chair flagellée de Jésus est l'expiation des péchés de la chair. Cet état de souffrances du Seigneur est un baume consolateur pour tous ceux qui sentent combien les convoitises de la chair les ont perdus. C'est de tous les péchés celui qui fait le plus de ravages et dont les suites sont les plus déplorables. Même dans la vie chrétienne, la chair peut être ou peut redevenir un interdit. Et où la chair règne, l'esprit est asservi, et avec l'esprit la vie; car la chair a des désirs contraires à ceux de l'Esprit, et l'Esprit en a de contraires à ceux de la chair, et ces deux choses sont opposées l'une et l'autre, de sorte que vous ne faites point les choses que vous voudriez. 0 vous qui êtes navré en regardant à vous-même et à *votre vie passée, soyez sûr que le Seigneur a aussi pensé à vous. Les meurtrissures de son dos déchiré par le fouet romain sont aussi pour votre paix et pour votre guérison. Dieu a reçu votre rançon, et il ne l'exigera pas une seconde fois. Que si la chair se réveille et vous surmonte, dites-vous qu'en lui cédant vous devenez vous-même le bourreau de Jésus. Continuerez-vous à ensanglanter le dos 'du Juste, en laissant régner en vous le péché? Le fouet vous tombera de la main et retombera sur votre vieil homme pour détruire son empire.

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28 MARS.

 

Jésus donc sortit, portant la couronne d'épines et le manteau de pourpre. (Jean XIX. 5.)

 

Nos couronnes d'orgueil et nos vaines glorioles sont devenues pour lui une couronne d'épines. Ces épines qui meurtrissent son front sacré font l'expiation de ces titres orgueilleux dont nous nous décorons nous-mêmes et qui nous empêchent de marcher dans l'humilité avec notre Dieu. Ce sont aussi ces joies mondaines dont nous ceignons nos têtes et auxquelles nous sacrifions les saintes affections de Dieu. Nous comprendrons la couronne d'épines du Seigneur, quand ce qui nous était jadis un gain, nous sera devenu une perte, à cause de Christ. Encore un peu de temps, et nos vaines gloires seront devenues des humiliations, nos plaisirs des soucis. Nous sentirons ces épines que le Seigneur avait prévues, mais par les siennes il nous enlèvera les nôtres. Avec la couronne d'épines Jésus porta aussi un manteau de pourpre. Comme roi il méritait cet honneur, mais les soldats en firent un objet de risée. Combien il arrive souvent que Jésus est ainsi raillé dans le monde! N'a-t-il pas dit lui-même : Ce peuple s'approche de moi dé sa bouche et m'honore de ses lèvres, mais leur coeur est bien éloigné de moi? Cette adoration pharisaïque est-elle moins outrageuse que la haine? Quand notre formalisme sera devenu pour nous une souffrance, nous saurons ce qu'est pour nous le manteau de pourpre de Jésus. Nous sentirons le besoin de l'adorer et nous lui demanderons la force de l'aimer. Humble et secourable, il nous écoutera, et après avoir supporté avec patience nos mépris, il nous aidera à amener toutes nos pensées captives sous l'obéissance de la foi. Nous sentirons alors qu'il est roi, qu'il est né pour cela, et qu'il est venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité.

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29 MARS.

 

Hérode lui fit donc plusieurs questions, mais Jésus ne lui répondit rien. (Luc XXIII, 9.)

 

A des questions oiseuses la meilleure réponse est le silence. Mais le silence de Jésus a une plus haute portée. C'est une expiation. Nous aurons à rendre compte au jour du jugement de toutes les paroles vaines que nous aurons dites. C'est par nos paroles que nous serons justifiés, et par nos paroles que nous serons condamnés. Jésus-Christ par son silence expie tous DOS péchés de langue et tous les abus que nous avons faits de la parole. Quand notre vie entière parlera contre nous, toute mauvaise parole sera aussi un tourment. Mais le silence de Jésus a encore une autre signification ; s'il y a des paroles prononcées par notre bouche qui nous accusent devant Dieu, il y en a dans notre coeur qui ne nous rendent pas moins coupables. Ce sont celles que nous prononçons dans ce langage intérieur que nous appelons le murmure. Le coeur est un monde en révolte, dont la rébellion s'exprime aussi par nos murmures. Cette sourde inimitié contre Dieu, qui est le fond de notre vie déchue, Jésus l'a expiée par son silence. Le silence du Sauveur est aussi l'expression du calme de l'âme, de l'harmonie avec Dieu. Ce qui nous manque le plus, Jésus l'a présenté pour nous, comme il a refait tout le reste. Il est dit de nous : Il y a un venin d'aspic sous leurs lèvres; leur bouche est pleine de malédiction et d'amertume. Il est dit de lui : Dans sa bouche, il ne s'est trouvé aucune fraude. Lorsqu'on lui disait des outrages, il n'en rendait point; et lorsqu'on le maltraitait, il ne faisait point de menaces, mais se remettait à celui qui juge justement. Prenez cette rançon, faites-la valoir devant Dieu, et puisque Dieu a béni, il ne le révoquera point.

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30 MARS.

 

Il a sauvé les autres, et il ne peut se sauver lui-même, s'il est le roi d'Israël , qu'il descende maintenant de la croix, et noue croirons en lui. (Matth. XXVII, 42.)

 

S'il s'était sauvé lui-même, il n'aurait point sauvé les autres. Pour nous racheter de la malédiction de la loi, il a fallu qu'il fût fait malédiction pour nous. C'est le bois maudit qui est pour nous l'arbre de vie; sans ce maudit qui est pendu au bois et qui y expire, notre délivrance eût été vaine. Il était nécessaire que la mort du testateur intervînt, parce qu'un testament n'a son effet qu'après la mort du testateur, n'ayant point de force tant qu'il est en vie. Il a été enlevé par la force de l'angoisse et de la condamnation. Voilà ce qui a tout accompli; si nous avions moins, nous n'aurions rien. Aujourd'hui il peut descendre de la croix, mais c'est pour nous montrer ses mains et son côté percés, et pour nous dire : La paix soit avec vous! Il a fallu qu'il fût élevé de la terre pour attirer tous les hommes à lui, et pour les arroser du sang de l'aspersion qui prononce de meilleures choses que le sang d'Abel.

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31 MARS.

 

Puis il disait à Jésus: Seigneur, souviens-toi de moi, quand tu seras entré dans ton règne. Et Jésus lui dit: Je te dis en vérité, que tu seras aujourd'hui avec moi dans le paradis. (Luc XXIII, 42, 43.)

 

Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. La première âme que la croix de Christ a sauvée fut celle d'un larron. Mais Christ peut toujours sauver ceux qui s'approchent de Dieu par lui, étant toujours vivant pour intercéder pour eux. Crier des lieux profonds, crier vers la croix, comme un crucifié du péché, c'est recevoir entrée dans le paradis, fût-ce à la onzième heure. Il est vrai, il y a crier et crier. Le cri qui sauve n'est point celui du désespoir. Il y a des cris qui frappent contre des rochers ou qui se perdent dans l'abîme. Ce n'est point non plus le cri qui rappelle un bonheur perdu, qui peut sauver une âme en détresse. Le cri sauveur est celui qui frappe le coeur de Jésus, parce que Jésus en est l'objet. Mais que de choses nous empêchent de pousser ce cri qui rend plus que vainqueur ! Une vie de péché, les malédictions de la conscience, une incrédulité sans fond, les angoisses de la mort, la vue de ce tribunal où se prononcera la sentence 1 - La foi peut et doit triompher de tout cela. Qui condamnera? Christ? Mais c'est lui qui est mort, et qui de plus est ressuscité, qui est assis à la droite de Dieu, et qui intercède même pour nous. Si Dieu peut pardonner un péché, il peut les pardonner tous; mais personne, dit Jésus. ne vient au Père que par moi. Christ a la clef de l'abîme et la clef du royaume céleste. Approchez-vous de lui, criez à lui, rendez-vous à discrétion à celui qui vous a aimé que vous soyez larron on non, il a été pourvu à votre salut. Par une seule oblation vous avez été amené pour toujours à la perfection.